MILA
Il est encore là.
Assis sur le bord du lit. Silencieux. Trop calme.
Comme s’il attendait que la tempête passe.
Mais je ne suis pas une tempête.
Je suis un putain d’ouragan.
Et cette fois, je vais tout balayer.
Je me tiens droite, les bras croisés, le dos raide, comme si je pouvais ainsi contenir l’explosion intérieure. Comme si j’avais encore assez de contrôle pour rester debout alors que tout en moi hurle. Mes tripes, ma gorge, ma peau.
Je le regarde. Il est trop beau. Trop calme. Trop réel.
Et ça me donne envie de le gifler.
— Tu devrais partir, je lâche.
Il tourne la tête. Lentement. Comme s’il venait d’émerger d’un rêve. Ou d’un cauchemar. Son regard accroche le mien. Un éclat de surprise. Puis l’inquiétude. Et enfin… la résignation.
— Mila…
— Je t’ai dit de partir.
Ma voix est plus tranchante que je ne l’aurais voulu. Mais je ne recule pas. Je ne tremble pas.
Pas encore.
Il se lève. Pieds nus sur le tapis beige de l’hôtel. Le dos nu. Les marques de mes ongles encore visibles.
Des preuves.
Des aveux.
Et moi, je les déteste.
— Qu’est-ce que tu veux que je fasse ? Que je reste et qu’on prétende que ça change rien ? Ou que je parte et que tu me haïsses pour ça ?
Je le fixe.
Et je mens.
— Je te hais déjà, je crache.
Il sursaute. Mais il ne recule pas. Et c’est ça le pire. Il croit encore qu’il peut réparer. Qu’il peut adoucir ce qui est déjà brisé.
Alors je continue. Je frappe avec les mots. Je détruis avant d’être détruite.
— Tu veux des limites, Nolan ? Parfait. En voici une. Ma chambre. Mon cœur. Mon corps. Barrière infranchissable. Efface-moi. Comme un dossier classé sans suite.
Il serre les poings. Sa mâchoire se crispe.
Il encaisse.
Mais il ne fuit pas.
— Tu ne penses pas ce que tu dis, souffle-t-il.
— Si. Je le pense. Je pense que je suis une conne d’avoir cru que t’étais différent. Que t’allais pas redevenir l’homme des protocoles dès que le soleil se lèverait.
Je croise les bras plus fort.
Je me retiens de hurler.
De pleurer.
De m’effondrer.
Je suis en colère. Mais pas contre lui.
Pas vraiment.
Contre moi.
Parce que je me suis laissée aller à rêver. À vouloir.
Et c’est ça, le pire poison.
— Je t’ai laissé entrer, Nolan. Je t’ai laissé voir ce que personne ne voit. Et toi ? Tu veux me recoller une étiquette et tracer une ligne entre nous comme si on était juste deux collègues qui ont merdé une nuit.
Il ouvre la bouche. Mais je le coupe.
— Tu veux que je fasse quoi, Mila ? Que je brûle tout pour une nuit ?
Je le fixe droit dans les yeux.
— Pour moi.
Et ce silence… ce putain de silence me tue.
Parce qu’il ne répond pas.
Parce qu’il n’a rien à dire.
Et parce que je viens de comprendre : je ne suis pas assez.
Pas pour lui.
Pas pour ce monde-là.
Alors je me redresse. Plus fière encore. Plus forte que je ne le suis vraiment.
— Sors d’ici, je répète plus bas. Avant que je dise des choses que je regretterai.
Il reste là, figé.
— Tu crois vraiment que c’est ce que je veux ? Que je m’en fous ?
— Je m’en fous de ce que tu veux, Nolan. C’est moi que je dois protéger, maintenant. Alors sors.
Il baisse la tête. Lentement. Comme si mes mots l’avaient frappé de plein fouet.
Il s’éloigne , ramasse sa chemise. L’enfile sans précipitation. Chaque geste est maîtrisé. Contrôlé.
Et je déteste ça.
Parce que moi, je suis en morceaux.
