Spectatrice d’une vie

Je remontai les escaliers sans bruit, tentant d’effacer ma présence comme on efface une tâche gênante.

Depuis l’étage, j’entendais encore leur voix — feutrée, mais pas assez pour me priver de leur venin.

— Dante, ta mère s’inquiète seulement pour toi, expliqua Elena d’un ton doux, comme si elle recouvrait un poignard de soie. Tu sais bien que ta mère ne veut que ton bien. C’est normal qu’elle trouve sa présence ici… délicate. Avec son passé...

— Son passé ? releva Dante, d’une voix tendue.

— Je ne veux pas dire ça comme une attaque, Dante. Je veux juste dire que... les choses pourraient être mal interprétées. Tu as une réputation, une image. Et elle… enfin, elle revient de loin.

— Elle a payé sa dette, Elena. Ce passé là ne vous appartient pas. Il n’appartient qu’à elle.

Je me figeai. « Son passé. » Comme un mot sale. Une étiquette qu’on ne me retirerait jamais, peu importe combien de fois je me tairais, me ferais petite, utile, obéissante.

Mais la voix de Dante claqua comme une lame.