Au cours de la semaine précédant le jour-j, l'ambiance festive se fait déjà ressentir à l'ESSET. Des groupes se forment peu à peu pour ce qui est du shopping et certains employés mettent en pratique leur talent de vendeur : ce qui est sûr c'est que tous attendent impatiemment la soirée du gala. Tous exceptée Véronique. Peu à l'aise dans les fêtes, la jeune femme reste sur son idée de prétendre d'être malade pour excuser son absence. Ayant finalement oublié son nouvel ami, sa frustration s'est estompée, la laissant profiter de ses journées.
Plus que deux jours avant l'évènement. Veronique qui a travaillé de 14 à 22 heures rentre chez elle fatiguée. Aussitôt arrivée, la pauvre se jette sur son lit. Heureusement Blévie par bonne foi lui prépare un sceau pour qu'elle aille se doucher. Bien que ses paupières s'alourdissent de plus en plus avec le temps, Véronique troque ses vêtements contre sa serviette pour aller se rafraichir et faire sa toilette. À son retour, son plat est servi et sa gratitude envers sa cousine n'a pas besoin d'être verbale ; rien que par leur regard, il y a une belle communication qui s'établit.
Pendant que l'agente de nettoyage s'alimente encore, Blévie lui annonce une nouvelle assez surprenante, à savoir :
« Mon équipe et moi avons été conviées au gala qu'organise l'ESSET !! »
« Cool. » réplique Véronique sans enthousiasme.
« Allez, on peut y aller ensemble ; tu n'as plus besoin de mentir à ta superviseure. »
« Et pourquoi ? »
« Tu n'imagines pas le nombre d'opportunités qu'on peut y trouver ! Tu sais le nombre de PDG qui ont été invités ? »
« Qu'est-ce que ça peut bien me faire ? C'est une fête pour des gens qui ont l'argent, non ?»
À ce moment-là, elle s'arrête de manger pour fixer son interlocutrice qui ne met pas de temps à répondre.
Le fait est que Blévie ne pourrait pas non plus s'y rendre toute seule. Consciente de l'agoraphobie de sa cousine, elle soutenait son idée initiale de rester chez elles. Cependant, après avoir reçu l'invitation à ce gala, bien que ne voulant pas y aller au départ, la jeune femme pensa pouvoir être accompagnée par Véronique. Ensemble elles pourraient trouver un emplacement calme et moins animé, pensait-elle.
« ... Ça pourrait être pour moi une occasion de faire connaissance avec des personnes importantes qui pourraient m'aider à évoluer. Je sais que toi, malgré ta position, tu reçois un bon salaire mais c'est pas mon cas et ça ne l'a jamais été. Depuis que j'ai commencé à travailler, au grand jamais j'ai eu plus de 40.000 comme salaire. Tout ce que je veux dire c'est que c'est une belle opportunité qui se présente à moi et je ne pourrais pas la saisir sans toi. »
« Comment ça ? »
« Je ne vais quand même pas me pointer et faire la conversation à de parfaits inconnus, voyons ! Et même s'il y aura mes collègues, ce ne serait pas pareil qu'avec toi. J'aimerais bien m'y amuser et c'est avec toi que je me sens libre de dire tout ce qui me passe par l'esprit. »
« Je ne me rendais pas compte que nous avions ici une vie sociale aussi inexistante ... » réplique Véronique dans une voix qui exprime son épuisement aussi bien mental que social.
Les mots de sa cousine l'ont cependant touchés. Elle y reconnait une partie de son ressenti, surtout sur le point des collègues avec qui les relations sont strictement professionnelles. Et c'est aussi l'une des raisons qui l'ont fermées à l'idée de participer à la fête.
Pourquoi avoir refusé d'y aller avec Blévie ? Eh bien, cette dernière la lâchera dès qu'elle aura trouvé ce qu'elle recherche. Résultat ? Une Véronique isolée et regrettant son choix de l'avoir accompagné.
Véronique décide malgré tout d'y réfléchir et voit le bon côté des choses. Là au moins, elle ne serait pas seule.
***
**
Un nouveau jour se lève et comme c'est samedi, les filles ne vont pas à leur travail respectif. Cependant, à l'ESSET une réunion du personnel aura lieu à partir de 10 heures. Alors au moment venu, Véronique s'y rend. Au cours de son trajet, elle réfléchit à sa discussion de la veille avec Blévie.
Elle y arrive, prend l'entrée réservée aux employés et se dirige vers le hall où se trouve déjà la moitié des membres du personnel. Une bonne dizaine de minutes plus tard, ils sont tous au complet. Du haut des escaliers apparaît un groupe constitué d'hommes et de femmes, celui des personnes les plus hauts placées de l'entreprise. Ils dégagent une aura d'autorité et malgré leur habillement décontracté, ils savent impressionner la foule. Ils descendent pour rejoindre le reste du monde et Véronique reconnaît parmi eux des visages familiers notamment celui de Madame Yvette, sa superviseure.
