~~~~~ Veronica White ~~~~~Quelques minutes plus tard, on arrive enfin devant le manoir. Je ne dis rien mais je sens son trouble et son hésitation. Je veux voir jusqu'où je peux aller. Il sort pour m’ouvrir la portière, toujours aussi professionnel, mais ses yeux me trahissent. Il brûle de l’intérieur. Je descends lentement, frôle volontairement sa main. Puis je me penche vers lui, tout près de son oreille. _ Monte avec moi. Juste pour un café. Rien de plus. Il ne répond pas mais il me suit. Dans le salon, je retire ma veste et la pose négligemment sur l’accoudoir. Je l’invite à s’asseoir dans le coin lounge. Je verse le café, doucement, en silence, puis je me retourne et je m’avance vers lui. _ Tu peux respirer, tu sais. Je ne vais pas te sauter dessus… pas si tu ne le veux pas. Je lui tends sa tasse, mais au lieu de la lâcher tout de suite, mes doigts restent sur les siens.... Longtemps... Trop longtemps. Il me regarde. Son regard descend lentement sur mes lèvre
~~~~~ Melrick Hart ~~~~~ Le silence de la maison est encore doux quand je me glisse hors du lit. Cassandra dort paisiblement. Je dépose un baiser sur son épaule nue et file vers la cuisine. C'est samedi et je ne vais pas travailler. Ce matin, j’ai envie qu’elle se réveille autrement. Qu’elle sente que, malgré tout, je suis là. Présent. Aimant. Je prépare ses pancakes préférés, avec un peu de sirop d’érable et les fruits frais qu’elle adore. Je décore l’assiette avec une rose que j’ai achetée hier. Ça ne compense pas mes absences, mais c’est un début. Alors que je termine de disposer le plateau, j’entends un petit bruit de pas hésitants. Roy. Il se tient au bout du couloir, dans son pyjama à rayures, les yeux encore mi-clos. Il tend les bras. _ Hey, champion, tu t’es réveillé tout seul ? Je le prends dans les bras. Il pose sa tête contre mon épaule, encore groggy. Il sent le sommeil et le lait chaud. _ Chut, maman dort encore. On va lui faire une surprise, d’accord ?
~~~~~ Veronica White ~~~~~ Je descends de la voiture avec calme, élégante, un léger sourire aux lèvres, les bras chargés de paquets soigneusement emballés. Des fleurs, un foulard de soie, du parfum français, et même un panier garni… Rien n’a été laissé au hasard. Je suis Veronica White, après tout. Et quand je veux quelque chose, je vais jusqu’au bout. Je monte les quelques marches du perron et je sonne. Mon cœur bat vite, mais je le cache derrière un aplomb glacé. La porte s’ouvre lentement, sur une dame aux traits durs, le regard méfiant. Elle me scrute de la tête aux pieds avant de demander : _ Oui ? Vous êtes qui ? Je redresse le menton d'un air poli mais ferme. _ Bonjour madame. Je suis Veronica White, la patronne de Melrick, votre fils. Elle fronce un sourcil, surprise, puis s’écarte légèrement. _ Entrez. Je pénètre dans la petite maison, discrètement décorée. Je lui tends les cadeaux avec un sourire doux sur les lèvres. _ Ce sont pour vous. Une pet
~~~~~ Veronica White ~~~~~ Lorsque je sors de la maison, le soleil tape fort, mais je ne ressens rien. Je suis encore habitée par cette conversation. La mère de Rick… elle est plus lucide que je ne l’imaginais. Elle a vu clair. Elle a compris. Et maintenant, elle est de mon côté. J’ouvre la portière arrière de la voiture, je m’installe, croise les jambes et prends une grande inspiration. Mon téléphone vibre légèrement dans ma main. Je le déverrouille. Je vais dans l’application bancaire. Mes doigts glissent calmement sur l’écran. Je retrouve le compte de Melrick, celui que j’ai lié pour ses virements mensuels. Le montant prévu était de cent mille dollars. Une somme déjà généreuse. Mais aujourd’hui, j’ai envie qu’il sente, qu’il se rende compte que je suis prête à plus. Qu’il vaut plus. Et que moi, je suis prête à lui offrir bien plus que ce que Cassandra pourra jamais lui donner. Trois cents mille dollars. Je tape le chiffre avec soin. Un sourire s’étire lentement sur m
