Santoro regarda les codes défiler à une vitesse folle sans y croire.Ida Kalda, de l’autre côté de la table, n’osait pas bouger d’un pouce, tétanisée par l’ambiance ténébreuse qui l’écrasait de partout.Les deux hommes en costume blanc qui encadraient son boss étaient plus qu’étranges. On aurait dit des jumeaux, chauves tous les deux, avec des yeux en amande sans qu’ils ne soient ni chinois, ni japonais, ni rien d’autre. Ils étaient un croisement improbable entre des sous-groupes ethniques de l’espèce humaine : traits aryens ayant une couleur de peau métissée, sans ride aucun – impossible de leur donner un âge –, aux lèvres fines mais au menton fort et renforcé par une fossette identique. Ida n’avait jamais vu d’êtres comme eux. On aurait pu penser qu’ils étaient le produit d’une expérience de laboratoire. Ils semblaient être l’expression exacte du mélange de tout ce que la terre comportait de mieux. Ils n’avaie
Sa mission n’est point de fixer les croyances en formulant les dogmes comme le Pape (arcane V) ; il ne s’adresse pas aux foules et ne se laisse approcher que par les chercheurs de vérité qui osent s’enfoncer jusque dans sa solitude. A eux, il se confie, après s’être assuré qu’ils sont capables de le comprendre, car le sage ne jette pas ses perles aux pourceaux.La clarté dont dispose le solitaire ne se borne pas, du reste, à éclairer les surfaces : elle pénètre, fouille et démasque l’intérieur des choses. (Le Tarot des Imagiers du Moyen- Age, édition Tchou, 1984, par Oswald Wirth, à propos de l’Arcane IX du Tarot : l’Ermite)Théophile monta en premier les marches en parpaing de son mobil-home rouge. Stan découvrit que tout avait déjà été nettoyé, rangé et que les affaires personnelles du chef de l’Entité se trouvaient déjà à leur place. Qui l’avait fait ? Mystère. Probablement avait-il transité dans les rêves de
Stan trouva son chez lui à soixante-dix mètres de chez Théophile, dans un petit recoin ou deux mobil-homes un peu à l’écart se faisaient face, coincés contre le grillage avec le désert nocturne et silencieux au-delà et ses coyotes qui tournaient autour du camp et dont on voyait les yeux briller dans le noir.La porte de sa baraque posée sur des empilements de planches était ouverte. De la lumière en sortait, formant un grand rectangle lumineux sur le sol de sable.Sur la porte, au rouge à lèvres d’un pourpre vif, Annabelle avait inscrit STAN en gros et en majuscule. Impossible de le rater.L’Ermite dans la poche de son jean, encore tout plein d’idées contradictoires après la conversation qu’il venait d’avoir avec le boss, il monta les trois marches de bois. Et trouva Annabelle et Prisca en train de récurer sols et murs en s’éclatant comme des folles.Un poste rad
A six heures, le réveil sonna et tous les deux ronchonnèrent en même temps.Ida était en morceaux, pleine de courbatures. Claude essaya d’ouvrir les yeux sans y parvenir.—Il me faut une douche, ronronna Ida en s’enveloppant du drap pour rejoindre la salle de bain, laissant Santoro à poil sur le lit, encore prêt à l’action.Il l’était toujours, ce salaud !—Tu crois qu’on a vraiment dormi à un moment ? demanda Claude en se retournant pour essayer de gagner quelques minutes de sommeil.—Non, ronchonna Ida. Ça t’arrive parfois d’être… au repos ?—Je serais le pire des crétins de l’être devant toi ! Depuis la première fois où je t’ai vue, je suis comme ça. Ça redescen
Trish Brahms avait commencé les entretiens.L’ordre de passage de chaque agent était affiché sur le mur à la sortie de l’ascenseur. Il avait aussi été envoyé par mail à tout le personnel.Le temps d’interroger tout l’effectif, ils en avaient jusqu’à vingt-trois heures ce soir.Santoro, assis derrière son bureau, ne lui jeta même pas un petit regard et ne la salua pas, comme il le faisait pourtant avec tous les salariés qui débarquaient par l’ascenseur interne.Elle l’entendit juste dire, d’un ton froid :—Capitaine Kalda, vous avez seize minutes de retard. Soyez à l’heure demain et les autres jours.Enfoiré ! Plusieurs visages se tournèrent vers elle, surpris par le comportement de leur colonel envers un cadre supérieur du Bureau.Ida, rouge de fureur, entra dans le Centr
Stan émergea avec pour compagnon de réveil un mal de crâne pas possible. La faute à la bière. Il en avait bu au moins cinq, un record mondial en ce qui le concernait.De quoi est-ce qu’il se souvenait ? D’avoir dansé sur de la country locale en ayant mal au ventre à force de rire, d’avoir terminé de nettoyer son nouveau chez-lui, d’avoir discuté une partie de la nuit avec une Annabelle défoncée et une Prisca tendue… Et de l’avoir embrassée subrepticement tandis que leur marraine s’attardait aux toilettes.Il se retourna en s’étirant et vit Prisca dormir dans son lit, tout contre lui, au point qu’il sente sa poitrine reposer contre ses côtes. L’effet fut immédiat et il se retourna de nouveau pour garder confidentiel son état.Avec les plus infimes précautions, il se leva. Par chance, il se trouvait du côté où on pouvait sortir du lit sans enjamber l’autre.Mais qu
Les résultats aux questionnaires n’avaient rien donné de concluant… sauf pour elle et Santoro. Beaucoup d’employés du Bureau 09 avait menti sur ce qu’ils prenaient comme drogue ou des choses comme ça et c’était ce qui les disculpait.En ce qui les concernait, elle et lui, ils avaient décidé d’un commun accord de laisser leurs résultats de côté, ni l’un ni l’autre ne voulant croire à la trahison de l’autre.Ils étaient juste sur-entraînés. Voilà tout.A Trish Brahms, Santoro décida de ne pas communiquer les résultats. Elle ne moufta pas mais cela se voyait qu’elle n’était pas satisfaite de cette décision.—Comment va Prax ? demanda Ida à Claude alors qu’ils se retrouvèrent par hasard à la machine à café, trois jours plus tard.—Il est costaud, il va s’en sortir. To
L’architecture de l’Amargosa Hotel « hanté » était simplissime : un couloir central de 300 mètres de long donnait accès à des chambres à droite et à gauche.Le couloir était divisé en huit sections séparées par sept portes battantes et grinçantes. Dans chaque section, il y avait quatre portes de chambres à droite, quatre portes de chambres à gauche. Total : soixante-quatre chambres.Chaque chambre possédait une porte vitrée donnant sur une coursive extérieure avec une petite table ronde et deux chaises avec vue directe et fascinante sur le désert le plus bouillant du monde.Bien que tout soit en ruine à l’intérieur, les Kroop disposaient chaque matin les tables et les chaises devant les chambres, bien rangées, pour les touristes qui commandaient des cocas géants bien frais au restaurant et venaient les boire à l’ombre de la coursive, dans l’attente éventuelle d’un grand frisson. Toutes l