Chapitre 4 J’ai quelque chose à te dire

Le lendemain, Manoir Iris.

C’est la résidence privée de Martin.

Il était à peine six heures et demie lorsque Camille s’est levée sur la pointe des pieds pour préparer le petit-déjeuner de Martin.

Depuis le tout premier jour où elle était devenue la maîtresse cachée de Martin, elle avait emménagé ici.

Depuis lors, tout ce qui touchait à la vie de Martin dépendait d’elle seule. Secrétaire le jour, maîtresse la nuit, elle était aussi devenue sa femme à tout faire.

Lorsque l’homme s’est levé, le petit-déjeuner l’attendait déjà sur la table. Voyant Martin descendre l’escalier en ajustant sa cravate, Camille s’est aussitôt approchée.

« Laisse-moi faire. »

Martin a suspendu son geste, laissant Camille s’occuper de sa cravate avec soin.

Camille n’était pourtant pas petite. Elle mesurait bien un mètre soixante-dix. Mais face à Martin, elle n’arrivait qu’à la hauteur de sa poitrine.

Martin a baissé les yeux sur elle, saisi par le parfum délicat de ses cheveux. Une chaleur soudaine l’a envahi.

« C’est bon... »

Camille venait à peine de lever la tête que Martin emprisonnait sa nuque dans sa paume. Sa langue à la fraîcheur mentholée s’est insinuée entre ses lèvres comme un serpent.

En un instant, une tension sensuelle s’est répendu dans la villa...

Deux heures plus tard.

Une Maybach noire s’est arrêtée devant la tour Groupe MK. Le chauffeur est aussitôt descendu pour ouvrir respectueusement la portière.

Quelques secondes plus tard, Martin est sorti du véhicule, ses longues jambes se dépliant avec élégance.

Son manteau noir, parfaitement taillé, exaltait sa prestance et son raffinement aristocratique.

Sous la lumière éclatante du soleil, il avait l’allure d’une divinité, son aura imposante faisait reculer quiconque croisait son chemin.

Martin a desserré sa cravate du bout de ses doigts longs et pâles, puis a tendu à Camille les dossiers qu’il tenait.

Son regard s’est figé un bref instant. Martin a longuement fixé les lèvres de Camille, encore légèrement gonflées.

Soudain, il a levé la main et a effleuré tendrement le coin de ses lèvres du bout de son doigt rugueux.

« Ton rouge à lèvres a bavé. »

Sur ces mots, il a effacé du pouce le rouge qui dépassait.

Cette caresse chaude et douce a fait papilloter les yeux de Camille.

Elle a aussitôt repensé à la scène de ce matin, quand Martin l’avait prise sur le canapé, la réclamant sans relâche.

Apercevant son trouble dans les yeux de Martin, Camille s’est vite ressaisie. Elle a baissé la tête. « Merci pour... l’indication. »

Même si son cœur battait la chamade, la voix de Camille est restée d’un calme parfait.

Martin a retiré sa main, un léger sourire aux lèvres, a pivoté élégamment et s’est dirigé d’un pas sur vers l’entreprise.

Camille a ravalé le trouble qui agitait son cœur, a ouvert son pad et a rejoint Martin d’un pas vif pour lui présenter le planning du jour.

« M. Bernard, vous avez une réunion tout à l’heure... »

« M. Bernard ! »

Avant même que Camille puisse terminer, une femme s’est précipitée vers eux.

D’un regard, Camille l’a tout de suite reconnue.

C’était Réa, la même qui avait fait un esclandre au service RH la veille. Qu’est-ce qu’elle faisait encore ici ?

Réa s’est jetée sur Martin, ses mains pâles agrippant désespérément sa veste, le suppliant avec ferveur.

« Je sais que vous êtes M. Bernard ! Je vous en prie, laissez-moi une chance au service RH, je vous en supplie, j’ai vraiment besoin de ce travail, aidez-moi ! »

Un profond dégoût a traversé les traits froids de Martin.

Il a lancé un regard au garde du corps à côté de lui et a ordonné d’une voix basse : « Emmenez-la ! »

À ce mot, les gardes se sont élancés, ont attrapé les bras de Réa et l’ont entraînée vers la sortie.

