~~~~~ Melrick Hart ~~~~~ Je coupe le moteur devant l’imposant manoir. Il est dix-huit heures pile. Veronica décroche doucement sa ceinture, puis me jette un regard par-dessus son épaule, un brin espiègle. _ Tu viens ? J’ai quelque chose à prendre, et j’ai pas envie de monter toute seule. Je soupire. J’hésite une demi-seconde. Puis je sors de la voiture et la suis à l’intérieur. Elle retire ses talons avec nonchalance, me lance un regard rapide et s’avance vers l’escalier. _ Tu restes planté là ? Viens. Je monte après elle. Elle pousse la porte de sa chambre et laisse tomber son manteau au sol sans cérémonie. Je m'arrête près du mur, comme à mon habitude. Je ne suis pas ici pour me détendre. Puis, sans crier gare, elle commence à faire glisser lentement et délibérément la fermeture de sa robe alors qu'elle me faisait dos. _ Veronica… _ Détends-toi, Rick. Ce n’est pas la première fois que tu me vois nue, non ? Je détourne le regard, mais c’est difficile d’oub
~~~~~ Veronica White ~~~~~Il grogne quelque chose derrière le bâillon que l’un de mes hommes retire avec brusquerie. Il crache au sol. _ Veronica… T’es complètement folle… Je m’approche encore plus. _ Peut-être, murmuré-je en m’accroupissant devant lui. Mais tu vois, Esteban… ce qui me rend redoutable, ce n’est pas la folie. C’est la précision. Je lève la main et caresse doucement sa joue marquée. _ Tu pensais que j’allais vraiment te pardonner, n’est-ce pas ? Que j’allais faire comme si de rien n’était, parce que tu as de l’argent, du pouvoir… et un peu de charme. Il serre les dents. _ Tu m’as utilisé. _ Tu m’as sous-estimée. C’est pire, je crois. Je le fixe, longtemps. Comme si je voulais graver ce moment dans ma mémoire. Lui, ligoté, vulnérable. Moi, debout, libre. Supérieure. _ Tu sais pourquoi tu es ici, Esteban ? Il ne répond pas. Mais je vois la panique dans ses yeux. Je m’approche. Ma voix reste douce, presque murmurée, mais chaque mot est une
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Le bois grince sous mes pas tandis que je pousse lentement la vieille porte. L’air est glacé. Humide. L’odeur de moisissure et de rouille me donne la chair de poule. Mes doigts serrent nerveusement le tissu de mon manteau. Je n’ai aucune idée de ce que je vais trouver ici. Je fais quelques pas à l’intérieur. Et mon cœur s’arrête. _ MON DIEU…! Un homme est étendu, inerte, dans une flaque de sang qui s’étend autour de sa tête. Je ne le connais pas. Mais je n’ai pas besoin de le connaître pour sentir l’horreur me frapper en pleine poitrine. Sans réfléchir, je cours vers lui. Je tombe à genoux et je secoue doucement ses épaules. _ Monsieur ! Monsieur… vous m’entendez ?! Réveillez-vous… oh non, non, non… Il ne bouge pas. Mon regard s’abaisse sur l’arme juste à côté de lui. Par pur réflexe, je l’attrape avec dégoût, me lève d’un bond et la lance aussi loin que possible. _ Très mauvaise idée, souffle une voix glaciale derrière moi. Je
~~~~~ Veronica White ~~~~~ Je regarde Cassandra s’éloigner. Elle quitte la bâtisse sans se retourner. J’ai gagné. Enfin. Je reste là un instant, figée. Il n’y a pas de triomphe dans mon cœur, juste une sorte de calme glacial. Le genre de silence qui précède les grandes chutes ou les grandes victoires. Théo s’approche, me jette un regard comme pour me demander si je suis sûre. Je lui fais un signe bref. _ Nettoyez. Je ne veux plus rien ici d’ici vingt minutes. Il acquiesce et donne des instructions discrètes à ses hommes. Pendant ce temps, je me glisse hors de la vieille bâtisse. L’air est frais, presque agréable. Un vent léger me caresse la joue, comme pour m’applaudir. Dans la voiture, je m’installe à l’arrière. Théo démarre sans un mot. Le silence nous enveloppe. Je sors mon téléphone. Il est dix-neuf heures et vingt-trois minutes. Rick doit encore m’attendre au manoir. Je compose rapidement un message, le ton doux, presque affectueux. « Je suis en route, j
