Chapitre 8

Aurélie a posé son regard sur son fils et a esquissé soudain un sourire.

Autrefois, pour mettre au monde Léon, elle avait presque fait une hémorragie et, après l’accouchement, sa santé s’était gravement affaiblie.

Elle n’avait jamais regretté de l’avoir mis au monde.

Pourtant, à cet instant, elle s’est sentie terriblement ridicule.

Il n’avait que six ans.

Même en étant précoce, il ne pouvait cacher les émotions qui traversaient ses yeux.

Par exemple, en ce moment, ce qu’elle voyait briller dans ses yeux, c’était un rejet et une aversion flagrants.

Autrefois, quand il se montrait proche de Véronique, Aurélie se sentait triste, mais elle s’efforçait toujours de se convaincre qu’il était encore petit.

Les enfants, pensait-elle, avaient tendance à être instinctivement attirés par les personnes qui brillaient.

Et puis, elle restait sa mère. Quoi qu’il arrive, il ne s’éloignerait pas d’elle à cause d’une inconnue.

Mais à cet instant, l’aversion manifestait dans son regard lui a prouvé que, même le lien du sang ne signifiait rien.

« Je ne suis que ta mère au sens biologique du terme. Tu es encore petit, mais tu as malgré tout le droit de choisir une autre personne pour être ta mère. » a-t-elle dit d’un ton froid en le fixant.

« Je m'en fous, de ce qu'il est jeune, de ne pas lui en vouloir, de ce qu'il ne comprend pas encore... » Tout ces excuses n’avait plus aucune valeur à ses yeux.

Elle ne voulait plus servir de mère docile.

Elle s’est retournée pour partir, mais Julien la dévisageait, les sourcils froncés, le cœur étrangement agité.

Qu’est-ce qu’elle voulait dire ?

Elle voulait que Léon reconnaisse une autre femme comme mère ?

Elle ne voulait plus de la place de Madame Bernard ?!

« Aurélie Marchand. » Julien a pincé les lèvres, puis, tout à coup, il l’a appelée d’une voix froide, « Léon est encore petit, il ne comprend pas. Il s’attache seulement à Véronique, et puis, cette fois-ci, c’est toi qui as eu tort. Présente-lui des excuses, et je considère que rien ne s’est passé. »

Il ne lui faisait pas confiance, mais il était prêt à ce qu’elle enterre la hache de guerre avec Véronique.

Aurélie trouvait cela ironique au fond d’elle-même.

Elle a levé les yeux et a dit en souriant : « Ce n’est pas la peine. Je ne m’excuserai pas pour quelque chose que je n’ai pas fait, et je n’ai pas besoin de votre approbation pour prouver mon innocence. Tant que Mlle Leroux présente des preuves, je suis prête à en assumer les conséquences. »

Quant à ce que pensaient son fils et son mari, cela ne l’intéressait plus.

Aurélie ne voulait plus supporter le dégoût réciproque qui existait entre elle et le père comme le fils.

Elle est passée dans un café pour chats, afin de préparer le transport de celui qu’elle y avait autrefois laissé en pension.

Julien n’aimait pas avoir d’animaux à la maison.

Aurélie, au contraire, adorait les chatons.

Ainsi, après avoir recueilli le petit chat tricolore, elle avait tenu compte des préférences du père et du fils : elle ne l’avait pas ramené à la maison et l’avait confié au café pour chats.

De temps en temps, elle allait le voir.

Le propriétaire du café, qui s’entendait bien avec elle, n’a pas pu s’empêcher de plaisanter en la voyant organiser le transport, « Tu ne disais pas que ton mari et ton fils n’aimaient pas ça, et que tu ne pouvais pas en avoir à la maison ? Tu comptes le donner ? »

« Non. »

Tout à coup, Aurélie s’est sentie soulagée. Elle a esquissé un sourire et a répondu, sur le ton de la plaisanterie, « C’est juste que je me rends compte que, finalement, mon mari et mon fils ne sont pas aussi importants qu’un petit chat. »

Un mari et un fils pouvaient préférer quelqu’un d’autre.

Mais un chaton, tant qu’on lui donnait assez d’amour, vous considérait toujours comme le meilleur au monde.

Le propriétaire a aussi ri, « Voilà qui est mieux ! Quel mariage empêcherait quelqu’un de garder le chat qu’il aime ? »

Aurélie a simplement souri, sans rien ajouter.

En vérité, pour Julien et Léon, elle avait presque mis de côté toutes ses propres préférences.

Heureusement, maintenant qu’elle était partie, elle se retrouvait seule, libre.

Le ciel était vaste, la mer était immense : elle aurait toujours l’occasion de suivre ses envies.

Après avoir joué un moment avec le petit chat, Aurélie a vu son humeur s’améliorer.

Juste à ce moment-là, Solène l’a appelée pour lui proposer d’organiser un dîner de bienvenue.

Elle ne révélait pas le programme d’Aurélie pour les jours à venir. Elle a prétexté simplement l’envie de se retrouver, et a invité quelques amis proches de l’époque de l’université.

