Chapitre 0003

L'apparition soudaine d'un mari dans ma vie m'a bouleversée. Je n'arrive pas à m'endormir bien que je suis allongée au lit depuis longtemps. Alors je décide d'appeler ma meilleur amie, Emmy.

Je ne l'avais pas contactée jusque là pour qu'elle ne s'inquiète pas pour mon accident. Je suis reconnaissante qu'elle m'ait pas contactée non plus, sinon, elle aurait appris pour mes blessures.

Mais, à l'instant où elle décroche, je n'ai pas pu cacher ma frustration, « sale g*rce, tu ne me contacteras pas si je ne viens pas vers toi ? »

Ça fait deux mois, et pas un appel de sa part, ni même un message !

Quelle copine indigne !

Je m'attendais à ce qu'elle dise qu'elle a été à un endroit sans connexion pour ses recherches. Mais, après un long silence, elle dit : « Joyce, on ne devait plus se parler. Tu l'as oublié ? »

Mes yeux s'agrandissent sous l'étonnement. Cette information est encore plus dure à accepter que l'apparition de mon mari !

Comment est-ce même possible ?

Je ne peux pas y croire.

Mais Emmy l'a dit d'elle-même.

Elle dit que c'est à cause de Lucas Morini.

Notre mariage n'était pas un mariage arrangé. Au contraire, j'aimais Lucas plus que tout, au point d'abandonner toutes mes limites.

Je suis comme une chienne qui quémande la moindre sympathie de sa part.

Même après avoir découvert que Lucas ne se servait de moi que pour avoir son héritage familial, et que celle qu'il aimait réellement était ma sœur adoptive, Rosaline Boréal, je ne l'ai pas lâché. Et ça, peu importe le nombre de fois où il m'a blessée pour elle.

J'allais jusqu'à me scarifier pour lui, pour qu'il me donne un peu d'attention.

C'est ainsi que je suis devenue la bouffonne de notre cercle social. Il y a même des gens qui pariaient sur mes prochaines actions débiles pour quémander l'amour et l'attention de Lucas.

Emmy m'a suggéré de le quitter, mais je l'ai rejetée pour lui.

Je n'arrive pas à me remettre de ce que je venais d'apprendre. Ça n'a pas l'air d'être moi, la Joyce Carnon de son histoire.

Je n'aurais jamais abandonné ma meilleure amie pour un homme.

Je n'aurais jamais fait de telles choses pitoyables.

Mais...

Emmy dit qu'elle ne veut plus recevoir mes appels.

Elle ne veut plus entendre ma voix, ni quoi que ce soit en rapport avec Lucas.

Elle dit que peu importe ce qui m'est arrivé, je l'ai cherché. Alors, je ne devrais plus la déranger.

Mon amitié avec Emmy vaut plus que de l'or. Elle ne m'aurait jamais dit ça si je ne l'avais pas blessée profondément.

Alors je suis obligée de croire que mon amour pour Lucas m'avait vraiment rendue aveugle, et bête.

Bien que ses paroles étaient blessantes, Emmy n'a pas pu s'empêcher de me demander si je vais bien et si j'ai besoin de son aide, et que pour la dernière fois, elle est prête à m'aider pour tout ce qu'on a vécu ensemble.

Des mots blessants mais un cœur tendre, c'est bien Emmy, ça.

Après avoir raccroché avec Emmy, je peine encore plus à m'endormir.

......

C'est seulement après un mois entier de rééducation, que j'ai été permise de sortir de l'hôpital.

Mon frère est venu me chercher.

