AU-DELA DES VAGUES

AU-DELA DES VAGUES

last updateLast Updated : 2025-07-27
By:  L'invincibleUpdated just now
Language: French
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Au-delà des Vagues Aya, une jeune ivoirienne de 22 ans, n’a plus rien à perdre quand elle embarque clandestinement pour l’Italie. Fuyant la pauvreté, un mariage forcé et les cicatrices d’un passé trop lourd, elle traverse l’Afrique du Nord et brave la mer Méditerranée. Le voyage est un cauchemar : violence, faim, peur constante. Mais elle survit. Et c’est déjà une victoire. Arrivée à Naples, sans papiers ni repères, elle erre entre foyers d’accueil et petits boulots précaires. Jusqu’au jour où son chemin croise celui de Salvatore Neri, un homme d’affaires aussi influent que mystérieux. Il a tout : l’argent, le pouvoir, une vie réglée au millimètre. Elle n’a rien… sauf son regard brûlant de vie. Contre toute attente, il l’aide. D’abord par pitié. Puis par fascination. Et très vite, par amour. Aya se méfie. Trop beau pour être vrai. Elle a trop souffert pour croire aux contes de fées. Mais Salvatore, lui aussi, cache ses propres blessures. Leur relation devient un refuge, un feu fragile qu’ils doivent protéger du monde extérieur… et de leurs propres démons. Entre les préjugés, les obstacles administratifs, les différences de classe et les fantômes du passé, leur amour tiendra-t-il ?

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Chapter 1

Chapitre 1 — Le sel et le silence

Aya

Le soleil est tombé comme un couperet sur Abidjan.

Un or jaune, lourd, presque cruel, s’est écrasé sur les tôles brûlantes des quartiers.

Les ruelles sentaient la poussière, l’huile rance et le regret.

Dans le sac à mes pieds : une robe rouge, deux photos cornées, un billet froissé.

Et ce cri dans ma poitrine qui refuse de se taire.

Il gronde depuis des années. Depuis l’enfance.

Depuis le moment où j’ai compris que le monde, pour les filles comme moi, n’était qu’une longue série de silences à avaler.

Je n’ai rien dit à ma mère. Ni à mon frère.

Ils croient que je vais vendre du poisson au marché de Koumassi.

Peut-être que c’est mieux ainsi. Peut-être qu’un mensonge est plus doux qu’un rêve trop grand.

Mais ce soir, je monte dans un bus.

Demain, je marcherai dans le désert.

Et après-demain…

Je n’ose même pas y penser.

Je n’ai que vingt-deux ans.

Et j’ai l’impression d’avoir déjà tout vécu.

Tout subi.

Le regard de Tonton Saliou, la nuit, quand il venait soi-disant "voir si je dormais bien".

Ses mains, sales, épaisses, qui glissaient sous les draps quand ma mère ronflait dans la pièce d’à côté.

Les doigts de l’imam, après la prière, qui se posaient trop longtemps sur mon bras.

Toujours avec ce sourire sucré. Celui qui te dégoûte, mais que tu ne peux pas dénoncer.

Le corps de mon fiancé, choisi par les anciens. Deux fois plus vieux. Trois fois plus sale.

Un homme qui me traitait déjà comme une épouse alors que je n’étais encore qu’une enfant.

Et ces femmes de ma famille. Ces tantes, ces voisines, ces mères fatiguées, qui répétaient inlassablement la même prière sans lumière :

– On endure, ma fille. On endure. C’est comme ça.

Non.

Pas moi.

Je refuse d’endurer.

Je refuse de m’effacer.

Alors je suis partie.

Sans bruit.

Sans adieu.

Avec pour seule foi ce qu’on m’a toujours interdit :

– L’espoir.

Le port est encore loin.

Mais déjà, je sens la mer.

Elle ne se voit pas. Mais elle pèse dans l’air.

Un souffle salé, invisible, qui colle à la peau.

Un appel.

Elle m’appelle.

Avec ses promesses pleines de sel, de douleur, de mystère.

On m’a dit que là-bas, en Libye, c’est pire que l’enfer.

On m’a dit que les passeurs te vendent comme une paire de chaussures usées.

On m’a dit que certaines filles se jettent à l’eau dès qu’elles voient le bateau.

On m’a dit qu’il y a des nuits où on crie si fort que même Dieu détourne le regard.

