Chapitre 7

Lucien a raccompagné Léa chez elle, et tout le long du trajet, son front s'est couvert d'une ombre inquiète.

Léa s'est sentie épuisée, sans envie de lui parler, tout était clair comme de l'eau de roche dans son esprit.

Après cinq ans de mariage, elle avait bien compris le tempérament de Lucien.

Il avait de grandes ambitions, un fort besoin de contrôle, et il était incapable de tolérer la moindre chose qui lui échappait.

Souvent, ce genre d'homme se laissait séduire par le vertige du danger : tout sous contrôle, mais toujours au bord du gouffre, grisé par cette excitation extrême.

À présent, Lucien avait découvert qu'Élise testait ses limites.

Il retenait sa colère ; il ne parvenait même pas à maîtriser ses expressions.

Arrivés devant la villa, Léa est descendue de la voiture.

« Léa, j'ai encore quelque chose à régler. Attends-moi pour dîner ce soir, je passerai du temps avec toi après. »

Lucien a lancé cette phrase, puis a démarré aussitôt.

Léa est restée immobile, regardant la voiture disparaître au bout de la rue avant de se retourner et de rentrer.

Dans la salle à manger, quelques gélules reposaient calmement sur la table, et un verre d'eau tiède était devenu froid.

Léa s'est tenue au bord de la table, le regard perdu, revoyant sans cesse les images de Lucien lui parlant avec douceur au fil des ans.

Le charme s'était brisé. À présent, ces souvenirs lui semblaient effrayants.

Pendant cinq ans, il l'avait cajolée pour qu'elle avale son propre poison — combien son cœur avait-il été cruel ?

Et si l'on y pensait bien, combien avait-il dû aimer Élise pour accepter de se priver d'héritiers pour elle ?

Léa a pris une profonde inspiration, refoulé son sarcasme, sorti son téléphone pour prendre une photo et appelé un livreur afin d'envoyer les gélules à Manon pour analyse.

En attendant, elle répondait aux innombrables messages reçus sur la plateforme de revente.

Une fois le colis récupéré par le livreur, Léa est montée se doucher, a changé de vêtements, et s'est enfin débarrassée de l'odeur de Lucien sur sa peau.

C'était alors que la domestique lui a rappelé, pour la troisième fois, que le déjeuner était prêt.

Léa est descendue, a mangé à peine quelques bouchées, puis a posé ses couverts et appelé une domestique : « Préviens tout le monde, vous serez en congé à partir de demain. Merci d'attendre les instructions qui suivront après le 18. »

« Hein ? Madame, vous nous donnez autant de jours de congé… vous n'allez pas nous renvoyer, n'est-ce pas ? »

« Je veux simplement vous offrir du repos, ne vous inquiétez pas. »

« Alors… »

La domestique, soudain inspirée, a frappé dans ses mains, « Ah ! Vous voulez sûrement préparer une grande surprise pour Monsieur à l'occasion de votre anniversaire de mariage ! »

Sans attendre la réponse de Léa, elle a ajouté avec admiration : « Comme c'est beau, après tant d'années, vous pensez encore l'un à l'autre avec autant d'amour… »

Léa est restée muette.

Mais c'était sans doute l'explication la plus commode pour tromper tout le monde.

Alors, elle l'a laissée croire cela.

Soudain, l'écran de son téléphone s'est allumé : un message de Manon est apparu.

Elle avait bien reçu les gélules, accompagné d'une série de « salutations » adressées à Lucien.

« Ce salaud de Lucien me dégoûte ! »

« Quelle différence entre lui et un animal en rut ? »

Léa a ouvert la conversation et a découvert plusieurs photos…

Le détective privé avait trouvé un excellent angle : une silhouette en costume, juste à côté d'une portière ouverte.

Si l'on n'y voyait pas des jambes gainées de bas noirs enroulées autour de sa taille, la scène aurait presque paru décente.

Une violente nausée l'a saisie, et Léa s'est levée en hâte, la main sur la bouche, pour courir aux toilettes.

Elle a vomi longuement, presque vidée, s'appuyant sur le lavabo pour rester debout.

Le goût du sang dans sa gorge semblait provenir d'un cœur à vif.

Léa a serré le bord du lavabo jusqu'à en blanchir les phalanges, au bord de la rupture.

Elle avait partagé son lit pendant cinq ans avec un homme aussi sale et répugnant !

…

En fin de journée, Lucien est rentré chez lui.

Léa s'est installée sur le canapé, regardant la télévision avec la même nonchalance habituelle.

Entendant un bruit, elle a levé paresseusement les yeux et a demandé : « Pourquoi as-tu changé de tenue ? »

Lucien s'est figé, une expression de panique traversant son visage.

« Rien ne peut échapper aux yeux de ma femme ! »

Il a baissé la tête pour changer de chaussures, puis a relevé les yeux avec un sourire et a dit : « Aujourd'hui, l'assistante m'a servi du café et l'a renversé sur moi par accident. »

« Hmm. »

Léa a répondu d'un simple « hmm » et a reporté son regard sur la télévision.

