Eden
L’erreur est là, entre nous.
Accrochée à ses lèvres. Gravée dans mon souffle court, dans mes doigts crispés sur sa chemise.
Je viens de l’embrasser.
Je viens de lui donner ce qu’il attendait, ce qu’il voulait depuis le premier instant.
Et le pire ?
Je l’ai voulu aussi.
La prise qu’il exerce sur moi se relâche légèrement. Juste assez pour me faire croire que j’ai encore un échappatoire. Mais je connais déjà la vérité : il ne me retient pas. C’est moi qui ne pars pas.
Ma respiration est saccadée. Mon cœur bat trop vite.
Aleksandr me regarde, et je devine ce qu’il va dire avant même qu’il ouvre la bouche.
— Tu te mens à toi-même, Eden.
Il murmure ces mots avec une douceur assassine, une certitude tranchante qui me donne envie de hurler.
Alors je fais ce que je fais de mieux.
Je le repousse violemment.
Son dos heurte le mur avec un bruit sourd. Mais il ne riposte pas.
Il se contente de me fixer avec cet air suffisant, ce sourire arrogant qui me donne envie de le frapper.
— Ne crois pas que tu as gagné, je crache, la gorge serrée.
Son regard sombre brille d’amusement.
— Oh, Eden…
Il se redresse lentement, comme un prédateur qui s’étire après avoir joué avec sa proie.
— Je n’ai pas encore commencé à jouer.
Un frisson me parcourt, et je le déteste encore plus pour ça.
Je tourne les talons, prête à sortir de cette chambre, de cette foutue cage où il m’a enfermée dans mon propre désir.
Mais à peine ai-je fait un pas qu’il me rattrape.
Sa main saisit mon poignet, et en une fraction de seconde, je me retrouve contre lui. Son corps brûlant contre le mien, son souffle effleurant ma peau.
— Laisse-moi partir.
— Pourquoi ?
Il pose cette question comme une provocation, comme une certitude qu’il connaît déjà la réponse.
Et le pire, c’est qu’il a raison.
Je ferme les yeux, cherchant un moyen de fuir cette spirale qui m’attire vers lui.
Mais sa voix s’insinue dans mon esprit comme un poison doux.
— Je pourrais t’avoir ici, maintenant.
Sa main glisse le long de mon bras, effleure mes hanches, s’arrête juste assez bas pour me faire haleter.
— Et tu le laisserais faire.
Je relève brusquement les yeux, furieuse.
— Ne sois pas si sûr de toi.
Il rit doucement.
— Tu penses encore avoir le contrôle ?
Sa main remonte lentement, glissant sur ma peau avec une lenteur calculée.
— Tu veux lutter, Eden ? Très bien. Luttes.
Il recule d’un pas, brisant ce contact brûlant qui me cloue sur place.
Je reste figée.
Il me teste.
Il veut voir si je vais partir ou si je vais rester.
Si je vais fuir ou si je vais céder.
Et moi, je ne sais plus.
Ma tête hurle de courir. Mon corps me supplie de rester.
Aleksandr me fixe, les bras croisés, comme s’il me défiait de prendre une décision.
Je m’humecte les lèvres, ma gorge trop sèche pour parler.
Puis, lentement, je recule.
Un pas.
Puis deux.
Jusqu’à ce que ma main atteigne la poignée de la porte.
Je pourrais sortir.
Je devrais sortir.
Mais alors, pourquoi ma main ne tourne-t-elle pas la poignée ?
Pourquoi mon corps tremble-t-il encore ?
Pourquoi mon cœur hurle-t-il qu’il me manque déjà alors qu’il est juste là, à quelques mètres de moi ?
Aleksandr ne bouge pas.
Il attend.
Je ferme les yeux une dernière fois.
Et je fais mon choix.
Eden
Je devrais sortir.
Laisser cette porte s’ouvrir, m’éloigner, me libérer de cette emprise invisible qui m’étouffe.
Mais mes doigts tremblent sur la poignée.
Je déteste cet instant.
Ce moment où tout se brouille, où ma raison s’effondre face à quelque chose de plus grand, de plus obscur, de plus dangereux.
Aleksandr est toujours là.
Il ne dit rien.
Il me regarde.
Comme s’il savait déjà ce que j’allais faire.
Et moi, je me hais de réaliser qu’il a raison.
Lentement, je relâche la poignée.
L’instant d’après, je me retourne.
