ÉpilogueAntoine avait faim.Pas le genre de faim que l’on pouvait ressentir après une longue journée de travail dans un bureau étouffant à trier des papiers administratifs pour le patron. Non. La faim d’Antoine était bien plus... Non.En réalité, Antoine n’avait pas faim. Il ne rêvait pas d’aventure. Tout ce qu’il souhaitait à présent était de vivre une vie normale. Et de retrouver ses amis.Antoine lâcha la pioche qu’il tenait dans ses mains. Il quitta le puits de pétrole abandonné et s’élança dans le désert.— Marianne ! appela-t-il. Josie !Mais personne ne lui répondit. Autour de lui, il n’y avait qu’un lourd silence qui étouffait ses cris.— Jonathan ! Yvan ! Mathieu !Il continua sa course folle, sans se retourner.— Où êtes-vous ?
PrologueAntoine avait faim.Pas le genre de faim que l’on pouvait ressentir après une longue journée de travail dans un bureau étouffant à trier des papiers administratifs pour le patron. Non. La faim d’Antoine était bien plus forte. Il était tout de même étonnant d’être surpris en premier lieu par la faim quand le métier consistait à donner des coups de pioche dans ce qui ressemblait à un puits de pétrole vide et abandonné au milieu d’un désert aride et brûlant. Pour Antoine, un être humain normal devait surtout avoir soif dans ce genre de situation. Ce n’était pas la seule chose qu’il présumait d’ailleurs. Petit déjà, il supposait que les gens n’étaient pas ce qu’ils semblaient être, que le ciel cachait des bestioles à tentacules verts, et qu’il n’était pas normal pour un enfant de son intelligence d’aller à l’école – et son père avait supposé qu’il serait mieux pour lui d’arrêter de dire des conneries s’il ne voulait pas s’en p
Livre I Le Cimetière des Affamés L’oeil du Guépard Le garçon roux marchait tranquillement dans les couloirs du lycée. Après quelques minutes, il arriva dans le hall principal de l’école. Grattant machinalement sa longue tignasse, il observa l’horloge électrique accrochée au mur. Dix-sept heures trente-deux. Personne n’avait cours après dix-sept heures. Bien. Très bien, même. Il pénétra dans un long corridor faiblement éclairé, et jeta un coup d’œil attentif aux numéros de salles devant lesquelles il passait. C56, C58, C60… C62. La voilà : C62. La salle de sciences — ou d’expérimentation si l’on se fiait à l’appellation pompeuse des professeurs. Pour le jeune homme, c’était plutôt la salle de l’ennui et de la perte de temps. Il s’approcha de la porte et posa sa main sur la poignée. Puis il s’immobilisa et tendit l’oreille. Aucun b
Main GaucheUn ciel noir. Des dunes de sable. Quelques cailloux par-ci par-là. Cela faisait peut-être plusieurs heures que Mute marchait et le paysage n’avait pas changé d’un poil.Un individu normal aurait vite trouvé ça monotone. Mais pas Mute. Le cow-boy aux cheveux écarlates n’y voyait aucun inconvénient. D’une part parce qu’il n’avait aucune mémoire et, d’autre part, parce qu’il n’avait aucune notion du temps. Le désert l’apaisait.Le réel problème était sa gorge, plus sèche que le soleil, et sa gourde, plus vide que le désert. Mute se gratta le menton et fronça les sourcils. Il appuya doucement son index contre son cou et soupira. Mute pensait présent et, à présent, il avait soif. Mute souffla du nez et tapa du pied. Il s’assit au sol et fit la moue. Il voulait boire et il ne bougerait pas tant qu’on ne lui aurait pas donné ce qu’il voulait. Il était impossible de marcher dans ces conditions.
RéveilLe noir. Un rugissement lointain. Son cœur battait à toute vitesse. Ses yeux ne voulaient plus s’ouvrir. Il avait du mal à respirer. L’odeur du sang. La douleur. Était-il en train de mourir ? Le moment vint où son cœur s’arrêta et il sombra dans les profondeurs infinies des ténèbres. Il avait froid. Un son strident vint lui percer les oreilles. Il s’intensifia, à la limite du supportable. Et soudain, plus rien. Le silence. Alors, il se laissa mourir.Doucement, son esprit s’endormit. Son âme rejoignait la lumière au bout du tunnel. La lumière. Il l’avait toujours imaginée différemment. La mort le perturbait depuis sa plus tendre enfance. Cela lui fit penser à son père qui n’avait jamais cru en lui. Son père qui avait pris goût à le frapper quand il ne lui obéissait pas ou qu’il parlait trop. Son père qui, contrairement à lui, n’avait jamais eu beaucoup d’imagination.Il pensa alors à tous les mystère
RencontreMute était essoufflé. Sa longue traversée dans le désert n’avait fait qu’intensifier sa soif. Il peinait à marcher droit et le soleil l’agaçait vraiment. Une fois, il avait même essayé de le faire partir en lui tirant dessus pour lui faire peur. Mais rien à faire. La boule jaune était restée de marbre.Il commençait à faiblir. Il voulait de l’eau. Juste de l’eau. Ça lui aurait vraiment fait plaisir. Mais de l’eau, il n’en voyait pas. Il n’y avait rien d’autre que du sable, des cailloux, du sable, d’autres cailloux, et encore du sable, une étendue rouge entourant une énorme flaque bleue, du sable...Mute s’arrêta et plissa les yeux. Une flaque bleue ? Heureux, le cow-boy tapa dans ses mains. Il avait trouvé de l’eau ! Haletant, il courut et se jeta la tête la première dans le petit lac. Il s’abreuva jusqu’à s’en faire mal au ventre. Il plongea sa gourde dans le bassin et la remplit à ras bord. Qu’i
PhagiasAntoine scruta les environs. Comme il s’y était attendu, l’escalier I était totalement désert. Pas d’élèves, pas de professeurs, et, surtout, pas de corps en décomposition aux cheveux roux. Cela aurait été trop simple.Il devait pourtant y avoir quelque chose. Il était impossible que tout ça n’eût été qu’un simple rêve. Il le savait, et il allait trouver de quoi le prouver. Antoine inspecta minutieusement chaque recoin de l’escalier, tout en s’assurant que personne ne l’observait. Il était censé être en cours à cette heure-ci et il serait dommage qu’il se fasse bêtement attraper par un surveillant du lycée.Il ne trouva malheureusement rien pour étayer sa théorie. Il porta alors son attention vers le couloir qui menait à la porte de sortie, à l’endroit même où Jonathan avait trouvé la mort. Peut-être pourrait-il y dénicher quelque chose, une tache de sang essuyée à la hâte ou un morceau de tissu déc
Derrière l’ascenseurQuelque chose d’inexplicable venait de se produire. C’était un sentiment plutôt étrange. Antoine n’était plus fatigué. Pire même. Il se sentait en pleine forme. Tout cela aurait pu paraître logique pour un jeune garçon en pleine santé, cela va de soi. Mais il y avait à peine quelques secondes, Antoine était si épuisé qu’il aurait été prêt à s’endormir à même le sol, au beau milieu d’un couloir du lycée. Et, soudain, tout avait disparu : sa fatigue, sa migraine et même son dégoût pour l’horrible dessin qui ornait le mur. Il ne comprenait absolument plus pourquoi le démon peint l’avait tant révulsé.Soudain, Antoine sentit qu’on le bousculait et il sortit de ses pensées. Jonathan s’était élancé vers le muet.— C’est toi qui m’as piqué mon flingue ! s’écria le jeune homme en arrachant l’arme des mains de Mute.Mais, après avoir observé le revolver d’un peu plus prè