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Chapitre 3

À sept heures le réveil sonna. Ondine grogna et se frotta les yeux mais en l'espace de quelques secondes elle était complètement réveillée. Lehyan quant à lui se tourna sur le ventre et enfouit son visage dans le coussin. Ondine s'assit sur son dos ce qui fit grogner Lehyan.

«Hum... T'es grosse lève toi.

-Moi grosse? Tu as vu tes bourrelets?

-Ça s'appelle des abdos.

-Des abdos mous, ouais. Allez lève toi.

-J'arrive...»

Lehyan se redressa tant bien que mal. Le poids de plume de sa sœur n'était pas ce qui le gênait pour se lever mais plutôt ses membres engourdis par la nuit. Ondine finit par tomber à la renverse et se dirigea vers la cuisine après s'être levée. Lehyan la suivit et but un verre d'eau. Il lui fallut cinq bonnes minutes avant d'être entièrement réveillé.

Ils s'habillèrent puis prirent la voiture et s'arrêtèrent à une boulangerie pour s'acheter de quoi petit déjeuner. Une fois rassasiés, ils remontèrent dans la voiture et se dirigèrent vers le magasin le plus proche afin de remplir leur frigo ainsi que leurs placards. Ils achetèrent beaucoup de fruits et de légumes ainsi que des yaourts et des céréales. Ondine ne buvait pas de lait mais Lehyan en buvait pour deux alors ils en prirent aussi une bonne quantité.

Alors qu'ils cherchaient de la viande ils discutaient des plats qu'ils comptaient cuisiner ainsi que des gâteaux qu'ils comptaient faire. Ondine n'aimait pas le miel plus que cela mais Lehyan en acheta décidé à essayer une nouvelle recette de poulet au miel. Ondine le suivit sans rien dire. Elle avait pleinement confiance en son frère en ce qui concernait la cuisine. Elle avait beau se défendre dans ce domaine, Lehyan était un excellent custo à côté d'elle. De plus il aimait beaucoup plus cuisiner qu'elle.

En moins d'une heure les courses étaient faites. Ondine ne put s'empêcher d'acheter une assez grande quantité de glace Ben and Jerry. Mise à part cela ils avaient réussi à rester raisonnables en ce qui concernait la quantité et la diversité des aliments achetés.

Après un rapide détour par chez eux, ils prirent le chemin de la fac pour les inscriptions. Ondine se gara pas loin et Lehyan descendit de la voiture. Il attendit à côté de cette dernière que sa sœur sorte à son tour mais voyant qu'elle n'en faisait rien il se pencha par la fenêtre.

«Tu viens?

-Tu veux que je viennes?

-Bah oui pourquoi?

-Je me suis dis que tu voulais peut être t'inscrire seul. Tu es majeur après tout...

-Mais t'es conne ou quoi?»

Lehyan fit le tour et ouvrit la portière de sa sœur.

«Allez viens. J'ai envie que tu m'accompagne.»

Ondine sourit de toutes ses dents et sauta sur ses pieds.

Ils marchèrent à peine deux minutes qu'ils purent apercevoir une des façades d'un des bâtiments de la fac. Cette dernière s'étendait sur des centaines de kilomètres et comprenait des dizaines de bâtiments datant du treizième siècle. Le frère et la sœur se figèrent ahuris devant la beauté des lieux. Les murs étaient d'un blanc cassé témoignant de leur âge et pourtant immaculé. Un immense parc parsemé de fleurs reliait les bâtiments et quelques personnes se promenaient entre les arbres dans le calme.

Ondine serra la main de Lehyan fière de lui. Ils se sourirent puis essayèrent de trouver le bâtiment des inscriptions. Ondine faillit se perdre plusieurs fois. Elle n'était pas d'une grande aide dans ces inscriptions. Elle était surtout là car Lehyan ne se voyait pas faire ce grand pas sans elle.

Ils finirent par trouver le bon bâtiment et l'intérieur de ce dernier était tout aussi radieux et imposant que l'extérieur. Le marbre et le lustre en cristal hypnotisèrent les jeunes un moment. Tout était tellement vieux et bien entretenu qu'ils se seraient crus dans un musée et ils auraient pu être mal à l'aise et auraient pu avoir peur de toucher quoi que ce soit mais ce n'était pas le cas. L'ambiance n'était pas froide et sérieuse. Au contraire. L'air dégageait une certaine chaleur et les mettait à l'aise. D'un coup Ondine comprit pourquoi cette école était si connue. En réalisant cela elle eut soudain peur pour son petit frère. Dans une telle école il allait sûrement tomber sur des personnes qui allaient tout faire pour être premiers. Des personnes qui n'allaient penser qu'à la compétition. C'était inévitable malheureusement. Tout ce qu'Ondine voulait était le bonheur de son frère.

