Le silence de la nuit n’était troublé que par le souffle du vent contre les vitres du manoir. Kael fixait la cheminée où les flammes vacillaient, illuminant par intermittence ses traits tendus. Tout ce qu’il avait construit semblait prêt à s’effondrer, et la seule personne capable de lui donner la force de continuer se tenait à quelques pas de lui : Liora.
Elle l’observait en silence, les bras croisés, partagée entre la colère et l’inquiétude. Leur amour avait survécu à des tempêtes, à des ennemis sans visage, mais cette fois, c’était différent. C’était comme si le danger n’était plus à l’extérieur : il était entre eux, tapi dans les secrets encore non dévoilés.— Tu ne m’as pas tout dit, Kael, murmura-t-elle finalement, la voix tremblante mais ferme.Il détourna les yeux, incapable de soutenir son regard accusateur. Ses doigts se crispèrent sur l’accoudoir de son fauteuil.— Certaines vérités détruisent plus qu’elles ne libèrent, répondit-il d’unKael n’avait presque pas fermé l’œil de la nuit. Les dossiers laissés par Armand restaient étalés sur la table, témoins muets d’une menace grandissante. Le jour se levait à peine, et déjà une tension électrique emplissait l’air de la villa.Liora descendit les escaliers, ses cheveux encore humides de la douche, son regard déterminé. Elle trouva Kael dans le salon, en train de scruter des cartes et des schémas avec une intensité glaciale.— Tu n’as pas dormi, constata-t-elle doucement.— Impossible, répondit-il sans lever les yeux. Ces gens ne nous laisseront pas de répit.Elle s’approcha, posa une main sur son épaule.— Alors on ne leur en laissera pas non plus.Kael releva enfin le regard vers elle. Dans ses yeux brillait une lueur nouvelle : moins de rage brute, plus de calcul, plus de clairvoyance. Il inspira profondément, puis déclara :— Aujourd’hui, on prend les devants.⸻La matinée fut consacrée aux préparatif
L’aube s’était levée sur la ville encore engourdie par les secousses des révélations de la veille. Kael fixait l’horizon depuis la terrasse de la villa, les traits crispés, le souffle retenu. Le ciel avait des teintes rougeoyantes, comme si le soleil lui-même pressentait que cette journée ne serait pas une journée ordinaire.Liora, restée en retrait, l’observait. Elle sentait la tension qui émanait de lui, une tension sourde, contenue, prête à exploser. Depuis qu’ils avaient franchi ensemble ce seuil dangereux – celui des vérités que personne ne voulait affronter – rien ne serait plus pareil.— Tu ne dors pas, murmura-t-elle, sa voix douce mais lourde d’inquiétude.— Comment veux-tu que je dorme ? répliqua-t-il sans détourner le regard. Chaque pièce du puzzle se met en place, et plus elles s’emboîtent, plus je comprends que nous sommes entourés de pièges.Elle s’avança lentement, posa sa main sur son bras. Ce simple geste l’apaisa légèrement, mais son
La falaise noire dominait la mer comme une garde ancienne, austère et immuable. Le vent, chargé d’écume, fouettait la lande et mordillait leurs visages. Kael et Elara avancèrent côte à côte, les bottes crissant sur le gravier, le souffle court. La lumière agonisante du jour leur léchait le dos ; bientôt il ferait nuit, et avec la nuit viendrait la décision.Ils ne parlèrent presque pas pendant le chemin. Les mots auraient été des armes trop fragiles. Kael avait préparé un plan sommaire, des bribes de stratégies qu’ils n’avaient eu ni le temps ni la force de tester. Elara, malgré la peur qui lui broyait le ventre, marchait d’un pas assuré — déterminée à rester à ses côtés. Parfois leurs mains se frôlaient, échange de chaleur plus efficace qu’un serment.Au sommet de la falaise, une vieille bâtisse en ruine servait de théâtre au rendez-vous. Des torches avaient été plantées dans le cercle, projetant des ombres dansantes. Devant l’entrée, un groupe de silhouettes pati
La maison délabrée baignait dans un silence oppressant, seulement rompu par les respirations saccadées d’Elara et de Kael. Le sang encore frais des hommes du Serpent noir s’étalait sur le parquet pourri, rappel brutal de ce qu’ils venaient d’affronter.Elara s’était laissée tomber contre le mur, son couteau toujours serré dans sa main tremblante. Ses yeux fixaient le vide, comme si elle tentait de comprendre ce qu’elle venait de faire. Elle avait blessé un homme, elle avait survécu… mais elle savait qu’il y avait un prix à cela.Kael, lui, faisait les cent pas dans la pièce, son arme encore chargée, ses muscles tendus comme un arc prêt à se rompre. Chaque fibre de son être criait vigilance. Ils venaient d’abattre une escouade, ce qui signifiait une chose : son père saurait où ils se trouvaient.— On n’a plus beaucoup de temps, dit-il enfin, sa voix grave résonnant dans la pièce.Elara releva la tête, ses yeux brillants d’un mélange de peur et de c
Le salon dévasté résonnait encore des échos de la bataille. L’odeur âcre de poudre se mêlait à celle du sang et du bois brûlé. Elara, tremblante, se serrait contre Kael comme si elle craignait qu’il ne disparaisse s’il s’éloignait d’un seul pas.Kael, lui, fixait Raze, toujours inanimé au sol. Chaque fibre de son corps criait de l’achever, de mettre fin à cette menace qui avait failli leur coûter la vie. Mais une voix intérieure l’arrêtait. Il savait que tuer Raze maintenant, ici, ce serait franchir une ligne de non-retour.— On doit partir, souffla-t-il, la voix rauque, ses doigts caressant la joue d’Elara pour l’apaiser. Ce lieu n’est plus sûr.Elara acquiesça, mais son regard se tourna vers Raze, une peur glaciale au fond des yeux.— Et lui ? S’il se réveille…Kael serra les dents. Il sortit de sa ceinture une paire de menottes rudimentaires, retrouvée dans l’arsenal de fortune qu’ils avaient monté. Il attacha les poignets de Raze à une pou
Le souffle d’Elara se bloqua dans sa gorge. Le salon, déjà éventré par les balles, devint l’arène d’un affrontement qu’elle sentait inévitable. Les éclats de verre au sol, les silhouettes inconscientes des hommes de Raze, le vent froid qui s’engouffrait par la fenêtre brisée… tout contribuait à transformer la pièce en un champ de bataille.Raze avança d’un pas lent, calculé. Sa carrure massive semblait avaler l’espace, et ses yeux, sombres comme la nuit, brûlaient d’une cruauté glaciale.Kael se plaça devant Elara, comme un mur. Son arme levée, ses muscles bandés, son regard rivé sur celui de son ancien frère d’armes.— Tu n’aurais jamais dû venir, Raze, lança Kael, la voix ferme malgré l’adrénaline.Raze ricana.— Et toi, tu n’aurais jamais dû trahir ton nom. Tu es né pour commander, Kael, pas pour te cacher derrière une femme.Le visage d’Elara se crispa. Elle sentit l’insulte comme une gifle. Mais Kael, lui, resta impassible. Il ne