Cependant, l'attention de la jeune femme se porte très vite vers celui qui n'a pas achevé sa descente.
~ VÉRONIQUE ~
Des jambes légèrement arquées, une silhouette normale, des bras plus ou moins musclés, beaucoup de barbe, une grosse moustache, beaucoup de cheveux ...
Je sens juste des frissons parcourir l'ensemble de mon corps. Je ne m'attendais tellement pas à le voir. Qu'est-ce qu'il fait là ? Pourquoi s'arrêter en chemin ?
Il adresse une salutation générale à l'assemblée, tel un chef. C'est la première fois que je le vois comme ça, dégageant un certain charisme, une certaine autorité...
Un instant, nos regards se croisent et mon cœur s'emballe. Instinctivement, je baisse ma tête vers mes pieds. À quoi je m'attendais aussi ? Être au fond ne pouvait que me rendre visible puisqu'il était en hauteur.
Quelques secondes après, sa voix résonne de nouveau dans le hall. Il s'élance dans un monologue au cours duquel il nous dit avoir été préalablement en réunion avec tous les directeurs et cadres dirigeants et qu'ils ont ensemble pris les décisions importantes pour l'organisation de la cérémonie de demain. Ainsi, le chef de chaque service rassemblera ses subordonnés afin de leur donner des instructions.
En tant que technicienne de surface, j'ai peur qu'on n'y participe que pour nettoyer. Ils feront la fête et nous, on va tout ranger derrière eux. C'est malheureux !
Dominique termine son discours et remonte. La foule, de son côté se disperse et se segmente en plusieurs groupes et chacun d'eux rejoint le département correspondant y compris nous, les agents de nettoyage. Sur le chemin, je suis à la traîne, distraite par ce que j'ai vu il y a quelques minutes. Je le soupçonnais déjà d'être quelqu'un d'important mais jamais qu'il soit le PDG de cette entreprise.
Je suis le reste du "troupeau" marchant à deux mètres devant moi et nous finissons par atteindre notre cabinet. La superviseure s'assied sur son bureau et nous autres nous mettons à l'aise. C'est notre chez nous. Même si tout le monde n'a pas son siège, mais au moins la salle est assez grande pour tous nous contenir.
Madame Yvette prend la parole et fait le briefing de ce qui a été dit. Elle parle longuement du déroulement du gala et j'en retiens que ce n'est pas notre poste de technicien de surface qui nous empêchera d'en profiter.
« ... Au gala, tout le monde sera convié au même titre. Il n'y aura pas de superviseur, pas de technicien de surface, pas de directeur exécutif, non ! Il y aura des individus réunis pour la cause des gens qui sont dans le besoin. Autrement dit, vous, moi, nos chefs et d'autres invités sans aucune distinction de position. » dit-elle.
Nous sommes contents. Mais il y a un hic. Qui va se charger du nettoyage ? Un de mes collègues qui a pensé à la même chose s'exprime à voix haute et la réponse de la superviseure est plus que surprenante, à savoir :
« Tout le monde sans exception. Du plus haut de la hiérarchie jusqu'au dernier des subalternes. »
Mon Dieu, je suis choquée !
« Tout ce que je veux savoir c'est ce qu'il attend de moi. Je ne veux pas être une maîtresse ; ça n'a jamais été mon intention. Je l'ai aimé pour lui et non ses biens. »« Si c'est l'homme que Dieu a fait pour toi, qu'il pleuve ou qu'il neige, vous finirez ensemble. »~ VÉRONIQUE ~Cela fait plusieurs heures que je me remémore cette conversation, notamment ces deux passages. Il est présentement treize heures et je suis dans le bus en partance pour le travail. La tête penchée contre la vitre, j'observe d'un œil rêveur le paysage. J'espère ne pas me retrouver dans la même situation qu'hier. Bref, je me sens excitée à l'idée de revoir Dominique. Excitée dans le sens où je ne peux pas m'empêcher d'imaginer la scène, j'ignore comment aborder le sujet et ... Que sais-je encore ?! J'espère que notre rencontre ne va pas me faire perdre mes repères. J'ai tellement de questions à lui poser !Plus j'y repense plus je me dis qu'il y a possiblement des raisons qui l'ont mené à être infidèle enver