Mais en réalité, elle ne regardait pas la télévision.

Tout à l'heure, le compte personnel d'Élise avait publié deux photos, l'une dans la voiture, l'autre dans un hôtel.

Avec la légende : « Où tu es, là est l'amour. »

Ces deux dernières années, Élise avait séduit des millions de fans avec son image de femme d'affaires forte. Ce soir, ces photos apparemment amoureuses ont immédiatement attiré l'attention en ligne.

Tout le monde a reconnu que la voiture était un Cayenne et l'hôtel une suite présidentielle cinq étoiles.

Sur les deux photos, le bras d'un homme portant une montre de luxe laissait libre cours à l'imagination.

Seule Léa savait qu'Élise la provoquait ouvertement.

Mais Élise s'était heurtée à un mur.

Léa, en tant que première génération d'influenceuses, savait manier l'opinion publique en ligne, les actions d'Élise n'étaient qu'un petit jeu.

Elle avait mille façons de faire en sorte qu'Élise se tire une balle dans le pied.

De l'autre côté, Lucien, voyant que Léa ne lui prêtait plus attention, est monté se doucher.

Dans la salle de bains, la vapeur enveloppait la pièce.

Lucien a fermé les yeux, laissant l'eau chaude ruisseler sur sa tête, tandis que ses pensées s'égaraient.

Aujourd'hui, il avait appris que Léa avait rencontré Élise et était allée à l'hôpital pour des examens, la panique qu'il avait ressentie alors ne l'avait toujours pas quitté.

Il craignait que Léa ne découvre toute la vérité, qu'il la perde complètement.

Au départ, il avait suivi les plans d'Élise pour approcher Léa, et même lui, après tant d'années de relation, n'avait pas prévu qu'il deviendrait incapable de se passer d'elle.

Alors, il était allé voir Élise avec une rage contenue, l'avertissant de rester loin de Léa ; il refusait que quiconque perturbe son mariage.

Mais Élise avait pleuré, d'une manière pitoyable.

« Lucien, je regrette vraiment… je n'aurais pas dû te laisser à Léa… »

« Si je pouvais tout recommencer, je ne demanderais rien d'autre : je veux seulement toi. Ni l'argent ni le pouvoir ne valent rien à côté de toi… »

« Lucien, je te promets que je ne briserai pas votre mariage, mais… je t'en prie, laisse-moi encore un peu de toi. Je te promets que, quand tu hériteras d'Industrie Solénautique, je tracerai définitivement la ligne. »

« … »

Les yeux d'Élise, pleins de larmes et d'amour, le rendaient incapable de résister.

Pendant toutes ces années, il avait volontiers aidé Élise à réaliser son plan ; cela montrait qu'il l'aimait profondément. Comment pourrait-il refuser une supplique si humble ?

Alors, il s'était laissé aller, allant jusqu'à accepter de passer une semaine avec elle.

Lucien avait pris la décision de bien cajoler Léa une fois tout cela terminé.

…

Après le dîner, Léa a trouvé une excuse pour monter à l'étage.

Lucien l'a soudain appelée, avec une pointe de regret dans la voix : « Léa, je dois partir en voyage d'affaires la semaine prochaine. À mon retour, je passerai du temps avec toi. »

« J'ai compris. »

Sur ces mots, Léa a monté les escaliers, le regard froid.

Lucien s'était noyé dans son petit paradis de douceur, oubliant tout.

Le 14 avril arrivait la semaine suivante : c'était l'anniversaire du décès de sa mère, chaque année, Lucien l'accompagnait pour le commémorer.

Mais il valait mieux qu'il ait oublié, cela lui évitait d'avoir à trouver une excuse pour refuser.

En entrant dans sa chambre, Léa a vu que ce numéro inconnu lui envoyait des messages en continu.

« Tu pensais pouvoir semer la discorde en provoquant Lucien ? Je devrais plutôt te remercier, aujourd'hui il m'a parfaitement choyée. »

« La semaine prochaine, c'est l'anniversaire de la mort de ta mère. Tu n'as pas à t'inquiéter, Lucien n'a pas le temps de t'y accompagner. »

« Si l'esprit de ta mère te voyait ainsi, si faible, ne serait-elle pas en colère ? »

Ces quelques messages ont frappé le cœur de Léa comme un instrument contondant, la laissant en lambeaux.

La famille des Dubois avait été détruite à cause de ce couple, et Élise osait encore mentionner l'anniversaire de la mort de la mère de Léa avec arrogance ?

La douleur la plus profonde de Léa avait été réduite en ridicule et foulée sans retenue.

Sa haine l'étouffait, et elle serrait son téléphone si fort qu'elle semblait vouloir le briser.

Léa a ouvert l'application de messagerie et a passé un appel vocal.

Bientôt, une voix joyeuse est parvenue : « Boss, tu t'es enfin rappelée de moi ! C'est… »

« Fais-moi un service. »

Léa, la voix rauque, a interrompu froidement : « Il y a une femme qui m'a mise en colère, et je ne veux pas qu'elle profite de la situation. »