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Chapitre 3 La fierté d'un père

Penulis: Karma Lockhart
last update Terakhir Diperbarui: 2025-05-26 16:08:54

point de vu de Daryl.

Le silence retomba dans la grande salle comme une chape de plomb.

La porte venait à peine de se refermer derrière Rayan, mais son absence pesait déjà dans chaque recoin de la pièce. Je fixais cet espace vide, là où il s'était tenu quelques instants plus tôt, debout, droit, fier. Mon aîné. Mon fils. Celui que j’aurais voulu voir me succéder.

— Insolent, grogna François dans sa barbe, juste assez fort pour que je l'entende.

Je pivote lentement la tête vers lui. Ce vieux renard n’avait jamais pu s’empêcher de commenter. Même dans les moments les plus tendus. Mon regard l'accrocha, glacé, et pour la première fois depuis longtemps, je vis une ombre d’hésitation dans ses yeux. Mais comme toujours, il garda ce petit sourire supérieur accroché aux lèvres.

À côté de moi, Mathilda restait silencieuse. Sa posture droite, les mains croisées sur ses genoux, trahissait une tension qu’elle maîtrisait avec élégance. Elle était comme ça, Mathilda. Une tempête sous contrôle. Si elle disait peu, elle comprenait tout.

Moi, je restais assis, les coudes sur les accoudoirs, les doigts entrelacés. Mon regard glissait d’un ancien à l’autre. Ils étaient venus nombreux. Trop nombreux. Et leur présence, ce jour-là, n’avait rien d’anodin.

Ils pensaient sans doute que Rayan allait s’écraser, que son passé allait le faire taire. Mais ils ne le connaissaient pas. Pas comme moi.

Je fermai brièvement les yeux.

Rayan n’aurait jamais dû être vu comme une menace. Il aurait dû être une fierté pour cette meute.

Mais depuis le début, il avait dû se battre contre leur regard.

Rose… douce Rose. Sa mère. Une ancienne esclave oméga, offerte à mon père comme une simple possession. Je l’ai connue enfant, et bien avant que les rôles ne soient imposés par le sang ou le rang, nous étions amis. Deux gosses en liberté, courant dans les bois, riant sans se douter du poids des générations.

Puis l'adolescence est arrivée. Et avec elle, le feu. Nous n’avions pas prévu Rayan. Mais quand elle m’a dit qu’elle était enceinte, j’ai compris que ma vie ne m’appartenait plus vraiment. J'étais heureux, confus, effrayé... et en colère. Pas contre elle. Contre ce monde qui allait lui faire payer d’avoir porté mon enfant.

Mon père, Alpha cruel mais lucide, voulait faire disparaître cette "honte". Un enfant né d’une oméga n’avait pas de place dans la lignée. J’ai hurlé, supplié, menacé. Et il a fini par céder, à condition que je me taise sur le reste. Il a libéré Rose, mais m’a imposé de ne jamais présenter Rayan comme mon héritier.

Je l’ai quand même élevé ici, dans la maison de la meute. Je l’ai vu grandir sous les regards en coin, les murmures venimeux, les rumeurs qui se collaient à lui comme de la crasse.

Puis un jour, Mathilda est entrée dans ma vie, comme une promesse d’équilibre. Elle a accepté Rose. Elle a accepté Rayan. Une force rare. Une femme Luna dans toute sa dignité.

Peu après est né Alex. Mon deuxième fils. Cette fois, les anciens ont exulté. L’héritier parfait. Le bon sang. Le bon rang. Ils l’ont adulé avant même qu’il sache marcher. Et pendant qu’ils dorlotaient le cadet, ils enfonçaient le couteau dans le dos de l’aîné.

Mais Rayan… mon dieu, Rayan. Il n’a jamais plié. Ils l’ont envoyé aux pires missions, espérant qu’il y laisserait la peau. Lui, il rentrait. Parfois blessé, parfois vidé, mais toujours vivant. Et chaque retour leur rappelait qu’ils avaient échoué à le briser.

C’est pour ça que je voulais qu’il soit Alpha. Non pas par obligation, mais par mérite. Parce qu’il aurait pu réécrire les lois. Parce qu’il aurait pu leur faire mordre la poussière.

Mais il a renoncé. Il a offert la place à Alex. Et même si cette décision me déchire, je comprends.

Rayan n’a jamais voulu diriger. Il voulait réparer. Il voulait protéger. Il voulait aimer, peut-être, à sa manière. Son courage, ce n’est pas dans le combat qu’il le montre. C’est dans le choix de reculer pour ceux qu’il aime. C’est ça, sa force.

Je rouvre les yeux. Les anciens sont encore là. L’odeur de leur hypocrisie me monte à la gorge. François reprend la parole, d’une voix faussement douce :

— Rayan n’était pas fait pour le rôle. Peut-être qu’il le sent lui-même. C’est un soulagement pour la meute, en vérité.

Je me lève d’un coup. La chaise racle le sol dans un grincement sec. Ma voix tombe, grave et tranchante :

— Ce que vous ressentez n’a rien à voir avec la meute. Ce que vous ressentez, c’est la peur. Peur de voir un enfant que vous avez méprisé toute sa vie s’élever au-dessus de vous.

Je m’avance de quelques pas. Mon ombre recouvre presque François.

— Vous avez envoyé mon fils à la mort plus d’une fois. Sans mon accord. Et il est revenu. Il est revenu pour vous prouver que même votre mépris ne suffit pas à tuer ce qu’il est. Ce n’est pas un Alpha que vous avez perdu aujourd’hui. C’est votre dernière chance d’avoir un homme juste à votre tête.

François se raidit, les autres anciens baissent les yeux. Mathilda reste droite, silencieuse, les yeux posés sur moi avec cette lueur discrète d’approbation.

— Maintenant, sortez de chez moi. Vous ne méritez pas d’être là.

Un à un, les anciens se lèvent. Lents. Humiliés. Mais pas vaincus. Ils complotteront encore, je le sais. Ils ne savent faire que ça.

Quand la salle est enfin vide, je soupire, longuement. Mon regard dérive vers la porte par laquelle Rayan est parti. Une partie de moi brûle d’aller le rattraper. L’autre sait qu’il a besoin d’espace.

Mathilda pose doucement une main sur mon bras. Elle ne dit rien. Mais sa présence suffit.

Rayan… mon fils. Tu as porté l’ombre de cette meute plus que quiconque. Et tu es encore debout.

Un jour, ils comprendront. Mais il sera peut-être trop tard.

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