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Chapitre 28 — Rattrapée

Author: L'invincible
last update Huling Na-update: 2025-08-01 03:47:27

Aya

Je suis restée là trop longtemps, figée, seule, collée au banc comme un vieux chewing-gum sous une table d’école, et la pluie a tout lavé sauf ce qui hurle dedans, mes bras sont glacés, ma nuque raidie, mes reins douloureux, j’ai l’impression d’être une vieille porte humide qui ne ferme plus, qui tremble à chaque rafale, je n’ai plus de force, plus de raison de me lever, j’attends, je m’enfonce dans cette nuit grise comme un noyé dans la vase, je me laisse couler dans cette fatigue qui ne dort pas, cette lassitude ancienne, ce regret poisseux qui colle à la peau comme une couche de suie

Et je sais qu’elle va venir, je le sais d’un savoir sans logique, comme on sait qu’un éclair vient après le grondement, comme on sent l’orage dans la gorge, Lucia, elle, ma Lucia, même si je l’ai perdue, même si je ne mérite plus rien d’elle, même si mes mots ont creusé trop de fossés, trop de nuits vides, trop de silences qu’aucun amour ne peut boucher

Et quand je la vois apparaître, au bout de la
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    AyaJe suis restée là trop longtemps, figée, seule, collée au banc comme un vieux chewing-gum sous une table d’école, et la pluie a tout lavé sauf ce qui hurle dedans, mes bras sont glacés, ma nuque raidie, mes reins douloureux, j’ai l’impression d’être une vieille porte humide qui ne ferme plus, qui tremble à chaque rafale, je n’ai plus de force, plus de raison de me lever, j’attends, je m’enfonce dans cette nuit grise comme un noyé dans la vase, je me laisse couler dans cette fatigue qui ne dort pas, cette lassitude ancienne, ce regret poisseux qui colle à la peau comme une couche de suieEt je sais qu’elle va venir, je le sais d’un savoir sans logique, comme on sait qu’un éclair vient après le grondement, comme on sent l’orage dans la gorge, Lucia, elle, ma Lucia, même si je l’ai perdue, même si je ne mérite plus rien d’elle, même si mes mots ont creusé trop de fossés, trop de nuits vides, trop de silences qu’aucun amour ne peut boucherEt quand je la vois apparaître, au bout de la

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    AyaJe marche, je marche sans sentir mes pieds, sans savoir où je vais, juste ce froid qui me traverse les os, qui s’infiltre sous mes vêtements détrempés, ce froid qui ne vient pas du vent mais de moi, de l’intérieur, comme si tout ce que j’étais avait gelé d’un coup, arrêté net, figé dans l’instant où son regard s’est détourné, dans l’instant où elle m’a vue, dans l’instant où je me suis vue, minuscule, inutile, honteuse, une silhouette de trop, une erreur criante, une intrusion dans une vie qui n’a jamais été la mienneJe tourne en rond dans une ville qui m’est devenue hostile, les trottoirs m’écorchent, les murs me jugent, les réverbères me percent, je vois leurs ombres danser autour de moi comme des spectres, des témoins, des juges silencieux, je voudrais m’effacer, fondre dans le goudron mouillé, me dissoudre dans la pluie qui frappe ma nuque comme des gifles, comme des reprochesIl faisait encore jour quand je suis partie, il faisait encore chaud, maintenant c’est la nuit et je

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    AyaJ’attends qu’il cède.Qu’il fasse un pas de côté. Qu’il me libère de cette tension qui m’écorche vivante.Mais il ne bouge pas.Son corps me fait face, mur de chair, de volonté, de rage contenue.Son regard ne tremble pas.Il me voit. Toute entière , fissurée , armée. Défaite.— Salvatore.— Non.Sa voix est calme. Trop calme.Comme un fond de lac avant le naufrage.Je serre la poignée.Je le défie du regard. Je le supplie en même temps.Qu’il me laisse fuir. Qu’il m’épargne. Qu’il s’efface.Mais il ne bronche pas.Alors je frappe , pour le punir, pour me venger , pour survivre d'un coup sec , nerveux et précis.Ma paume s’écrase contre sa joue dans un claquement presque obscène.Sa tête bascule légèrement.Ses paupières se ferment.Une seule seconde.Mais il reste droit.Et quand il rouvre les yeux, quelque chose a changé , je vois un feu , une brèche . Et sans prévenir, il me rapproche de lui et m’embrasse avec passion et furieur . Ce n'est pas un baiser , c'est une collision ,

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