Emily
La nuit est tombée depuis longtemps quand je quitte le club. L'air est lourd, chargé d'humidité et de l'odeur de la pluie fraîchement tombée. Mes talons claquent sur le pavé tandis que je rejoins ma voiture, encore secouée par ce qui vient de se passer avec Victorio.
Mes lèvres sont encore sensibles, brûlantes de son baiser. Chaque frisson, chaque battement de cœur résonne dans ma poitrine comme une alarme. Il joue avec moi. Mais le pire, c'est que je suis en train de répondre à ce jeu.
Je démarre la voiture, les mains crispées sur le volant. La musique basse résonne dans l'habitacle, mais elle ne couvre pas le tumulte de mes pensées.
Victorio Moretti n'est pas un homme à qui on survit. Il est le genre de poison qui s’infiltre dans vos veines et vous détruit de l’intérieur. Et pourtant, je viens de lui céder.
Je passe les feux rouges sans vraiment les voir, la mâchoire serrée. Ce n'est qu'une mission, je me répète. Juste une mission.
Mais au fond, je sais que c'est un mensonge.
—
J'arrive enfin à l'hôtel, le bruit de mes talons résonnant sur le marbre poli du hall d'entrée. Le réceptionniste me salue d'un hochement de tête, mais je ne lui accorde qu'un bref regard avant de rejoindre l'ascenseur.
Quand les portes se referment, je me laisse aller contre la paroi, le souffle court. Je ferme les yeux, et le visage de Victorio apparaît aussitôt. Son sourire carnassier, son regard sombre, le goût de sa bouche sur la mienne…
Je rouvre les yeux, le cœur battant.
— Merde, soufflé-je.
Les portes s’ouvrent sur le couloir désert de mon étage. Je sors de l'ascenseur, récupère la clé dans mon sac et entre dans ma chambre.
L'obscurité m'enveloppe aussitôt. Je jette mon sac sur le fauteuil près de la fenêtre et retire mes talons. La moquette froide sous mes pieds me fait frissonner.
J’allume la lampe de chevet, et c’est à cet instant que je le sens.
Une présence.
Je me fige, les muscles tendus. Mon regard balaie la pièce, mais tout semble en ordre. Pourtant, mon instinct hurle le contraire.
— Jolie chambre.
Je sursaute, pivotant vers l'ombre qui se découpe près de la fenêtre.
Victorio.
Il est là, adossé au mur, les mains dans les poches de son pantalon noir. Il me fixe avec ce sourire paresseux qui me rend folle.
— Comment es-tu entré ?
— Tu devrais mieux verrouiller la porte.
Mon cœur tambourine contre ma poitrine.
— Qu’est-ce que tu fais là ?
Il s’approche lentement, son regard sombre fixé au mien.
— Tu crois pouvoir m’embrasser comme ça et me laisser derrière ?
Je recule d’un pas, mais il continue d’avancer.
— Ce n’était qu’une erreur, dis-je d’une voix qui se veut froide.
Son sourire s’élargit.
— Alors pourquoi tu trembles ?
Il est maintenant si proche que je sens la chaleur de son corps irradier contre le mien. Je recule encore, jusqu'à ce que mes jambes heurtent le bord du lit.
— Qu’est-ce que tu veux, Victorio ?
Il se penche vers moi, ses mains venant emprisonner mes hanches.
— La vérité ?
Je hoche la tête, le souffle court.
— Je veux te posséder.
Sa voix est rauque, menaçante, mais étrangement douce.
— Tu crois que je vais te laisser faire ?
— Tu ne me repousses pas.
Ses lèvres effleurent ma joue, descendant le long de ma mâchoire. Je ferme les yeux malgré moi, incapable de lutter contre le frisson qui me traverse.
— Ce feu entre nous, Emily… il est réel.
Ma main vient se poser sur son torse, mais je ne le pousse pas. Je sens son cœur battre, fort et rapide, sous mes doigts.
— C’est dangereux, murmuré-je.
— Tout ce qui en vaut la peine l'est.
Ses lèvres se posent sur les miennes, d’abord doucement, puis avec plus de force. Sa langue glisse contre la mienne, réveillant ce désir incontrôlable qui brûle en moi depuis notre premier contact.
Je cède. Encore.
Je le laisse me faire basculer sur le lit, son poids pressant contre mon corps. Ses mains glissent sur mes cuisses, remontant ma robe.
— Tu es à moi, Emily, murmure-t-il contre ma bouche.
