Chapitre 5

« Quelle autre raison ? » a lancé Collin en me foudroyant du regard.

« Qui d'autre l'a touchée à part toi ? »

En regardant cette scène parfaitement orchestrée, un profond désespoir m'a envahie.

Elle avait tout planifié — jusqu'à l'allergène qu'elle avait caché dans sa manche.

« Hélène ! » a rugi Collin en se jetant sur moi. Sa main s'est refermée autour de ma gorge.

« J'aurais dû savoir à quel point tu es tordue ! »

Sa poigne s'est resserrée. Je n'ai plus pu respirer, ma vision s'est brouillée.

Mais au moment même où ses doigts se sont crispés, une douleur brûlante a éclaté à travers notre lien.

Ce n'était pas ma douleur. C'était la sienne.

Le lien de compagnons se retournait contre lui, le punissant d'avoir blessé sa moitié destinée.

Son visage est devenu livide, et des perles de sueur froide ont jailli sur son front.

Il m'a lâchée par réflexe.

Je me suis écrasée contre le mur. Le choc sourd a résonné dans la pièce, tandis qu'un goût de sang emplissait ma bouche.

« Collin ! » a crié Lydia, alarmée. « Ça va ? Pourquoi tu es si pâle ? »

Il a secoué la tête, refoulant la douleur lancinante qui montait du fond de son esprit, puis il m'a de nouveau regardée.

La rage dans ses yeux a brûlé encore plus fort, comme s'il voulait me réduire en cendres.

« Si j'avais su que ton esprit était aussi venimeux, j'aurais maudit la Déesse de la Lune pour nous avoir unis ! Sors d'ici ! Et ne te montre plus jamais devant moi ! »

Je me suis effondrée au sol, sans plus rien dire.

Parce que je savais que c'était la dernière fois.

Je ne ressentirais plus jamais la douleur de leur méfiance.

Parce que mon cœur était déjà entièrement mort.

Pendant un bref instant, en voyant le sang couler de mes lèvres, j'ai cru apercevoir quelque chose dans les yeux de Sarah — de la pitié.

Mais l'instant d'après, les gémissements plaintifs de Lydia ont repris, et Sarah a détourné le regard, se précipitant pour consoler la fille qui, selon elle, avait vraiment besoin d'elle.

« Mon ange, comment tu te sens ? Tu veux qu'on appelle un guérisseur ? »

J'ai essuyé le sang sur ma bouche d'un revers de main et je me suis lentement relevée.

Dans un coin se trouvait une vieille valise contenant mes rares vêtements.

J'avais déjà fait mes bagages.

Ils m'ont regardée avec surprise, avant que leurs visages ne se tordent d'un sarcasme amer.

« Quoi, tu crois que tu peux fuir la maison, maintenant ? »

« La meute te punit pour ton bien, Hélène. Pourquoi tu ne comprends pas que c'est pour ton bien ? »

Mon père m'a fixée, le visage impassible.

« Tu crois que fuir va arranger quoi que ce soit ? »

Sarah a ricané.

« Hélène, tu as toujours été comme ça. Dès qu'un problème se présente, tu fuis. Comme ton père l'a dit, on a élevé une lâche. »

Collin a déposé Lydia sur le lit avec précaution, puis il s'est tourné vers moi.

Il n'y avait plus aucune chaleur dans ses yeux — seulement un dégoût glacial.

« Où crois-tu aller ? »

« Loin du territoire de la meute de la Lune Noire. »

« Hélène ! » Sa voix a grondé comme un tonnerre. « Tu te rends compte de ce que tu dis ? Dès que tu franchiras la frontière, tu ne seras plus membre de la meute de la Lune Noire ! »

Trop de déception s'était accumulée. Mon cœur était devenu trop engourdi pour ressentir encore la douleur.

J'avais entendu cette menace des centaines de fois.

Et je n'avais plus peur de perdre ce qu'ils appelaient ma maison.

Parce que cette meute ne m'avait jamais vraiment donné le sentiment d'en faire partie.

« Parfait, » ai-je dit d'une voix plate en traînant ma valise vers la porte.

« Je n'en ai jamais été digne, de toute façon. »

« Je ne me retournerai pas. Et celui qui rompra ce vœu perdra son unique amour pour l'éternité. »

J'ai traîné ma valise jusqu'à la porte principale sans un regard en arrière.

Au moment où j'ai franchi le seuil de la villa, une brise nocturne m'a frôlée.

Elle portait l'odeur de la liberté… mais aussi le présage de la mort.

Collin est resté debout devant la grande baie vitrée, me regardant partir.

Mes derniers mots lui ont glacé le sang.

Il savait que je n'étais pas en bonne santé.

Il craignait que sortir dans la nuit froide ne me détruise davantage.

Il avait envie de dire que ses paroles de bannissement étaient dictées par la colère, qu'il n'avait jamais voulu que je parte vraiment.

Il a fait un pas en avant, prêt à me rattraper.

Mais la voix douce de Lydia l'a arrêté.

« Elle reviendra, Alpha. Quand elle comprendra qu'elle n'a nulle part où aller, elle reviendra en rampant, te suppliant de la reprendre. Alors, elle saura que sans ta protection, elle n'est rien. »

En entendant cela, une étrange irritation a traversé Collin.

Il a détourné le regard, silencieusement.

Personne n'a remarqué le léger tremblement de ses poings serrés, ni la façon dont ses ongles s'étaient enfoncés dans sa paume jusqu'à en faire couler le sang.