Chapter: Chapitre 46 — Le matin des certitudesLuciaLa lumière du matin filtre à travers les rideaux épais, dorant l’air de la chambre d’une douceur trompeuse. C’est une lumière de paix, presque irréelle, qui ne sait pas encore ce qui s’est passé dans cet espace fermé quelques heures plus tôt.Je me réveille dans le creux de son bras, ma joue contre son torse chaud, ma peau collée à la sienne. Il respire lentement, profondément, comme un homme qui dort sans crainte. Moi, je n’ose pas bouger, prise entre l’envie de rester là et celle de me soustraire à cette proximité.Sur mes lèvres, je sens encore ce goût de sel et de chaleur. Dans mon ventre, une langueur lourde, chaude, qui pulse doucement comme un souvenir trop vif.Je tente de m’écarter. Son bras se resserre.— Bonjour… murmure-t-il, la voix basse, presque rauque, comme si les mots étaient encore gonflés de sommeil et d’autre chose, plus dense.Je détourne les yeux.La gêne m’envahit d’un coup. Les images de la nuit s’imposent ma voix étranglée, mes gestes affolés, mes cris
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Chapter: Chapitre 45 — L’envers du silenceLuciaIl descend lentement, bouche à bouche, souffle à souffle, avec cette précision presque déchirante d’un homme qui ne cherche plus à posséder mais à sonder, à inscrire dans ma chair des vérités plus anciennes que la mémoire, plus profondes que le nom et chaque frôlement de ses lèvres est une note longue, grave, enroulée autour de mes nerfs, une vibration qui me dilate de l’intérieur, me rend poreuse, disponible, prête.Il explore, il revient, il insiste, sans urgence, sans but, comme s’il me connaissait déjà mais voulait tout de même tout réapprendre, tout vérifier, tout retoucher, comme s’il avait besoin que mon corps lui confirme ce que ma bouche refuse encore de dire et à chaque passage de sa langue, c’est un pan entier de mon silence qui se fissure.Je retiens mon souffle, mais c’est inutile.Je suis ouverte , offerte , écartelée entre deux silences l’un d’avant, froid, de façade, et l’autre qui vient, chaud, intime, abyssal et je sais que je suis en train de basculer dans ce
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Chapter: Chapitre 44 — Ce que le corps avoueLuciaLe matin s’est glissé sans bruit entre les persiennes.Une lumière pâle, presque timide, caresse les draps froissés, souillés, épars.Leur odeur flotte encore dans l’air, mélange de sueur, de peau, de foutre séché.Je sens tout. Trop.J’ouvre les yeux sur un monde trop réel.Trop nu. Trop silencieux.Et mon corps… mon corps résonne encore. Il vibre, douloureux et affamé, saturé de souvenirs qui ne sont pas encore devenus du passé.Mon souffle est chargé d’images.Ma peau, moite sous le tissu, conserve les empreintes de ses mains, la morsure de ses dents, l’empreinte de son sexe en moi.Mes cuisses sont lourdes, collées, encore ouvertes malgré la nuit.Et chaque repli de moi-même pulse lentement, comme si la nuit refusait de finir.Je suis nue. Encore.Nue sous les draps, nue dans ma tête, nue dans ma honte.Et lui…Michel est là.Allongé sur le flanc, appuyé sur un coude, me regardant avec cette même intensité tranquille, souveraine, presque insolente.Comme s’il attendait.Comm
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Chapter: Chapitre 43 — L’Insomnie des corpsLuciaJe ne dors pas.Ou peut-être que si. Juste assez pour sombrer à la lisière d’un rêve brûlant, un songe gorgé de sa peau, de sa voix, de ses reins qui cognent, infatigables, contre mon bassin.Juste assez pour que mes membres s’abandonnent et que mon esprit vacille encore dans l’écho de ses gestes, de ses mots, de sa bouche sur moi.Et pourtant, tout en moi vibre. Tout en moi est encore tendu, à vif, arqué vers lui.Le drap poisse entre mes cuisses, collé à ma peau humide, inondée de moiteur, de foutre, de sueur salée. Mon corps s’alanguit, mais mon ventre, lui, demeure habité, tendu, prêt.Mes seins sont sensibles, gonflés de désir. Mes tétons pointent sous le tissu froissé. Mon souffle est ralenti, mais mon cœur, lui, cogne.J’ai joui. Oui. Longtemps. Fort.Mais il reste quelque chose en moi d’insatisfait. Une attente, sourde, profonde, inaltérable.Comme une faim que rien ne peut vraiment combler.Et puis je le sens.Avant même qu’il ne parle.Un frémissement du matelas, la ch
