Elena
J'avale difficilement ma salive alors qu'il continue de me dévisager. Ses sourcils froncés, la surprise se lit aussi dans son regard. Il ne s'attendait pas à me revoir après toute ces années. S'il est surpris de me revoir, cela signifie qu'il ignorait que je travaille dans cette agence. Alors, il n'a pas racheté cette entreprise dans le but de me faire du mal et cela me rassure un peu. ___ « Bonjour à tous. J'ose croire que vous savez déjà qui je suis et pourquoi je suis là. » se prononce t'il d'une voix légèrement grave et calme. Il me lance un dernier regard avant de détourner ses yeux de moi et de reporter son attention sur les autres employés. Quand on s'est séparés, il avait 25 ans et moi, 22. On était très jeunes et fous amoureux, j'ai toujours su qu'il sera un grand homme. Il avait de grands objectifs, Adrian voulait conquérir le monde et je sais qu'il a toujours cette rage de dominer le monde à travers ses compétences. ___ « Je suis Adrian de Luca et je suis sûr que ce n'est pas la première fois que vous attendiez ce nom. Je suis désormais votre nouvel employeur, le PDG de cette agence. » reprend t'il, avec petit sourire arrogant au coin de ses lèvres. Adrian dégage une aura très forte et surtout très mauvaise. Rien que le voir afficher ce souire arrogant, j'ai le sentiment que nous allons passer une très sale journée et que les jours à venir risquent d'être épuisants pour tous. ___ « Maintenant, nous allons passer à la présentation. » lance t'il. Il pose négligemment ses fesses sur le bord de l'un des bureaux, les bras croisés. Il me fixe comme un prédateur qui a retrouvé sa proie. Ma gorge se serre davantage et ma respiration s'accélère. Il commence à indexer mes collègues d'un signe de tête. Chacun se présente aussi brièvement possible. Puis, vient mon tour : la dernière personne et finit les présentations. Ma température corporelle monte et mes mains deviennent moites. Ma gorge se serre sous le regard indifférent de mon ex fiancé. Aurait-il oublié mon identité ? ___ « Je m'appelle Elena Morreau et je suis la... » ___ « J'étais... » me corrige t'il brusquement. Je me tue pendant quelques secondes, morte de honte. Il secoue légèrement sa tête pour me faire comprendre de reprendre ma présentation. Je ferme les yeux, respire un bon coup avant de me relancer. ___ « J'étais la directrice de la création de cette boîte » reprends je tout simplement. ___ « OK. Maintenant que la présentation est finie, passons à l'étape suivante. » Il se relève et se tient droit, les yeux qui dévisagent chacun de nous. ___ « Monsieur Gastaud m'a vendu votre savoir-faire, il m'a raconté à quel point vous êtes de bons employés. Mais, si vous étiez si performants que ça, cette agence serait encore à lui. » nous dit-il sur un ton moqueur. Nous sommes une belle équipe qui a tout pour faire exploser les chiffres de cette boîte. Si l'entreprise a fait faillite, c'est parce que monsieur Gastaud a eu à faire de mauvais investissements. ___ « Pour ne pas me retrouver un de ces jours dans cette même situation, j'ai décidé de vous laisser une seule chance de me prouver que j'ai eu tort de vous sous-estimer. » nous fait il savoir en appuyant bien sur le mot « Seule ». ___ « Vous n'allez pas le regretter monsieur. » lui promet un type derrière moi. ___ « Je l'espère bien. » ___ « Alors, nous gardons nos postes ? » interroge une autre personne. Il fait un simple grimace et me lance un bref coup d'œil. ___ « Tout le monde garde son poste, sauf... » Il pose ses yeux sur moi. Ma respiration se bloque, mon estomac se noue et mes battements cardiaques deviennent plus intenses. . ___ « Toi, je veux que tu sois mon assistante personnelle. » Cette déclaration vient m'assommer et me coupe pendant un instant du reste du monde. La bouche ouverte d’étonnement et le regard braqué sur lui, j'attends les bruits d'étonnement autour de moi, mais je suis encore sous le coup de la surprise. Assistante personnelle ? Adrian veut que je sois son assistante personnelle. C'est une blague, n'est-ce pas ? Au moment où je décide de me prononcer, il détourne son regard de moi et reprend la parole aussi rapide qu'un éclair, ne me donnant pas l'occasion de dire quoi que ce soit. ___ « Il va falloir qu'on revoye la décoration de certaines pièces. La couleur ne me plaît pas beaucoup. » ___ « Adrian, ce n'était pas ce qu'on avait convenu. » murmure la jeune femme à côté de lui. Je le vois incliner à peine sa tête vers cette dernière et je l'entends répliquer comme un murmure aussi : ___ « Je sais. » Je