Je renverse la tête en arrière, les yeux mi-clos.
— Pas encore.
Il rit, un son grave et sensuel qui me fait frémir.
— On va voir ça.
Il mord doucement ma lèvre, et cette fois, je ne résiste pas.
—
Je me réveille en sursaut quelques heures plus tard. La chambre est plongée dans l'obscurité, mais le poids chaud contre mon dos me rappelle immédiatement où je suis.
Victorio est allongé derrière moi, son bras passé autour de ma taille.
Je reste immobile, le souffle court.
— Tu comptes fuir ? murmure-t-il, la voix rauque de sommeil.
— Peut-être.
Sa main glisse sur ma hanche, son souffle chaud effleurant ma nuque.
— Pas cette nuit.
Je ferme les yeux. Je suis foutue. Complètement.
—
Le lendemain matin, je suis assise sur le balcon, une tasse de café brûlant entre les mains. Le soleil levant éclaire les rues de la ville sous une teinte dorée.
Victorio est toujours dans le lit, endormi. Je l’ai observé un long moment avant de sortir prendre l’air.
Je devrais partir. Maintenant. Je devrais appeler Alex, mettre fin à cette mission avant qu’elle ne dérape.
Mais je n’en ai pas envie.
Victorio est une drogue. Un poison. Et je suis déjà en train de sombrer.
Je sens une main glisser sur mon épaule.
— Tu réfléchis trop.
Sa voix est encore rauque de sommeil. Je lève les yeux vers lui. Il est debout derrière moi, torse nu, son pantalon de costume noir pendouillant sur ses hanches.
— Peut-être.
Il s’accroupit à côté de moi, sa main se posant sur ma cuisse nue.
— Alors arrête de penser.
Il m’embrasse à nouveau, doucement cette fois. Mais je ressens toujours cette fièvre sous-jacente, ce feu qu'il allume en moi à chaque contact.
Quand il s’écarte, il me fixe avec un sourire sombre.
— Je t’ai dit que tu finirais par me supplier.
Je souris lentement.
— On verra bien qui suppliera qui.
Il rit, et je me rends compte que c’est exactement ce qu’il voulait entendre.
Victorio Moretti est en train de me piéger.
Et le pire dans tout ça, c’est que je le laisse faire.
EmilyJe me réveille dans ses bras.Le silence de la chambre est rare, presque irréel.Il n’est pas vide. Il est habité d’une présence tendre, d’un souffle calme, d’une lumière douce filtrée par les rideaux entrouverts.Le jour est là, doré, discret, posé sur les draps comme une promesse.Sa main repose sur ma hanche nue, large et chaude, comme un ancrage silencieux.Sa poitrine contre mon dos bat à un rythme lent, presque solennel — comme si son cœur, désormais, savait qu’il avait trouvé un lieu où s’ancrer, un temps où demeurer.Je garde les paupières closes encore un instant.Non par fatigue, mais pour graver cette paix dans ma mémoire.Cette quiétude qu’on croyait impossible, arrachée au chaos à la seule force de nos volontés, de nos corps, de nos choix.— Tu dors pas ? murmure-t-il, d’une voix grave encore veloutée par le sommeil.— Je te regarde dormir, je réponds, à voix basse, avec ce sourire intime qu’on réserve aux instants qui comptent.Il m’attire un peu plus contre lui, d
EmilyLe soleil est haut à présent, tranchant, insolent.Comme s’il n’avait pas vu ce que nous venons de faire.Comme s’il refusait d’admettre qu’un empire s’était levé dans le sang au lever du jour.Nous rentrons en silence, à travers les rues encore tièdes de chair, jonchées de douilles vides, de cendres noires, de silence suspendu.Le sol colle. L’air pue le carnage.Mais nos pas ne tremblent pas.Nous avançons comme des rois sans couronnes, couverts de poudre et de loyauté.La villa est intacte.Trop intacte.Presque indécente dans ce chaos qu’on vient de créer.Mais nos hommes nous y attendent. Certains, blessés, rapiécés à la hâte, d’autres, encore électrisés par la mort qu’ils ont semée.Leurs regards changent quand ils nous voient.Tout se fige.Et puis une clameur s’élève.Brute , totale.Ils frappent leurs poings contre les murs, les tables, le sol, les barres métalliques, les armes, leurs poitrines.— A-MI-NA ! A-MI-NA !Mon nom. Pas celui que m’ont donné mes parents. Celui