Elle secoua la tête pour chasser les pensées négatives. Elle devait arrêter de se torturer pour rien. Elle avait confiance en Lehyan. Il n'était plus un petit garçon sans défense. Il pouvait se défendre tout seul. Elle ne pouvait pas le protéger de tout et heureusement. Sinon il n'allait jamais apprendre et s'endurcir. D'un autre côté elle aurait adoré qu'il n'ait pas à s'endurcir et qu'il ait quatre ans à vie.

Ils avaient pris rendez-vous alors ils n'eurent pas à attendre longtemps. Ils étaient en avance comme d'habitude et à neuf heures pile une dame à lunettes et au sourire accueillant vint les accueillir.

Ils s'installèrent dans un bureau décoré avec goût et simplicité et sortirent tout le tas de documents qui leur avait été demandé. Ondine les avait vérifies des centaines de fois. Ils n'avaient rien oublié et en quelques minutes l'inscription était terminée. Lehyan reçu un emploi du temps non définitif pour la première semaine de cours ainsi qu'un petit carnet qui résumait tout ce qu'il y avait à savoir sur la vie dans cette université.

Pour finir on lui fit une carte étudiant que Lehyan tendit à Ondine avec un sourire victorieux. Cette dernière le prit tout aussi fière et rit en voyant la tête d'enterrement que tirait son frère sur la photo. En plus de cela Lehyan eut droit à un petit sac et un pull avec le logo de l'université. Ondine savait déjà qu'elle allait lui les voler et qu'elle allait plus les utiliser que lui.

Ils remercièrent la dame et sortirent du bâtiment. En sortant Ondine était trop occupée par l'admiration de la carte étudiant de Lehyan pour regarder devant elle et elle percuta quelqu'un.

Ondine s'excusa frénétiquement avant même qu'elle ait le temps de voir qui elle avait bousculé. Enfin bousculer était un bien grand mot. L'homme devant elle aux épaules larges et imposantes n'avait pas bougé d'un centimètre suite au choque avec Ondine. C'était à se demander s'il l'avait sentie. Le bloque de glace se retourna avec une lenteur et pourtant une rapidité déstabilisante. Son regard était froid et lassé. Ses yeux verts puaient le mépris et l'irritation à plein nez. Ondine perdit son sourire face à cette froideur et s'excusa une dernière fois avec plus de douceur.

«Je suis désolée. Je ne vous ai pas vu.

-À l'avenir ouvrez l'oeil.»

Lehyan bomba le torse irrité à son tour.

«Elle s'est excusée.»

L'homme le détailla de haut en bas. Lehyan ne sembla pas le moins du monde impressionné. Et sur ce il partit sans rien ajouter. En ayant entendu sa voix Ondine sentit une sorte de familiarité. L'homme au regard imposant lui disait quelque chose. Elle chercha pendant de longues secondes avant de réussir à mettre le doigt dessus.

«Mais oui!»

Lehyan fronça les sourcils.

«Ça va?

-Cet homme ne te dit rien?»

Lehyan chercha un instant en détournant son regard de sa sœur vers le dos de plus en plus lointain de l'inconnu. Il haussa les épaules.

«Nope.

-Si, on l'a vu à la plage. Tu sais je l'avais bousculé dans l'eau et il avait fais une remarque aussi.»

Lehyan relia d'un coup les deux personne.

«Oh... Mais oui tu as raison. Et moi qui me disais qu'il y avait que des grincheux dans cette ville. En fait il n'y en a qu'un.»

Ondine sourit.

«Il a dû passer une mauvaise journée.

-Sa femme a dû le quitter.»

Lehyan rit.

«Je ne pense pas qu'une personne aussi renfermée ait jadis eut une femme.

-Pas sûr, peut être qu'elle aime les bad boys.

-Il y a une différence entre bad boy et chieur.»

Ondine haussa les épaules.

«Tu as sûrement raison. Mais bon, l'amour est quelque chose d'incompréhensible et de subjectif. On ne peut juger personne.»

Lehyan sourit. N'importe quelle blague pouvait partir en débat profond avec Ondine.