Et lui… il se rhabille.
Il ouvre la porte. L’air du couloir s’infiltre dans la chambre, plus froid que je ne l’aurais cru. Il est sur le seuil. Sur le fil.
Avant de sortir, il murmure :
— Je suis désolé.
Je souris. Sans joie. Sans force.
— Moi aussi.
Et il part.
La porte claque.
Je reste seule. Immobile.
Face au miroir.
Face à moi-même.
Et cette fois, je pleure.
Pas parce qu’il est parti.
Parce que je l’ai laissé entrer.
Parce que j’ai cru qu’il resterait.
Parce que j’ai voulu y croire.
Parce que j’ai oublié, l’espace d’une nuit, que dans notre monde, le feu ne réchauffe pas.
Il consume.
Je m’effondre sur le lit, là où il était encore il y a quelques instants.
Je sens son odeur sur l’oreiller.
Je sens encore ses doigts sur ma peau.
Et je voudrais tout effacer.
Ou tout recommencer.
Mais il est trop tard.
Et ce matin, c’est moi qui suis réduite en cendres.
MILAIl est encore là.Assis sur le bord du lit. Silencieux. Trop calme.Comme s’il attendait que la tempête passe.Mais je ne suis pas une tempête.Je suis un putain d’ouragan.Et cette fois, je vais tout balayer.Je me tiens droite, les bras croisés, le dos raide, comme si je pouvais ainsi contenir l’explosion intérieure. Comme si j’avais encore assez de contrôle pour rester debout alors que tout en moi hurle. Mes tripes, ma gorge, ma peau.Je le regarde. Il est trop beau. Trop calme. Trop réel.Et ça me donne envie de le gifler.— Tu devrais partir, je lâche.Il tourne la tête. Lentement. Comme s’il venait d’émerger d’un rêve. Ou d’un cauchemar. Son regard accroche le mien. Un éclat de surprise. Puis l’inquiétude. Et enfin… la résignation.— Mila…— Je t’ai dit de partir.Ma voix est plus tranchante que je ne l’aurais voulu. Mais je ne recule pas. Je ne tremble pas.Pas encore.Il se lève. Pieds nus sur le tapis beige de l’hôtel. Le dos nu. Les marques de mes ongles encore visibles
MilaIl commence à bouger.Doucement. Puis plus fort.Ses hanches claquent contre les miennes.Mes ongles griffent son dos.Mes jambes le serrent.Je veux qu’il entre plus encore.Plus fort.Plus loin.Il grogne. Il jure.Il gémit mon prénom. Encore. Encore. Encore.Il me retourne. Il me prend par derrière.Je colle ma poitrine au drap.Et il me possède avec une force animale.Puis il me ramène à lui.Assise sur ses cuisses.Je le chevauche. Je le regarde droit dans les yeux.Et c’est moi qui le prends.Il me serre. Il m’embrasse à la gorge. À la bouche. À l’âme.— Tu ne partiras plus, je murmure.Il sourit. Tremblant.— Jamais.Quand on jouit, ensemble, c’est violent.C’est viscéral.C’est trop.Et pourtant…On recommence.Encore.Plus tard.Plus doucement.Comme une pluie après la foudre.Quand l’aube glisse derrière les rideaux, il me tient toujours dans ses bras.Et cette fois, je sais.Je ne suis plus seule.9h06 – Chambre 1322 – Hôtel de TokyoJe suis réveillée, mais je ne bouge
Mila6h58 – Hôtel de transit TokyoLa lumière du matin est grise et lourde.Comme moi.Je n’ai pas fermé l’œil.Le vol s’est terminé dans un silence épais. Professionnel. Irréprochable.Nolan n’a pas croisé mon regard une seule fois.Mais je l’ai senti.Je l’ai senti derrière moi pendant le débarquement.Je l’ai senti quand il a effleuré mon épaule dans le couloir de sortie.Je l’ai senti surtout… quand il m’a ignorée volontairement dans la navette.Et maintenant, je suis là.Dans cette chambre impersonnelle, étage 12, odeur de désinfectant et de fatigue collée à la peau.Je me suis effondrée sur le lit sans enlever mes talons.J’ai les jambes encore tendues.Le ventre noué.Le sexe douloureux de ce qu’il n’a pas terminé.Il m’a laissée là-haut.Incomplète.Explosive.Et je le hais pour ça.Mais je le veux encore plus.Je ferme les yeux.Je revois son visage dans la lumière du cockpit.Sa mâchoire tendue.Son regard au bord de la rupture.Il avait craqué.Pour un instant.Pour un batt