Mais on m’a aussi dit que si tu survis…

Tu peux renaître.

Moi, je veux renaître.

Pas pour être une sainte.

Pas pour devenir une grande dame.

Je ne veux pas une villa, ni un mari blanc, ni les robes chères qu’on voit à la télé.

Je veux juste pouvoir respirer.

Respirer sans avoir à demander la permission.

Sans craindre les murs. Les mains. Les non-dits.

Et si, au passage, je peux devenir belle, libre, désirée…

Alors oui, je suis prête à me perdre.

Je suis prête à tout.

Même à mourir un peu, pour naître autrement.

Je monte dans le camion.

Il sent l’essence, la sueur, la peur.

Ils sont dix à l’intérieur. Hommes, femmes, jeunes, vieux.

Entassés. Écrasés les uns contre les autres.

Le silence est lourd comme la fièvre.

On ne parle pas.

On s’évalue du regard.

On sait qu’on va devoir se battre pour survivre.

Peut-être même l’un contre l’autre.

Moi, je serre mon sac contre moi.

Dedans, il y a ma robe rouge.

Celle que j’ai cousue moi-même, la nuit, à la lueur d’une bougie.

Celle que je porterai le jour où je me regarderai dans un miroir…

Et que je me trouverai belle.

Pas comme une marchandise.

Pas comme une proie.

Mais comme une femme. Une vraie.

Entière. Vivante.

Brûlante de désir et de colère.

Libre.

Même si je dois d’abord me perdre en mer.

Même si je dois vendre mon corps pour acheter ma dignité.

Même si je dois tout oublier.

Même mon nom.

Quand le moteur rugit et que les pneus crissent contre la terre rouge, je ne pleure pas.

Je ne regarde pas derrière moi.

Je garde les yeux ouverts.

Le dos droit.

Parce que c’est le seul choix que j’ai fait.

Le seul que je peux encore appeler à moi.

Le camion file à toute vitesse sur une route que je ne connais pas.

Pas de panneaux. Pas de lumières.

Juste la nuit, grasse et opaque, qui s’étale de chaque côté comme une bête endormie.

Le vent s’engouffre par une fente rouillée, secoue mon foulard, colle mes mèches à mon front.

Je transpire. Mais je frissonne.

Je ne sais pas si j’ai chaud ou froid.

Je ne sais même pas si j’ai encore peur… ou si je suis déjà en train de me transformer.

– On ne revient pas en arrière, Aya.

Je me répète cette phrase, comme une prière. Comme une incantation.

À côté de moi, une femme ronfle doucement.

Ses pieds sont nus, sales. Ses bras serrent un bébé contre sa poitrine.

Le petit ne bouge pas. Je ne sais pas s’il dort… ou s’il ne pleure plus parce qu’il a compris qu’ici, ça ne sert à rien.

En face, un jeune homme me regarde depuis tout à l’heure.

Il ne dit rien. Mais ses yeux fouillent. Déshabillent.

Je baisse les miens. Je serre les genoux.

Pas encore. Pas déjà.

On s’arrête en pleine brousse, vers l’aube.

Le chauffeur descend. Il parle avec deux autres types.

Je devine leur silhouette dans le contre-jour du matin naissant.

L’un d’eux porte une machette. L’autre fume une cigarette sans la main. Juste posée entre ses lèvres. Il parle, mais ne bouge pas.

Quelque chose dans leur manière de rester droits me fait peur.

Comme s’ils étaient nés ici, dans l’ombre, et qu’ils y règnent.

On nous fait descendre.

Une voix sèche crache des ordres en arabe. Je ne comprends pas, mais je sais :

– Il faut marcher.

On marche. Longtemps.

La poussière colle à mes jambes. Ma gorge est sèche. Mes pieds me brûlent.

Mais je ne dis rien.

À chaque pas, je laisse quelque chose derrière moi.

Une peur. Une honte. Une miette de la fille d’hier.

Plus tard, un camp. Un genre de base. Barbelés, tôles, tentes sales.

Et des hommes. Beaucoup d’hommes.

Certains jeunes. D’autres beaucoup trop vieux.

Ils nous regardent arriver comme on observe une livraison.

Je sens leur faim.

Pas de pain. Pas d’eau.

La faim du sexe. De la domination.

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