LOGINÉlina pensait fuir pour survivre. Quand elle s’enfonce seule dans la forêt, fuyant les coups, la honte et une trahison brûlante, elle ne cherche ni pardon, ni miracle. Elle veut juste disparaître. Mais au détour d’un cri, d’un hurlement, elle tombe dans un autre monde. Capturée par une meute de loups-garous, battue, interrogée, réduite au silence, elle n’est plus qu’un corps meurtri... jusqu’à ce qu’il apparaisse. Kaël. L’Alpha. Le seul qui voit au-delà des cicatrices. Le seul qui murmure qu’elle est sa mate. Elle n’a rien choisi. Rien compris. Et pourtant, quelque chose en elle bat à l’unisson du sien. Dans un monde où les instincts gouvernent, où la force dicte les règles, où les liens ne se brisent pas... Élina va devoir apprendre à respirer à nouveau. À faire confiance. À exister. Même si chaque pas la rapproche d’un passé qu’elle pensait avoir enterré... et d’une vérité qui pourrait tout faire exploser. Et si sa douleur était la clef d’un pouvoir plus ancien que la meute elle-même ?
View MoreLa voiture gronde doucement sur la route forestière, avalant les kilomètres à mesure que les pins défilent de part et d’autre. Dans le silence qui règne à l’arrière, je garde les yeux rivés à la fenêtre. Je sens la vibration sous mes cuisses, le vent qui s’insinue par la vitre entrouverte, mais je n’entends rien. C’est comme si mes pensées étaient enfermées dans une bulle insonore.
- Tu vas pas nous faire la gueule tout le week-end, hein ? balance Léa depuis le siège passager, un sourire acide au coin des lèvres.
Je ne réponds pas. Je n’ai pas la force. Mes côtes me lancent à chaque respiration et ma pommette droite est encore enflée malgré la glace que j’ai appliquée toute la nuit. Maman n’a rien dit. Elle n’a même pas osé me regarder ce matin, quand j’ai fourré mes affaires dans le sac pour partir. Elle fait toujours ça. Elle détourne les yeux. Comme si ne pas voir rendait la douleur moins réelle.
- T’as pas dormi ou quoi ? me demande Thomas en jetant un regard inquiet dans le rétroviseur.
Son ton est plus doux que celui de Léa. Je devrais lui répondre. Je devrais au moins faire semblant. Mais je reste figée, incapable de formuler la moindre syllabe. Il n’y a plus de place en moi pour les mots.
Je repense à hier soir. À la ceinture de cuir, à la porte claquée, au silence étouffant qui a suivi. Mon corps porte les marques, mais c’est mon cœur qui saigne. J’aurais aimé que Thomas le voie. Qu’il comprenne, sans que j’aie à lui dire.
Nous arrivons en fin d’après-midi dans une clairière bordée d’arbres massifs, à l’abri de la route et du monde. Adrien, toujours enthousiaste, saute hors du coffre avant même que le moteur ne s’arrête, brandissant les piquets de tente comme des trophées.
- Ce week-end va être génial ! clame-t-il. Pas de réseau, pas de parents, que la nature et nous !
Je force un sourire. Il est sincère, Adrien. Trop, parfois. Le genre de type qui croit encore que les choses s’arrangent toujours. Il ne sait pas que certaines blessures ne se referment jamais.
La forêt est vaste, magnifique. Le vent chante entre les feuillages et l’air sent la résine, l’humus et la liberté. Une part de moi veut s’y abandonner. Laisser la douleur derrière. Juste respirer, marcher pieds nus sur la mousse. Mais je suis encore trop lourde. Comme si chaque battement de mon cœur était un fardeau.
Le soir tombe rapidement. Le feu crépite au centre du cercle que nous avons formé. Les flammes dansent, projetant sur nos visages des reflets mouvants, presque surnaturels. Les bouteilles circulent, les rires fusent. Thomas s’assied près de moi, son bras frôle le mien.
-Tu vas mieux ? demande-t-il, bas, pour que seuls nous deux l’entendions.
Je hoche vaguement la tête. C’est un mensonge. Il le sait. Mais il ne dit rien.
Il tente de m’embrasser. Je tourne la tête. Il insiste, pose sa main sur ma cuisse. Je la repousse, fermement.
- Pas ce soir, murmuré-je.
Il recule, surpris. Ce n’est pas de la colère que je lis dans ses yeux, mais de l’incompréhension. Et peut-être une blessure.
- Je pensais que tu voulais... qu’on retrouve un peu de nous, souffle-t-il.
Je baisse les yeux. Il a raison, en un sens. Notre relation n’a pas toujours été chaotique. Thomas avait été là, souvent. Présent. Patient, même quand je m’enfermais dans mes silences. Il avait essayé de me faire rire, de m’aider à me sentir vivante. Il n’est pas parfait. Mais il n’est pas un monstre.
