Chapitre 3

« Merci. J'accepte cette invitation. »

J'ai perçu la surprise fugace dans le regard du messager, et une étrange satisfaction m'a envahie.

« Quand est-ce que vous commencez ? »

« Dans une semaine. »

Après son départ, j'ai rangé soigneusement l'invitation et ai commencé à envisager l'avenir.

Puisque Kade ne me voyait qu'en tant que remplaçante, je n'avais plus à gaspiller ma jeunesse dans cette relation mensongère.

La Meute de la Crête d'Argent était plus puissante que la Lune Noire, et le poste de Guerrière en chef qu'elle m'offrait était bien plus prometteur que ma situation actuelle.

Après avoir fait rapidement mes bagages, j'ai pris la route jusqu'aux quartiers des vétérans, à la lisière du territoire.

« Anya ? » Mon père, à la fois surpris et ravi de me voir, a ouvert la porte, « Qu'est-ce qui t'amène à cette heure-ci ? »

Son teint était plus pâle que la dernière fois, et sa toux, aggravée par ses vieilles blessures, semblait plus prononcée.

« J'ai une bonne nouvelle », ai-je dit en soutenant son bras légèrement tremblant, « la Crête d'Argent m'a offert le poste de Guerrière en chef. »

Il était pris d'une quinte de toux, si violente que je lui ai tapoté rapidement le dos.

« Bien, très bien ! J'ai toujours su que ma fille était la plus forte des guerrières ! »

Une fois calmé, il a froncé les sourcils : « Mais qu'en est-il de ta relation avec Kade ? »

Mon sourire s'est figé : « De quelle relation parles-tu ? »

« Ne joue pas à l'innocente avec moi », a-t-il dit, le visage grave, « il doit organiser la Cérémonie de l'Union au plus vite, c'est la seule façon d'asseoir ta position. Trouve le temps de l'amener me voir, je dois lui parler. »

Une vague d'amertume m'a envahie. Mais pour ne pas l'inquiéter, je me suis contentée d'un hochement de tête.

...

Lorsque je suis retournée à la Maison de l'Alpha, Kade venait juste de se réveiller. Les stigmates de la gueule de bois le laissaient défait, ses mèches blondes éparses tombant sur son front.

« Anya ? » a-t-il demandé tout en se massant les tempes, « Qu'est-ce qui s'est passé hier soir ? »

« Tu as trop bu, Ryan t'a raccompagné. »

Il s'est redressé et a tendu soudain la main vers moi : « Viens ici. »

C'était le même ton autoritaire que je connaissais si bien, auquel j'avais toujours obéi sans condition. Mais maintenant, cette voix ne me soulevait que le cœur.

J'ai reculé d'instinct : « Je vais préparer le déjeuner. »

« Anya », son ton s'est fait plus vif, « j'ai dit : viens ici. »

Je me suis approchée à contrecœur du lit. Lorsque sa main m'a effleurée, je n'ai pu plus contenir la nausée qui me vrillait l'estomac.

« Qu'est-ce que tu as ? » a-t-il perçu mon anormalité, « Tu es toute pâle. »

« Rien. C'est peut-être… » Mais avant que je ne puisse finir ma phrase, je l'ai repoussé et me suis précipitée dans la salle de bain pour vomir, le corps secoué de haut-le-cœur.

Il m'a suivie, l'air inquiet, et s'est mis à me tapoter le dos.

« Je ne me sens pas bien ces derniers temps… J'ai souvent des nausées. »

« Tu ne serais pas… enceinte ? »

Ses paroles nous ont figés tous les deux.

Dans le miroir, j'avais capté l'éclair de joie fugitif qui avait traversé son regard. Il n'en avait sans doute pas conscience, mais notre lien m'avait transmis le langage silencieux de son instinct : la fierté immédiate d'un Alpha à l'idée de sa future paternité.

« Je t'accompagnerai à l'hôpital cet après-midi pour un examen », a-t-il dit.

J'ai acquiescé, puis, après une hésitation de quelques secondes, j'ai choisi mes mots avec soin : « Cet après-midi… Tu pourrais m'accompagner voir mon père ? »

Adossé au cadre de la porte, son attention était captivée par son téléphone. Il a répondu par un « Hmm » distrait.

Il avait accepté aussi facilement ? Échafaudait-il un autre plan ?

Qu'il soit sincère ou qu'il joue la comédie, le moment n'était pas venu d'abattre mes cartes. L'essentiel était, pour l'instant, de rassurer mon père.

Je suis descendue à la cuisine. Alors que je ressortais avec du lait et une baguette, Kade, déjà habillé de façon impeccable, s'apprêtait à partir.

« Réunion d'urgence à la frontière cet après-midi. Tu devras aller à l'hôpital seule. Contacte-moi par le lien mental dès que tu as des nouvelles. »

« Et pour mon père… ? »

« Envoie-moi l'adresse. » La porte qui s'est refermée derrière lui a coupé net ma phrase.

Je n'ai rien ajouté. M'asseyant à table, j'ai picoré quelques bouchées avant de perdre l'appétit.

Repoussant mon assiette, je me suis rendue directement à l'hôpital de la meute.

Dans le bureau du guérisseur, ma main tremblante a saisi le résultat : positif.

Tomber enceinte en de tels moments… La Déesse Lunaire me jouait décidément la cruauté des farces.

À travers notre lien, je percevais distinctement l'ardent désir de Kade pour cet enfant... Mais son existence allait tout compliquer démesurément…

Rangeant soigneusement le rapport dans mon sac, j'ai pris congé du guérisseur. À ma sortie de l'établissement, une voiture familière a attiré mon regard. Celle de Kade. Lui-même était au volant, semblant attendre quelqu'un.

Solène, vêtue d'une robe bleu clair, s'est dirigée vers lui d'un pas vif, un doux sourire aux lèvres.

« Kade, merci de m'accompagner », a-t-elle dit d'une voix mielleuse à faire frémir.

« Et les résultats ? » La voix de Kade était d'une douceur qui m'était inconnue.

« Tout va bien. Le bébé se porte à merveille. »

À cet instant, j'ai senti mon cœur éclater.