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~Mes pas sont hésitants alors que je m’éloigne de la vieille bâtisse. J’avance sans vraiment voir où je vais. Mon esprit est vide, mais mes yeux, eux, débordent. Je viens de laisser un pan de ma vie derrière moi. De dire adieu à l’homme que j’aime. Mes doigts tremblent encore à cause de la peur, du choc, du dégoût et, surtout, de la douleur. Je m’arrête un instant en bordure de la route, mes bras serrés autour de moi comme si je pouvais me protéger du vent… ou de la vérité.__ Tu viens de tuer un homme. Les mots de Veronica résonnent encore. Sa voix glaciale. Son sourire de prédatrice. Et cette arme… ce corps au sol. Cette mise en scène macabre. Je savais qu’elle me détestait, mais je n’imaginais pas à quel point elle était prête à aller loin pour me sortir de sa route. Je ferme les yeux, revois ses photos. Ses mensonges. Ses menaces.__ Tu passeras vingt-cinq ans en prison. Même Roy te méprisera. Un sanglot m’échappe. Comment ai-je pu en arr
~~~~~ Melrick Hart ~~~~~ Je me réveille avec une boule dans la gorge. Il fait encore sombre dans le manoir, et l’odeur sucrée de son parfum flotte dans l’air. Veronica est là, nue, lovée contre moi sur le canapé, ses doigts enroulés autour de ma chemise. Je sens son souffle régulier contre ma clavicule. Et moi… je suis en train de me détester. Je passe une main sur mon visage, ferme les yeux un instant. Je repense à Cassie… Je me redresse légèrement, sans trop la bousculer. Elle gémit faiblement dans son sommeil, puis se tourne de l’autre côté, murmurant quelque chose que je ne comprends pas. Je me lève, ramasse mon pantalon, le remet sans bruit. Une fois debout, je fixe le canapé un long moment. Cette scène… je la connais trop bien. Ce sentiment d’avoir été faible. Ce rappel que je suis en train de tout foutre en l’air. Encore. Et pourtant, c’est moi qui ai cédé. Je me dirige vers la salle de bain du rez-de-chaussée, ouvre le robinet et m’asperge le visage. Je ne me re
~~~~~ Melrick Hart ~~~~~Je monte les marches du manoir de Veronica d’un pas rapide et déterminé. Depuis que je suis sorti de l’appartement, une seule pensée me hante : elle est responsable. En effet, tout concorde. Les photos, la disparition de Cassie, le silence. Dès lors, je n’ai plus de doute. Dès que j’arrive, je frappe à la porte, mais je n’attends pas qu’on m’ouvre. J’entre, porté par la colère. Comme je m’y attendais, elle est dans le salon, un verre à la main. _ Melrick ? dit-elle en fronçant les sourcils, visiblement surprise. Tout va bien ? Tu as une drôle de tête. Sans répondre, je sors les photos de ma poche et les jette sur la table basse. Elles s’étalent entre nous comme des preuves accablantes. _ Tu vas m’expliquer ce que ces photos faisaient dans MON appartement ? je demande d'une voix froide. Elle baisse les yeux et les regarde brièvement. Puis, elle redresse le visage et pendant quelques secondes, elle ne dit rien, puis elle recule légèrement, les mai
~~~~~ Melrick Hart ~~~~~ Quelques heures plus tard, je me tiens devant la porte de Lenny. Mon cœur bat fort. Depuis ce matin, je suis comme un lion en cage, tournant en rond dans cet appartement vide. Elle est partie… avec Roy… sans un mot d’explication clair, sans un adieu digne de ce nom. Je frappe à la porte. Une fois. Deux fois. Finalement, elle s’ouvre brusquement. _ Rick ? souffle Lenny, visiblement surprise. _ Salut, Lenny. Est-ce que je peux entrer ? Je… j’ai besoin de te parler. Elle hésite une seconde, puis s’écarte. Je pénètre dans l’appartement, jetant un rapide coup d’œil autour de moi. Aucune trace de Cassie. Aucune trace de Roy. _ Elle est ici ? je demande, la voix tendue. _ Non. Et même si c’était le cas, je ne te le dirais pas. Son ton sec me prend de court. _ Je suis juste inquiet, Lenny. Je veux comprendre pourquoi elle est partie, pourquoi elle n’a rien dit. _ Tu veux comprendre ? Elle hausse le ton. _ Tu veux qu’on t’explique ce
Je sors et ferme la porte derrière moi d’un geste vif car je n'ai pas envie qu'il voit mes enfants et je n'ai pas envie non plus qu'ils le voient. Je le fixe et il me fixe. _ Qu’est-ce que tu fais ici ? je murmure, les bras croisés. Tu n'as alors rien retenu de ce qu'on s'est dit hier ? Je le fixe sans ciller, bien que tout mon corps hurle de l’intérieur. _ Tu crois vraiment que j’allais repartir comme ça sans revoir mon fils ? réplique-t-il d’un ton bas. Je suis venu voir Roy. _ Non. BMa réponse est immédiate. Je ne prends même pas le temps d’y mettre des formes. _ Cassandra… commence-t-il. _ Tu n’as aucun droit sur lui, Melrick. Aucun, le coupé-je, sans attendre. Tu ne l’as pas vu grandir et tu ne sais rien de sa vie. Et aujourd’hui, tu débarques ici comme si tu pouvais t’improviser père ? Je retiens ma voix de trembler. Je lui tiens tête mais mes entrailles sont nouées. _ J’ai toujours été son père, que tu le veuilles ou non, siffle-t-il. Il a mon sang