Le problème, ce n’est pas lui. C’est moi. C’est tout ce que je traîne derrière moi comme des chaînes invisibles. Ce mal qui me serre la poitrine, cette honte que je n’arrive pas à dire. Comment pourrait-il comprendre ?
- Je suis juste fatiguée, je lui dis doucement.
Il acquiesce, les mâchoires un peu serrées. Puis il se lève sans un mot, traverse le cercle et va s’asseoir plus loin, près de Léa.
Je le regarde s’éloigner avec un pincement au cœur. Peut-être que j’ai été dure. Peut-être que je devrais lui parler. Lui expliquer. Ce n’est pas juste de le repousser sans le prévenir. Il mérite de comprendre ce qu’il se passe en moi, au lieu de deviner, de se heurter à mes silences.
Je me lève donc à mon tour, mon cœur battant un peu plus vite à l’idée de le rejoindre. J’imagine déjà les mots que je pourrais dire. « Je suis désolée, Thomas. Ce n’est pas contre toi. Je suis juste... brisée à l’intérieur. » Peut-être qu’il me prendrait dans ses bras. Peut-être qu’il me dirait que ça ira.
Mais alors que je contourne le cercle pour le chercher du regard, je m’aperçois qu’il n’est plus là.
Intriguée, je m’éloigne à pas feutrés. Les voix se sont tues derrière moi. La forêt m’engloutit.
Au détour d’un arbre, je les vois.
Léa, plaquée contre un tronc, les mains dans les cheveux de Thomas. Lui, collé contre elle, haletant. Leurs bouches emmêlées.
Mon cœur rate un battement. Le feu dans ma poitrine n’est plus celui du camp, c’est une brûlure crue, brutale.
Je recule. Une branche craque sous mon pied. Ils se retournent. Thomas blanchit. Léa, elle, esquisse un sourire satisfait, presque triomphant.
Je m’enfuis.
Je cours à travers les arbres, les feuilles me griffent les bras, les racines me font trébucher. Je ne sais pas où je vais. Je veux juste fuir, m’éloigner, ne plus les voir, ne plus rien sentir.
Je pleure. Un flot incontrôlable, sale et brûlant. J’ai mal. Pas dans mon corps cette fois, mais dans mon âme. J’aurais pu tout encaisser si Thomas était resté. Si Léa n’avait pas trahi.
Les sanglots me secouent sans retenue. Ma respiration devient saccadée. La nuit est tombée maintenant. L’obscurité est totale. Je me perds.
Je trébuche sur une racine et m’écrase contre le sol. Mes genoux râpent la terre. Je me redresse lentement, mais je sens que je n’ai plus la force.
Un hurlement déchire le silence. Aigu. Sauvage. Il ne vient pas de moi.
Je m’arrête net.
Un craquement. Une ombre. Des pas lourds. Quelque chose approche.
Je veux crier, mais aucun son ne sort de ma bouche.
Je recule, recule encore, jusqu’à heurter un tronc d’arbre. Mes doigts agrippent l’écorce comme à une bouée.
Ma vision se brouille. Le monde tangue.
Puis plus rien.
Le vide.
Il a commencé par froncer les sourcils.Nuit Claire était assis sur la peau près du feu, ses pieds nus bien à plat, les doigts occupés à tordre une lanière de cuir. Il ne parlait pas encore beaucoup, ses phrases tenaient en deux ou trois mots, mais son regard, lui, en disait des pages. Ce matin-là, Talan et Faël discutaient près de la porte à propos d’un piège mal refermé. Le ton restait poli, les mots choisis, pourtant l’air s’épaississait à chaque échange.Mon fils s’est figé. Ses mains se sont immobilisées sur la lanière. Sa petite poitrine s’est mise à battre trop vite, comme si on lui serrait les côtes. Il a tourné la tête vers les deux guerriers, et ses yeux d’argent ont accroché leurs silhouettes. Puis il a poussé un son étrange, ni rire ni sanglot, un gémissement contrarié, et il a ramené brusquement les genoux contre lui.Avant même que j’ouvre la bouche, Faël a lâché :- Laisse tomber. On verra ça plus tard.Talan a marmonné une réponse, mais ses épaules se sont relâchées. L
Les jours suivants ont eu la lenteur des neiges qui ne fondent pas. Je remplissais ma part : nourrir Nuit Claire, répondre aux anciens, vérifier le couloir des humains, sourire quand il le fallait. Dès que les tâches le permettaient, je me repliais dans l’angle sombre de la Maison, là où la lumière glisse sur les planches sans vraiment les atteindre. Mon fils contre moi, une tisane oubliée à portée de main, j’écoutais le silence comme on écoute un vieil ennemi.Kaël acceptait ce retrait avec une patience qui me blessait presque. Il tournait autour comme un loup qui respecte un cercle de braises. Sa main entrait parfois dans mon champ : un bol de soupe posé près de moi, un manteau sur mes épaules, un contact bref au passage de ses doigts sur ma nuque. D’autres soirs, lorsqu’il me croyait endormie, je le sentais s’adosser au pied du lit, simple masse de chaleur veillant sur moi. Mon corps le réclamait, ma peau se tendait vers lui dès qu’il approchait, mais mes pensées avaient besoin de
