Dès que je suis sortie de la salle de réunion, je me suis autorisée un soupir. Ce type, Alexandre Duval peu importe son nom – il va falloir que je me le grave dans le crâne, bordel – était un problème. Un problème à surveiller de près.
J’ai traversé le couloir d’un pas rapide, croisant plusieurs employés qui me saluaient d’un respect mêlé d’appréhension. Il faut dire que j’avais vite imposé mon style : Sébastien était connu pour être charismatique, moi j’avais rajouté une touche… plus piquante. En d’autres termes, j’étais un PDG qui pouvait t’ignorer royalement ou te sortir une punchline bien sentie si tu me saoulais. Une fois dans mon bureau, j’ai refermé la porte et me suis laissée tomber dans mon fauteuil. Réfléchir. Il n’allait pas me lâcher, ce mec. Il allait vouloir me tester, me poser d’autres questions, creuser. Et ça, c’était le genre de chose qui pouvait faire exploser toute ma couverture. J’ai roulé des épaules pour évacuer la tension, puis j’ai attrapé mon téléphone. — Adam, j’ai un problème. Son soupir de lassitude en guise de réponse m’a presque fait sourire. — Encore un ? On peut au moins fêter le fait que ça a tenu plus de deux semaines sans catastrophe ? — Tais-toi et écoute. Je lui ai expliqué la situation en quelques phrases, et son silence m’a suffi pour comprendre qu’il n’aimait pas ça du tout. — Tu penses qu’il va chercher à en savoir plus ? — C’est déjà le cas. Et moi, j’ai pas envie qu’il trouve. Un léger silence. — Tu veux que je fasse quoi ? J’ai eu un sourire narquois. — Je sais pas… Tu peux pas lui faire une petite lobotomie express avec tes scalpels de chirurgien ? — Elena. — Quoi ? Je propose des solutions ! — Des solutions légales, Elena. — T’es pas marrant, tu sais ça ? — Et toi, tu devrais arrêter de jouer avec le feu. Peut-être. Mais où était le plaisir, sinon ? Le piège du soupçon Le lendemain, il était là. DANS MON BUREAU. Comme si de rien n’était. Je l’ai trouvé assis dans le fauteuil en face du mien, à l’aise, les jambes croisées, son regard trop perçant posé sur moi. — C’est quoi, une tentative de prise de pouvoir ? ai-je lancé en m’adossant nonchalamment contre le dossier de mon siège. — Je voulais juste discuter. — D’habitude, les gens demandent un rendez-vous. — Je me suis dit que ça te ferait plaisir une petite surprise. J’ai haussé un sourcil. — C’est marrant, moi qui croyais que les psychopathes faisaient des surprises comme ça. Il a ri doucement. — Rassure-toi, je suis loin d’être un psychopathe. Juste un homme… curieux. Oh, celui-là, il allait me fatiguer. — Curieux de quoi ? Il s’est légèrement penché en avant, posant ses coudes sur ses genoux. — Curieux de toi, Sébastien. Tu es différent. — Et toi, t’as beaucoup trop de temps libre, visiblement. Son sourire s’est élargi. — Tu sais, je me suis amusé à regarder quelques vidéos des anciennes réunions où tu parlais. Alerte rouge. — Et alors ? — Disons que c’est fascinant… de voir à quel point on peut changer en peu de temps. Il testait ma réaction. Il voulait voir si j’allais paniquer, si j’allais me trahir. Alors, j’ai pris une grande inspiration et j’ai haussé les épaules. — J’ai pris des cours de théâtre. Ça se voit tant que ça ? Son rire a résonné dans la pièce. — Tu es amusant. — Merci. T’as fini ton interrogatoire, l’inspecteur Colombo ? Il a secoué la tête, toujours avec ce foutu sourire. — Pour aujourd’hui, oui. Mais je reviendrai. Je l’ai regardé se lever et sortir, me laissant seule dans mon bureau, avec une seule certitude : Ce mec allait me causer plus de soucis que prévu. Et j’allais devoir être encore plus maligne que lui pour ne pas tomber dans son piège. Dès que la porte se referma derrière Alexandre, Elena ferma les yeux et laissa