Il sourit.
Ce sourire, ce foutu sourire qui me donne envie de l’étrangler et de l’embrasser dans la même seconde.
— Tu vois ? souffle-t-il.
Je ne réponds pas. Je refuse de lui donner cette victoire.
Mais il n’a pas besoin de mots.
Il sait.
Son regard sombre brille d’une lueur dangereuse, une satisfaction carnassière qui me fait frissonner.
— Tu ne peux pas t’échapper, Eden. Tu ne l’as jamais pu.
Je serre les poings, luttant contre l’envie de lui sauter à la gorge.
— Ne me dis pas ce que je ressens.
Il avance d’un pas.
Je devrais reculer.
Je ne bouge pas.
Un sourire effleure ses lèvres.
— Alors prouve-moi que j’ai tort.
Son défi flotte entre nous, brûlant comme une braise prête à enflammer tout ce qu’elle touche.
Et je la sens.
Cette chaleur qui me consume, cette rage entremêlée à quelque chose d’autre.
Quelque chose d’encore plus dangereux.
Un désir que je refuse de nommer.
Aleksandr tend la main.
Une invitation silencieuse.
Un piège.
Je le sais.
Je sais que si je la prends, je tomberai encore plus profond.
Que je n’aurai plus aucun moyen de reculer.
Mais mes doigts bougent malgré moi.
Ils frôlent les siens.
Un contact infime. Électrique.
Et dans ce simple effleurement, je sais que j’ai déjà perdu.
Le sourire d’Aleksandr s’élargit à peine.
Et moi, je ferme les yeux, prête à plonger dans l’abîme.
— Viens.
Sa voix est un murmure. Une promesse. Une condamnation.
Et moi, sans un mot, je le suis.
---
La chambre est plongée dans la pénombre.
Le silence est épais, chargé de quelque chose d’invisible, de dangereux.
Aleksandr est devant moi.
Immobile. Patient.
Comme un chasseur qui attend que sa proie vienne à lui.
Je pourrais encore fuir.
Mais je ne veux plus fuir.
Je suis fatiguée de lutter contre ce que je ressens.
Alors je fais le premier pas.
Je pose mes mains sur sa chemise, mes doigts glissant contre le tissu.
Il ne bouge pas.
Il me laisse faire.
C’est moi qui décide.
C’est moi qui choisis de le vouloir.
Je déboutonne lentement sa chemise, révélant la peau chaude sous mes doigts.
Mon souffle s’accélère.
Son regard s’obscurcit.
— Eden…
Sa voix est rauque, teintée d’une menace douce.
Je le sais.
Je joue avec le feu
.
Mais pour la première fois, je ne veux pas éteindre l’incendie.
Je veux brûler avec lui.
Je lève les yeux, ancrant mon regard au sien.
Et je murmure, dans un souffle :
— Fais-moi regretter de rester.
L’instant d’après, il me saisit brutalement.
Et je tombe.
EdenJe tombe.Pas au sens littéral. Pas cette fois.Mais je sombre dans quelque chose de plus profond, de plus dangereux.Aleksandr me prend. Sans hésitation. Sans douceur inutile.Il ne m’offre pas d’échappatoire. Il ne m’accorde aucun répit.Et moi, je m’y abandonne.Sa bouche s’écrase sur la mienne avec une brutalité qui me coupe le souffle.C’est sauvage. Cru. Affamé.Je devrais lutter. Mon corps devrait protester contre cette emprise impitoyable.Mais au lieu de ça, je le retiens plus fort.Mes doigts s’accrochent à ses épaules, mes ongles s’enfoncent dans sa peau nue sous sa chemise entrouverte.Je le déteste pour ce qu’il me fait ressentir.Et j’en veux encore plus.Aleksandr m’entraîne avec lui, me plaquant contre le mur dans un choc sourd.Ses mains explorent mon corps sans la moindre hésitation. Il ne demande pas la permission. Il prend.Et moi, je le laisse faire.Mon souffle se mélange au sien. Ma tête tourne.Je suis prise au piège, oui.Mais est-ce vraiment lui qui me r