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Chapter: Chapitre 42 — Les Cendres ChaudesLuciaJe flotte.Entre deux respirations, entre le souvenir et le réel, entre les cendres encore tièdes de la nuit et le feu brutal du matin qui revient. Mes paupières sont closes, mais mon ventre, lui, s’éveille sous une tension familière, une chaleur pressante, une fièvre carnée qui me fait déjà frissonner. Je ne bouge pas, je retiens mon souffle, mais je sens tout, je devine la position de son corps contre le mien, le drap repoussé, sa peau nue, son sexe durci contre mes fesses, son souffle rauque qui racle ma nuque comme un souffle de bête en chasse.Ses mains remontent lentement, comme dans un rêve répété mille fois, ses doigts effleurent le creux de mon genou, la pliure de ma cuisse, la ligne de ma hanche, et je tremble. Il ne parle pas, pas encore. Il me touche. Il m’effleure comme s’il me retrouvait, comme s’il avait passé des années à m’attendre. Puis sa bouche, brûlante, humide, se referme sur ma nuque, et je gémis, doucement, le dos cambré.— Mmh…Je veux parler, protester
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Chapter: Chapitre 41 : Je le veuxClaraIl ne dit rien, mais tout son corps parle, il me contemple comme une chose rare, comme une offrande arrachée au refus, et pourtant désirée, je vois dans ses yeux la morsure du doute et la certitude brute, je suis là, offerte, tendue, haletante, et je voudrais fuir, encore, mais mes bras l’enlacent— Tu dis non… mais tu restes, murmure-t-il, sa bouche si proche de mon oreille que je frémis— Lâche-moi…— Regarde-moi, LuciaJe ferme les yeux plus fort, je ne veux pas, je ne peux pas, mais ses mains glissent déjà le long de mes côtes, ses paumes chaudes effleurent mes flancs, mes seins, il m’explore avec lenteur, comme s’il voulait imprimer ma peau sous ses doigts, il me descend doucement vers le lit, et moi je ne résiste plusJe suis posée là, allongée, nue, écartée, la gorge sèche, les cuisses frémissantes, et lui me regarde encore, il reste debout un instant, à me contempler, le souffle court, les yeux noirs, et je vois le désir durcir son sexe sous le tissu, je le vois se défai
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Chapter: Chapitre 28 — Le retour au solNolanLa petite maison de ma mère n’a pas changé. Même la haie, taillée au cordeau, semble avoir résisté à toutes les saisons… et à toutes les tempêtes de voisinage. J’ai toujours soupçonné qu’elle faisait exprès de la couper un peu plus haut que celle de Madame Roche d’à côté, juste pour la contrarier.Je coupe le moteur et reste là un moment, les mains sur le volant, à écouter le cliquetis du moteur qui refroidit. Le silence, ici, n’est pas le même qu’en altitude. C’est un silence qui sent la terre humide, les feuilles écrasées et le café en train de passer.Elle est là, derrière la vitre de la cuisine, un torchon à la main, la même posture que quand j’avais douze ans et que je revenais d’avoir fait une bêtise. Ses yeux disent "Tu crois que je ne sais pas, mais je sais."Quand elle m’ouvre, elle ne dit rien tout de suite. Elle m’embrasse sur la joue comme on prend la température d’un enfant malade.— Tu as l’air fatigué, dit-elle enfin.— Ça va.— Tu mens comme ton père, et c’est pa