Mais Réa, telle une furie, s’est débattue de toutes ses forces contre les gardes.

« Ne me tirez pas comme ça, je vous en supplie, laissez-moi juste parler à M. Bernard ! M. Bernard, juste quelques minutes ! »

Voyant Martin déjà agacé, les gardes ont resserré leur prise.

Pendant qu’on la tirait, les mèches de cheveux qui encadraient le visage de Réa volaient dans tous les sens. Sous la lumière, le grain de beauté rouge vif sur son lobe d’oreille ressortait d’autant plus.

D’un seul regard, Martin est resté figé.

Il a immédiatement arrêté les gardes : « Arrêtez ! »

Aussitôt, les hommes ont lâché prise, et Réa s’est précipitée devant Martin. Elle a tenté de maîtriser les tremblements de son corps.

Au moment où elle a levé les yeux, des larmes silencieuses ont coulé sur ses joues. « M. Bernard, je m’appelle Réa Hubert, j’ai des choses à vous dire, je vous en supplie. »

Martin a contemplé le lobe de son oreille d’un regard trouble, sa voix s’est adoucie inconsciemment : « Monte avec moi. »

Réa, émue, a balbutié : « Merci beaucoup, M. Bernard ! »

Martin s’est tourné vers Camille et a ordonné : « Repousse la réunion. »

Camille a entrouvert les lèvres, puis s’est ravisée au dernier moment.

En regardant Martin s’éloigner avec la jeune femme, Camille a refermé la bouche, un sourire désabusé sur les lèvres.

Après avoir réglé les affaires confiées par Martin, Camille est retournée à son bureau. À peine s’était-elle assise qu’une vague de vertige l’a saisie.

Camille s’est aussitôt appuyée sur la table à côté pour ne pas vaciller.

À peine avait-elle retrouvé son équilibre que le rire cristallin de Réa a résonné à ses oreilles.

Camille a levé les yeux vers le bureau présidentiel, séparé d’elle par une simple cloison de verre.

Elle ignorait ce que Martin et Réa étaient en train de discuter à l’intérieur.

Mais à voir leurs visages rayonnants, cette Réa devait sans doute être celle que Martin avait toujours cherchée.

Camille a ravalé l’amertume dans son cœur, a pris sur elle pour s’asseoir à son bureau et s’est forcée à se concentrer sur son travail.

Dans l’après-midi, le service RH a diffusé un communiqué : Réa intégrait le département design de mode en tant que vice-directrice.

En lisant cette annonce, Camille a ressenti ses yeux se piquer.

À l’époque, si elle avait pu devenir la secrétaire particulière de Martin, c’était grâce au grain de beauté rouge sur son lobe d’oreille droit.

Aujourd’hui, la vraie personne que Martin cherchait était revenue, il était naturel qu’il chérisse cette muse retrouvée.

Ses pensées ont soudain été interrompues par un coup frappé à la porte.

« Camille. »

Camille a aussitôt refoulé sa tristesse, a fermé la page sur son ordinateur, et a répondu : « Entre. »

La porte s’est ouverte. Lucas est entré d’un air solennel.

« Camille, M. Bernard m’a chargé de te transmettre qu’il compte sur toi pour faciliter le travail de Mlle Hubert ici. »

Camille est restée figée.

Le département design de mode n’était même pas de son ressort : comment pouvait-elle s’occuper d’une femme qu’elle n’avait croisée qu’une seule fois ?

Devant son silence, Lucas a poursuivi : « M. Bernard a aussi précisé que tu devais passer au département design pour leur demander de ménager Mlle Hubert. Après tout, elle est nouvelle ici. »

La main de Camille, posée sur ses genoux, s’est instantanément contractée.

Elle a détourné les yeux et a répliqué d’une voix feinte : « C’est noté. »

Une fois Lucas parti, Camille a caché son visage dans ses mains, dissimulant sa tristesse.

Le geste de Martin ne laissant aucun doute : la personne qui comptait vraiment pour lui était revenue, et il était le temps pour elle de céder sa place de doublure.