Chapitre 1

Quand je l'ai découvert, mon monde s'est arrêté.

Dans mon souvenir, je me suis agrippée au bord du lit avant que tout ne devienne noir.

On a dit que j'avais perdu connaissance sous le choc.

Lucas Moreau – mon mari, l'homme que tout le monde appelait l'héritier doré de la Mafia – a abandonné un contrat d'un milliard de dollars et est rentré à la maison en une nuit.

Il n'a pas dormi pendant deux jours, assis à mon chevet, le visage pâle de peur.

Quand j'ai enfin ouvert les yeux, il était juste là.

« Rose, » a-t-il murmuré en pressant ma paume contre sa joue. « Tu m'as fait mourir de peur. »

C'était le même homme qui avait autrefois affronté un revolver chargé sans ciller, et qui tremblait maintenant parce que je m'étais évanouie.

J'ai regardé dans ses yeux – ces yeux auxquels je croyais plus qu'à tout, et j'ai ressenti une douleur intense que je n'avais jamais éprouvée.

On ne pouvait pas feindre un amour comme ça.

Et pourtant, je ne pouvais pas m'empêcher de me demander : il la regardait aussi ainsi ?

Béatrice Richard.

Son amie d'enfance.

La femme qui avait donné naissance à ses jumeaux.

Si je n'avais pas vu les preuves de mes propres yeux : les photos et le rapport ADN, je ne l'aurais jamais cru. Aux yeux du monde, Lucas était parfait.

Mais la perfection cache des secrets. Et son secret, c'était d'avoir vécu aux côtés d'une autre femme pendant toute une année.

J'ai détourné le visage et ai laissé les larmes imprégner l'oreiller.

Ma main tremblante s'est posée sur mon ventre.

Après des années de traitements de FIV infructueux, j'étais enfin enceinte.

Et je n'ai rien pu faire d'autre que pleurer.

Lucas m'a prise dans ses bras, sa voix basse et tendre.

« Qu'est-ce qui ne va pas, ma chérie ? Qui t'a bouleversée ? Dis-le-moi et j'arrangerai ça. »

Mais c'est alors que j'ai perçu une faible odeur sur sa peau : un parfum cher que je ne portais pas, mêlé à la douceur du lait en poudre pour bébé.

Mon estomac s'est tordu. Je l'ai repoussé et me suis précipitée vers la salle de bains pour vomir.

Il s'est rué derrière moi, tenant mes cheveux, essuyant mon visage.

Il détestait le désordre. Il détestait l'odeur de la maladie.

Et pourtant il était là, à genoux, murmurant : « Tout va bien. Je suis là. »

J'ai failli m'effondrer à nouveau, car à cet instant, il était l'homme dont j'étais tombée amoureuse.

Celui qui avait tout fait pour moi.

Celui sans qui je pensais ne jamais pouvoir vivre.

J'ai failli lui pardonner.

J'ai failli me convaincre que s'il quittait Béatrice, nous pourrions redevenir comme avant : tout recommencer, élever notre enfant ensemble, faire comme si rien n'avait changé.

J'ai ouvert la bouche pour lui dire.

« Lucas, je... »

Mais son téléphone a sonné.

Il a embrassé mon front, a dit que c'était pour le travail, puis il est sorti de la chambre.

Trente minutes plus tard, Béatrice m'a envoyé une photo.

Lucas tenait les jumeaux dans ses bras, les lèvres pressées contre le front du bébé.

Le sourire sur le visage de Lucas n'était pas de la culpabilité, c'était de la paix.

Cette photo a détruit le dernier espoir qui me restait.

Quand je suis sortie de l'hôpital, je ne suis pas rentrée chez moi.

Je suis allée directement chez Clara, mon amie et la seule personne en qui je pouvais encore avoir confiance.

« Aide-moi, » ai-je dit. « J'ai besoin que tu simules un crash d'avion. »

Elle m'a dévisagée, horrifiée, mais je n'ai pas cligné des yeux.

Parce que je connaissais Lucas.

Il ne me laisserait jamais partir.

Et si je voulais protéger mon bébé, je devais disparaître.

Cette nuit-là, j'ai commencé à faire mes valises.

J'ai ouvert l'armoire et j'ai sorti toutes les chemises que j'avais cousues pour lui.

Je les ai découpées en morceaux et je les ai jetées.

Les diamants qu'il m'avait offerts, je les ai donnés aux femmes de ménage.

Et les seize albums photos que nous avions faits au fil des années, pour nous permettre de les regarder ensemble quand nous serions vieux, je les ai jetés un par un dans la cheminée.

Les pages se sont gondolées, noircies et transformées en cendres.

À minuit, mon téléphone a vibré.

Clara : Tout est prêt. Dans deux jours, tu vas disparaître.