EdenLe jour s’étire lentement, traînant son poids lourd et pesant sur mes épaules.Je devrais déjà être partie.Je devrais être loin de lui, loin de cet appartement où le luxe dissimule à peine la brutalité qui règne entre ces murs.Mais je suis toujours là.Toujours enfermée dans cette chambre, toujours piégée dans cette emprise que je prétends refuser, mais qui m’attire avec une force contre laquelle je ne peux pas lutter.Aleksandr est là aussi.Immobile. Assis sur le bord du lit, le dos tourné vers moi.Il est torse nu, son corps sculpté d’ombres et de lumière dans la semi-pénombre du matin.Je devrais détourner les yeux.Mais je les laisse traîner sur les cicatrices qui marquent sa peau.Preuves silencieuses d’un passé dont je ne sais rien.— Tu comptes me fixer encore longtemps, Eden ?Sa voix est basse, traînante.Je sursaute légèrement, prise en faute.Mais je ne réponds pas.Je ne vais pas lui donner ce plaisir.Il tourne légèrement la tête, et ses yeux noirs se posent sur m
EdenJe le fixe, le souffle court.Ses mots résonnent encore dans ma tête."Tu restes avec moi. Entièrement. Sans demi-mesure."Je devrais rire. Me moquer de lui. Lui dire qu’il rêve, que je ne suis pas une femme qu’on enferme et qu’on possède.Mais les mots restent coincés dans ma gorge.Parce que je sais.Je sais que je suis déjà à lui, d’une manière qui me terrifie.Aleksandr attend, patiemment.Il sait que je vais répondre.Il sait que, malgré ma fierté, je ne peux pas me contenter de silence.Alors, je fais ce que je fais de mieux : je le provoque.— Et si je préfère te briser plutôt que de me laisser conquérir ?Un sourire carnassier s’étire sur ses lèvres.— Tu crois pouvoir me briser, Eden ?Il s’approche, lentement.Trop lentement.Et mon cœur tambourine dans ma poitrine, indécis entre la peur et l’excitation.— Je crois que personne n’est invincible. Pas même toi.Je le fixe, relevant le menton pour ne pas lui laisser voir à quel point sa proximité me trouble.Il s’arrête à
EdenJe suis piégée.Contre cette porte, entre ses bras, entre cette envie qui me consume et cette raison qui hurle de fuir.Aleksandr ne bouge pas, mais sa présence est une cage invisible, un piège dont je ne peux m’échapper. Son souffle est là, contre ma peau, un rappel constant du pouvoir qu’il exerce sur moi.Je devrais me dégager.Je devrais dire non.Mais je ne fais rien.— Tu ne me repousses pas.Ses doigts glissent lentement le long de mes bras, son contact brûlant chaque centimètre de ma peau.Je retiens mon souffle.— C’est ce que tu voulais ? Ma voix est rauque, troublée malgré moi.Aleksandr rit doucement.— Ce que je veux ? Il se penche, sa bouche frôlant l’angle de ma mâchoire. Tu n’as aucune idée de ce que je veux, Eden.Sa main se referme sur ma hanche, m’attirant un peu plus contre lui. Mon corps répond avant même que je ne puisse le contrôler. Je sens la tension de ses muscles sous sa chemise, l’électricité dans l’air qui nous entoure.— Alors dis-moi.C’est un défi.
EdenIl me laisse là.Brûlante. Tremblante. Consumée.L’air est encore saturé de lui, de son parfum, de la fièvre de ce baiser qui m’a laissée au bord du précipice. Mes lèvres picotent sous le souvenir de son contact. Mon corps entier est un champ de bataille, tiraillé entre colère et désir, fureur et manque.Je serre les poings.Respire.Ravale ce cri de frustration qui menace d’éclater dans l’air.Il croit qu’il peut jouer avec moi, me pousser au bord puis me laisser retomber seule ?Il croit qu’il peut imposer ses règles, dicter le tempo, contrôler ce qui se passe entre nous ?Non.Je refuse d’être une marionnette entre ses mains.Je veux inverser le jeu.Je veux le faire plier.Aleksandr pense avoir le contrôle. Il va comprendre qu’il se trompe.---AleksandrLa porte claque derrière moi, et je m’appuie contre le mur, inspirant profondément.Merde.Je passe une main sur mon visage, tentant d’éteindre l’incendie qu’elle a déclenché en moi.Eden…Ce n’était pas censé être ainsi.J’a