«Tu as bien raison. Chacun a son style et même une personne que nous trouvons horrible peut être trouvée magnifique par une autre.

-Après on peut lui accorder qu'il n'est pas horrible. Peut être que quelqu'un est sorti avec que pour son physique et lui a brisé le cœur. Dans ce cas c'est triste et il peut en partie être excusé.

-Pourquoi toujours relier les mauvais caractères aux problèmes de cœur? Ça se trouve il n'a jamais aimé personne et est juste née comme cela. Quoi que ce serait assez étrange. En général les gens deviennent comme cela car ils ont été délaissés, mal élèves, ont suivi le mauvais exemple etc.

-J'ai l'impression que tout est relié au cœur. Le fait d'être délaissé peut être un manque d'amour enfouie. L'amour sous toutes ses formes est ce qui nous tient la plupart du temps en vie ou nous pousse à nous suicider. Le harcèlement est aussi un problème de cœur d'après moi. Un manque d'amour envers soi même.

-C'est beau ce que tu dis... Enfin c'est très triste mais beau. Personne ne devrait être poussé à se suicider. Le harcèlement est quelque chose d'ignoble.

-Quand j'entends tous ces témoignages sur des personnes qui ont été poussées à essayer d'en finir... L'humanité est vraiment quelque chose d'horrible. En quelques années on a bouleversé cette planète alors que les dinosaures sont là depuis bien plus longtemps et on se tue alors qu'on est la même espèce.

-Le racisme, l'homophobie et tant d'autres... Je ne comprends même pas le principe. Sincèrement. Je ne comprends pas comment quelqu'un peut penser ainsi.

-Tu t'en fiches si quelqu'un aime quelqu'un du même sexe. Cela n'influence en rien ta propre vie. L'amour est la chose la plus belle et même ça ils le critiquent.»

La conversation continua ainsi pendant de longues minutes avant que Lehyan et Ondine se rendent compte qu'ils avaient à faire. Ils finirent donc par se souvenir où ils étaient et se remirent en route.

Ils choisirent leurs meubles très vite et payèrent encore plus vite. Ce qui fut plus long fut de placer les quatre chaises une par une dans la voiture, de faire un aller retour pour les laisser à la maison et de revenir pour la table et ainsi de suite.

Ils étaient têtus et surtout ne voulaient pas dépenser de l'argent dans un petit camion alors que cela leur aurait pris au plus quelques minutes pour tout charger et emporter. Ils se débrouillèrent sans et leur maison fut meublée. Continuant sur leur lancée ils montèrent leurs lits et placèrent les draps sur leurs matelas. Une fois tous les meubles nettoyés, montés et à leurs places, Ondine et Lehyan se mirent à décorer la maison avec les accessoires ou objets qu'ils avaient laissés dans leurs cartons.

Un vase vert trouva sa place sur leur nouvelle table et ils se promirent d'aller acheter des fleures au plus vite. Ils avaient seulement un petit coussin chacun pour dormir et n'en avaient pas acheté pour le canapé sur lequel ils se contentèrent d'allonger quelques peluches. La grande partie de la décoration était constituée de photos. Il y avait des cadres accrochés aux murs, des cadres posés sur l'armoire, encore plus de photos accrochées aux murs, au dessus de leurs lits et posées sur leurs bureaux.

Ils avaient pris goût à la décoration mais malheureusement finirent bien vite. Ondine sortit donc l'enceinte de Lehyan et lança une de leurs playlists avant de rejoindre son frère dans la cuisine. Ce dernier lisait avec sérieux une recette sur son téléphone et sortait les ingrédients petit à petit. Ondine se proposa pour aider et ils firent à manger dans la bonne humeur. En attendant que le plat finisse de chauffer, Ondine sortit des légumes du frigo et les découpa tandis que son frère se chargeait de la sauce. Une fois que tout était prêt, ils mirent la table et mangèrent en coupant la musique et discutant de tout et de rien.

Soudain Lehyan balaya la pièce du regard avec un petit sourire. Il s'attarda sur leurs photos. Eux deux à la plage l'année d'avant, eux deux à la plage deux ans auparavant, eux deux lors des résultats du bac, eux deux à Disneyland, eux deux au musée d'Orsay... Eux deux à tous âges et dans toutes sortes de lieux qui se répétaient assez souvent pour quelques uns.

Ondine suivit le regard de son frère et sourit à son tour.

«J'aime bien cette maison... chuchota Lehyan. Je me sens chez moi.»

Ondine sourit de plus belle.

«Moi aussi.»

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