serre les poings, bouillante de colère face à ce changement brusque et surtout face à cette injustice. ___ « Je suis désolée de vous contrarier, mais je ne suis pas assez compétente dans ce domaine. Je suis très bien en tant que directrice de la création, devoir occuper une place où je n'y connais rien, c'est... » Il ne me laisse pas terminer ma phrase. ___ « J'ai décidé que tu seras mon assistante personnelle et cela ne va pas changer. Je trouverai bien quelqu'un de plus performante que toi pour ce poste. » Sa replique sonne comme une humiliation. Depuis son arrivée, il ne fait que me rabaisser à la moindre occasion. Il veut me faire payer pour un crime que je n'ai même pas commis. Adrian n'a pas tourné la page, même après toutes ces années. Il me nargue avec un sinsitre rictus qui déforme son visage en celui d'un prédateur face à sa proie. Il est le prédateur et moi, la proie. Mon sang fait un tour et la colère m'envahit. Je ravale ma salive et me retient d'exploser de rage. ___ « Pour tester vos performances, j'ai décidé de vous confier un marché. Une nouvelle entreprise qui vient de mettre un produit sur le marché a sollicité mes services pour la publicité de son produit. Vous aurez plus de détails demain. J'espère que vous donnerez tout pour garder vos postes. » nous informe t'il. Il fait une petite pause. ___ « Aussi, la décoration ne me plaît pas trop. Nous allons revoir cela, le moment venu. J'aime les couleurs sombres. » marmonne t'il à la fin. Il se retourne vers la jeune femme sans m'accorder encore de l'importance. ___ « Tu veux prendre la parole ? » ___ « Non. Mais nous devons avoir une sérieuse discussion Adrian. » insiste t'elle. Il hoche juste la tête et se dirige vers son bureau. La jeune femme et l'autre type le suivent. Quant à mes collègues, ils semblent emballés. Nous retournons à nos postes, je range mes effets personnels tandis qu'ils discutent. ___ « Non seulement il est beau, mais quand il s'exprime, il a un truc... un truc qui le rend encore plus charismatique et séduisant. Tu vois ? » ___ « Il fera un bon chef, je suis persuadé. Je pense qu'il est a le caractère d'une personne sévère mais au fond, c'est un bon type. » ___ « ... » Je soupire d’agacement en écoutant leurs commentaires. Je finis de ramasser mes effets de mon bureau, le cœur lourd et triste, je dois regagner mon nouveau bureau. ___ « Il a été bon avec tout le monde. » entends je une voix féminine dire. ___ « Vraiment ? Il a été bon avec tout le monde ? » rétorque je sèchement. Les autres qui ont vaqué après à leur occupation nous lancent quelques regards curieux, tandis que le groupe de commérage qui ne rate aucune occasion pour se réunir me dévisagent tous avec des regards compatissants. ___ « Vous avez peut-être oublié mon cas ? Cet homme m'a changé de poste, de la directrice à l'assistante. Je suis condamnée à ne presque rien faire. C'est humiliant. » continue je. ___ « Je te comprends Elena. Personne n'apprécierait un tel changement dans sa vie professionnelle. » répond une de mes collègues avec une voix touchée. Je respire profondément pour me ressaisir lorsque je me rappelle que ces pauvres gens ne sont pas responsables de ce qui m'arrive.Dans la peau de l'auteure Allongée dans son lit d’hôpital, le regard perdu sur le plafond immaculé, Elena a encore du mal à croire ce qui venait de se passer. Son cœur bat à tout rompre. Ses doigts caressent machinalement son ventre, encore invisible mais déjà porteur d’un monde nouveau.Et soudain, une évidence s’impose à elle : elle devait appeler Adrian. Sans même réfléchir, elle attrape son téléphone posé sur la table de chevet et compose son numéro. Il répond aussitôt, comme s’il l’attend.___ « Mon cœur ? »___ « Adrian… »Sa voix tremble d’émotion, de joie, d’un vertige doux et irréel.___ « Tu vas bien ? Tu as l’air... bizarre, tu m’inquiètes. »Elle inspire profondément, cherchant les mots justes, les plus simples.___ « Adrian… Je suis enceinte. »Un silence. Un long silence. Puis…___ « Tu… Tu es sérieuse ? » ___ « Oui. Je viens de l’apprendre. J’ai fait un malaise, Anna m’a amenée à l’hôpital… Et le médecin m’a dit que je suis enceinte de six se
