CHAPITRE 118 — Ce qu’ils savent de moi(version longue)---AWAJe suis sortie de la salle blanche en silence.Mais rien n’est silencieux en moi.Le cri de sa voix résonne encore sous mon crâne.Amir.Ses mots. Son regard.Sa façon de me parler comme s’il me connaissait mieux que moi-même.Je traverse les couloirs, droite, rapide, le regard rivé au sol.Chaque pas est un refus.Chaque pas est un rappel : ce n’est pas moi, ce n’est plus moi.Mais alors pourquoi cette colère ne me quitte-t-elle pas ?Pourquoi ce feu, ce frisson familier, pulse-t-il à l’intérieur de mes veines comme un poison ancien réveillé ?Les murs respirent ma tension.Je la sens dans chaque regard détourné, chaque salut timide, chaque battement de cœur qui ralentit quand je passe.Ils ont vu.Ils ont compris.Ce que je suis capable de faire.Ce que je suis redevenue.Et je ne sais pas s’ils ont peur de moi… ou pour moi.Peut-être les deux.Je tourne à droite.J’entre dans la salle d’observation.Il fait sombre.Un
CHAPITRE 117 — La morsure du dedansAWAJe n’ai dormi que deux heures.À peine.Mon sang bat toujours à contretemps. Mon cœur cogne plus fort que ma raison.Je me lave les mains dans l’eau glacée, mais le rouge ne part pas complètement.Pas le vrai rouge.Pas celui que je ressens à l’intérieur.Lorenzo est en soins intensifs.Il est stable.Mais chaque bip de la machine me rappelle ce que j’ai failli perdre.Chaque seconde me renvoie au manque.Et ce manque-là, je ne peux pas le laisser se dilater.Pas tant que je n’ai pas compris.Pas tant que je ne l’ai pas désossé.Je sors de l’infirmerie.Je remonte le couloir central sans un mot.Même Tania ne me parle pas. Elle sait. Ils savent tous.Je suis passée de l’autre côté.Et ce n’est pas la première fois.LA SALLE BLANCHEIl est là.Assis. Les poignets liés à la chaise. Les lèvres fendues. Une arcade gonflée.Mais vivant.Je referme la porte derrière moi.Clac.Je ne regarde personne.Je veux qu’il sente que dans cette pièce, il n’exis
CHAPITRE 116 — Le feu dans le sangAWAJe marche.Non.Je traque.Chaque pas est une lame.Chaque battement de mon cœur est un tambour de guerre.Je ne pense plus. Je sens.Les murs me renvoient leur silence comme un écho coupable.Il est là. Quelque part.Celui qui a osé lever la main sur Lorenzo.Qui a visé juste. Qui a attendu l’instant.Qui connaît nos mouvements, nos angles morts.Quelqu’un de l’intérieur.Je passe devant une vitre. Je m’y regarde.Mes yeux sont…Autres.Plus noirs. Plus larges. Plus anciens.Je connais ce reflet.Je l’ai vu dans une autre vie.Dans une jungle en feu. Dans une cellule de sable.Avant qu’ils ne tentent de me briser.Ils n’ont pas réussi.Et lui non plus ne réussira pas.Je tends l’oreille.Un pas. Une respiration. Quelque chose.Un parfum.Un doute.Il ne s’est pas encore échappé.LORENZOJe flotte.Un bruit sourd bat à mes oreilles.Comme un tambour étouffé.J’ai froid.Puis chaud.Puis plus rien.Je sens une pression sur mon ventre.Un poids. Un
CHAPITRE 115 — Le seuil rougeAWAJe suis au poste central, en train de relire les notes de la mission à La Coupure.Les visages me reviennent. Leurs phrases, leurs provocations, leurs regards.Mais il y a quelque chose de plus sombre qui rôde dans ma cage thoracique.Un frisson.Un pressentiment.Je n’aime pas quand le silence se pose si proprement sur les choses.Quand tout semble tenir sans effort, comme suspendu à un fil invisible.Ça signifie souvent qu’un déséquilibre se prépare, dans l’ombre, patiemment.Ça signifie que quelque chose guette.Je me lève. Je fais quelques pas dans la salle, les bras croisés dans mon dos.J’écoute.Je n’ai pas confiance en ce calme.C’est à ce moment-là qu’un cri jaillit dans le couloir.Brut. Déchiré. Humain.Un mot.Un nom.— LORENZO !Mon cœur explose dans ma poitrine.L’IMPACTJe cours.Je bouscule une chaise, une table. Je pousse une porte qui claque contre le mur.Les murs défilent.Tout est flou. Tout est net.Une perception étrange, déform
CHAPITRE 114 — Miroirs ennemisAWAOn m’envoie là-bas.Dans la zone neutre.Trois jours de voyage. Deux frontières. Zéro garantie.La mission est simple, en apparence : établir un canal de discussion avec l’Union Sceptre les anciens adversaires, les anciens monstres. Ceux qu’on combattait pendant que l’Architecte, lui, tirait ses ficelles dans l’ombre.Ils disent vouloir la paix.Mais dans leur regard, il y a autre chose. Une attente. Une faim contenue.Et moi, on m’y envoie seule. Parce que je suis, paraît-il, « la plus capable de gérer ce genre de tension ». Traduction : la seule assez redoutée pour qu’ils écoutent.Mais ce n’est pas pour ça que j’accepte.J’y vais parce qu’au fond, je veux savoir.Est-ce qu’ils ont réellement changé ?Ou est-ce que, comme moi, ils ont simplement appris à cacher leurs armes sous leur peau ?DÉPARTLorenzo ne dit rien au moment où je pars.Il me regarde juste, les mains dans les poches, le regard un peu plus dur que d’habitude.— Tu crois qu’ils vont
CHAPITRE 113 — Face au noyau AWAIl m’attend.Je le sens avant même d’arriver devant cette vitre blindée, avant de percevoir l’air chargé de lourdeur qui colle aux murs.Lui. Toujours là, immobile, figé comme une statue fatiguée.Les mains croisées derrière la nuque, regard fixe sur un plafond sans vie, comme un roi déchu contemplant son royaume d’ombres.Six jours. Il n’a échangé aucun mot avec personne. Ni gardiens, ni psychologues.Mais pour moi, il attend.Il sait que je viendrai.Et moi… je viens.Pas pour implorer.Pas pour négocier.Pas pour demander pardon.Je viens pour me confronter.Pour lui prouver que je suis autre chose que la chose qu’il a fabriquée.Que je suis une femme. Vivante.Que le feu qu’il a allumé en moi, je l’ai dompté.Je descends seule.Pas d’arme. Pas de renfort.Juste la certitude nue d’être moi-même.Sans masque. Sans armure.Le couloir est long et froid. Les néons, intermittents, projettent des éclats blafards sur le béton brut.Chaque pas résonne, éch