« N'en veux pas à papa et maman de ne pas être venus, tu sais que Rosa tombe facilement malade depuis toute petite. Elle était effrayée et elle faisait des cauchemars, papa et maman n'avaient pas le temps de venir te voir. »

« En plus, je viens d'être promu PDG, et beaucoup d'actionnaires attendent de voir mes preuves, je suis épuisé tous les jours... J'ai vraiment essayé de trouver du temps et de l'énergie pour venir te voir, mais... »

Je baisse mes yeux en faisant un sourire amer, « oui, je sais. »

Bien que je vais dans son sens, il s'énerve, « si tu n'es pas contente, dis-le. Arrête d'être toujours ironique ! »

« ... »

« On n'est pas venus te voir, mais n'es-tu pas en tort, toi ? Tu ne peux jamais te remettre en question ? Tu restes trois mois à l'hôpital pour si peu, c'est abusé ! »

« Ce n'est pas étonnant que papa et maman préfèrent Rosa à toi, leur fille biologique. Regarde-toi, si tu ne changes pas, personne ne t'aimera ! »

Je ne sais pas quoi faire d'autre que de maintenir mon sourire face à ses mots.

Mon frère semble avoir oublié que j'ai toujours détesté l'hôpital.

Petite, il galérait toujours pour m'y emmener.

Si c'était possible, j'aurais voulu ne pas entrer une seule seconde dans un hôpital.

Alors je n'aurais jamais voulu rester aussi longtemps dans un hôpital.

« Sais-tu à quel point j'étais occupé pendant que tu profitais de tes jours tranquilles à l'hôpital ? On me demandait toujours à l'entreprise, et papa et maman... »

Il est de plus en plus digne dans ses reproches, mais il semble se fatiguer à un moment, et il finit par dire : « Bref, en fin de compte, je suis ton frère. Je ne dois pas te détester, peu importe ce que tu fais. »

« Pense à tout ce que j'ai fait pour toi. Je suis celui qui t'aime le plus dans ce monde. »

Alors je pense à ce qu'il faisait pour moi, de notre enfance.

C'est vrai, il était tellement gentil envers moi, tellement.

Mais tout a changé quand nos parents ont adopté Rosaline.

Je suis toujours faible, puisque je sors à peine de l'hôpital.

Je me suis endormie sur le trajet.

Quand mon frère me réveille, je me sens un peu perdue en regardant le paysage à l'extérieur. C'est quand il me dépêche impatiemment de descendre que je bouge enfin.

« Ça ne ressemble pas... à chez moi. »

Ma phrase n'est pas finie, mais il me tire en dehors de la voiture.

« Dépêche-toi. Tu te caches depuis trois mois, tu dois t'excuser auprès de Rosa maintenant. »

« ... »

C'est donc pour ça qu'il est venu me chercher malgré sa charge de travail.

Ça devait être un effort incroyable pour lui de dire qu'il est venu me chercher par respect.

J'allais dire quelque chose mais il me coupe, « Rosa s'est faite enlevée par ta faute. Elle a été malade pendant toute une semaine à cause de toi. Tu dois t'excuser. »

Je n'ai pas envie de ça.

J'ai peut-être oublié certaines choses, mais je n'ai pas oublié les interactions entre Rosa et le kidnappeur. Il y a des enquêtes à mener à ce sujet.

Mon frère me tient fermement, et ça me fait mal. Pour que la douleur ne s'intensifie pas, je le suis sans riposter.

Quand on arrive à une salle privée du bar, l'ambiance est au max.

Un groupe de personnes entourent un homme et une femme, les poussant à s'embrasser.

« Un bisou ! Un bisou ! Un bisou ! »

Quelle ambiance ! Je n'ai pas pu m'empêcher de les joindre en criant la même chose.

Mais ma voix est peut-être un peu trop forte, alors le silence s'installe quand ils m'entendent.

D'un coup, tous les regards sont rivés sur moi. J'en suis presque embarrassée.

« Ne me regardez pas, continuez ! Je pense la même chose que vous tous, ils vont bien ensemble ! », dis-je, en regardant l'homme au centre, mon soi-disant mari, « ne fais pas attention à moi, embrasse-la. »

« Je suis venue pour vous donner ma bénédiction, de toute façon. »