~~~~~ Melrick Hart ~~~~~ Les voix s’élèvent à nouveau, plus douces. _ ¿Todavía me odias? demande Wells. (Tu me détestes encore ?) _ No. Pero no soy estúpida. (Non. Mais je ne suis pas stupide.) J'aurais voulu écouter la suite de la conversation mais je n'entends plus rien. Juste un silence, un long silence. Je frappe deux coups sur la porte. _ Veronica, tout va bien ? _ Oui, Melrick. Tu peux entrer. J’ouvre et je vois que Wells se lève et boutonne sa veste avec soin. Il tend une main vers Veronica, qu’elle serre brièvement. Elle affiche un sourire poli et professionnel. Le genre de sourire qu’elle réserve à ceux qui ne méritent pas plus. _ Merci pour tout, dit-elle en anglais cette fois. Melrick va vous raccompagner. Je hoche la tête, j’ouvre la porte à Wells et l’accompagne jusqu’à sa voiture. Avant de monter, il se tourne vers moi, le regard pesant. _ Ella confía en ti. Cuídala. (Elle a confiance en toi. Protège-la.) Il monte, la voiture s’éloign
~~~~~ Veronica White ~~~~~ Je reste immobile en fixant la porte qu’il vient de refermer. Mon cœur bat encore trop fort. Ma gorge est nouée. « Travail, rien d’autre. » Il me l’a dit en me regardant droit dans les yeux. Comme s’il n’avait pas brûlé pour moi il y a quelques jours. Comme si son corps n’avait pas supplié pour le mien. Je ris jaune. Puis je m’effondre dans mon fauteuil. Je me déteste de le vouloir autant. Je me déteste de l’aimer, surtout. Je sais que ce n’est pas juste. Pour cette... Cassandra, leur fils et leur histoire. Je sais tout ça. Mais pourquoi, alors, est-ce que c’est moi qu’il regarde avec ces yeux-là quand il pense que personne ne le voit ? Pourquoi est-ce que ses mains tremblent parfois quand nos doigts s’effleurent ? Pourquoi est-ce qu’il ne m’a jamais traitée comme une simple patronne ? Je prends une inspiration longue, douloureuse, et j’ouvre mon ordinateur. J’ai du travail. Beaucoup. Et je vais m’y plonger. Parce que si je continue à p
Puis, j'entends la clochette au-dessus de la porte tinter doucement. Je lève les yeux… et mon cœur rate un battement. Ma belle-mère. Elle entre d’un pas sec, sans un regard pour les autres clients. Ses yeux sont rivés sur moi. Lenny me jette un coup d'œil depuis le coin de la boutique, déjà sur la défensive. Elle s’approche du comptoir, le visage dur, sans détour. _ J’espère que tu es fière de toi. Je reste figée, incapable de dire un mot. Puis, je balbuie doucement : _ Bon... Bonjour, maman. Elle balaie la boutique du regard avant de croiser les bras et de se pencher légèrement vers moi. Puis elle me murmure avec mépris. _ Je ne suis pas ta mère. Je reste silencieuse et je baisse légèrement les yeux. _ Tu veux toujours t’accrocher, n’est-ce pas ? À mon fils, à cette vie qui n’est pas la tienne. Tu t’accroches comme une sangsue. Ma gorge se noue. Lenny s’avance, mais je lui fais un signe discret de ne pas intervenir. _ Écoute-moi bien Cassandra… ou pe
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~Lenny s’approche doucement et pose ses mains sur mes épaules. _ Cassie… attends, respire. Je lève vers elle un regard embué. _ Tu l’as entendu, toi aussi, non ? Elle n’a pas dit ça pour rien. Elle ne vient pas ici par hasard. Lenny hoche la tête avec prudence. _ Oui, c’était violent. Elle a balancé ça comme une évidence. Mais… écoute-moi bien. Ce n’est pas elle qui vit avec Rick. C’est toi. Ce n’est pas à elle qu’il prépare le petit déjeuner, ni à elle qu’il fait l’amour, ni avec elle qu’il se balade dans les parcs. C’est toi. _ Et pourtant… Veronica existe. Et elle rôde. Lenny soupire, puis se penche, plus proche de moi : _ Alors on va découvrir ce qu’il en est. Tu veux savoir s’il t’a menti ? Très bien. On va creuser. Mais pas en pleurant sur un plan de travail, pas en devinant. On va savoir. Je cligne des yeux, surprise. _ Comment ? _ Tu travailles dans une pâtisserie, Cassie. Les gens parlent ici. Et moi, j’ai un petit
Je sors et ferme la porte derrière moi d’un geste vif car je n'ai pas envie qu'il voit mes enfants et je n'ai pas envie non plus qu'ils le voient. Je le fixe et il me fixe. _ Qu’est-ce que tu fais ici ? je murmure, les bras croisés. Tu n'as alors rien retenu de ce qu'on s'est dit hier ? Je le fixe sans ciller, bien que tout mon corps hurle de l’intérieur. _ Tu crois vraiment que j’allais repartir comme ça sans revoir mon fils ? réplique-t-il d’un ton bas. Je suis venu voir Roy. _ Non. BMa réponse est immédiate. Je ne prends même pas le temps d’y mettre des formes. _ Cassandra… commence-t-il. _ Tu n’as aucun droit sur lui, Melrick. Aucun, le coupé-je, sans attendre. Tu ne l’as pas vu grandir et tu ne sais rien de sa vie. Et aujourd’hui, tu débarques ici comme si tu pouvais t’improviser père ? Je retiens ma voix de trembler. Je lui tiens tête mais mes entrailles sont nouées. _ J’ai toujours été son père, que tu le veuilles ou non, siffle-t-il. Il a mon sang