~ À Brazzaville ~À quatorze heures, Véronique termine sa journée de travail avant de se mettre en route pour rentrer chez elle. Arrivée sur les lieux, Blévie semble y être absente vu les coups infructueux donnés à la porte. Alors, la jeune femme a le réflexe de chercher la clé sous leur pot de fleur.Une fois dans le studio, elle a le souvenir de son idée de le changer en lui apportant de nouveaux meubles et accessoires. La jeune femme dépose sur le sol carrelé son petit sac avant de troquer ses vêtements contre d'autres plus amples. Puis ses pensées se portent sur Dominique, elle se sent mal mais s'attache à l'espoir qu'il ait prévu, avant de se mettre avec elle, de se séparer de sa femme. Elle passe délicatement une main sur son cou avant de la glisser vers sa poitrine en se souvenant de ses baisers pendant une seconde. « Il faut que j'arrête ! » maugrée-t-elle en allant ranger le petit bazar autour d'elle.Plus tôt dans la journée, Véronique pensait certes le quitter facilement
« Demain, appelle-le !... Fais tout ce que tu pourras pour discuter avec lui ! Il a le devoir de te dire la vérité. »« J'ai essayé de le joindre au cours de la journée... Et il ne m'a pas répondu. »« Bah oui, justement ; tu vas l'appeler demain. Et s'il ne décroche pas, ça va barder pour lui. C'est moi qui te l'dis ! »~Quelques minutes de silence plus tard~« Est-ce que tu iras à l'ESSET ? »« Je n'ai pas vraiment le choix. »Et c'est la dernière chose que Véronique dit avant de sombrer progressivement dans un profond sommeil, recroquevillée sur elle-même et la tête posée sur les cuisses de sa cousine.*****~ Le lendemain, 5 heures ~~ Au POOL ~Dominique sort de l'hôtel vêtu d'un jogging et d'un débardeur pour aller courir. La nuit, ayant particulièrement été difficile et plus faite de réflexion que de sommeil, il espère se vider l'esprit pendant l'espace d'un temps. Dans sa course, il arrive au trentenaire de croiser des agriculteurs, des éleveurs ainsi que des commerçants : à
~ DOMINIQUE ~« Je te demande pardon. »« Aimer n'est pas un péché. Si tes sentiments envers cette fille sont sincères, alors je ne vois pas pourquoi me mettre en travers de ton chemin. »Je me mords instinctivement la lèvre inférieure. Je me suis mis dans le pétrin. Sa phrase est chargée d'une telle amertume que je regrette encore plus de lui avoir fait ces confessions. Elle se lève sans plus de cérémonie et s'en va. Je n'ai même pas le courage de la rattraper parce que... à quoi bon ? Je ne ferai que remuer le couteau dans la plaie. Pourquoi chercher à la retenir lorsque j'éprouve des sentiments pour une autre. Je suis certain de mon affection profonde pour Valérie et j'ai longtemps cru qu'elle serait la seule femme que je pourrais à jamais garder dans mon cœur. Puis Véronique est arrivée, comme un défi que la nature me présentait. Et je n'ai pas résisté.*****~ BLÉVIE ~J'ouvre la porte sur une Véronique aux yeux rougis, légèrement bouffis et larmoyants. Je ne me souviens plus
Iris, l'infirmière n'avait pas réellement l'intention de prévenir le DRH. Comme son chantage ne sembla pas susciter une quelconque réaction de Véronique, elle quitta le vestiaire et traîna ses pas dans une direction piochée au hasard dans l'optique de créer un temps de latence entre son départ et son retour. Elle aperçut un groupe de techniciens de surface et alla s'entretenir avec eux, ayant reconnu deux qu'elle avait vu à son entrée dans la pièce où Véronique demeure allongée.« Qu'est-ce qui s'est passé avec cette jeune fille ? »« Maman Yvette l'a sermonné et elle a piqué une crise. » répondit l'une.« Vous savez pourquoi ? » « Ce n'était qu'un blâme ! » dit une autre. « Apparemment cette fille vend son corps pour de l'argent. Maman Yvette a juste essayé de la remettre sur le droit chemin. »« C'est grave !... » murmura Iris en voyant arriver Vianney, le DRH accompagné de Christophe, le cousin du PDG de l'entreprise.« Bonjour, messieurs. » dirent en chœur les subalternes.Et les
« Eh mâ Yvette, obomi mwana batu(ou) ! »Traduction : "Maman Yvette, tu as tué l'enfant d'autrui !"Ironiquement, la personne qui a émis ce commentaire l'a dit d'un air assez détaché. Comme n'importe quel autre phrase. Ils étaient nombreux à entourer le corps de la jeune femme encore inconsciente. Il y en avait de plusieurs genres : les méprisants, les insultants, les juges et les commères." Allez, transportez-là dans les vestiaires ! » ordonne madame Yvette tandis qu'elle lance un appel à l'infirmière de l'entreprise....On allonge Véronique sur un banc assez large lorsque madame Yvette se rapproche de la jeune femme pour déboutonner le haut de sa chemise. Les hommes n'ont certes pas accès à cette pièce ; cependant dans le cas précis, il a fallut que l'un d'eux la porte. Et celui-ci est en train d'être témoin d'un spectacle qui suscite tout-de-suite des chuchotements : le cou ainsi que la poitrine de Véronique sont couverts de suçons laissant croire à une réelle relation intime ent