échapper un soupir. Elle bascula sa tête en arrière contre le dossier de son fauteuil, fixant le plafond, luttant contre la chaleur indésirable qui lui montait aux joues. Putain Il est beau ..! Elle était en train de rougir. Rougir. J’ai failli succomber à son charme..! C’était une réaction idiote, stupide, insensée. Alexandre n’était pas censé lui faire cet effet. Ce type était un emmerdeur de première, un fouille-merde perspicace, et surtout… un danger. Alors pourquoi son cœur tambourinait-il dans sa poitrine comme un foutu tambour de guerre ? Elle ferma les yeux un instant, prenant une inspiration lente pour retrouver son calme. Il ne fallait pas qu’elle perde pied maintenant. Pas à cause de lui. Son jeu avec Alexandre était censé être un duel intellectuel, une partie d’échecs où chacun cherchait à déstabiliser l’autre. Sauf que là, c’était elle qui se faisait avoir. Il s’était rapproché, l’avait regardée droit dans les yeux, et cette foutue phrase qu’il avait lâchée avant de partir… “Je ne lâche jamais une énigme qui m’intrigue.” Ce salaud savait exactement ce qu’il faisait. Il voulait la pousser à la faute, la forcer à réagir. Et bordel, ça marchait. Merde, Elena. Ressaisis-toi. Elle secoua la tête, tentant de chasser cette chaleur agaçante de son visage. Puis, par réflexe, elle attrapa un dossier sur son bureau et le feuilleta machinalement, comme si se plonger dans le travail pouvait effacer la sensation du regard perçant d’Alexandre sur elle. Mais même en lisant les lignes de chiffres et de rapports, une seule pensée persistait dans son esprit : Alexandre Duval va me rendre folle. Pendant ce temps, Alexandre avançait dans le couloir avec un léger sourire en coin, le regard pensif. Il avait vu ce qu’il voulait voir. Le léger trouble dans les yeux de “Sébastien”, cette seconde d’hésitation imperceptible, et surtout… ce rougissement furtif. Oh, il était bon pour masquer ses émotions, ce prétendu PDG. Il jouait le jeu avec brio, usant de sarcasme et d’arrogance comme d’un bouclier. Mais Alexandre adorait les défis. Et maintenant, il en avait la confirmation : il y avait quelque chose à percer chez Sébastien. Ou plutôt… chez Elena.Son regard se promena rapidement dans la pièce jusqu’à ce que quelque chose attire son attention. Une photo. Elle s’approcha du buffet et l’attrapa. Son cœur rata un battement. Sébastien était dessus, en train d’embrasser un homme. Un inconnu. Un très beau jeune homme, aux yeux verts perçants et à la chevelure blonde soignée. Elena fronça les sourcils, une sensation étrange l’envahissant. — Sébastien… Pourquoi tu ne m’as jamais parlé de lui ?murmura-t-elle pour elle-même. Un bruit la tira de ses pensées. Son corps réagit instinctivement. Elle se plaqua contre le mur, son souffle contrôlé, ses muscles tendus. Des pas résonnèrent dans le couloir. Un homme entra dans la pièce. Il avançait d’un pas lent, détendu. Son regard vert balaya la pièce alors qu’il se dirigeait vers le bar. Il se servit un verre de whisky sec, puis resta un instant immobile, les yeux fixés sur la baie vitrée. Un sourire effleura ses lèvres. — Tu as mis du temps à venir,
Elle savait ce qu’elle venait chercher. ✔ Tenue d’infiltration noire, résistante et souple, parfaite pour les déplacements silencieux.✔ Pistolets à fléchettes tranquillisantes, pour neutraliser sans tuer.✔ Mini-explosifs et gadgets de diversion.✔ Dispositif de vision nocturne et thermique.✔ Kit de crochetage et outils électroniques de piratage. Tout était prêt. Mais elle savait que, cette fois, elle ne pourrait pas agir seule. Elle sortit son téléphone et composa rapidement un numéro. — J’ai une mission. J’ai besoin de toi Lyam De l’autre côté, une voix calme mais assurée répondit. — Je t’écoute. — Je vais devoir infiltrer une maison ultra-sécurisée. Vingt gardes, des caméras partout. Je veux un accès à distance pour les neutraliser. — Facile. Tu veux un blackout total ou un accès progressif ? — Progressif. Je veux pouvoir réactiver
