Semua Bab À l'encre de tes chaînes : Bab 81 - Bab 90

MaëlysLe miroir me renvoie l’image d’une autre.Ou peut-être de celle que j’ai toujours été.Mais que j’avais oubliée dans les draps froissés d’Aleksandr.Je remonte la fermeture de ma robe noire, sobre, élégante, ajustée à la perfection.Pas une armure de métal.Mais une armure tout de même.Chaque couture, chaque pli, chaque choix est un mur entre le chaos et moi.Parce que je n’ai plus le droit d’être fragile.Je passe un rouge profond sur mes lèvres.Pas pour séduire.Pour rappeler que je suis là.Que je mords.Que je ne suis pas qu’une amante dans un lit défait.Je suis Maëlys Delcourt. Avocate. Stratège. Survivante.J’attache mes cheveux en une queue basse, stricte.J’enfile mes talons.Le cliquetis qu’ils feront sur le marbre du palais de justice sera mon tambour de guerre.Et je m’en nourrirai.Parce que je dois avancer.Même avec la peur dans la gorge.Dans l’entrée, un silence tendu m’accueille.Il a laissé sa veste sur le dossier d’un fauteuil, comme s’il allait revenir vi

MaëlysL’appartement s’est vidé de toute présence, hormis moi. Le silence est devenu presque palpable, comme un poids qui écrase mes épaules. La lumière artificielle éclaire les murs lisses, froids, aseptisés des surfaces lisses comme le mensonge dans lequel je nage depuis trop longtemps. J’ai posé le téléphone sur le bureau, mais le poids du silence est encore plus lourd que la menace au bout du fil. Cette voix, glaciale, se répercute encore dans ma tête.Je sens le souffle de Mirela, cette ombre glaciale qui me suit partout. La Veuve. Un surnom qu’elle a choisi, ou qu’on lui a donné. Et ce nom résonne comme un avertissement que je ne peux plus ignorer. Elle n’est pas une menace lointaine. Elle est là, elle existe. Elle rôde, patiente, prête à frapper.Je repense à Aleksandr. À la violence contenue sous son regard dur, aux éclats d’humanité qu’il m’a parfois laissés entrevoir, au moment fugace où j’ai cru pouvoir percer sa carapace. Mais est-ce suffisant pour me protéger ? Pour proté

MaëlysLe trajet du retour a été un long tunnel de silence.Je n’ai pas prononcé un mot dans la voiture. Lui non plus. Ce mystérieux homme à la cicatrice m’a ramenée jusqu’à une ruelle proche, puis il a disparu comme il était venu, avalé par la nuit, sans autre explication que celle qu’il m’a laissée entre les dents : « Tu n’as encore rien vu. »Et maintenant je suis là. Dans l’appartement. Face à Aleksandr. Mon cœur bat trop vite, ma peau est trop froide, mes mains tremblent encore du poids des vérités qu’on a insinuées dans mon esprit. Mais je garde le masque. Pour lui. Pour moi. Pour ce qu’on doit affronter.Je suis celle qui entre dans la guerre. Plus une spectatrice. Plus une protégée.— Dis-moi la vérité, dis-je enfin.Il m’observe, figé.— Quelle vérité ?— Celle que tu caches depuis le début. À propos de Mirela. De toi. D’elle. De vous.Il ferme les yeux, soupire lentement, puis s’assoit au bord du lit, comme si le poids du passé l’écrasait.— Ce que tu as entendu ce soir… ce

MaëlysJe n’ai pas dormi.Le carnet est resté ouvert sur mes genoux toute la nuit. Les mots ont dansé sous mes yeux comme des fantômes : noms oubliés, dates effacées, promesses rompues. J’ai lu jusqu’à ce que les lettres se brouillent, jusqu’à ce que ma respiration devienne douloureuse.Aleksandr est resté près de moi, silencieux, immobile. Présent sans s’imposer. Comme s’il sentait que je devais traverser cette nuit seule, avant de pouvoir revenir à lui.Je relis un passage. "Ils ont scellé leur pacte dans le sang. Lev est tombé en premier. Mais le prix le plus élevé, c’est lui qui le paiera. Le fils, pas le père."Je serre les mâchoires. Lev. Ce nom revient encore et encore, comme un poison qui refuse de se dissiper.— Ton frère ? je murmure, sans détourner les yeux du carnet.Aleksandr ne répond pas tout de suite. Puis sa voix s’élève, rauque, usée :— Oui. Mon frère.Je referme doucement le carnet et me tourne vers lui, le cœur battant. Je cherche à comprendre. À entendre ce qu’i

MaëlysIl y a des matins qui n’en sont pas vraiment.Des matins où le corps s’éveille, mais où l’esprit reste suspendu. Comme s’il refusait de réintégrer pleinement la réalité. Comme s’il savait que la paix était éphémère, et qu’il valait mieux retarder le retour à la conscience.Je reste là, contre lui, à écouter le rythme lent de sa respiration. C’est presque une berceuse. Mon front contre sa clavicule. Sa main toujours sur ma hanche, lourde et tendre. Ancrage. Promesse.Je n’ai jamais aimé les promesses.Elles ont trop souvent été des chaînes.Mais avec lui, c’est différent. Ce n’est pas une promesse formulée. C’est un fait. Une présence. Un je suis là que rien ne vient troubler.Et c’est ça, le plus dangereux.Parce que j’y crois.Parce que je veux y croire.Je ferme les yeux un instant de plus, juste pour le luxe de rester.Mais le monde, lui, ne s’est pas arrêté.Je le sens dans les vibrations lointaines d’un téléphone, dans les murmures étouffés de la ville qui reprend. Les bru