Chapitre 4

Quand j'ai repris mes esprits, le cristal de communication scintillait déjà.

La voix de mon père, teintée d'une excitation mal dissimulée, a résonné : « J'ai préparé ton bouillon d'os de bœuf préféré, et du chevreuil rôti aussi. »

J'ai inspiré profondément avant de m'éclipser sans un mot de plus.

Tout l'après-midi, mon père et moi avons œuvré à préparer le festin du guerrier, mijotant le gibier selon sa recette secrète.

Mais les plats ont refroidi un à un sans que Kade ne se montre. Mes tentatives de le contacter sont restés sans réponse.

En voyant l'attente dans le regard de mon père peu à peu s'éteindre, la honte m'a submergée. Sous un prétexte, je me suis rendue sur le balcon et ai forcé notre lien de compagnons. Cette fois, la connexion s'est établie rapidement.

Je suis allée droit au but : « Tu arrives ? Mon père t'attend depuis longtemps. »

On aurait dit qu'il venait tout juste de s'en souvenir : « Désolé, la réunion s'éternise. Je n'avais pas vu l'heure… »

Soudain, des rires mêlés à une musique raffinée ont filtré par le lien : ce genre de fond sonore sophistiqué propre aux clubs privés.

« Kade, goûte ça. Je l'ai fait préparer spécialement pour toi », a murmuré la voix mielleuse de Solène.

« La cuisine d'un ancien guerrier ? Tellement dépassé. Je parie qu'il ne sait même pas assaisonner correctement. »

« Solène, tu es jalouse ? » a lancé un voix taquine.

« T'inquiète pas, Anya ne fait pas le poids. Son père n'est qu'un has-been, sans aucun exploit militaire réel. »

Leurs moqueries m'ont glacée jusqu'à l'âme.

J'ai perçu le « Hmh » agacé de Kade, qui semblait consulter son téléphone.

« Arrêtez vos bêtises », a-t-il grogné, visiblement irrité.

Après le déclic d'un briquet, sa voix altérée par la fumée a repris : « Anya, je viens tout juste de devenir Alpha. Je ne peux pas me permettre de partir tôt et donner une mauvaise image. Je me rattraperai avec ton père un autre jour, d'accord ? »

Il me prenait vraiment pour une idiote ?

Quelle sorte de réunion se tiendrait avec ce fond sonore de club privé ?

Mes doigts se sont refermés inconsciemment sur le cristal de communication. Alors que je m'apprêtais à parler, des voix pressantes sont parvenues de l'autre côté : « Kade, ne traîne pas, Solène t'attend. »

Kade a écrasé sa cigarette, sa voix empreinte d'une douceur factice : « Sois sage, tu as toujours été si compréhensive. Je me rattraperai ce soir. »

Après avoir coupé la communication, je suis revenue à la table en affectant une légèreté que je ne ressentais pas.

« Il a une réunion urgente », ai-je menti en forçant un sourire.

La table était chargée des plats qu'il avait préparés. Le bouillon d'os de bœuf mijotait encore doucement, emplissant l'air de son arôme.

« Mangeons sans lui. »

« Nous ne l'attendons plus ? » m'a demandé mon père.

« Non. »

Nous avons pris place en silence. Il m'a servi une portion de soupe.

« Anya, crois-tu vraiment que Kade t'aime ? »

Cette question m'a figée net, et ma cuillère en suspens.

« Un homme qui t'aime vraiment ne te laisse jamais affronter seule la honte dans les moments importants. »

Sa voix était calme, mais chaque mot m'a transpercé le cœur comme un clou.

« Il doit vraiment être occupé... » ai-je tenté de défendre Kade une fois de plus.

« Chérie, j'ai vécu assez longtemps pour comprendre certaines choses », a-t-il secoué la tête, « je rêvais de te voir devenir Luna avec tous les honneurs. Mais si une relation manque même de respect élémentaire, je préfère te voir avancer seule. »

Il a marqué une pause avant d'ajouter, le regard appuyé : « L'honneur d'une guerrière vaut mieux qu'un faux amour. »

J'ai reposé ma cuillère et l'ai serré dans mes bras : « Papa, je sais ce qu'il me reste à faire. »

...

Quand je suis revenue à l'appartement, Kade était déjà là, sans raison apparente.

Il sortait de la cuisine, un verre de liqueur sanglante à la main.

Lorsque son regard s'est posé sur mon sac de voyage, ses pupilles se sont rétrécies brusquement.

« C'est quoi ça ? J'ai entendu que tu voulais partir pour la Meute de la Crête d'Argent ? »

Je n'ai pas nié.

Kade a refermé la distance entre nous d'un pas vif, m'attirant brutalement contre lui : « Écoute-moi bien, sans ma permission, tu ne bouges pas d'ici. »

Il a posé ses lèvres sur les miennes avec une voracité qui sentait la possession.

Je l'ai mordu sauvagement au sang : « Lâche-moi. »

Reculant sous la douleur, il s'est baissé l'instant d'après pour me jeter sur son épaule, son bras gainant mes hanches.

J'ai atterri dans le canapé en duvet, le choc coupant mon souffle.

Avant même que je ne reprenne mes esprits, il pesait déjà sur moi : « La Crête d'Argent ? Tu rêves ! Tu es MA compagne ! »

Son souffle chaud effleurait mes cils tremblants, réveillant en moi une lutte instinctive.

D'une main, il a serré mes poignets plus fort ; de l'autre, il a maintenu mes hanches agitées. Son genou a immobilisé mes jambes raidies, anéantissant toute possibilité de défense.

Il a approché ses lèvres des miennes, ses doigts parcourant ma peau avec une habitude troublante.

Ce n'était pas qu'il ne percevait pas mes émotions, il préférait régler nos conflits par la force brute, comme un loup domine sa meute.

Cela faisait quatre ans que je vivais dans l'ombre en tant que compagne secrète. À chaque dispute, cet Alpha orgueilleux dédaignait toute consolation. Et moi ? Je jouais mon rôle, cédant à la dominance de son aura.

Mais il était temps de mettre fin à cela, de briser cette comédie.

J'ai chassé le brouillard de possessivité qui obscurcissait mon esprit et l'ai repoussé de toutes mes forces : « Kade, C'EST TERMINÉ ENTRE NOUS ! »