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Chapter: Chapitre 27 — L’homme qui regardait le cielNolanIl y a dans le bruit sourd d’un réacteur au sol quelque chose qui me ramène à l’enfance une vibration profonde presque organique qui traverse la cage thoracique et vient frapper ce point flou entre le cœur et l’estomacJe l’ai toujours aimée cette secousse même avant de savoir pourquoiJ’avais dix ans la première fois que j’ai vu un avion décoller je ne veux pas dire un avion dans le ciel non je parle d’un de ces monstres d’acier qui quitte le sol comme un défi lancé à la pesanteurOn était venus chercher mon oncle à l’aéroport ma mère portait sa robe bleue celle qu’elle mettait les jours de bonnes nouvelles il faisait chaud et j’avais les mains moites je me souviens du tarmac luisant des vitres épaisses des silhouettes floues derrière les vitresEt puis soudain le grondementJe m’étais figéLe 747 a soulevé ses flancs lentement puis plus vite et j’ai su c’était ça ce que je voulais faire ce que je devais devenirCe jour-là je n’ai rien dit mais depuis ce jour-là tout ce que j’a
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Chapter: Chapitre 26 — L’endroit où tout s’est briséLÉAJe ne la lâcherai pas.Pas cette fois.Elle est là, affalée sur le canapé comme un pantin vidé, et je jure que si je la laisse s’enfoncer une journée de plus dans ce mutisme, elle ne reviendra jamais.Son sweat est trop large. Ses cheveux sont attachés n’importe comment. Ses joues se creusent un peu plus chaque jour, comme si elle tentait de disparaître par les bords.Et ses yeux… vides. Éteints.Je la reconnais à peine.— Mila, tu peux pas continuer comme ça.Pas de réponse. Bien sûr.Je m’installe en face d’elle. Je pose un paquet de chips sur la table basse , sel et vinaigre ce sont ses préférées.Elle ne les regarde même pas.Alors je tape là où ça cogne. Pas par cruauté. Par nécessité.Je refuse de la regarder se dissoudre.— Tu crois que c’est normal de t’effondrer à ce point pour un mec qui a merdé ?— …— Tu crois que t’es la seule à avoir eu le cœur piétiné ? Moi aussi j’ai été trahie. J’ai hurlé, pleuré, foutu sa brosse à dents dans les chiottes. Toi tu fais quoi ? Tu di
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Chapter: Chapitre 25 — Ce qu’on ne dit qu’à une amieMILAIl a sonné deux fois.Je suis restée figée dans l’entrée, à quelques mètres de la porte, le cœur bloqué dans la gorge.Je savais que c’était lui.Je reconnais sa manière de sonner. Courte. Rythmée. Sans insistance, mais avec cette tension silencieuse, comme s’il retenait son souffle derrière la porte.Je n’ai pas bougé. Je n’ai pas ouvert.Il est resté là une minute, peut-être deux. Puis j’ai entendu ses pas s’éloigner dans le couloir.Pas un mot. Pas un message. Rien.Il essaie. Je le vois bien.Il laisse des signes. Il passe déposer un sachet de viennoiseries sur mon paillasson. Il m’envoie des captures de paysages vus du cockpit, avec juste : « Ça m’a fait penser à toi. »Mais je ne peux pas. Pas maintenant.Pas alors que je n’arrive même plus à respirer quand je pense à lui.Alors quand Léa, ma meilleure amie, a débarqué sans prévenir avec son énergie ravageuse, un grand sac de chips, et ce regard mi-inquiet mi-déterminé, j’ai presque pleuré.— Tu vas parler, Mila. Aujourd’hu
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Chapter: Chapitre 24— À distance égaleMILALa maison est silencieuse.Mais ce n’est pas un silence neutre ou reposant.C’est un silence qui pèse, qui serre la gorge, un silence de cendre et d’abandon.Trois jours.C’est tout ce qu’ils nous ont donné.Trois jours pour se "reposer", disent-ils, après un vol long-courrier.Trois jours enfermés dans un espace trop familier devenu étranger.Trois jours à marcher dans les décombres d’une histoire qu’on a à peine commencée et déjà ruinée.Je suis rentrée la première.Il m’a laissée partir sans un mot après l’atterrissage. Et moi, je n’ai pas regardé en arrière. J’ai attendu qu’il entre à son tour, plus tard, dans la nuit.Il n’a pas frappé. Pas parlé. Juste un soupir. Un frôlement.Depuis, on vit ensemble comme deux étrangers qui connaissent trop bien les recoins de l’autre.J’ai retiré mon uniforme comme on arrache une peau qu’on ne supporte plus.J’ai glissé mon corps dans ce vieux pull informe, large, doux, familier, presque maternel.C’est devenu une armure. Une forteresse.