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Le soleil monte doucement dans le ciel au dehors. Il est à peine sept heures du matin, mais la maison bourdonne déjà. Célina est la première à apparaître, encore ensommeillée, un doudou dans les bras. Je lui tends un bol de lait chaud et elle me gratifie d’un sourire, les yeux encore collés de sommeil. Quelques minutes plus tard, Sienna surgit dans la pièce en courant. Elle grimpe sur sa chaise et me dit : _ Maman, on fait des pancakes aujourd’hui ? Je souris malgré moi. C’est notre petit rituel du samedi matin, mais aujourd’hui, on est mardi. Néanmoins, je cède. _ D’accord, mais seulement si tu aides à la pâte. Elle tape dans ses mains, ravie, pendant que je sors les ingrédients. Roy descend enfin. Il a toujours été matinal, mais il aime trop râler. C’est sa façon de protester contre le réveil. Je le salue d’un baiser sur la tempe, mais je remarque que son regard est songeur ce matin. Il semble ailleurs et préoccupé. Je n’insiste
~~~~~ Grégory Smith ~~~~~ Je pousse la porte de chez moi et je le referme doucement. Au salon, comme je m’y attendais, ma mère est assise dans son fauteuil préféré, les jambes croisées, un livre à la main et ses lunettes glissées sur l’arête de son nez. Elle ressemble à une vieille reine anglaise en pleine inspection de ses sujets. Sauf qu’ici, le seul sujet, c’est moi. Je m’approche à pas comptés, mais évidemment, elle relève la tête avant que j’aie franchi la moitié du salon. Rien ne lui échappe, même pas à son âge. _ Bonsoir, Majesté, dis-je avec un large sourire en m’inclinant légèrement. Elle lève les yeux au ciel et sourit en coin. _ Arrête ton cinéma, Greg, et viens m’embrasser. Je m’exécute sans tarder et l’embrasse tendrement sur la joue. Je prends place sur le canapé en face d’elle, m’étire comme si j’avais couru un marathon… alors que j’ai seulement dîné et failli embrasser une femme qui me hante depuis des mois. Je suis fatigué, oui, mais de pensées.
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Je ne vais pas bien, pas du tout après ce qui s'est passé aujourd'hui. Melrick à Boston, ça change tout. Je n'ai pas envie qu'il décide de m'enlever mon fils et encore moins mes deux petites princesses. Je ne sais pas ce que je dois faire pour ne pas les perdre. Ce sont mes enfants... les miens. Je refuse de le laisser me les enlever. Je touille distraitement la sauce dans la casserole lorsque Greg, adossé au plan de travail à côté de moi, tente une nouvelle approche pour m’aider. J'ai d'abord refusé car je voulais cuisiner seule, perdre mon esprit dans quelque chose de de simple, sans avoir à penser à tout ce qui m'angoisse. Mais Greg a insisté avec une telle douceur que je n'ai pas eu le cœur de refuser plus longtemps. Ainsi, nous voilà, côte à côte, lui découpant des légumes avec soin, et moi m'occupant des plats principaux. Pendant de longues minutes, nous travaillons en silence. Puis, naturellement, Greg engage la conversation : _ Tu cui
Je reste quelques secondes planté là, incapable de bouger, encore sonné par ce que je viens de voir. Cependant, lorsque je vois la voiture de Greg s’éloigner lentement du trottoir, mon instinct reprend le dessus. Sans perdre de temps, je remonte dans le taxi qui m'attend à quelques mètres. _ Suivez cette voiture noire, vite, ordonné-je au chauffeur. Sans poser de questions, il démarre tout en gardant une distance raisonnable pour ne pas éveiller de soupçons. Le cœur battant à tout rompre, je fixe intensément la voiture de Greg, comme si ma vie en dépendait. Je dois savoir où ils vont. Je dois comprendre quelle place cet homme a prise dans la vie de mon fils... et peut-être aussi dans celle de Cassandra. Après quelques minutes de trajet, Greg s’arrête devant une petite glacerie située dans une rue. Je demande au chauffeur de s’arrêter également, un peu plus loin, pour que je puisse observer sans être vu. À travers la vitrine, je les aperçois. Greg achète des glaces aux