EdenJe sens encore la brûlure de ses doigts sur ma peau.Ses mots résonnent dans ma tête."Tu es déjà à moi."Les battements de mon cœur sont encore chaotiques. Je devrais partir, m’éloigner avant que ce jeu ne me consume.Mais je n’en ai pas envie.Je veux voir jusqu’où il ira.Jusqu’où nous irons.Aleksandr me regarde toujours, son verre de whisky posé sur la table basse, son regard sombre accroché au mien.Le silence est une tempête prête à éclater.— Tu fuis ? demande-t-il, sa voix un murmure venimeux.Je croise les bras, feignant une assurance que je ne ressens pas tout à fait.— Fuir ? Pourquoi je fuirais ?Son sourire lent me met en garde.— Pourquoi, en effet ?Et en un instant, il se lève.Il ne me touche pas.Mais il est trop près.Je recule d’un pas, mon dos rencontrant la table. Il suit. Un prédateur. Son ombre m’engloutit.— Tu joues avec moi, Eden.— Et si c’était toi qui jouais avec moi ? je réplique, le souffle court.Un rictus effleure ses lèvres.— Oh non, princesse
EdenL’air est chargé d’électricité.Je suis allongée sous lui, mes poignets piégés dans son emprise, mon souffle court.Aleksandr me fixe, son regard sombre brûlant d’une intensité qui me fait perdre pied.— Tu crois que je vais me soumettre ? je murmure, un défi au bord des lèvres.Son sourire est lent, cruel.— Je crois que tu es déjà en train de céder, Eden.Je serre les dents.— Jamais.Je me débats, tirant sur mes poignets. Il resserre sa prise, me maintenant fermement contre le matelas.— Continue, souffle-t-il contre ma joue. J’aime quand tu résistes.Un frisson me parcourt.Il le sent.Il sait exactement ce qu’il me fait.Son poids contre moi est une cage, une prison à laquelle je devrais vouloir échapper.Mais au lieu de ça…Je lève le menton, provocante.— Si tu penses pouvoir me briser, Aleksandr, tu te trompes.Sa main libre effleure ma joue, lentement, avant de descendre le long de mon cou.— Briser, non. Ses doigts effleurent mon clavicule. T’ouvrir. Te révéler. T’oblig
EdenSon regard est braqué sur moi, brûlant, insondable. Mais il ne bouge pas.Aleksandr me laisse faire.Je sens la tension dans ses muscles, pourtant il ne me repousse pas. Il se contente de me fixer, de me laisser croire que je le tiens.C’est grisant.C’est dangereux.Et je ne suis pas assez naïve pour penser que j’ai réellement gagné.— Tu es bien silencieux, Aleksandr, je murmure, mes doigts effleurant sa mâchoire avec une lenteur calculée. Ce n’est pas ton genre.Son sourire est imperceptible.— Continue, Eden. Sa voix est grave, presque un murmure. Fais-moi croire que tu contrôles la situation.Son ton en dit long.Il attend.Il attend que je me piège moi-même.Un frisson parcourt ma peau, mais je ne recule pas. Je glisse mes lèvres près de son oreille, juste pour le provoquer davantage.— Et si c’était toi qui avais déjà perdu ?Sa main bouge.Tellement rapide que je n’ai pas le temps de réagir.Ses doigts glissent le long de ma colonne vertébrale. Une caresse presque tendre…
EdenLa nuit s’est enfoncée dans mes veines.Je suis allongée sur lui, ses bras serrés autour de moi, ses doigts agrippés à ma peau comme s’il pouvait m’ancrer à lui pour l’éternité.Mais le monde ne nous appartient plus.Il s’effrite.Il s'effondre.Il saigne.Et nous avec.Aleksandr gémit dans son sommeil agité. Un son rauque. Arraché à sa gorge.Je glisse mes doigts sur son front trempé de sueur, tente d’apaiser les tremblements qui secouent son corps massif.Rien n’y fait.Il lutte contre des ennemis invisibles. Des fantômes que je ne peux pas chasser.Je le vois.Je le sens.La peur.Pas pour lui.Pour moi.Pour ce qu'il est prêt à devenir pour me garder en vie.---Un cri étouffé m’arrache au peu de calme qu’il reste.Roman fait irruption dans la chambre, le visage livide.Roman — Ils attaquent. Maintenant.Aleksandr se réveille en sursaut.Ses yeux s’ouvrent. Glacés. Bestiaux.En un mouvement brutal, il se lève, m'arrache à lui et m'entraîne.Tout est chaos.Tout est feu.---L