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Le soleil monte doucement dans le ciel au dehors. Il est à peine sept heures du matin, mais la maison bourdonne déjà. Célina est la première à apparaître, encore ensommeillée, un doudou dans les bras. Je lui tends un bol de lait chaud et elle me gratifie d’un sourire, les yeux encore collés de sommeil. Quelques minutes plus tard, Sienna surgit dans la pièce en courant. Elle grimpe sur sa chaise et me dit : _ Maman, on fait des pancakes aujourd’hui ? Je souris malgré moi. C’est notre petit rituel du samedi matin, mais aujourd’hui, on est mardi. Néanmoins, je cède. _ D’accord, mais seulement si tu aides à la pâte. Elle tape dans ses mains, ravie, pendant que je sors les ingrédients. Roy descend enfin. Il a toujours été matinal, mais il aime trop râler. C’est sa façon de protester contre le réveil. Je le salue d’un baiser sur la tempe, mais je remarque que son regard est songeur ce matin. Il semble ailleurs et préoccupé. Je n’insiste
~~~~~ Grégory Smith ~~~~~ Je pousse la porte de chez moi et je le referme doucement. Au salon, comme je m’y attendais, ma mère est assise dans son fauteuil préféré, les jambes croisées, un livre à la main et ses lunettes glissées sur l’arête de son nez. Elle ressemble à une vieille reine anglaise en pleine inspection de ses sujets. Sauf qu’ici, le seul sujet, c’est moi. Je m’approche à pas comptés, mais évidemment, elle relève la tête avant que j’aie franchi la moitié du salon. Rien ne lui échappe, même pas à son âge. _ Bonsoir, Majesté, dis-je avec un large sourire en m’inclinant légèrement. Elle lève les yeux au ciel et sourit en coin. _ Arrête ton cinéma, Greg, et viens m’embrasser. Je m’exécute sans tarder et l’embrasse tendrement sur la joue. Je prends place sur le canapé en face d’elle, m’étire comme si j’avais couru un marathon… alors que j’ai seulement dîné et failli embrasser une femme qui me hante depuis des mois. Je suis fatigué, oui, mais de pensées.
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Je ne vais pas bien, pas du tout après ce qui s'est passé aujourd'hui. Melrick à Boston, ça change tout. Je n'ai pas envie qu'il décide de m'enlever mon fils et encore moins mes deux petites princesses. Je ne sais pas ce que je dois faire pour ne pas les perdre. Ce sont mes enfants... les miens. Je refuse de le laisser me les enlever. Je touille distraitement la sauce dans la casserole lorsque Greg, adossé au plan de travail à côté de moi, tente une nouvelle approche pour m’aider. J'ai d'abord refusé car je voulais cuisiner seule, perdre mon esprit dans quelque chose de de simple, sans avoir à penser à tout ce qui m'angoisse. Mais Greg a insisté avec une telle douceur que je n'ai pas eu le cœur de refuser plus longtemps. Ainsi, nous voilà, côte à côte, lui découpant des légumes avec soin, et moi m'occupant des plats principaux. Pendant de longues minutes, nous travaillons en silence. Puis, naturellement, Greg engage la conversation : _ Tu
Je reste quelques secondes planté là, incapable de bouger, encore sonné par ce que je viens de voir. Cependant, lorsque je vois la voiture de Greg s’éloigner lentement du trottoir, mon instinct reprend le dessus. Sans perdre de temps, je remonte dans le taxi qui m'attend à quelques mètres. _ Suivez cette voiture noire, vite, ordonné-je au chauffeur. Sans poser de questions, il démarre tout en gardant une distance raisonnable pour ne pas éveiller de soupçons. Le cœur battant à tout rompre, je fixe intensément la voiture de Greg, comme si ma vie en dépendait. Je dois savoir où ils vont. Je dois comprendre quelle place cet homme a prise dans la vie de mon fils... et peut-être aussi dans celle de Cassandra. Après quelques minutes de trajet, Greg s’arrête devant une petite glacerie située dans une rue. Je demande au chauffeur de s’arrêter également, un peu plus loin, pour que je puisse observer sans être vu. À travers la vitrine, je les aperçois. Greg achète des glaces aux
