Chapitre 3

Après avoir raccroché, Lambert m'a envoyé une autre vidéo. On y voyait un ami de Valentin se lever brusquement, lui parler à l'oreille. Soudain, Valentin a fracassé son verre de rage. L'assistance s'est empressée autour de lui pour le calmer. Puis Mélodie a murmuré quelque chose... et Valentin l'a embrassée fougueusement en éclatant de rire.

J'ai compris aussitôt : des membres du Conseil des affaires avait dû les informer par le lien mental de l'organisation des funérailles. Même si Valentin bloquait ce lien, ses proches pouvaient encore recevoir les messages.

Ce qui m'a glacé le sang, c'était de constater combien Mélodie parvenait à le désarmer d'un simple chuchotement. Moi, quand il était en colère, je marchais sur des œufs. Le moindre mot de travers et il me jetait dehors pour que je réfléchisse à mon attitude.

Quelle différence cruelle.

Mais je devinais sa réaction actuelle : furieux, mais pas inquiet. Après chaque dispute, j'avais toujours couru m'excuser, implorant son pardon...

J'ai archivé précieusement ces preuves de leur liaison. Alors que j'allais éteindre mon portable, Mélodie m'a appelée.

La musique assourdissante a failli me perforer les tympans.

« Béatrice, t'as pété un câble ? » a-t-elle hurlé d'une voix stridente, « Valentin est toujours vivant et toi tu prépares ses funérailles ? Tu veux même élire un nouvel Alpha ? S'il le savait, il te tuerait ! »

« Allez, annule tout ça et convoque une réunion pour admettre que tes propos insensés ne sont que les divagations d'une femme trop obsédée par son compagnon ! »

J'ai raccroché net, ai éteint mon téléphone et me suis effondrée sur le lit. C'était la première nuit paisible depuis trois mois.

Au petit matin, j'ai reçu la liste des candidats Alpha. Tous brûlaient de se présenter. Un sourire satisfait a joué sur mes lèvres.

Après avoir finalisé les détails des funérailles et du processus électoral, je me suis rendue devant la porte de Mélodie.

La porte de son domicile était close. J'ai dû frapper à plusieurs reprises avant qu'elle ne daigne ouvrir, vêtue d'une nuisette en dentelle, révélant des marques équivoques s'étendant de son cou jusqu'aux zones normalement dissimulées par les vêtements.

Mon regard s'est fixé d'abord sur le collier de coquillage lunaire qui ornait son cou, celui-là que ma mère m'avait offert, avant de remonter vers son visage, croisant son expression désinvolte.

« J'espère que tu assisteras aux funérailles de Valentin. Après tout, tu étais sa... meilleure amie préférée. »

Mélodie m'a lancé un regard noir et s'est exclamée d'une voix perçante : « Tu es folle ou quoi ? Valentin a disparu sans laisser de trace, et toi tu t'obstines à organiser ses funérailles comme s'il était mort ? Et s'il était toujours en vie ? N'est-ce pas là une véritable malédiction venant de sa propre compagne ? »

J'ai sorti de mon sac l'avis officiel concernant l'élection du nouvel Alpha et le lui ai jeté au visage. « Trois mois de disparition, soit il a été tué par des loups errants, soit dévoré par les vautours. La meute ne peut rester sans Alpha. J'ai donc initié le processus pour élire son successeur. »

« Rappelle-toi comment tu m'as exhortée à reprendre mes esprits après sa disparition ! »

Je me suis remémoré ce jour où, apprenant la nouvelle, la vue m'avait brusquement troublée et j'avais failli m'évanouir, avant d'être conduite à l'hôpital par les frères de Valentin.

« Béatrice, cette zone est infestée de loups errants. Les équipes de secours n'ont trouvé aucune piste. Le pire est à craindre. »

« Tu ne dois surtout pas rejoindre les recherches, c'est trop dangereux. »

Pourtant, je m'étais obstinée, suivant les secouristes jour et nuit sur les routes de patrouille de Valentin. Trois mois sans un seul repos paisible. Comment avais-je pu ne pas remarquer alors que dans le regard de ses frères, il n'y avait aucune inquiétude, mais seulement une moquerie cruelle envers ma crédulité ?

À peine avais-je prononcé ces mots qu'un bruit sourd a retenti dans l'appartement de Mélodie.

En voyant les signatures unanimes des membres du Conseil des affaires apposées sur l'avis officiel, Mélodie a pâli. Elle avait cru que ma déclaration concernant l'élection n'était qu'une vaine menace, sans imaginer que j'irais jusqu'au bout.

« Béatrice, ne fais pas ton intéressante ! Quand Valentin reviendra, il te tuera ! »

J'ai poussé un rire avec une indifférence calculée.

Mélodie m'a fusillée du regard avant de claquer la porte avec violence.