EdenLa nuit s’est enfoncée dans mes veines.Épaisse. Lourde. Poisseuse.Je suis allongée sur lui, son souffle râpeux effleurant ma gorge, ses bras serrés autour de moi comme si l’univers entier pouvait s’effondrer et qu’il ne lâcherait toujours pas.Ses doigts s’accrochent à ma peau, griffant presque, tentant de m'ancrer à lui, de me clouer à sa chair.Mais le monde ne nous appartient plus.Il s’effrite.Il s’effondre.Il saigne.Et nous avec.Aleksandr gémit dans son sommeil agité.Un son brut.Déchiré.Arraché de ses entrailles comme une bête blessée.Je glisse mes doigts tremblants sur son front trempé de sueur, caresse ses cheveux collés, tente d’apaiser les secousses incontrôlables qui traversent son corps massif.Rien n'y fait.Il se bat.Contre des ennemis que je ne peux pas voir.Contre des démons que je ne peux pas tuer.Je le vois.Je le sens.La peur.Pas pour lui.Pour moi.Pour nous.Pour tout ce qu’on pourrait perdre en une seconde.---Un cri étouffé déchire le peu de
EdenLe matin s'étire comme une lame lente sur nos corps enchevêtrés.Je suis réveillée par son souffle contre ma gorge, par le poids de sa jambe jetée sur les miennes, par la chaleur brute de sa présence. Il ne dort pas. Je le sens dans la tension de ses muscles, dans la cadence nerveuse de sa respiration. Aleksandr ne dort jamais vraiment. Pas quand il pense que je peux lui échapper.Je reste là, immobile, écoutant son cœur battre contre mon flanc. Chaque battement est un coup de marteau. Chaque respiration un serment silencieux.Mais le monde n’attend pas.Un coup à la porte. Trois frappes sèches, sans appel.Aleksandr se redresse aussitôt, son regard fauve, sauvage, prêt à tuer. Il se penche, attrape son arme posée sous l’oreiller, et son corps se place devant le mien dans un geste pur, instinctif : me protéger. Moi, avant lui. Toujours.Voix de Roman derrière la porte. — Chef. Ils sont là.Aleksandr serre la mâchoire. Ses yeux croisent les miens.Aleksandr — Reste ici.Eden — Non
EdenLe jour s’effrite sans éclat. La maison est devenue un tombeau silencieux, imprégné de la chaleur de son corps et de l’odeur de sa peau contre la mienne.Je reste allongée quelques secondes. Ou quelques heures. Le temps a perdu tout sens. Ma peau garde encore l’empreinte de ses mains, comme une cicatrice brûlante que je chérirai jusqu’à mon dernier souffle.Quand Aleksandr finit par se lever, c’est sans bruit. Il ramasse son pantalon, sa chemise arrachée, et se rhabille avec une lenteur presque douloureuse. Ses gestes sont précis, mécaniques, comme ceux d’un soldat avant la bataille.Je le regarde s’éloigner de moi et chaque centimètre qui nous sépare me fait l’effet d’une érosion. Un morceau de moi s’arrache.Eden— Reste encore.Ma voix est rauque, éraillée par le sommeil et l’amour. Elle claque dans l’air comme une prière.Il s’arrête. De dos. Ses épaules se contractent.Puis il se tourne, lentement. Ses yeux accrochent les miens, et tout ce que je lis dedans me coupe le souff
EdenNous avons enterré les corps dans le silence. Sans mots, sans prières. Juste de la terre retournée à la hâte, et le poids de ce qu’ils représentaient : une promesse de violence. Une déclaration de guerre.Chaque pelletée me déchirait les bras. Pas à cause de la douleur physique, non. Mais parce que j'avais l’impression de m’enterrer moi-même, centimètre par centimètre. Mon innocence. Ma paix. Mon illusion de pouvoir encore choisir une vie tranquille.Le jour s’est levé sans lumière.Le ciel est d’un gris sourd, dense comme la cendre, comme s’il savait ce qui s’est joué cette nuit. Comme s’il pleurait ce que nous venons de perdre : la paix illusoire, le répit, ce mince fil d’air qu’on appelait « avenir ».Mais je ne veux plus penser à eux. Ni à ceux qui viendront. Je ne veux plus penser à la fuite, aux pièges, au sang.Je veux lui.Aleksandr est resté debout devant la fenêtre. Les mains croisées dans le dos. La nuque tendue. Le dos droit comme un commandant devant un champ de bata