Quand Aurélie est arrivée, ses amis étaient rassemblés, un verre à la main.

En la voyant, l’homme assis au centre a levé la tête, a esquissé un léger sourire et a lancé d’un ton taquin : « C’est rare que notre grande occupée trouve le temps de venir nous voir. »

Cet homme était Xavier Laurent, son aîné à l’université et, à l’époque, un séducteur bien connu.

À l’époque, Aurélie avait beaucoup d’amis et aussi beaucoup de prétendants.

Xavier faisait partie de ceux-là.

Elle était vive, lumineuse, éclatante.

Elle attirait toujours tous les regards.

Ainsi, quand la famille Marchand avait connu des difficultés et qu’elle avait épousé Julien pour se consacrer à sa famille, son absence répétée aux réunions surprenait toujours.

Heureusement, ses amis comprenaient, et ne posaient pas de questions.

Mais après quelques verres, quelqu’un un peu ivre, a évoqué les souvenirs de l’université : « En y repensant, Aurélie, à l’époque, Xavier était amoureux de toi en secret. Si on avait su que tu allais devenir comme ça après le mariage, on aurait mieux fait de vous mettre ensemble. »

Aurélie restait un instant interdit, puis a levé les yeux et a croisé le regard doux et profond de Xavier.

À l’époque, Xavier l’avait effectivement courtisée.

Elle a détourné les yeux et a dit avec une pointe d’amusement : « C’est bien vous, ça… Lui, il rêvait juste de donner un foyer à toutes les femmes. »

Xavier a haussé légèrement les sourcils, l’air innocent, « Pourquoi me démasquer comme ça ? J’avais travaillé dur pour me bâtir cette image d’homme fidèle. »

Tout le monde a éclaté de rire et a enchaîné sur un ton léger.

Xavier a donné vraiment l’impression que, lorsqu’il l’avait poursuivie, il n’avait pas été sérieux.

Aurélie, de son côté, n’a rien dit.

Elle était réellement désabusée vis-à-vis de Julien.

Mais, pour les chemins qu’elle avait déjà empruntés, elle n’avait jamais imaginé d’autre route.

Un peu plus loin, Lucien, qui venait de sortir d’un salon privé, a vu la scène et n’a pas pu s’empêcher de parler : « Tiens, ce ne serait pas Aurélie ? Qu’est-ce qu’elle fait ici ? »

Julien s’est arrêté net, son regard s’est posé sur Xavier et Aurélie, et ses yeux en amande se sont plissés légèrement.

Ce soir-là, Julien recevait un ami pour lui souhaiter la bienvenue. La soirée venait de se terminer, et il ne s’attendait pas à croiser Aurélie ici.

Depuis leur mariage, elle se consacrait à son mari et à leur fils, et sortait rarement dans ce genre d’endroit.

À côté de lui, Véronique a eu les yeux qui ont brillé légèrement et a lancé tout à coup : « Julien, ce ne serait pas Xavier ? Cet homme-là n’a pas bonne réputation, c’est un vrai séducteur. Comment se fait-il que Mlle Marchand soit avec lui ? »

Le visage de Julien est resté impassible, mais une froideur latente s’est devinée.

Ce n’était pas la première fois qu’il voyait Xavier.

À l’université, Xavier entretenait déjà des liens étroits avec Aurélie, et il y avait même eu des rumeurs selon lesquelles il l’avait courtisée.

Mais par la suite, Aurélie avait épousé Julien.

Xavier, lui, était parti à l’étranger, et les rumeurs s’étaient éteintes d’elles-mêmes.

Un peu plus loin, Aurélie et ses amis ont aussi remarqué la présence de Julien.

Véronique a suivi Julien et s’est avancée vers Aurélie et les autres.

Le regard de Julien a glissé sur Xavier avant de se poser sur Aurélie. Sa voix s’est faite légèrement froide : « Tu as vraiment de l’humeur aujourd’hui. Au lieu d’accompagner Léon pour son piano, tu viens dans ce genre d’endroit pour retrouver d’autres hommes. »

Xavier a arqué les sourcils avec désinvolture, et son regard s’est posé sur Véronique derrière Julien. Il a esquissé un sourire chargé de sous-entendus : « Intéressant, ce que dit M. Bernard… Vous n’êtes pas, vous aussi, en compagnie d’une autre femme ? »

Véronique a tourné les yeux vers Aurélie et s’est hâtée d’expliquer avec un sourire : « Mlle Marchand, ne vous méprenez pas. Ces jours-ci, avec toute cette agitation causée par les détracteurs en ligne, Julien ne voulait pas me laisser seule, de peur qu’il m’arrive quelque chose. J’espère que cela ne vous dérange pas ? »

Ses lèvres s’incurvaient légèrement, et dans ses yeux brillait une lueur de satisfaction.

Chaque mot soulignait la sollicitude et la protection que Julien lui témoignait.

« Pas du tout. »

Aurélie n’a pas plus réagi que cela, elle est simplement passée à côté de Julien et a dit d’un ton calme : « Si tu l’aimes, je te le laisse. »