~~~~~ Melrick Hart ~~~~~
Après avoir récupéré mon fils chez Cassie, j'ai pris le bus pour me rendre dans le Bronx pour voir ma mère. Je me sens un peu triste en ce moment. Ce n'est pas la première fois que je passe un entretien et que ça ne donne rien. Mais je me sens toujours très triste à chaque fois. Je me sens un peu perdu, comme si je tournais en rond dans un labyrinthe sans issue.
Le bus cahote sur les routes du Bronx, et je serre Roy contre moi. Quand nous atteignons enfin le Bronx, je prends une grande inspiration avant de sortir du bus. Ensuite, je me dirige vers l’appartement de ma mère.
Dès que j’ouvre la porte, l’atmosphère change. Ma mère est là, assise dans le canapé en train de tricoter un pull.
_ Bonjour, maman, lui lancé-je en m'approche.
_ Bonjour, mon petit Rick, le répond-elle.
Je lui fais là bise et elle prend Roy dans ses bras avec une douceur infinie.
_ Mon petit trésor. Mon petit Rick, chéri. Regarde comme tu as grandi. Tu es devenu un grand garçon maintenant !!
Oui, elle n'appelle jamais mon fils par son prénom. Elle l'appelle toujours "petit Rick". Tout ça parce qu'il me ressemble.
Je la regarde lui parler avec tendresse, lui racontant des histoires sur les nuages et les étoiles, sur les rêves que les enfants portent dans leur cœur. En la voyant ainsi, je sens un pincement au cœur. Pourquoi ne puis-je pas ressentir la même légèreté qu’elle ?
Je tente de cacher ma tristesse derrière un sourire pour Roy, mais ma mère ne tarde pas à remarquer que quelque chose ne va pas.
_ Qu’est-ce qui t’arrive, mon chéri ? Tu sembles préoccupé.
Je soupire et lui parle de l’entretien d’embauche que j’ai passé plus tôt ce matin. Je lui raconte comment ils m’ont dit qu’ils me rappelleraient bientôt.
_ Ils m’ont dit qu’ils étaient impressionnés par mon CV et qu'ils me rappelleront… mais je sais bien ce que ça veut vraiment dire.
Elle me regarde avec compassion.
_ Tu sais qu’ils ne le feront pas, Melrick…
Je hoche la tête. Elle soupire et commence à parler de Cassie.
_ C’est à cause de cette femme avec qui tu vis que tout va mal, je te le dis. Elle porte la poisse. Depuis qu'elle est dans ta vie, tout va de travers. Elle vient d’une banlieue et elle est orpheline. Elle…
Je sens la colère monter en moi.
_ Maman, je te demande de ne pas parler de Cassie comme ça. Pour une fois, s'il te plaît, essaie de ne pas tout ramener à elle.
Mais elle ne m’écoute pas et commence à crier.
_ Je te dis la vérité. Je n'aime pas cette femme et je ne l’aimerai jamais. Elle est une malchanceuse. Regarde tout ce qui t’arrive depuis qu’elle est dans ta vie. La seule chose qu'elle ait fait de bien, c'est de mettre au monde le petit Rick...
_ Maman, contrôle ton langage !! C'est MA FEMME. MA. FEMME.
_ ELLE N'EST PAS TA FEMME, RICK. ELLE NE SERA JAMAIS MA BELLE-FILLE !!
_ MAIS BON SANG !! QU'EST-CE QUE TU AS CONTRE ELLE ?
Je me lève brusquement.
_ ÇA SUFFIT ! JE M'EN VAIS ! DE TOUTES MANIÈRES, ON NE PEUT PAS DISCUTER AVEC TOI.
Je prends Roy par la main pour quitter l’appartement. Mais ma mère me retient doucement.
_ Attends ! Ne pars pas… me dit-elle.
_ Et pourquoi devrais-je rester ? répliqué-je. Pour que tu insultes Cassie devant moi ?
_ Je t’en prie, Rick… Un jour tu comprendras que j’ai raison. Mais en attendant, reste avec moi.
Elle change alors de ton et adoucit sa voix.