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Chapter: Chapitre 23 — Les Échos du Silence MILAJe marche le long du couloir de l'avion, chaque pas résonnant comme un écho de ma décision. Le monde autour de moi est un flou indistinct de visages assis, de murmures lointains, mais rien de tout cela ne parvient à percer la bulle de solitude dans laquelle je me suis enfermée. Les annonces des commandes clignotent sur le tableau de bord, mais aucun de ces mots ne semble avoir de sens. Tout ce qui importe, c'est que je m'éloigne de lui, même si nous sommes enfermés dans la même cabine à des centaines de pieds au-dessus du sol.Je sens encore sur moi le regard de Nolan, ce mélange de désespoir et de compréhension tardive. Je l'ai laissé derrière, seul avec ses regrets, tout comme je me sens seule avec mes choix. Chaque pas que je fais dans l'allée est une victoire amère, un rappel cruel de ce que j'ai laissé derrière moi. Les lumières artificielles de l'avion éclairent mon chemin, froides et impersonnelles, reflétant parfaitement l'état de mon cœur.Je me remémore notre dernier éc
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Chapter: Chapitre 13 — Les murmures derrière les portesÉlise ClaraLe bureau est vaste, plus lumineux que je ne l’imaginais, mais il a cette froideur d’endroit où rien n’est laissé au hasard. Chaque objet est parfaitement aligné, chaque surface impeccable. Une table immaculée, un ordinateur dernier cri, un fauteuil qui respire le confort… et, à travers la cloison vitrée, la silhouette de Gabriel De Rohan, penché sur des documents comme si le monde extérieur n’existait pas.Je n’ai pas encore posé mon sac que déjà les regards se posent sur moi. Pas discrets, pas furtifs. Plutôt ce genre de coups d’œil qui évaluent, comparent, décortiquent. Certains glissent sur mes épaules, d’autres sur mes mains… et, forcément, sur mon ventre à peine arrondi.Des murmures suivent.Deux femmes de l’équipe administrative passent devant la porte, ralentissant ostensiblement. L’une, brune tirée à quatre épingles, penche la tête vers l’autre.— C’est elle ? souffle-t-elle, croyant sans doute que je n’entends pas.— Oui… La nouvelle assistante de De Rohan.— Eh
ปรับปรุงล่าสุด: 2025-08-11
Chapter: Chapitre 12 — Le mouvement des piècesGabrielJe n’ai pas dormi de la nuit.Pas à cause des chiffres qui s’entassent sur mon bureau, ni des deals qui se jouent en coulisses. Ce n’est pas l’inquiétude qui m’a tenu éveillé, mais une présence. Invisible. Persistante.Élise Clara Rivière.Ce nom est resté dans mon esprit comme une braise sous la cendre, discrète mais brûlante.Je ne devrais pas penser à elle. Pas ainsi. Pas comme un besoin. Et pourtant, il y a dans sa façon d’être… quelque chose d’indéfinissable. Une ancre, peut-être. Ou un rappel que je ne suis pas que cet homme froid que tout le monde croit connaître.Je fixe le téléphone posé sur le coin gauche de mon bureau. Une ligne directe avec les décideurs, les hommes que je peux faire ou défaire d’un mot. Et aujourd’hui, ce mot n’a rien à voir avec la finance, les contrats ou les marchés.Je décroche.— Martin.Mon ton est calme, mais il y a dans ma voix cette note que même les plus coriaces redoutent.— Oui, Monsieur De Rohan ?— J’ai réfléchi. Je veux une nouvelle
ปรับปรุงล่าสุด: 2025-08-11
