L’amour, ma plus belle prison

« Léa, ne fais pas semblant de ne pas le savoir, ton mari est encore sorti avec une autre femme ! »

« Lucien est vraiment un bon mari, il t'a offert tant de choses, et il n'a pas oublié de te préparer une grande surprise pour le printemps ! »

« Tu continues ton live d'ouverture de colis ? Tu ferais mieux de diffuser ta chasse au mari infidèle, je serai la première à t'envoyer un cadeau ! »

« … »

Le soir du 3 avril.

Léa venait juste de commencer son direct quand une vague de spectateurs a envahi le chat de commentaires.

Depuis deux ans, Léa en avait vu tellement qu'elle ne les comptait plus.

Au début, elle essayait de se défendre, les joues brûlantes de honte.

Mais à présent, elle avait appris à faire semblant de ne pas voir les questions gênantes et à ne répondre qu'à celles qu'elle choisissait.

Les messages continuaient à défiler…

Elle savait que Lucien était encore sorti à une réception avec Élise Laurent, toujours dans cet endroit qu'ils fréquentaient autrefois.

Avant, Lucien la prévenait toujours, mais ce soir, elle n'avait reçu aucune nouvelle.

Une agitation sourde l'a gagnée, elle a saisi un colis au hasard et l'a ouvert. Et au moment où elle a vu le contenu, son visage a blêmi.

Impossible !

Ils étaient mariés depuis cinq ans, et elle n'avait jamais été enceinte.

Mais le test de paternité concernait Lucien et un petit garçon de quatre ans : le résultat montrait une probabilité de 99,99 % qu'ils soient père et fils.

La lumière vive autour d'elle rendait son visage sans maquillage encore plus livide.

En panique, elle a aussitôt coupé le direct, a saisi le document et est sortie, se dirigeant vers le lieu où Lucien participait à la réception.

…

La nuit s'est épaissie.

Sous les arcades du jardin, la lumière était faible et la brise du soir portait une odeur de fumée de cigarette.

« Tu vas trahir les efforts d'Élise en agissant ainsi ! »

Ces mots ont arrêté Léa net : c'était la voix de Lucas Perrin, le meilleur ami de Lucien.

« Tu passes ton anniversaire de mariage avec Léa chaque année, mais cette soirée pour célébrer la reprise de l'entreprise familiale, c'est unique ! Élise s'y prépare depuis longtemps, et toi tu veux partir retrouver cette femme laide ? »

« Et puis, tu ne l'as épousée que pour écarter les obstacles devant Élise. Maintenant que vous avez atteint le sommet ensemble, il est temps de dire adieu à Léa. »

« Ça suffit. »

Lucien s'est montré agacé et a dit : « Ne reparle plus du passé. Élise a obtenu ce qu'elle voulait, et je dois désormais assumer ma responsabilité envers Léa. »

« À peine cinq ans se sont écoulés, et tu as déjà pris ton rôle trop au sérieux, tu as tout oublié ? »

Lucas a éclaté d'un rire moqueur et a dit : « C'est toi qui as détruit la famille des Dubois, qui as poussé la mère de Léa à la dépression et à la mort. Tu as même utilisé le poison le plus cruel pour la rendre stérile. Pour Élise, tu as tout sali, tout détruit. »

« Et maintenant, tu dis que tu veux mener une vie tranquille avec Léa ! Lucien, ton idée est tout simplement insensée ! »

« Ce que je dois à Léa, je le rembourserai avec le reste de ma vie. »

Lucien a répondu sans la moindre hésitation, comme s'il avait déjà préparé sa réponse depuis longtemps.

Mais il n'avait pas songé à savoir si Léa voulait de sa compensation.

Léa serrait les lèvres, sans se rendre compte que ses lèvres saignaient légèrement. Une colère et une douleur tumultueuses l'ont presque submergée en un instant, et son esprit est devenu vide.

Comme une noyée, elle a eu beau se débattre, elle n'arrivait plus à respirer, chancelant sur ses jambes.

Son corps a vacillé et son épaule a heurté le mur de briques froides.

En un instant, son monde entier s'est effondré. Tous les souvenirs tendres avec son mari se sont retournés contre elle comme des lames aiguisées, la laissant saigner de l'intérieur.

À dix-huit ans, au moment où elle était tombée amoureuse de Lucien, elle n'avait été qu'une idiote, une marionnette dans une comédie cruelle.

Pendant cinq ans de mariage, l'amour de Lucien était arrivé comme une tempête, violent et aveuglant, l'emportant sans qu'elle comprenne où elle allait.

Elle avait été aveuglée, incapable de voir que ce mariage dont elle était si fière n'était qu'un mensonge entaché de sang…

Léa a essuyé ses larmes d'un geste rageur, s'est retournée et est partie, disparaissant dans la nuit.

De l'autre côté, Lucien a eu comme un pressentiment et a regardé machinalement vers l'angle du couloir. Une mite s'y débattait, se heurtant follement contre une lanterne.

Rien d'autre ne paraissait anormal.

À ce moment-là, quelqu'un a crié depuis le salon privé : « Élise est ivre, Lucien, raccompagne-la chez elle ! »

Lucien a baissé les yeux, a écrasé sa cigarette dans le cendrier et a répondu : « D'accord. »

…

Léa avait l'esprit en plein chaos, sans savoir comment elle était rentrée chez elle.