_ Tu veux manger quelque chose ? J’ai préparé du riz…
Je regarde Roy qui a l’air perdu entre nous deux. La faim dans ses yeux me fait hésiter un instant. Ma mère a toujours su cuisiner avec amour, mais je suis trop en colère pour accepter son offre. Pourtant, en voyant le regard triste de Roy, je sais que je dois rester un peu plus longtemps pour lui.
Mais alors que je prends place à table, un sentiment d’incompréhension persiste entre nous trois. J’essaie de garder mon calme pendant qu’elle sert le riz fumant dans des assiettes blanches.
J'ai dû lutter pour rester une heure de plus. Après ça, je suis parti avec mon fils à l'arrêt de bus.
Alors que je scrute la rue pour voir arriver le bus, mon téléphone vibre dans ma poche. Je sors le téléphone et vois que c'est Marc, un ancien ami de l'université et ex-collègue de travail. Je me demande ce qu'il veut, mais je décroche.
_ Salut, man, comment vas-tu ? demande-t-il dès que je décroche.
_ Je suis là, et toi ?
_ Ça va. Je t'appelle pour te dire qu'il y a une fête à Manhattan ce soir.
Je fronce les sourcils, intrigué.
_ Et alors ?
_ Comment ça, et alors ? Il y aura de grands chefs d'entreprise là-bas. Tu devrais venir pour en aborder quelques-uns.
Je laisse échapper un petit rire. C'est typiquement Marc de vouloir me traîner dans des événements où je ne me sens pas forcément à l'aise.
_ Et l'invitation ?
_ J'en ai déjà envoyé une chez toi.
Je prends un moment pour réfléchir.
_ Merci frérot, j'y réfléchirai.
_ D'accord.
Je raccroche et regarde autour de moi. Le bus arrive au loin. Je monte à bord et je m'assieds près de la fenêtre en pensant à cette fête. Peut-être que ça pourrait être une bonne occasion de trouver un boulot. Ou peut-être juste une soirée où je me sentirai comme un poisson hors de l'eau. Quoi qu'il en soit, ce soir pourrait être différent...
Mais je devrais en parler à Cassie d'abord.
Je sors et ferme la porte derrière moi d’un geste vif car je n'ai pas envie qu'il voit mes enfants et je n'ai pas envie non plus qu'ils le voient. Je le fixe et il me fixe. _ Qu’est-ce que tu fais ici ? je murmure, les bras croisés. Tu n'as alors rien retenu de ce qu'on s'est dit hier ? Je le fixe sans ciller, bien que tout mon corps hurle de l’intérieur. _ Tu crois vraiment que j’allais repartir comme ça sans revoir mon fils ? réplique-t-il d’un ton bas. Je suis venu voir Roy. _ Non. BMa réponse est immédiate. Je ne prends même pas le temps d’y mettre des formes. _ Cassandra… commence-t-il. _ Tu n’as aucun droit sur lui, Melrick. Aucun, le coupé-je, sans attendre. Tu ne l’as pas vu grandir et tu ne sais rien de sa vie. Et aujourd’hui, tu débarques ici comme si tu pouvais t’improviser père ? Je retiens ma voix de trembler. Je lui tiens tête mais mes entrailles sont nouées. _ J’ai toujours été son père, que tu le veuilles ou non, siffle-t-il. Il a mon sang
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Le soleil monte doucement dans le ciel au dehors. Il est à peine sept heures du matin, mais la maison bourdonne déjà. Célina est la première à apparaître, encore ensommeillée, un doudou dans les bras. Je lui tends un bol de lait chaud et elle me gratifie d’un sourire, les yeux encore collés de sommeil. Quelques minutes plus tard, Sienna surgit dans la pièce en courant. Elle grimpe sur sa chaise et me dit : _ Maman, on fait des pancakes aujourd’hui ? Je souris malgré moi. C’est notre petit rituel du samedi matin, mais aujourd’hui, on est mardi. Néanmoins, je cède. _ D’accord, mais seulement si tu aides à la pâte. Elle tape dans ses mains, ravie, pendant que je sors les ingrédients. Roy descend enfin. Il a toujours été matinal, mais il aime trop râler. C’est sa façon de protester contre le réveil. Je le salue d’un baiser sur la tempe, mais je remarque que son regard est songeur ce matin. Il semble ailleurs et préoccupé. Je n’insiste
~~~~~ Grégory Smith ~~~~~ Je pousse la porte de chez moi et je le referme doucement. Au salon, comme je m’y attendais, ma mère est assise dans son fauteuil préféré, les jambes croisées, un livre à la main et ses lunettes glissées sur l’arête de son nez. Elle ressemble à une vieille reine anglaise en pleine inspection de ses sujets. Sauf qu’ici, le seul sujet, c’est moi. Je m’approche à pas comptés, mais évidemment, elle relève la tête avant que j’aie franchi la moitié du salon. Rien ne lui échappe, même pas à son âge. _ Bonsoir, Majesté, dis-je avec un large sourire en m’inclinant légèrement. Elle lève les yeux au ciel et sourit en coin. _ Arrête ton cinéma, Greg, et viens m’embrasser. Je m’exécute sans tarder et l’embrasse tendrement sur la joue. Je prends place sur le canapé en face d’elle, m’étire comme si j’avais couru un marathon… alors que j’ai seulement dîné et failli embrasser une femme qui me hante depuis des mois. Je suis fatigué, oui, mais de pensées.