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Dès que la porte du bureau claque derrière Melrick, je reste figée quelques secondes, incapable de bouger et incapable de respirer. Mon cœur bat tellement vite que j'ai l'impression qu'il va exploser. Je serre les poings, je ferme les yeux et j'inspire profondément pour calmer les tremblements de mon corps. Il est ici à Boston. Oh mon Dieu !! Comment je peux faire pour cacher mes enfants maintenant ? Je m'effondre dans ma chaise, la tête entre les mains. Ce n'est pas le moment de paniquer, Cassandra. Ce n'est vraiment pas le moment. Je dois garder mon sang-froid. Je tends la main vers mon téléphone et compose nerveusement le numéro de Lenny. Elle décroche au bout de la deuxième sonnerie. _ Allô, Cassie ? _ Lenny, écoute-moi bien, dis-je avec urgence. Melrick est ici à Boston. Je viens juste de le voir à l’hôpital. Un silence inquiet s'installe au bout du fil. _ Quoi ? Mais... tu es sûre que c'est lui ? _ On vient tout juste de disc
~~~~~ Melrick Hart ~~~~~ Je sors de son bureau et je referme doucement la porte derrière moi, mais dans mon cœur, c’est un fracas. Je serre la mâchoire et je me sens brûler de l’intérieur, consumé par la colère et le désir. Je traverse le couloir de l’hôpital en m'efforçant de ne pas laisser transparaître mon trouble, mais bordel... elle a failli craquer, je l'ai vu dans ses yeux. Elle ment. Elle me hait peut-être, mais elle ne m'a pas oublié. Je quitte le bâtiment sans ralentir et je respire enfin plus librement en sentant l'air vif sur mon visage. Je m'arrête sur le trottoir et passe une main dans mes cheveux, frustré. Ce n'était pas le bon moment. Cassandra est sur la défensive, elle est encore blessée... et méfiante. Je devrais le savoir mieux que quiconque : la forcer n’amènera rien. Je prends une profonde inspiration. J'ai attendu six ans alors je peux attendre encore un peu. Je fouille dans la poche intérieure de ma veste et je sors mon téléphone. J’ai
Il attrape mon poignet si brusquement que je sursaute et il me bascule presque contre lui. Mon cœur s'emballe et mon souffle se bloque dans ma gorge. Ses yeux... Ses yeux me dévorent et pendant un court instant, je sens son pouce effleurer ma peau, et une vague de souvenirs me traverser comme une décharge. Je me ressaisis violemment. D'un geste sec, je me dégage et lui crache, le regard noir : _ COMMENT OSES-TU ME TOUCHER ? JE T'INTERDIS de refaire ce que tu viens de faire, SINON... Je me stoppe net. Il me fixe d'un air impassible avant de faire quelques pas vers moi. _ Sinon quoi ? demande-t-il d'une voix basse, presque provocante. Je recule d'un pas sans même m'en rendre compte. Ma main tremble légèrement, mais je la cache derrière mon dos. Il avance encore, le regard cloué au mien, et lâche, moqueur : _ Tu vas me gifler ? Sa voix est douce, presque moqueuse, mais je perçois l’amertume qui suinte derrière. Il s'arrête juste devant moi, si près que je pourrais
~~~~~ Cassandra Hurber ~~~~~ Je suis en train de parler à une patiente et je lui donne des conseils pour améliorer sa santé alors qu'on marché dans le couloir de l'hôpital. Mon cœur s'est allégé depuis que je suis à Boston et que je n'ai pas eu de signe de Melrick ni de Veronica. J'ose croire que ce n'est pas le calme avant la tempête. Peut-être m'ont-ils réellement oubliée. Peut-être ont-ils repris le cours de leur vie, celui qu'ils menaient sans moi depuis six ans. Je retiens un soupir, puis laisse échapper un léger souffle, presque un soupir de soulagement, en esquissant un sourire chaleureux à ma patiente. _ À très bientôt, lui dis-je doucement. Prenez soin de vous. Elle me remercie avec un sourire sincère avant de quitter la pièce. Je m'apprête à regagner mon bureau, lorsque j'aperçois un silhouette familière. Je regarde bien et... Mon cœur rate un battement. C'est Melrick. Et je comprends immédiatement qu'il m'a vue aussi, car il se lève, brusquement et se d