Au-delà des Vagues Aya, une jeune ivoirienne de 22 ans, n’a plus rien à perdre quand elle embarque clandestinement pour l’Italie. Fuyant la pauvreté, un mariage forcé et les cicatrices d’un passé trop lourd, elle traverse l’Afrique du Nord et brave la mer Méditerranée. Le voyage est un cauchemar : violence, faim, peur constante. Mais elle survit. Et c’est déjà une victoire. Arrivée à Naples, sans papiers ni repères, elle erre entre foyers d’accueil et petits boulots précaires. Jusqu’au jour où son chemin croise celui de Salvatore Neri, un homme d’affaires aussi influent que mystérieux. Il a tout : l’argent, le pouvoir, une vie réglée au millimètre. Elle n’a rien… sauf son regard brûlant de vie. Contre toute attente, il l’aide. D’abord par pitié. Puis par fascination. Et très vite, par amour. Aya se méfie. Trop beau pour être vrai. Elle a trop souffert pour croire aux contes de fées. Mais Salvatore, lui aussi, cache ses propres blessures. Leur relation devient un refuge, un feu fragile qu’ils doivent protéger du monde extérieur… et de leurs propres démons. Entre les préjugés, les obstacles administratifs, les différences de classe et les fantômes du passé, leur amour tiendra-t-il ?
View MoreAya
Le soleil est tombé comme un couperet sur Abidjan.
Un or jaune, lourd, presque cruel, s’est écrasé sur les tôles brûlantes des quartiers.
Les ruelles sentaient la poussière, l’huile rance et le regret.
Dans le sac à mes pieds : une robe rouge, deux photos cornées, un billet froissé.
Et ce cri dans ma poitrine qui refuse de se taire.
Il gronde depuis des années. Depuis l’enfance.
Depuis le moment où j’ai compris que le monde, pour les filles comme moi, n’était qu’une longue série de silences à avaler.
Je n’ai rien dit à ma mère. Ni à mon frère.
Ils croient que je vais vendre du poisson au marché de Koumassi.
Peut-être que c’est mieux ainsi. Peut-être qu’un mensonge est plus doux qu’un rêve trop grand.
Mais ce soir, je monte dans un bus.
Demain, je marcherai dans le désert.
Et après-demain…
Je n’ose même pas y penser.
Je n’ai que vingt-deux ans.
Et j’ai l’impression d’avoir déjà tout vécu.
Tout subi.
Le regard de Tonton Saliou, la nuit, quand il venait soi-disant "voir si je dormais bien".
Ses mains, sales, épaisses, qui glissaient sous les draps quand ma mère ronflait dans la pièce d’à côté.
Les doigts de l’imam, après la prière, qui se posaient trop longtemps sur mon bras.
Toujours avec ce sourire sucré. Celui qui te dégoûte, mais que tu ne peux pas dénoncer.
Le corps de mon fiancé, choisi par les anciens. Deux fois plus vieux. Trois fois plus sale.
Un homme qui me traitait déjà comme une épouse alors que je n’étais encore qu’une enfant.
Et ces femmes de ma famille. Ces tantes, ces voisines, ces mères fatiguées, qui répétaient inlassablement la même prière sans lumière :
– On endure, ma fille. On endure. C’est comme ça.
Non.
Pas moi.
Je refuse d’endurer.
Je refuse de m’effacer.
Alors je suis partie.
Sans bruit.
Sans adieu.
Avec pour seule foi ce qu’on m’a toujours interdit :
– L’espoir.
Le port est encore loin.
Mais déjà, je sens la mer.
Elle ne se voit pas. Mais elle pèse dans l’air.
Un souffle salé, invisible, qui colle à la peau.
Un appel.
Elle m’appelle.
Avec ses promesses pleines de sel, de douleur, de mystère.
On m’a dit que là-bas, en Libye, c’est pire que l’enfer.
On m’a dit que les passeurs te vendent comme une paire de chaussures usées.
On m’a dit que certaines filles se jettent à l’eau dès qu’elles voient le bateau.
On m’a dit qu’il y a des nuits où on crie si fort que même Dieu détourne le regard.
Mais on m’a aussi dit que si tu survis…
Tu peux renaître.
Moi, je veux renaître.
Pas pour être une sainte.
Pas pour devenir une grande dame.
Je ne veux pas une villa, ni un mari blanc, ni les robes chères qu’on voit à la télé.
Je veux juste pouvoir respirer.
Respirer sans avoir à demander la permission.
Sans craindre les murs. Les mains. Les non-dits.
Et si, au passage, je peux devenir belle, libre, désirée…
Alors oui, je suis prête à me perdre.
Je suis prête à tout.
Même à mourir un peu, pour naître autrement.
Je monte dans le camion.
Il sent l’essence, la sueur, la peur.
Ils sont dix à l’intérieur. Hommes, femmes, jeunes, vieux.
Entassés. Écrasés les uns contre les autres.
Le silence est lourd comme la fièvre.
On ne parle pas.
On s’évalue du regard.
On sait qu’on va devoir se battre pour survivre.
