Chapitre 39 — Là où l’on recolle les morceauxIsisLe jour s’est levé sans qu’on s’en rende compte.Le ciel a pâli, comme un corps épuisé. Le vent ne souffle plus. Même les arbres semblent retenir leur souffle. Le monde est suspendu. Figé.Je suis assise sur les marches de l’escalier. Mes mains tremblent encore, tachées de sang séché. Mon flanc me lance, mon dos brûle. Ma peau est une plaie, mais elle respire encore.Et c’est ça, le plus étrange : je suis vivante.Vivre après ça.Pas seulement survivre. Vivre, malgré la mort dans les coins, la peur incrustée sous les ongles, malgré le goût métallique dans ma bouche.Le salon est un champ de ruines. Une chaise renversée. Des lames abandonnées. Du sang dans les interstices du parquet, séché, brun comme la rouille. Le feu s’est éteint, il ne reste que des braises éparses.Raven ne dit rien. Il range.Il n’a pas dormi. Moi non plus. Nos gestes sont lents, pesants, mais nécessaires. On s’est relayés pour veiller, même si plus personne ne v
Chapitre 38 — Là où le sang appelleIsisLe premier bruit est sourd.Un craquement.Puis un autre. Plus proche.Un éclat de bois sec, arraché net.Je me redresse.Ma gorge se serre.Raven, à l’étage, m’a déjà sentie bouger. Il descend en silence, aussi fluide qu’une ombre.Il hoche la tête. Pas besoin de mots.Ils sont là.La nuit se tend. Comme une bête qui retient son souffle.Je prends la lame dissimulée dans la cloison. Le froid du métal me réveille plus vite qu’une claque.Raven vérifie les pièges du couloir. Tout est en place. Tout est prêt.Mais on ne l’est jamais vraiment.Un choc contre la porte.Puis un second.Et un rire.— Petite Isis… tu as laissé la lumière allumée. C’est pas prudent.Maddox.Je sens mes poings se crisper. Mon cœur ralentir, au lieu d’accélérer.C’est comme ça chez moi. Le sang devient glace quand il faut tenir.Je murmure à Raven :— Attends qu’ils entrent. On ne gaspille rien. Pas un coup.Il acquiesce. Sa main serre la mienne, un bref instant.Puis la
Chapitre 37 — Là où le poison prend racineIsisLa nuit est noire, compacte. Une chape de suie sur nos têtes.Il n’y a pas de lune.Seulement les craquements du bois sous nos pas et le sifflement discret du vent à travers les interstices des volets.Raven est à l'étage. Je garde le rez-de-chaussée.Je crois que je commence à m’habituer à cette tension sourde. Ce fil tendu entre l’instinct et la mémoire. Mais ce soir, il y a autre chose.Un vide soudain.Puis un pas.Un seul.Calme. Lent.Je me fige.Je tends l’oreille.Un autre pas.Pas de groupe. Pas d'assaut.Un seul homme.J’empoigne la lame cachée derrière la poutre, prête à bondir. Mais la voix me cloue net.— Isis.Mon cœur explose dans ma poitrine. Ce n’est pas une hallucination.C’est lui.— Pas besoin de hurler. Je suis seul.Je m’approche lentement, les doigts crispés sur le manche de la lame. Mon souffle court. Mon ventre noué.La porte grince. Il est là.Maddox.Dans l’encadrement, calme, les bras ouverts. Pas d’arme visib
Chapitre 37 — Là où le poison prend racineIsisLa nuit est noire, compacte. Une chape de suie sur nos têtes.Il n’y a pas de lune.Seulement les craquements du bois sous nos pas et le sifflement discret du vent à travers les interstices des volets.Raven est à l'étage. Je garde le rez-de-chaussée.Je crois que je commence à m’habituer à cette tension sourde. Ce fil tendu entre l’instinct et la mémoire. Mais ce soir, il y a autre chose.Un vide soudain.Puis un pas.Un seul.Calme. Lent.Je me fige.Je tends l’oreille.Un autre pas.Pas de groupe. Pas d'assaut.Un seul homme.J’empoigne la lame cachée derrière la poutre, prête à bondir. Mais la voix me cloue net.— Isis.Mon cœur explose dans ma poitrine. Ce n’est pas une hallucination.C’est lui.— Pas besoin de hurler. Je suis seul.Je m’approche lentement, les doigts crispés sur le manche de la lame. Mon souffle court. Mon ventre noué.La porte grince. Il est là.Maddox.Dans l’encadrement, calme, les bras ouverts. Pas d’arme visib
Chapitre 35 — Là où la guerre s’insinue dans les cœursIsisIl a barricadé les fenêtres.Vissé les verrous. Glissé un couteau dans chaque pièce, sans un mot. J’ai suivi ses gestes en silence, notant chaque détail, chaque soupir retenu.Il marche vite, concentré. Mais dans la tension de ses épaules, je sens la peur. Pas pour lui. Pour moi.Quand il referme la dernière trappe et éteint la lumière, seul le feu continue de vaciller, projetant des ombres mouvantes sur les murs.Il ne me regarde pas encore.Moi non plus.Mais je sens que ça monte. L’angoisse. L’envie de s’ancrer quelque part. De se retrouver. Avant que tout n’éclate.— Raven…Il s’arrête. Lentement. Il ne tourne pas tout à fait la tête, mais je sais qu’il écoute. J’avance. Pieds nus sur le parquet. Le froid me mord, mais je m’en fiche.Je m’arrête juste derrière lui.— Tu ne dors pas, murmuré-je.— Je peux pas.Je pose ma main sur sa nuque, doucement. Il frissonne. Il ne recule pas.— Moi non plus.Il finit par se tourner v
Chapitre 34 — Là où le passé cogne à la porteRavenUn bruit sec me sort de cette bulle.Trois coups. Pas hésitants. Pas pressés. Trois coups nets, parfaitement espacés.Je redresse la tête. Isis se fige. Nos doigts se délient sans un mot. Une seconde à peine, et la chaleur de sa main me manque déjà.Mon regard se tourne vers la porte. Elle est close. Mais je sens le souffle du danger glisser dessous.— Tu attends quelqu’un ? demandé-je à voix basse.Elle secoue la tête. Son visage a pâli. Pas de peur. De tension. D’instinct. Elle sent, elle aussi.Je me lève. Silencieusement. Mes pas sont lourds sur le vieux parquet. J’attrape mon couteau, dissimulé sous le manteau jeté sur la chaise, puis je m’approche lentement de la porte.— Reste derrière, murmuré-je.— Je t’en prie, ne fais pas de bruit. Écoute d’abord.Elle a raison. La nuit dehors est trop calme. Le feu continue de crépiter derrière nous, incongru dans cette attente suspendue.Un quatrième coup, plus fort cette fois.Et une vo