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Dès que la porte du bureau claque derrière Melrick, je reste figée quelques secondes, incapable de bouger et incapable de respirer. Mon cœur bat tellement vite que j'ai l'impression qu'il va exploser. Je serre les poings, je ferme les yeux et j'inspire profondément pour calmer les tremblements de mon corps. Il est ici à Boston. Oh mon Dieu !! Comment je peux faire pour cacher mes enfants maintenant ? Je m'effondre dans ma chaise, la tête entre les mains. Ce n'est pas le moment de paniquer, Cassandra. Ce n'est vraiment pas le moment. Je dois garder mon sang-froid. Je tends la main vers mon téléphone et compose nerveusement le numéro de Lenny. Elle décroche au bout de la deuxième sonnerie. _ Allô, Cassie ? _ Lenny, écoute-moi bien, dis-je avec urgence. Melrick est ici à Boston. Je viens juste de le voir à l’hôpital. Un silence inquiet s'installe au bout du fil. _ Quoi ? Mais... tu es sûre que c'est lui ? _ On vient tout juste de disc
~~~~~ Melrick Hart ~~~~~ Je sors de son bureau et je referme doucement la porte derrière moi, mais dans mon cœur, c’est un fracas. Je serre la mâchoire et je me sens brûler de l’intérieur, consumé par la colère et le désir. Je traverse le couloir de l’hôpital en m'efforçant de ne pas laisser transparaître mon trouble, mais bordel... elle a failli craquer, je l'ai vu dans ses yeux. Elle ment. Elle me hait peut-être, mais elle ne m'a pas oublié. Je quitte le bâtiment sans ralentir et je respire enfin plus librement en sentant l'air vif sur mon visage. Je m'arrête sur le trottoir et passe une main dans mes cheveux, frustré. Ce n'était pas le bon moment. Cassandra est sur la défensive, elle est encore blessée... et méfiante. Je devrais le savoir mieux que quiconque : la forcer n’amènera rien. Je prends une profonde inspiration. J'ai attendu six ans alors je peux attendre encore un peu. Je fouille dans la poche intérieure de ma veste et je sors mon téléphone. J’ai
Il attrape mon poignet si brusquement que je sursaute et il me bascule presque contre lui. Mon cœur s'emballe et mon souffle se bloque dans ma gorge. Ses yeux... Ses yeux me dévorent et pendant un court instant, je sens son pouce effleurer ma peau, et une vague de souvenirs me traverser comme une décharge. Je me ressaisis violemment. D'un geste sec, je me dégage et lui crache, le regard noir : _ COMMENT OSES-TU ME TOUCHER ? JE T'INTERDIS de refaire ce que tu viens de faire, SINON... Je me stoppe net. Il me fixe d'un air impassible avant de faire quelques pas vers moi. _ Sinon quoi ? demande-t-il d'une voix basse, presque provocante. Je recule d'un pas sans même m'en rendre compte. Ma main tremble légèrement, mais je la cache derrière mon dos. Il avance encore, le regard cloué au mien, et lâche, moqueur : _ Tu vas me gifler ? Sa voix est douce, presque moqueuse, mais je perçois l’amertume qui suinte derrière. Il s'arrête juste devant moi, si près que je pourrais
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Je suis en train de parler à une patiente et je lui donne des conseils pour améliorer sa santé alors qu'on marché dans le couloir de l'hôpital. Mon cœur s'est allégé depuis que je suis à Boston et que je n'ai pas eu de signe de Melrick ni de Veronica. J'ose croire que ce n'est pas le calme avant la tempête. Peut-être m'ont-ils réellement oubliée. Peut-être ont-ils repris le cours de leur vie, celui qu'ils menaient sans moi depuis six ans. Je retiens un soupir, puis laisse échapper un léger souffle, presque un soupir de soulagement, en esquissant un sourire chaleureux à ma patiente. _ À très bientôt, lui dis-je doucement. Prenez soin de vous. Elle me remercie avec un sourire sincère avant de quitter la pièce. Je m'apprête à regagner mon bureau, lorsque j'aperçois un silhouette familière. Je regarde bien et... Mon cœur rate un battement. C'est Melrick. Et je comprends immédiatement qu'il m'a vue aussi, car il se lève, brusquement et se d