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Chapitre 9

Author: Élodie Doré
Daniel Brissaud a fixé Sylvie avec un air de dédain : « Franchement, qu'est-ce qu'elle fait là ? Elle vient se faire remarquer devant toi ? »

Alain a jeté un regard furtif à Sylvie, sans répondre.

Comparée à Héloïse, adulée par tous, Sylvie, malgré sa beauté saisissante, semblait bien terne.

À côté de l'éclatante Héloïse, elle faisait pâle figure.

« Je comprends pourquoi tu n'aimes pas rentrer chez toi, » a continué Daniel. « À ta place, moi aussi, je préférerais Héloïse. Diplômée, compétente, ambitieuse, excellente en tout. Elle surpasse Sylvie à tous les niveaux. Ta femme, elle, ne fait que dépenser ton argent et rester à la maison. »

Daniel, appartenant au même cercle qu'Alain, méprisait Sylvie depuis leur mariage. Pour lui, c'était juste une femme qui avait manipulé un homme pour grimper socialement, pouvait-elle valoir quelque chose ?

La voir s'obstiner à venir ici lui semblait ridicule.

« Qu'est-ce qu'elle fait encore là, à regarder l'interview ? » a-t-il ajouté. « Elle comprend quelque chose ? On dirait qu'elle veut se lancer dans l'aéronautique ! »

Alain lui a jeté un coup d'œil froid.

« Tu parles trop. »

Daniel a aussitôt fermé la bouche.

Thayer, voyant Héloïse entourée d'admirateurs, s'est senti fier, comme si sa gloire rejaillissait sur lui.

Si seulement Tatie Héloïse était vraiment sa mère…

Mais peu importait, tant qu'elle l'aimait plus que tout.

Sylvie a observé Héloïse, rayonnante, expliquer son travail avec aisance.

Elle avait une maîtrise parfaite de son sujet, et cela se voyait.

Sylvie a pris une profonde inspiration et a détourné les yeux.

Pas étonnant qu'Alain préfère Héloïse.

Entre une femme au foyer sans compétences et une femme brillante et ambitieuse, le choix était évident.

Et dire qu'elle n'avait pas compris cette vérité dans sa vie précédente.

Émilie, elle, fixait Héloïse, ses grands yeux ronds captivés, écoutant les conversations.

Alors cet avion… c'était elle qui l'avait conçu ? Pas étonnant que Thayer l'admire autant.

-

À ce moment-là, le téléphone de Sylvie a sonné.

Javier l'a appelée pour lui indiquer qu'il leur avait réservé une place dans une tribune avec une vue idéale pour le spectacle de chasseurs.

Sylvie a emmené Émilie directement sur place.

Pour Daniel, cela confirmait que Sylvie, consciente de ne pas faire le poids face à Héloïse, s'était éclipsée avec sa fille.

Une fois l'interview terminée, Thayer s'est précipité dans les bras d'Héloïse :

« Tatie Héloïse, t'es trop forte ! »

Héloïse l'a soulevé et a embrassé sa joue.

« Merci, mon trésor. »

Thayer, ravi, a affiché un sourire éclatant.

Tenant Thayer d'un bras, Héloïse a levé l'autre vers Alain, un air espiègle sur les lèvres :

« Frangin, avec un succès pareil, tu ne viens pas me prendre dans tes bras pour fêter ça ? »

Daniel, avec un rire forcé, s'est approché : « Quoi, je ne suis pas ton frère, moi ? »

Sans attendre la réponse d'Alain, il l'a poussé vers Héloïse pour un câlin collectif.

Les quatre, enlacés, semblaient une famille unie.

En se détachant, Daniel a proposé à Alain :

« On va manger ensemble pour fêter ça ? »

Héloïse, tenant toujours Thayer et posant l'autre main sur l'épaule d'Alain, a répondu :

« Parfait, les gars, c'est moi qui régale ! »

Sylvie et Émilie n'étaient pas encore loin.

Émilie n'a cessé de se retourner vers son père.

En se retournant, elle a vu cette scène. Elle s'est mordu la lèvre, puis a détourné les yeux, refusant de regarder davantage.

Si elle était aussi exceptionnelle que Tatie Héloïse, peut-être que son père l'accepterait.

C'était parce qu'il ne l'aimait pas qu'il n'aimait pas maman non plus, non ?

Elle ne voulait pas être un fardeau pour sa mère.

Les places réservées par Javier offraient une vue parfaite, au cœur de l'événement.

« Restez ici, le spectacle va bientôt commence. » a dit Javier en souriant. « Évitez de vous déplacer, il y a beaucoup de monde, ça pourrait bousculer la petite. »

« Merci, » a répondu Sylvie. « Va t'occuper de tes affaires, ne t'en fais pas pour nous. »

« Appelez-moi s'il y a quoi que ce soit. »

Après le départ de Javier, Sylvie s'est installée sur son siège, son regard perdu sur un avion au loin.