EdenJe ne dors pas. Pas vraiment. Il y a dans l’air quelque chose de trop tranchant pour le sommeil. Le feu crépite dans l’âtre, timide. Il éclaire les murs de pierre d’une lueur vacillante, projetant des ombres instables, comme des souvenirs en fuite. L’obscurité danse. Le silence est presque parfait. Mais il n’est pas doux. Il est tendu. Suspendu. C’est le silence de l’attente. Le genre de calme que seuls les fous peuvent appeler paix.Aleksandr dort à moitié. Son bras m’entoure, possessif, protecteur. Son souffle chaud s’épanche dans mon cou. Pourtant, même endormi, son corps est prêt. Je le sens. Chaque muscle en alerte, chaque battement de cœur comme un écho du danger. Il est né pour survivre. Et pour tuer, si besoin.Mon bras blessé pulse doucement. La douleur est là, constante, comme une voix basse qui ne cesse de murmurer. Je ferme les yeux. Inspire. Expire. Essaie de m’accrocher à cette chaleur contre moi. À cette bulle de sécurité factice.Mais il y a quelque chose. Quelque
EdenL’air vibre autour de moi, saturé du bruit des pales, du hurlement des moteurs, et de l’écho des coups de feu qui résonnent toujours, plus lointains. Ma poitrine se soulève, haletante. Je m’accroche à lui. Sa présence, son corps contre le mien, est la seule chose qui m’empêche de sombrer dans l’abîme. Je suis blessée. Pas seulement physiquement, mais profondément. Cette violence, ce chaos, tout est si... réel. Et pourtant, dans ses bras, je ne veux plus rien ressentir d’autre que la chaleur de sa peau contre la mienne.Je ne ressens plus mon bras. Juste des fourmillements insupportables, comme si la chair elle-même refusait d’accepter la blessure. La douleur est là, mais elle ne prend pas le dessus. Ce n’est pas grave. Pas tant qu'il est là. Tant qu'il me tient, je peux tenir.Je lève les yeux vers lui. Sa mâchoire est crispée, ses lèvres serrées. Il est pâle, les veines de son cou saillantes, battant dans un rythme qui ne me dit rien de bon. Mais il garde les yeux fixés sur le v
AleksandrLe sang bat à mes tempes, résonne contre mes tympans comme un tambour de guerre. La ville, ses bruits, ses hurlements, ses coups de feu… tout s’éloigne. Il n’y a plus qu’elle. Cette silhouette qui fend la foule, qui court vers moi avec une force que je croyais éteinte depuis longtemps. Eden.Je ne peux pas bouger. J’ai les bras en feu, le flanc en sang. J’ai reçu un éclat, peut-être plus. Mais ce n’est pas ça qui m’empêche d’avancer. C’est la peur. La terreur sourde que quelque chose la touche avant que je puisse la serrer contre moi.AleksandrCours. Continue. Je suis là.Elle est magnifique. Même au milieu du chaos, même dans cette nuit où tout pourrait s’arrêter, elle est lumière. Et je me rends compte que j’ai été idiot de croire que je pouvais la protéger en m’éloignant. Elle est ma seule protection contre l’ombre. Elle est mon feu.Je tends la main vers elle, une seconde trop tard.Le coup de feu claque.Je hurle.Aleksandr– Non !Mon cœur explose dans ma poitrine. Je
Eden Le bruit de mes pas résonne comme un appel à l’aide dans la ruelle sombre. Chaque mouvement semble amplifier le sentiment d’urgence qui bombarde mon esprit. Je suis à la recherche d’une issue, d’un abri, ou peut-être même d’un signe qui me dirait que tout ira bien. Mais dans cette cacophonie urbaine, chaque son semble une résonance de danger. Je tourne à gauche et me faufile dans une ruelle étroite, pressant mon dos contre le mur froid. Ma respiration est rapide, presque incontrôlable. Je scrute l’horizon, tentant d’attraper un aperçu de ce que je fuies. Les images des visages menaçants, de leurs intentions sombres, hantent chaque coin de mon esprit. Je me rappelle de l’adieu d’Aleksandr, de son regard déterminé, et de la promesse qu'il m’a faite. Chaque image me pousse à avancer. EdenJe dois le retrouver. Je dois savoir s’il va bien.Peu importe combien il est difficile de croire en une lumière au bout de ce tunnel, je refuse de laisser la peur m’écraser. Je me glisse der