Son sourire s’agrandit alors qu’elle s’appuya contre le dossier du canapé. — J’aime bien quand je le contrôle comme ça… Un frisson d’excitation parcourut son échine. Elle commençait enfin à être elle-même. Dehors, Alexandre démarra brutalement la voiture. Ses mains agrippaient fermement le volant, sa mâchoire était serrée. Il aurait dû rester. Il aurait dû la confronter jusqu’au bout au lieu de partir comme un idiot. Mais cette femme… Elle l’avait piégé dans son propre jeu. — Pourquoi je réagis comme ça ? Il appuya sur l’accélérateur, les rues défilant sous ses yeux. — C’était l’occasion parfaite de mettre les choses au clair. De lui dire que cette foutue blonde ou plutôt Lucie ne signifiait rien. Il passa une main nerveuse dans ses cheveux. — Mais au lieu de ça, j’ai perdu mon sang-froid… Putain ! Un coup sec sur le
Mais elle aussi était bornée. — Très bien, alors prouve-moi que tu ne seras pas un fardeau. Elle croisa les bras, le regard perçant. — Si tu viens avec moi, tu suis mes ordres. À la lettre. Pas de décisions stupides, pas de gestes impulsifs. Tu fais ce que je te dis, quand je te le dis. Elle s’approcha encore plus, réduisant la distance entre eux. — Sinon, je te laisse sur le carreau. Alexandre la fixa quelques secondes, analysant son visage. Puis un sourire en coin apparut sur ses lèvres. — Je savais que tu finirais par accepter. Elena leva les yeux au ciel, exaspérée. — Ne me fais pas regretter cette décision. La mission venait de prendre un tournant inattendu. Elena avait accepté. Du moins, en apparence. Elle avait croisé les bras, jeté un regard agacé à Alexandre et lâché ce “D’accord, mais tu suis mes ordres”, comme s’il avait ré
—C’est impossible, il a été piégé c’est le seul moyen que je peux constater, murmura-t-elle, comme un souffle, à peine audible. Elle secoua la tête, refoulant la panique qui montait en elle. Il doit y avoir une autre explication. Elle se leva brusquement, comme si la révélation la faisait se redresser instinctivement, prête à chercher une échappatoire. Elle observa la photo une nouvelle fois, cherchant à comprendre. Si ce gamin avait un lien avec Sébastien, cela signifiait que tout ce qu’elle pensait savoir sur lui venait d’être renversé —Si on part de cette hypothèse… Que Sébastien a vendu une partie de ses actions, peut-être que c’était pour l’enfant. Peut-être qu’il avait l’intention de protéger ce petit. D’une manière que personne n’aurait imaginée. Alexandre hocha lentement la tête, semblant réfléchir aux implications de ses propres paroles. —C’est possible. Mais il reste encore trop de zones d’ombre L’atmosphère était
Avant qu’elle ne ressente cette jalousie insupportable, ce trouble, cette peur d’aimer. Elle pleura parce que Sébastien lui manquait. Son frère… Son repère. Elle aurait tout donné pour qu’il revienne, pour ne plus porter seule ce poids sur ses épaules. Elle aurait voulu être encore dans sa base militaire, loin de toutes ces intrigues, loin de cette vie de manipulation et de faux-semblants. Ses missions lui manquaient. Ses entraînements, l’adrénaline, le danger, ses camarades… Là-bas, elle savait qui elle était. Ici, elle se perdait. Elle renifla, passa rageusement ses mains sur son visage pour effacer les traces de ses larmes. Puis, elle se redressa lentement. “Reprends-toi, Elena. T’as pas le droit d’être faible.” Elle fixa son reflet dans l’eau, son regard brûlant de détermination. Elle allait tout remettre en ordre.