Le Phénix X7, magnifiquement achevé, a été mentionné plusieurs fois lors du salon.

De nombreuses personnalités du secteur ont afflué vers la zone centrale.

De loin, Émilie avait aperçu son père, Thayer dans les bras, accompagné de Tatie Héloïse, qui s'approchaient.

« Qu'est-ce que vous faites là ? » a lancé Thayer en voyant Émilie, avec un air de dédain.

Comment sa mère et elle pouvaient-elles être assises ici ?

« Cet endroit est réservé aux gens importants. Vous êtes entrées toutes seules, attention à ne pas vous faire expulser ! »

« Et les bonnes manières ? » a dit Alain, le ton neutre mais autoritaire.

Bien qu'il chérisse Thayer, ce dernier le craignait profondément.

Il s'est tu, cherchant refuge auprès d'Héloïse.

Celle-ci a souri :

« Alain, c'est un enfant, il ne sait pas encore. On lui apprendra. Pourquoi lui faire peur avec ce visage sévère ? »

Sylvie n'a pas répondu, comme s'ils n'existaient pas.

Daniel a ricané, roulant des yeux intérieurement.

Cette femme, collant Alain jusqu'ici, avait réussi à entrer dans la zone réservée par on ne sait quel moyen, et maintenant elle jouait les hautaines. Comme si ses intentions n'étaient pas évidentes !

Sylvie s'est installée à l'intérieur de la tribune, Émilie à l'extérieur.

Alain s'est assis à côté d'Émilie, suivi par Thayer, qui a tapoté le siège à côté de lui.

« Tatie Héloïse, ici ! »

Héloïse a souri et s'est assise.

Émilie, voyant son père à côté d'elle, a serré nerveusement sa robe, observant son expression avec prudence.

Mais Alain ne l'a pas regardée, concentré sur Thayer et Héloïse.

La fillette s'est sentie peu à peu envahie par la déception.

Le spectacle des avions de chasse a commencé.

La foule a éclaté en acclamations.

Les enfants, captivés, ont applaudi avec ferveur.

« Tatie Héloïse, tu vas concevoir des chasseurs comme ceux-là ? » a demandé Thayer. « C'est trop cool ! »

Héloïse a ri.

« Si tu aimes, je t'en ferai un modèle réduit. »

« Super ! »

Émilie, en écoutant, a ressenti une pointe d'envie.

Elle aimait ça, elle aussi.

Mais elle n'a rien montré, gardant ses sentiments enfouis.

À la fin du spectacle, une animation a débuté sur la scène principale.

Les autres s'étaient levés pour mieux voir, et Émilie, même debout, ne pouvait rien voir.

Alain a soulevé Thayer dans ses bras, et celui-ci, triomphant, a tiré la langue à Émilie.

Elle a grogné, est montée sur son siège : « Les petits ont besoin qu'on les porte, moi je peux voir comme ça ! »

« Ah ouais ? Moi, je vais grandir. Toi, t'as même pas de papa ! »

Ces mots ont transpercé Émilie, éteignant son enthousiasme.

Sylvie a froncé les sourcils, s'est tournée vers Thayer, la voix glaciale.

« Et toi, tu n'as pas de mère. »

Thayer s'est figé.

Héloïse, elle aussi, a été stupéfaite. Elle n'aurait jamais cru que Sylvie dirait une chose pareille !

Alain a froncé les sourcils, visiblement contrarié :

« Sylvie, pourquoi t'en prendre à un enfant ? »

Sylvie a ricané.

« Et toi, pourquoi t'en prendre à une femme ? »

Sans lui accorder plus d'attention, elle a caressé la tête d'Émilie : « Maman est là. »

La fillette a serré les lèvres avant de sourire et hocher la tête.

Alain, le visage fermé, n'a plus rien dit.

Une impression persistante lui a traversé l'esprit : ces derniers temps, Sylvie avait affiché envers lui une hostilité grandissante.

Jusqu'à la fin du spectacle, ils n'ont plus échangé un mot.

Alain a reposé Thayer au sol.

« Maman, j'ai envie d'aller aux toilettes. » a dit Émilie.

« D'accord. »

En sautant de son siège, Émilie a mal calculé son mouvement, s'est tordue la cheville et a chuté.

« Ah ! »

Elle a fermé les yeux, s'attendant à la douleur.

Mais celle-ci n'est pas venue. Une paire de mains solides l'a rattrapée.

En ouvrant les yeux, elle s'est retrouvée dans les bras de son père. Son étreinte était chaude, rassurante.

Émue, Émilie a senti son nez piquer.

Son père tenait à elle, non ?

Instinctivement, elle a murmuré : « Merci, papa… »

Alain a plissé les yeux, son regard glacial : « Comment m'as-tu appelé ? »
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