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Je ne vais pas bien, pas du tout après ce qui s'est passé aujourd'hui. Melrick à Boston, ça change tout. Je n'ai pas envie qu'il décide de m'enlever mon fils et encore moins mes deux petites princesses. Je ne sais pas ce que je dois faire pour ne pas les perdre. Ce sont mes enfants... les miens. Je refuse de le laisser me les enlever. Je touille distraitement la sauce dans la casserole lorsque Greg, adossé au plan de travail à côté de moi, tente une nouvelle approche pour m’aider. J'ai d'abord refusé car je voulais cuisiner seule, perdre mon esprit dans quelque chose de de simple, sans avoir à penser à tout ce qui m'angoisse. Mais Greg a insisté avec une telle douceur que je n'ai pas eu le cœur de refuser plus longtemps. Ainsi, nous voilà, côte à côte, lui découpant des légumes avec soin, et moi m'occupant des plats principaux. Pendant de longues minutes, nous travaillons en silence. Puis, naturellement, Greg engage la conversation : _ Tu cui
Je reste quelques secondes planté là, incapable de bouger, encore sonné par ce que je viens de voir. Cependant, lorsque je vois la voiture de Greg s’éloigner lentement du trottoir, mon instinct reprend le dessus. Sans perdre de temps, je remonte dans le taxi qui m'attend à quelques mètres. _ Suivez cette voiture noire, vite, ordonné-je au chauffeur. Sans poser de questions, il démarre tout en gardant une distance raisonnable pour ne pas éveiller de soupçons. Le cœur battant à tout rompre, je fixe intensément la voiture de Greg, comme si ma vie en dépendait. Je dois savoir où ils vont. Je dois comprendre quelle place cet homme a prise dans la vie de mon fils... et peut-être aussi dans celle de Cassandra. Après quelques minutes de trajet, Greg s’arrête devant une petite glacerie située dans une rue. Je demande au chauffeur de s’arrêter également, un peu plus loin, pour que je puisse observer sans être vu. À travers la vitrine, je les aperçois. Greg achète des glaces aux
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Dès que la porte du bureau claque derrière Melrick, je reste figée quelques secondes, incapable de bouger et incapable de respirer. Mon cœur bat tellement vite que j'ai l'impression qu'il va exploser. Je serre les poings, je ferme les yeux et j'inspire profondément pour calmer les tremblements de mon corps. Il est ici à Boston. Oh mon Dieu !! Comment je peux faire pour cacher mes enfants maintenant ? Je m'effondre dans ma chaise, la tête entre les mains. Ce n'est pas le moment de paniquer, Cassandra. Ce n'est vraiment pas le moment. Je dois garder mon sang-froid. Je tends la main vers mon téléphone et compose nerveusement le numéro de Lenny. Elle décroche au bout de la deuxième sonnerie. _ Allô, Cassie ? _ Lenny, écoute-moi bien, dis-je avec urgence. Melrick est ici à Boston. Je viens juste de le voir à l’hôpital. Un silence inquiet s'installe au bout du fil. _ Quoi ? Mais... tu es sûre que c'est lui ? _ On vient tout juste de disc