Peut-être même l’un contre l’autre.
Moi, je serre mon sac contre moi.
Dedans, il y a ma robe rouge.
Celle que j’ai cousue moi-même, la nuit, à la lueur d’une bougie.
Celle que je porterai le jour où je me regarderai dans un miroir…
Et que je me trouverai belle.
Pas comme une marchandise.
Pas comme une proie.
Mais comme une femme. Une vraie.
Entière. Vivante.
Brûlante de désir et de colère.
Libre.
Même si je dois d’abord me perdre en mer.
Même si je dois vendre mon corps pour acheter ma dignité.
Même si je dois tout oublier.
Même mon nom.
Quand le moteur rugit et que les pneus crissent contre la terre rouge, je ne pleure pas.
Je ne regarde pas derrière moi.
Je garde les yeux ouverts.
Le dos droit.
Parce que c’est le seul choix que j’ai fait.
Le seul que je peux encore appeler à moi.
Le camion file à toute vitesse sur une route que je ne connais pas.
Pas de panneaux. Pas de lumières.
Juste la nuit, grasse et opaque, qui s’étale de chaque côté comme une bête endormie.
Le vent s’engouffre par une fente rouillée, secoue mon foulard, colle mes mèches à mon front.
Je transpire. Mais je frissonne.
Je ne sais pas si j’ai chaud ou froid.
Je ne sais même pas si j’ai encore peur… ou si je suis déjà en train de me transformer.
– On ne revient pas en arrière, Aya.
Je me répète cette phrase, comme une prière. Comme une incantation.
À côté de moi, une femme ronfle doucement.
Ses pieds sont nus, sales. Ses bras serrent un bébé contre sa poitrine.
Le petit ne bouge pas. Je ne sais pas s’il dort… ou s’il ne pleure plus parce qu’il a compris qu’ici, ça ne sert à rien.
En face, un jeune homme me regarde depuis tout à l’heure.
Il ne dit rien. Mais ses yeux fouillent. Déshabillent.
Je baisse les miens. Je serre les genoux.
Pas encore. Pas déjà.
On s’arrête en pleine brousse, vers l’aube.
Le chauffeur descend. Il parle avec deux autres types.
Je devine leur silhouette dans le contre-jour du matin naissant.
L’un d’eux porte une machette. L’autre fume une cigarette sans la main. Juste posée entre ses lèvres. Il parle, mais ne bouge pas.
Quelque chose dans leur manière de rester droits me fait peur.
Comme s’ils étaient nés ici, dans l’ombre, et qu’ils y règnent.
On nous fait descendre.
Une voix sèche crache des ordres en arabe. Je ne comprends pas, mais je sais :
– Il faut marcher.
On marche. Longtemps.
La poussière colle à mes jambes. Ma gorge est sèche. Mes pieds me brûlent.
Mais je ne dis rien.
À chaque pas, je laisse quelque chose derrière moi.
Une peur. Une honte. Une miette de la fille d’hier.
Plus tard, un camp. Un genre de base. Barbelés, tôles, tentes sales.
Et des hommes. Beaucoup d’hommes.
Certains jeunes. D’autres beaucoup trop vieux.
Ils nous regardent arriver comme on observe une livraison.
Je sens leur faim.
Pas de pain. Pas d’eau.
La faim du sexe. De la domination.
AyaJ’attends qu’il cède.Qu’il fasse un pas de côté. Qu’il me libère de cette tension qui m’écorche vivante.Mais il ne bouge pas.Son corps me fait face, mur de chair, de volonté, de rage contenue.Son regard ne tremble pas.Il me voit. Toute entière , fissurée , armée. Défaite.— Salvatore.— Non.Sa voix est calme. Trop calme.Comme un fond de lac avant le naufrage.Je serre la poignée.Je le défie du regard. Je le supplie en même temps.Qu’il me laisse fuir. Qu’il m’épargne. Qu’il s’efface.Mais il ne bronche pas.Alors je frappe , pour le punir, pour me venger , pour survivre d'un coup sec , nerveux et précis.Ma paume s’écrase contre sa joue dans un claquement presque obscène.Sa tête bascule légèrement.Ses paupières se ferment.Une seule seconde.Mais il reste droit.Et quand il rouvre les yeux, quelque chose a changé , je vois un feu , une brèche . Et sans prévenir, il me rapproche de lui et m’embrasse avec passion et furieur . Ce n'est pas un baiser , c'est une collision ,
AyaJe m’apprêtais à partir , tourner les talons , rassembler les lambeaux de ma fierté et les recoller comme je pouvais. Disparaître par les ruelles, rentrer à pied, hurler dans le vide, me reconstruire ailleurs. En silence. Loin de ce monde qui m’a recrachée . Mais....il est là.Garé comme une évidence. Comme un piège tendu depuis l’aube. Sa voiture noire attend à la sortie du portail. Et lui, dedans, immobile , prêt : Salvatore.Il ne bouge pas tout de suite. Il me regarde. Comme s’il m’avait suivie à distance. Comme s’il connaissait exactement le moment où j’allais craquer. Comme s’il n’attendait que ça.Je reste figée , le froid remonte dans mes jambes. Mon cœur cogne plus vite. Mais je ne bouge pas , puis il sort , tranquille et glacial.Aucun mot pour commencer. Pas même un bonjour.Juste :— Monte.Sa voix coupe l’air comme une lame.Je ris , sec , bref : — Non.— Ne fais pas ça, Aya.— Faire quoi ? Refuser de monter dans une voiture avec l’homme qui vient de me faire radier