Je lui ai demandé de rentrer avant même que le soleil ne touche la crête.Pas un ordre. Pas même une supplication. Un appel nu, sans parure, lâché dans le lien comme on jette une corde vers un rocher lointain.Kaël. Rentre.La marque s’est mise à vibrer contre ma nuque, longue pulsation lourde, puis un choc bref, comme son cœur qui bute. Il ne m’a pas demandé pourquoi. Il n’a pas répondu avec des mots. Je n’ai senti que le basculement de sa décision : détente, rupture, demi-tour. Les jeunes Alphas resteraient une demi-journée de plus sans lui. Moi, je ne resterais pas une nuit de plus sans sa peau.Nuit Claire dormait enfin, luisant de sueur douce, lové dans le creux des bras d’Arna. Elle avait renversé la couverture sur son ventre, tiré la chaise près du feu, décidé pour moi.- File te laver la figure, avait-elle dit au milieu de la nuit. Quand il reviendra, tu veux qu’il voie les dégâts ou la femme qui se tient encore debout ?Je n’avais pas répondu. J’avais plongé les mains dans l’
La nuit s’était installée sans que je m’en rende compte. Le feu ne donnait plus qu’une lumière basse, rassemblée dans les braises, et tout le reste de la chambre baignait dans ce flou orangé qui rend les angles moins nets et les pensées plus vives. Nuit Claire dormait contre ma poitrine, bouche entrouverte sur mon sein, respiration rapide, régulière. Chaque souffle me réchauffait la peau. Mon corps réclamait le lit, mon esprit restait accroché au vide laissé par Kaël.Il avait parlé d’un retour avant la lune. Elle brillait déjà haut derrière la fenêtre. La marque à ma nuque vibrait faiblement : vivant, loin, absorbé par ses jeunes Alphas. Par le lien, je percevais sa fatigue, ses muscles lourds, la concentration obstinée d’un chef qui réapprend la guerre pour qu’elle dévore moins. Nulle place pour moi dans ces sensations-là, pourtant mon désir glissait jusqu’à lui, en filigrane.Son odeur restait partout. Dans les draps encore froissés par notre dernière nuit, sur la chemise abandonné
- Tu reviens quand ?La question m’a échappé plus sèche que prévu. Je tenais la bride d’un jeune cheval nerveux pendant que Kaël ajustait sa ceinture de cuir. Le ciel tirait sur le blanc, promesse de neige tardive. Derrière lui, dix jeunes Alphas s’agitaient, excités à l’idée de partir au camp d’entraînement.- Trois jours, peut-être quatre, répondit-il. Ils ont besoin de temps pour comprendre.- Comprendre quoi ?Il leva enfin les yeux vers moi. L’ambre y brûlait, sérieux.- Qu’on peut apprendre à frapper sans nourrir la haine. Qu’un chef qui marche avec du poison dans la gorge finit toujours par s’étouffer.J’ai soufflé par le nez.- Et moi, je fais quoi pendant qu’ils apprennent à respirer propre ?Je regrettai aussitôt. La phrase avait le goût d’un reproche d’ado, et j’avais sur le ventre la marque d’une maternité récente, sur la nuque celle d’un lien sacré, dans les mains la responsabilité d’un village. Pourtant, les mots étaient sortis.Le coin de sa bouche tressaillit. Il se ra
Je n’arrive pas à tenir mes mains tranquilles. Elles lissent ma tunique sombre, remontent la lanière de cuir sous ma poitrine, reviennent à la tresse. Le miroir poli me renvoie une étrangère familière : fils d’argent dans les cheveux, morsure de Kaël à la gorge, cernes tenaces. Dans le berceau de voyage, Nuit Claire bâille, bras en croix.- Ne fais pas cette tête, murmuré-je. C’est toi qu’ils veulent célébrer, pas moi.Une chaleur s’installe contre mon dos. Les doigts de Kaël glissent sur mes hanches, remontent jusqu’à la nuque. Sa paume couvre la marque, la fait pulser.- Erreur, souffle-t-il à mon oreille. Aujourd’hui, c’est toi.Je croise son regard dans le miroir. L’ambre y brûle, fier, un peu inquiet.- Ils m’accrochent un titre, rétorqué-je. J’aurais préféré qu’on m’apporte une liste de choses à réparer.Ses pouces dessinent un cercle au-dessus de la morsure. Mon ventre réagit avant ma tête.- Tu as déjà montré ce que tu fais quand le monde se fissure, dit-il. Laisse-les seuleme






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