Dans la peau de l’auteureDeux mois se sont écoulés depuis l’éclat de colère d’Adrian. Deux mois depuis cette confrontation glaciale qui met définitivement fin aux manigances de Roméo et Louise. Depuis, la vie reprend son cours avec une douceur surprenante, presque irréelle, comme si le calme est enfin autorisé à s’installer.L’entreprise prospère. Les chiffres montent, les partenariats se multiplient, les collaborateurs travaillent avec enthousiasme. Adrian, plus serein, reprend confiance. Il accepte même une invitation à un congrès international, un voyage d’affaires de quelques jours, seul, à l’étranger. Une première depuis longtemps. Elena, de son côté, trouve un équilibre. Les douleurs, les peurs, les doutes s’estompent, remplacés par une routine paisible et sincère.C’est dans cette atmosphère plus légère qu’un samedi ensoleillé pointe le bout de son nez. Le genre de journée où le ciel est d’un bleu éclatant, sans l’ombre d’un nuage. Elena et Anna décident d’en profiter pour sor
AdrianLe silence dans mon bureau est pesant, presque suffocant. Seul le tic-tac de l’horloge semble oser braver l’ambiance électrique. Roméo se tient devant moi, les bras croisés, le regard noir. Il n’a même pas pris la peine de frapper. Il est entré comme un voleur, comme s’il avait le droit d'être là. Il a osé réapparaître après tout le chaos qu'il a causé. ___ « Tu pensais vraiment que je n’allais pas comprendre que c’était toi ? » lancé-je, la voix basse, mais tranchante.Il ricane, pendant que moi je brûle de rage.___ « Tu t’imagines toujours que tout tourne autour de toi, Adrian. Tu penses que je n’ai que ça à faire ? Saboter ta petite entreprise, c’est ça ? »Je me lève lentement, la chaise crissant contre le parquet. Je m’avance vers lui, chaque pas appuyant ma colère que je contiens tant bien que mal.___ « Tu m’as trahi, Roméo. Toi… mon propre cousin. Tu crois que je vais laisser passer ça ? »Il fronce les sourcils, mais je vois son trouble dans le f
ElenaAprès la soirée d'hier dans son bureau, il a voulu qu'on aille dans sa villa et nous avons dormi, l'un à côté de l'autre. Le lendemain matin, l’air est différent.Je me réveille dans sa chambre, dans ses bras, et pour la première fois depuis longtemps… je respire sans douleur.Adrian dort encore, un bras posé sur ma taille. Son visage est détendu, paisible. Je pourrais rester là pendant des heures à le regarder, à mémoriser chaque trait, chaque ride au coin de ses yeux. Il est beau. Dangereusement beau. Mais surtout, il est à moi.Je me lève à contre-cœur, m’habille rapidement et descends préparer du café. Une routine simple, presque normale. Et pourtant, tout me paraît nouveau.Lorsque j’arrive à l’agence un peu plus tard, il est déjà là. En costard, cheveux en arrière, l’air parfaitement concentré. Mais dès qu’il me voit, il sourit. Et mon cœur rate un battement. Les souvenirs d'hier soir reviennent et je ne peux m'empêcher de sourire, comme une idiote. Il s’
ElenaLe lendemain, je me force à venir plus tôt. Comme si, inconsciemment, j’espérais croiser son regard, lui dire un mot… ou juste exister un peu dans sa journée. Et pour dire vrai, les mots de mon amie me hantent encore. Mais à 9h25, alors que je sors de la salle d’archives avec quelques dossiers, je m’arrête net. La porte de son bureau est entrouverte. Et à l’intérieur, je l’entends rire. Je serre les sourcils, les observant. Pas n’importe quel rire. Celui qu’il a quand il est vraiment amusé. Franc. Léger. Décontracté.Mon cœur rate un battement et la curiosité m'envahit. Je m’avance. Discrètement. Sans bruit. Et je la vois.La nouvelle employée du service marketing. Clara. Blonde platine, chemisier blanc trop cintré, et ce rire de dinde qui perce les murs.Elle est assise face à lui, un dossier à la main, mais elle ne regarde pas les documents. Elle le regarde lui. Comme s’il était la chose la plus drôle au monde. Et lui, il sourit comme un idiot. Il lui
Elena Cela fait trois jours qu’on s'évite au bureau. Trois jours que mon sommeil se trouble.Trois jours que mon téléphone reste muet. Pas un message. Pas un appel. Pas même un mot glissé sous la porte. Et lorsqu'on se croise à l'agence, nos rapports se limitent juste au travail. Je sens qu'il est froid et qu'il m'en veut de lui avoir fait des reproches. Le silence s’est installé comme une brume épaisse entre nous. Et je n’arrive pas à le dissiper. Je m’en veux. Il a peut-être séquestré un mec, mais il avait toutes les raison de le faire. Je suis dans la cuisine, assise à la table, une tasse de thé froide entre les mains, quand Anna débarque. Elle s’invite sans prévenir, comme toujours. Ses cheveux sont relevés en un chignon désordonné, et elle porte son vieux pull rouge troué à la manche.___ « On devrait te trouver un psychologue, tu ne penses pas ? Je te trouve bizarre dernièrement, mais tu ne me dis rien, non plus. Ou tu préfère que j'aille rendre visite à Adria