Nolan4h26 – Cabine de repos – Vol 438 Ciel de SibérieJe suis debout, immobile, le dos contre la cloison métallique de la cabine, les bras croisés, le regard vissé à la porte.Elle est là.Derrière.Allongée, peut-être.Ou juste éveillée dans le noir, tendue comme une corde.Mila Rives.Son nom cogne à l’intérieur de ma poitrine comme un rappel constant, un battement régulier. Ce prénom m’obsède. M’infiltre. Me suit dans chaque couloir, chaque espace clos, chaque zone d’ombre.Je m’étais juré de ne jamais recommencer.Pas avec une membre d’équipage.Pas avec une femme qui me regarde comme si elle voulait me faire tomber.Et pourtant je suis là.Comme un con.Mes mains tremblent. Pas de peur. De contrôle. De désir. J’ai eu des femmes. Trop. Des corps offerts, des regards dociles. Mais Mila n’a rien de tout ça. Elle me défie. Me regarde comme si elle m’attendait déjà.Et dans ce foutu cockpit, j’ai failli craquer.J’ai senti la chaleur de sa peau, la tension dans sa gorge, cette odeur
MilaSes doigts s’attardent sur ma hanche. Juste un instant. Puis il s’éloigne d’un pas.— Retournez à l’arrière. J’ai besoin d’un œil dans la cabine de pilotage. L’équipage se coordonne mal, et j’ai pas envie qu’on perde le nord ce soir.Il dit ça comme s’il parlait de navigation.Mais sa voix...Elle est plus rauque.Moins en contrôle.Je me redresse. Nos regards se croisent. Longs. Silencieux. Je veux lui dire quelque chose. Je ne sais pas quoi. Que je brûle ? Que je le sens faillir ? Que je suis prête à tomber, si c’est lui qui me rattrape ?Mais je reste droite.— Reçu, commandant.Je pivote lentement et m’éloigne. Mes pas résonnent dans le couloir comme un battement de tambour.Je sens son regard sur moi jusqu’à la dernière seconde.Et ce que j’ai lu dans ses yeux, ce que j’ai senti dans ses bras...Ce n’était pas du contrôle.C’était un dérapage.Un souffle de désir.Une faille.Et moi, Mila Rives,je suis prête à m’y engouffrer.3h12 – Cockpit – Vol 438 – Altitude de croisière
MilaJe reste plantée là, stupide, avec l’impression qu’il vient de me frôler la peau sans lever le petit doigt. Je cligne des yeux, puis secoue la tête. Il faut que je me concentre. L’équipage s’active. Zoé entre à son tour, avec ce sourire mielleux qu’elle ne réserve qu’aux situations où elle sent une proie à partager.– Il est encore plus froid que ce qu’on racontait, souffle-t-elle, moqueuse. Mais canon… Tu ne trouves pas ?Je hausse les épaules.– Peut-être. Je le connais pas encore.Mensonge.Je le connais déjà trop.Elle ricane doucement, comme si elle flairait déjà quelque chose. Zoé est fine. Belle. Toxique. Elle a le regard d’une chatte affamée et les griffes prêtes. Elle sent quand une autre femme brûle pour un homme. Et elle ne recule jamais.– J’espère qu’il n’a pas de préférence. Ce serait dommage qu’il ne goûte pas à tout ce qu’on peut lui offrir.Elle me lance un regard en coin, provocateur, puis disparaît vers l’arrière de la cabine.Je reste là, seule, le souffle cou