Chapter: Chapitre 11 — Les Mères saventLa mère d’ÉlodieÉlodie est montée se reposer. Elle a déclaré : « Juste dix minutes »… Ce qui, en langage adolescent, signifie plutôt : laissez-moi m’effondrer en silence pendant trois heures, minimum.Je ne l’ai pas retenue. Je n’ai posé aucune question. Elle avait besoin de solitude, de silence, d’un moment pour assimiler ce qu’elle venait d’entendre. Et je la connais, ma fille. Lorsqu’elle quitte la pièce sans son téléphone, sans un soupir, sans même s’enquérir du dîner, c’est que la tempête gronde à l’intérieur.Je reste en bas, dans la cuisine, le torchon à la main, l’esprit ailleurs.Clara enceinte.Je m’appuie contre l’évier. L’eau tiède continue de couler, mais un frisson me parcourt l’échine. Non par jugement ce réflexe-là, je m’en suis débarrassée depuis longtemps mais par lucidité. Car je sais, moi. Je sais ce que signifie une grossesse inattendue, surgie en dehors du cadre, au moment le moins propice. Je sais les regards, les murmures, les suppositions. Je sais la solitude
ปรับปรุงล่าสุด: 2025-08-08
Chapter: Chapitre 10 — Ce qu’on ne choisit pasÉlodieJe marche vite. Trop vite.J’ai laissé Clara dans sa chambre, recroquevillée comme une coquille vide, et moi, j’ai refermé la porte sur un champ de ruines.Son silence me reste dans la gorge, comme une écharde. J’aurais voulu faire plus. Dire plus. Mais parfois, il n’y a rien à dire. Juste rester là. Juste être. Et même ça, je ne sais pas si ça suffit.Je rentre chez moi, les épaules tendues, le cœur dans les talons.À peine la porte franchie, je sens l’odeur du dîner. Des épices chaudes, du riz qui fume, des choses simples qui réconfortent. Mais rien ne me réchauffe.— Élodie ?Ma mère apparaît dans le couloir, les mains pleines d’eau savonneuse, le torchon encore sur l’épaule.Elle me regarde. Son regard se plisse tout de suite.— Ça ne va pas ?Je hoche la tête. Je pourrais dire que je suis fatiguée. Prétexter un contrôle, une dispute au lycée, quelque chose de banal.Mais non. J’ai besoin d’en parler. Maintenant.— C’est Clara.Elle pose le torchon. Essuie ses mains lenteme
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Chapter: Chapitre 9 — Les restes d’un avenirClaraJe croyais que ce serait le pire : le moment où je prononcerais ces mots, où je briserais le silence.Mais ce n’est pas ça, le pire.C’est ce qui vient après.Quand le silence revient, plus tranchant qu’avant.Quand il découpe ce qui reste debout.Ma mère se lève. Elle tourne en rond, comme si le mouvement allait dissiper l’onde de choc. Elle marmonne des bribes, des « non », des « comment », des « ce n’est pas possible », mais sans s’adresser à personne. Ses mains tremblent, elle s’agrippe à un coussin comme à une bouée.Élodie reste droite, près de moi, sa main dans la mienne. Son contact est tiède, solide. C’est elle, maintenant, mon point d’ancrage. Mais même elle ne peut rien arrêter.Ma grand-mère.Elle ne dit rien d’abord. Elle me regarde. Et dans ce regard, je vois ce que je n’avais pas prévu. Pas de tristesse. Pas de peur. Pas de compassion.De la colère. Froide. Calcinée. Ancienne.— Tu ne pouvais pas faire ça, Clara.Sa voix fend l’air comme une lame. Chaque mot tombe
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Chapter: Chapitre 8 — Tout ce qu’elle sait déjàClaraElle ne répond pas tout de suite.Son regard se trouble, puis revient se fixer dans le mien, plus calme qu’attendu.— Depuis quand le sais-tu ?— Depuis plusieurs semaines. Peut-être davantage. J’ai tenté de l’oublier, de le cacher même à moi-même. Mais le corps ne ment pas.Et toi, encore moins.— Et… le père ?Je baisse les yeux.Je pourrais le dire. Mais cette pièce-là n’est pas encore prête à rejoindre le puzzle. Elle demande du recul. Une autre forme de courage.— Ce n’est pas l’essentiel. Pas pour l’instant.Elle acquiesce, sans insister.Elle respecte le silence, même quand il griffe.— Et ta mère ? Ta grand-mère ? Tu leur as parlé ?Je secoue la tête, presque honteuse.— Non. J’ai voulu. J’ai même préparé des phrases. Mais au moment de les dire… tout se coince.J’ai peur de leur regard. De leur colère.Et pire encore : de leur absence de réaction.Elle me dévisage longuement, puis avance sa main pour venir envelopper la mienne.— Tu veux que je sois là quand tu leur dira
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