AyaL’air du matin me gifle au visage, mais sans réussir à dissiper le chaos qui s’est levé en moi comme une tempête tapie trop longtemps. Il n’a pas la rudesse nécessaire pour m’anesthésier, ni la morsure salvatrice qui aurait pu refermer la plaie vive qu’il a rouverte. Ce feu qui me ronge de l’intérieur, né du claquement de porte qui m’a expulsée hors de son univers, refuse de s’éteindre. Il s’attise au contraire, nourri par l’humiliation, la colère, et cette sensation étouffante de dépossession.Je descends les marches une à une, l’estomac noué, comme on quitte un rêve fracassé ou un mensonge qu’on aurait arraché à sa gorge après l’avoir trop longtemps avalé. À chaque pas, quelque chose se fissure, mais quelque chose d’autre se renforce. Je ne veux pas verser de larmes, je refuse de m’effondrer ou de supplier un homme de m’autoriser à respirer. Je veux éclater, m’imposer, inscrire mon cri dans la pierre de ses fondations. Lui rappeler que je suis là, entière, vibrante, dangereuseme
SalvatoreJe la regarde s’habiller.Chaque geste est maîtrisé. Rapide. Détaché.Elle enfile sa robe comme on remet une armure.Elle relève ses cheveux d’un coup de main sec, sans un regard.Elle attrape ses clés.Tout est normal. Trop normal.Comme si ce matin n’avait été qu’un accident tendre. Une anomalie.Un rêve déjà évacué.Elle s’apprête à partir.À retourner là-bas.À ce foutu entrepôt qui la bouffe à petit feu.Je me cale contre la porte, les bras croisés. Je la fixe. Je retiens. Je ravale.— Tu vas à l’entrepôt ?Elle s’arrête, juste une seconde, les doigts sur la poignée.Elle tourne la tête. Pas vraiment vers moi. Plutôt à côté.Sa voix est sèche.— Oui. Pourquoi ?— J’aimerais que tu n’y ailles pas, aujourd’hui.Elle se retourne complètement cette fois.Elle plante son regard dans le mien. Tranchant.— Et pourquoi ça ?— Parce que tu es au bout, Aya. Tu dors pas. Tu manges presque rien. Tu passes ta vie à porter des charges et à régler des problèmes qui ne sont pas les tie
AyaJe me réveille contre lui.Pas à côté , contre.Il est là, entier, dense, endormi, mais encore posé sur moi comme un serment silencieux.Sa main repose sur ma hanche, paume ouverte, peau contre peau. Ses doigts s’enroulent légèrement autour de moi, comme s’il m’avait tenue toute la nuit sans jamais lâcher prise.Et pourtant, je dors si souvent seule. Même quand je suis avec lui. Mais cette nuit… je ne me suis pas échappée. Pas même dans mes rêves.Je l’entends respirer doucement. Un souffle profond, lent, presque animal. Il dort encore, et moi… je ne veux pas bouger. Pas encore.Alors je l’effleure. À peine.Du bout des doigts, je longe sa cage thoracique, les lignes de ses côtes, cette peau fine où je devine le battement de son cœur. Mon geste n’est pas éveil. Il est hommage.Je le regarde dormir. Et je me dis que peut-être… peut-être je pourrais le choisir. Un jour.Mais pas dehors. Pas encore. Ici, dans cet espace clos où rien ne me juge, où le monde ne s’accroche pas à mes épa
AyaIl voulait sortir.Je l’ai vu avant même qu’il me le dise.Dans les détails.Dans la façon qu’il a eue de boutonner sa chemise cette chemise noire, sobre, celle qui dessine ses épaules sans ostentation.Il avait remonté ses manches juste au-dessous du coude, et sa montre cliquetait doucement contre son poignet quand il bougeait.Il avait mis du parfum aussi.Un boisé chaud, presque épicé. Subtil.Un parfum qu’on ne remarque pas tout de suite, mais qui, une fois reconnu, reste sur la mémoire comme une empreinte.Il s’était préparé. Pour moi. Pour nous.Et moi, je l’ai regardé…Et j’ai reculé.— Tu veux vraiment qu’on sorte ? ai-je demandé.— Oui, a-t-il répondu. J’ai réservé quelque part. Un resto calme. Discret.Mais le mot "réservé" m’a frappée plus fort qu’il n’aurait dû.Parce qu’il signifiait un cap franchi.Un cap que je ne savais pas encore comment traverser.J’ai senti ma poitrine se serrer.Pas à cause de lui.À cause du monde.— Je préfère rester ici, ai-je dit.Et j’ai v
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