EmilyL’aube n’est pas encore levée.Le monde, là-dehors, est encore plongé dans cette obscurité bleue et sourde, celle qui précède les catastrophes ou les révélations.Trois coups, secs, nets, sur la porte.Le signal.Je ne sursaute pas.Je me lève. J’attrape la lame dissimulée dans ma botte, le geste précis, instinctif.Victorio, lui, n’a pas besoin d’arme en main pour avoir l’air dangereux mais il tient déjà son pistolet, prêt, comme si ses veines pulsaient au rythme du conflit qui s’annonce.— C’est Rafaël, murmure-t-il, sans détourner les yeux de la porte.Je hoche la tête.La tension est palpable, mais contenue. Une bête muselée qui attend le coup de feu.Rafaël entre.Il ne sourit pas.Son visage, creusé par la fatigue et la détermination, ressemble à un masque de guerre.— Le Nord est en place. L’Est attend ton feu vert. L’Ouest… tergiverse.Je m’avance, pieds nus sur le parquet froid, et je le fixe.— Alors l’Ouest tombera avec les autres. On ne négocie plus avec les hésitan
EmilyLe soir est tombé comme un drap humide sur nos épaules.Tout est silencieux dans la pièce, comme si même les murs retenaient leur souffle.Il n’y a plus de cris, plus de sarcasmes, plus d’orgasmes trop forts pour faire place au reste.Juste nous deux.Deux corps posés côte à côte dans un lit qui a trop vécu.Il a allumé quelques lampes, à peine.Pas assez pour effacer les ombres. Juste ce qu’il faut pour dessiner les reliefs de son torse, les veines de ses bras, la ligne de sa mâchoire.Je le regarde s’asseoir au bord du lit, nu, les pieds posés au sol comme s’il s’ancrait avant de tomber.Il allume une clope.Et c’est idiot, mais le geste me fait presque mal.Parce qu’il est trop calme.Trop lui.— Tu vas rester là à me mater comme une statue grecque ou tu comptes faire quelque chose d’utile ? il demande, sans même se retourner.Je souris. Une étincelle acide dans la gorge.— Tu veux dire t’insulter ou te sucer, c’est ça ?Il éclate de rire. Un vrai.Un de ces rires qui secouen
EmilyJe n’ai pas fermé l’œil. Pas vraiment.J’ai juste… laissé mon corps contre le sien.Pas trop près. Pas trop loin.Assez pour sentir sa chaleur sans me perdre dedans.Assez pour entendre sa respiration changer parfois comme un aveu qu’il ne dira pas à voix haute.Le rideau laisse passer un bout de lumière sale.Une aube qui hésite.Comme moi.Je suis toujours nue dans ses draps. Pas par oubli.Par instinct.Parce que mon corps reconnaît ce lit.Et que l’odeur de ses draps, c’est un piège dans lequel je saute encore les yeux ouverts.Il bouge dans son sommeil.Un râle, un bras qui cherche à l’aveugle.Puis cette voix que je connais par cœur, rauque, débraillée, juste assez irritante pour me faire sourire.— Tu es en train de me fixer comme une psychopathe ou tu comptes grimper sur moi ?Je ris. Un petit éclat de rire moqueur, planqué sous la fatigue.— Tu rêves. Je réfléchis.— C’est pire. Ça veut dire que tu prépares un coup.Je me glisse sur lui sans prévenir.Mes cuisses entour
EmilyJe ne sais pas qui bouge le premier.Peut-être lui. Peut-être moi.Peut-être l’univers, fatigué d’attendre.On n’est pas tombés l’un sur l’autre.On s’est choisis.Avec les dents serrées et les mains déjà prêtes à déchirer.Il m’attire par le col de mon manteau ce manteau que je serre depuis des jours comme une armure et je ne le retiens pas.Ma bouche trouve la sienne.Ce n’est pas un baiser.C’est une collision.— Qu'est-ce tu fais ? je murmure entre deux souffles .— Attends et tu verras, répond-il.Ses mains me saisissent comme s’il me connaissait encore.Et peut-être qu’il me connaît encore.Ou peut-être qu’il réinvente.Mon dos frappe le mur dans un claquement sourd.Je laisse échapper un rire. Un vrai.Et ça, c’est presque plus obscène que ce qu’on est sur le point de faire.— Tu as toujours ce besoin maladif de m’écraser contre des surfaces dures ? je lâche, un sourcil levé.— Toi, tu as toujours cette manie de me provoquer quand tu as envie.Et c’est vrai.J’ai envie, j