La matinée s’écoulait lentement, teintée d’une tension étrange dans les murs de la villa. Le soleil passait paresseusement à travers les longs rideaux crème de la chambre, projetant des motifs dorés sur le sol ciré. Lisa, toujours sous le masque de Dolce, était assise sur un fauteuil près du lit, habillée d’une nuisette soyeuse que Sesar avait fait livrer “pour son confort”.Il était devant le miroir, bouton de manchette entre les doigts, ajustant son costume avec la précision d’un homme qui ne laisse rien au hasard.— Tu vas quelque part ? demanda-t-elle d’une voix douce, presque lascive.Sesar se retourna à moitié, un sourire au coin des lèvres.— Un rendez-vous d’affaires, répondit-il. Un certain Evan Marly. Un investisseur venu de l’Europe de l’Est. Il veut placer son argent ici, dans mes… entreprises.Il avait dit “entreprises” avec cet air de façade, comme s’il parlait de boulangeries ou de clubs de jazz. Lisa savait que ces “investissements” touchaient probablement au blanchime
Sesar… je vis avec mon neveu. Il est jeune. Je ne peux pas le laisser seul. Il a besoin de moi.Il s’éloigna un peu, passa une main nerveuse dans ses cheveux.— J’comprends, ouais. Mais… réfléchis-y. T’as ta place ici. Avec moi. Ce monde-là, ce qu’on construit… il est pas fait pour la solitude. Et tu le sais. Tu sais que je peux te donner tout ce que tu veux, Dolce.Elle détourna les yeux, presque honteuse de la boule d’émotion qui se formait dans sa gorge. Il ne savait pas. Il ne savait rien. Pas qu’elle s’appelait Lisa. Pas qu’il l’avait violée des années plus tôt. Pas que ce “neveu”, c’était leur fils.Et là, devant lui, elle devait faire semblant d’être flattée. De se sentir honorée.— Je vais y réfléchir, souffla-t-elle en esquissant un sourire.Il s’approcha à nouveau, posa ses lèvres sur sa tempe.— Doucement, oui… Réfléchis, mais n’attends pas trop longtemps.Elle acquiesça sans mot dire. Et pendant qu’il la tenait contre lui, dans cette étreinte troublante et détestable, elle
L’aube pointait à peine à l’horizon lorsqu’elle se réveilla en sursaut. Le drap à côté d’elle était froid. Sesar était déjà parti. Comme toujours, sans un mot, sans un regard. L’odeur de son parfum flottait encore dans la pièce, lourd, entêtant, presque agressif. Lisa s’assit sur le bord du lit, nue, la peau moite, le cœur serré. La nuit avait été longue, étouffante, pleine de fausses caresses et de véritables cauchemars.Elle ferma les yeux quelques secondes, essayant de retrouver un semblant d’équilibre. Mais à l’intérieur, c’était le chaos. Le vide. Elle se leva lentement, prit une douche brûlante comme pour effacer l’empreinte de Sesar sur son corps. Elle se lava longuement, minutieusement, frottant chaque centimètre de peau avec une rage sourde. Elle ne pleura pas. Plus maintenant. Elle n’avait plus le luxe de la faiblesse.Quand elle rentra chez elle, la maison était calme. Trop calme. Elle se dirigea vers la chambre de Bobby, mais le lit était vide. Une note était posée sur la
Lisa détourna les yeux vers la rue. Elle sentait son cœur cogner plus vite. Il n’était pas comme les autres. Il avait ce quelque chose de calme mais déterminé. Un homme dangereux, sûrement. Mais peut-être pas pour elle.— Vous n’avez pas peur de vous asseoir avec une inconnue qui pourrait être armée ? lança-t-elle.Il sourit.— Si vous l’étiez, vous auriez déjà tiré.Le silence retomba. Pas gênant. Plutôt… enveloppant.— Je peux vous offrir quelque chose ? reprit Marco.— Un thé noir.Il fit signe au serveur. Quand la commande arriva, Lisa entoura sa tasse de ses deux mains comme pour s’y raccrocher.— Vous avez ce regard, dit-il soudain. Celui des gens qui portent une tempête en eux.— Et vous, vous avez ce regard des gens qui croient pouvoir l’éteindre, répliqua-t-elle doucement.Il hocha la tête, un peu admiratif.— J’aime bien parler avec vous, Lisa.Elle sursauta. Il savait son prénom.— Ne soyez pas surprise. Reyes m’a parlé de vous… en bien. Vous avez du cran. Vous êtes douée.
Le vent matinal fouettait doucement les rues de New York, glissant entre les grilles, soulevant les feuilles mortes et les morceaux de papiers abandonnés sur les trottoirs. Lisa marchait d’un pas rapide, le manteau noir serré autour d’elle, le regard rivé sur l’entrée de l’école élémentaire. Bobby tenait sa main, son petit sac sur le dos, les cheveux en bataille.— Tu viens me chercher ce soir ? demanda-t-il en levant les yeux vers elle.Elle baissa les yeux vers lui et tenta de sourire, bien que sa gorge reste nouée.— Bien sûr. Et ce soir, je te ferai des pancakes. Ceux que tu aimes.Il acquiesça, le sourire un peu timide, puis courut vers la grille après avoir déposé un baiser rapide sur sa joue. Lisa resta là un moment, le regardant disparaître dans la foule d’enfants.Elle inspira profondément.Elle avait mis son masque.Le visage de la mère fatiguée s’effaça pour laisser place à l’agent Lisa Wood, infiltrée depuis deux mois dans l’une des mafias les plus puissantes de la côte Es
L’odeur de la ruelle était âcre, chargée d’humidité et de relents de la nuit passée. Lisa marchait vite, le visage dissimulé sous un foulard noir, les bras serrés contre son manteau comme si elle voulait empêcher son cœur d’éclater.Elle avait quitté la maison de Sesar avant l’aube, alors que les couloirs étaient encore plongés dans le silence. Personne ne l’avait arrêtée. Elle était libre de ses mouvements, à condition de revenir quand il le déciderait. C’était ce qu’il avait dit, nonchalamment, comme on parle à un chien bien dressé.Ses talons claquaient sur le béton, résonnant dans sa tête comme un écho de ce qu’elle avait vécu quelques heures plus tôt. Elle n’arrivait pas à respirer. Tout son corps lui faisait mal, pas seulement à cause du contact physique, mais à cause de ce qu’elle avait dû faire. Ce qu’elle avait laissé faire.Une fois devant la petite porte grise de son immeuble, elle marqua une pause. Sa main tremblait. Elle lutta pour introduire la clé dans la serrure. Puis