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Chapitre 4

Author: Mr Donch
last update Huling Na-update: 2025-06-04 17:37:40

La pluie avait commencé à tomber dans la nuit, fine et persistante, comme un murmure d’alerte sur les vitres de la maison. Dans le salon, une cheminée crépitait paresseusement, diffusant une chaleur réconfortante. Jack, assis sur le canapé, tenait Olivia contre lui. Elle s’était endormie, enfin, après plusieurs nuits à tourner en rond, hantée par les lettres, la voiture, la voix de sa tante que Riley avait entendue au parc.

Jack caressait doucement ses cheveux, tentant de calmer ses propres pensées. Il n’était pas naïf. Il savait que ce monde dont elle parlait, l’univers opaque, impitoyable et glacé des Harper, était bien réel. Et qu’il était en train de les observer.

À plusieurs reprises ces derniers jours, il avait eu la sensation d’être suivi. Des passants qui fixaient un peu trop longtemps la vitrine de sa petite librairie. Un inconnu qui avait demandé où était Riley, prétendant être un ancien ami d’Olivia, avant de disparaître dans la foule.

Mais il ne disait rien. Pas encore. Parce qu’il voulait croire qu’ils avaient encore un peu de répit. Un peu de paix. Olivia, de son côté, vivait dans un état de vigilance permanent. Son téléphone vibrait plusieurs fois par jour sans qu’aucun message ne s’affiche. Lorsqu’elle appelait le numéro, une voix synthétique lui répondait : "Ce numéro n’est pas attribué."

Une nuit, elle se leva en sursaut. Un rêve. Ou plutôt un souvenir. Elle avait treize ans, enfermée dans le bureau de Margot. La voix de sa tante résonnait dans sa mémoire : « Tu ne choisis pas ta vie, Olivia. On te la dessine. À toi d’apprendre à bien entrer dans le cadre. »

Elle se leva sans bruit, traversa la maison plongée dans l’obscurité et s’approcha de la chambre de Riley. La fillette dormait profondément, son ours en peluche contre elle. Olivia la regarda longtemps, une main contre sa bouche pour retenir une vague de larmes.

Elle ne les laisserait jamais l’approcher, jamais. Le lendemain, Jack fut surpris de voir une enveloppe glissée sous la porte de sa librairie. À l’intérieur : une photographie. C’était Olivia. Sur une terrasse de café, à New York. Souriant, entourée de deux hommes en costume. L’un d’eux n’était autre que Charles Dunning, avocat principal des Harper. Et au dos, une simple phrase manuscrite, à l’encre noire : « Savez-vous vraiment qui dort dans votre lit ? »

Jack sentit la colère lui remonter dans la gorge. Qui faisait ça ? Et surtout… pourquoi maintenant ? Il jeta un regard à l’extérieur, mais la rue était vide, trop vide. Il garda la photo pour lui. Pas pour la cacher à Olivia, mais parce qu’il voulait comprendre avant de la confronter à ce passé qu’elle avait déjà tant de mal à tenir à distance.

Le soir même, ils dînèrent tous les trois, comme si rien n’avait changé. Riley bavardait joyeusement, racontant comment elle avait appris à dessiner des cœurs avec une règle. Olivia riait doucement, mais ses mains tremblaient légèrement. Jack l’observait. Il voyait tout.

Après avoir couché Riley, Jack prit Olivia dans ses bras, la regarda droit dans les yeux.

« Tu es en sécurité ici. Avec moi. » Elle lui sourit tristement. « Tu ne comprends pas, Jack. Je ne suis pas sûre qu’on puisse vraiment me protéger. »

Il l’embrassa alors, tendrement, profondément, comme pour lui faire oublier ce monde extérieur, ces ombres qui grattaient à la porte. Et pendant un instant, elle s’abandonna à lui. Un instant suspendu, hors du temps. Mais, dehors, une silhouette observait la maison depuis la ruelle. Et dans sa poche, un téléphone vibra. Un message s’afficha : « Étape 1 terminée. Elle est prête. »

Ce dimanche-là, tout semblait paisible. Le ciel s’était enfin dégagé après des jours de pluie, et la petite maison de banlieue baignait dans une lumière dorée. Jack préparait des pancakes pendant qu’Olivia aidait Riley à mettre la table, sous les éclats de rire d’un matin presque trop parfait pour être vrai.