À peine rentrée, elle a reçu un message de Lucien : « J'ai trop bu ce soir, je dors chez Lucas. »

Léa n'a pas répondu. Serrant son téléphone, elle est montée à l'étage et est entrée sans hésiter dans le bureau.

D'ordinaire, Lucien prétextait la protection de documents importants pour lui interdire de toucher à son ordinateur.

À cet instant, la lumière de l'écran s'est reflétée dans ses yeux, rendant la haine et la culpabilité qu'elle ressentait encore plus intenses.

Dans un dossier caché de l'ordinateur, se trouvaient les preuves de la manière dont Lucien avait détruit la famille des Dubois !

Trois ans plus tôt, la famille des Dubois avait fait faillite. Son grand-père s'était suicidé en se jetant du haut d'un immeuble, et la même année, sa grand-mère était morte de chagrin.

Sa mère, fille unique de la famille, était déjà fragile. La perte de ses parents l'avait complètement détruite.

Encore aujourd'hui, Léa se souvenait clairement du regard de sa mère, plein d'amertume et de regret, au moment de sa mort.

Elle comprenait enfin que cette douleur silencieuse n'était que la dernière trace d'orgueil d'une mère voulant préserver le bonheur conjugal de sa fille.

Et elle, telle une idiote, avait vécu dans le mensonge, comblant d'amour son « ennemi », rêvant de fonder une famille et de vieillir à ses côtés.

Le plus risible, c'était que Lucien ne l'avait jamais aimée.

Cette année-là, Lucien lui avait présenté Élise en disant qu'elle était sa partenaire d'affaires.

Élise était l'assistante générale du Groupe Bernard et dirigeait aussi le service des relations publiques. Alors, quand des rumeurs avaient circulé à propos de leur proximité, Léa n'y avait pas prêté attention.

Après tout, une femme aussi éclatante qu'Élise, resplendissante et lumineuse comme une rose, faisait naître des pensées équivoques chez quiconque voyait un homme se tenir à ses côtés.

Mais en réalité, ils se connaissaient depuis bien longtemps…

« Hein… »

Léa a ricané de sa propre naïveté. C'était parce qu'elle avait eu une confiance aveugle en Lucien qu'elle avait été trompée, manipulée par ce couple ignoble.

« Lucien, tu m'as tellement trompée… »

En un éclair, elle a eu l'impression que ses entrailles étaient broyées, déchirées, réduites en morceaux, au point de vouloir mourir.

Tout son amour s'est dissipé en poussière, se mêlant à ses sanglots étouffés pour se perdre dans la nuit…

Jusqu'à ce que l'aube grise apparaisse, et qu'un premier rayon de lumière tombe dans la pièce.

Un rappel est apparu en bas de l'écran : « Il reste 14 jours avant le 18 avril, date de la succession familiale. »

Lucien nourrissait une attente immense pour ce jour.

Léa savait mieux que quiconque combien Lucien avait travaillé pour ce moment.

Le jour de la succession coïncidait avec leur anniversaire de mariage : quelle belle journée pour célébrer à la fois la famille et la carrière…

Un sourire ironique s'est dessiné au coin des lèvres de Léa, et dans ses yeux rougis s'est répandue une haine absolue.

Puisqu'elle se trouvait déjà en enfer, elle a décidé de l'y entraîner avec elle, au moment le plus heureux de sa vie.

« Lucien, c'est toi qui l'as dit », a murmuré Léa calmement, les larmes coulant sur ses joues, la voix rauque : « Tu devrais passer le reste de ta vie à me rembourser. »

Une demi-heure plus tard, Léa est sortie lentement du bureau, tenant la clé USB contenant les fichiers copiés.

De retour dans la chambre principale, elle a aplati le test de paternité froissé et a pris une photo avec son téléphone avant de l'envoyer à son amie Manon Petit.

« Aide-moi à rédiger une convention de divorce. Lucien est en tort, je veux obtenir ce que je mérite. »

À peine le message envoyé, Manon l'a immédiatement appelée.

« Léa, le premier avril est passé depuis trois jours, ce genre de blague n'a rien de drôle ! »

« Je ne plaisante pas », a répondu Léa d'une voix basse et ferme.

Léa a tiré les rideaux, la lumière du soleil lui a brûlé les yeux et elle les a plissés légèrement.

« Je vais divorcer de Lucien. »

Elle ne voulait pas seulement divorcer, elle voulait aussi le voir déchu, incapable d'hériter de l'entreprise familiale.

La souffrance qu'elle avait endurée, elle comptait la lui rendre au centuple.

« Toi… » Manon est restée un instant silencieuse avant de pousser un long soupir : « Ce n'est pas une petite affaire. On ne peut pas en parler au téléphone, voyons-nous pour en discuter. »

« D'accord, choisis le lieu. »

Après avoir raccroché, Léa a entendu en bas la voix de la domestique saluant Lucien.

Léa a rangé le test de paternité, et alors que le froid en elle commençait à se dissiper, Lucien l'a prise soudain dans ses bras par derrière. Un léger parfum de gel douche à la rose a effleuré aussitôt ses narines.