Mais lorsqu’on frappa à la porte, le monde bascula. Trois coups. Secs, parfaits, précis. Jack s’essuya les mains, fronça les sourcils, puis ouvrit la porte. Ce qu’il vit le figea. Une femme, élégante, sèche, impeccable dans un manteau ivoire cintré, comme découpée dans du marbre. Derrière elle, deux hommes en costume attendaient, impassibles. Un véhicule noir aux vitres teintées les attendait en double file.

La femme inclina légèrement la tête. « Bonjour. Je suis Margot Harper. Je crois qu’Olivia ne vous a pas tout dit. » Jack resta muet. Le nom résonna dans sa tête comme une alarme. Derrière lui, Olivia accourut, alertée par le ton. En un instant, son visage se décomposa, « Margot. »

La tante sourit avec une lenteur presque cruelle. « Olivia. Toujours aussi théâtrale. Tu ne m’invites pas à entrer ? » « Va-t’en, » répondit Olivia d’une voix glacée. « Tu n’as rien à faire ici. » Margot entra malgré tout, comme une reine conquérant un territoire perdu. Elle balaya la pièce du regard, puis posa ses yeux sur Riley, qui jouait dans le salon sans comprendre ce qui se passait.

« Elle est charmante, » dit-elle en s’adressant à Jack. « Vous avez fait un joli couple, on dirait. » Jack s’interposa, furieux. « Sortez de chez moi. » Mais Olivia leva la main. « Laisse-moi faire. » Elle s’approcha de Margot, à quelques centimètres seulement, et son regard se durcit.

« Tu n’as jamais supporté qu’on dise non à la famille. C’est toujours la même stratégie : l’argent, le contrôle, les menaces. Mais je ne suis plus cette fille docile que tu pouvais façonner. Je suis partie. Je me suis reconstruite. Tu n’as aucun droit ici. »

Margot sourit, glaciale. « Tu es partie, oui. Et tu as fui avec un accès bancaire de plusieurs millions, je te le rappelle. C’est du vol. » Olivia rit, amère. « Tu veux vraiment me faire un procès pour mon propre héritage ? » Margot se pencha à son oreille. « Ce n’est pas un procès que je veux, chérie. C’est ton retour. Ta place t’attend. Ton nom. Tes obligations. Et si tu refuses... » Elle jeta un regard lourd de sous-entendus vers Riley. « …alors on fera ce qu’on doit faire. »

Jack s’élança, furieux, la saisit par le bras. « Je vous interdis de la menacer, ou de parler de ma fille. Sortez d’ici. Maintenant. » Margot se dégagea lentement, sans violence, puis lissa son manteau comme si rien ne s’était passé. « Très bien. Je suis venue en paix. Je repartirai en guerre. »

Elle regarda Olivia une dernière fois, avec quelque chose d’inquiétant dans la voix. « Tu peux croire que tu as gagné. Mais l’empire Harper ne laisse jamais ses enfants s’égarer longtemps. » Puis elle tourna les talons, ses gardes du corps à sa suite, et disparut. Le silence qui suivit était lourd. Intenable. Jack ferma la porte d’un geste brutal.

« C’était elle ? » demanda-t-il. « Celle que tu redoutais ? » Olivia s’assit, vidée. « Elle est pire que ce que j’ai pu te dire. Elle n’est pas venue pour me récupérer. Elle est venue pour m’écraser. » Jack s’accroupit devant elle, cherchant ses yeux. « Qu’est-ce que ça signifie ? Qu’est-ce qu’elle peut faire, concrètement ? » Olivia leva lentement la tête, et dit, d’une voix blanche : « Elle peut faire retirer Riley de ta garde. Elle peut tout acheter. Des avocats. Des juges. Des fonctionnaires. Et elle ne reculera devant rien. »

Un frisson traversa Jack. « Alors on doit riposter. » Olivia le regarda longuement. « Et si tu devais choisir, Jack ? Ta fille… ou moi ? » Jack voulut répondre. Il voulut dire « les deux ». Mais au fond de lui, il savait que ce dilemme allait s’imposer bientôt. Implacable. Et que Margot venait de déclencher un jeu dangereux où l’amour seul ne suffirait plus.

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