LOGINDianeLe marbre froid du sol de la salle de bain pénètre mes genoux, mais la sensation est lointaine, engourdie. Tout est engourdi, sauf cette chose brûlante et acérée qui bat derrière mon sternum. La Haine. Elle a un goût de métal et de cendres. Elle a le visage de Dimitri Volkov.Mes doigts se crispent sur le bord de la vasque. J’ai essayé de m’enfuir. Une tentative désespérée, puérile, conçue dans la panique de cette journée. J’avais un plan, un contact, une route vers la liberté. Ou vers Liam. C’était la même chose, dans ma tête. Liam, c’était la liberté. La douceur, la normalité, un amour qui ne laissait pas d’empreintes bleues sur la peau.Volkov l’a su avant même que je ne bouge. Il avait anticipé chaque pas. Le chauffeur « complice » était à sa solde. La voiture qui devait m’emmener à l’aéroport s’est arrêtée devant les grilles de la propriété moscovite, et l’homme a simplement tourné la tête, un sourire navré aux lèvres.— Monsieur Volkov vous attend, madame.Il attendait. Co
Dimitri VolkovLe silence de ma suite , après son départ, est plus éloquent que n’importe quel tumulte.Je reste près de la grande baie vitrée, les mains dans les poches de mon costume. Je contemple la ville étincelante qui s’étale à mes pieds. Mon empire. Un réseau de lumières et d’ombres que je contrôle d’un simple mot. Pourtant, l’écho le plus vif en ce moment n’est pas celui de mes conquêtes. C’est celui d’un claquement de talons furieux dans le couloir, suivi d’un silence de mort.Diane.Je ferme les yeux un instant, et je la revois. Pas telle qu’elle est partie, humiliée et tremblante. Mais telle qu’elle était dans l’instant qui a précédé la rage. Ce feu dans son regard vert. Cette insolence magnifique qui défiait toute logique. Le goût de ses lèvres, d’abord surprise, puis furieusement résistantes, persiste sur ma langue comme un vin capiteux.Un sourire lent étire mes lèvres.Elle a essayé de me frapper. Une deuxième fois.L’audace est… enivrante. Aussi enivrante que sa stupid
Diane Sa limousine m'attend devant , je monte accompagné de Liam .La limousine glisse dans les rues de la ville, un cocon de silence et d’acier. La nuit, à travers les vitres teintées, n’est qu’un flou de lumières étirées, comme si le monde extérieur fuyait, indifférent à l’effondrement qui a lieu à l’intérieur.Je regarde mes poignets. Les empreintes digitales de Volkov sont déjà visibles, des cercles violacés qui encerclent ma peau fine. Des médaillons de ma défaite. La douleur sourde qui en émane est un rappel constant : prévisible, maîtrisable, punissable. Sa voix résonne encore dans mon crâne, froide et implacable.Mon père, assis en face de moi, n’a pas prononcé un mot depuis que nous avons quitté le repaire du dragon. Son regard, fuyant, s’est accroché une fois à mes mains, puis s’est détourné, préférant contempler le néant urbain. Son silence est plus éloquent qu’un réquisitoire. C’est une abdication. Une ratification de la nouvelle loi : celle de Volkov.Mais c’est Liam, as
DianeJe suis déjà sur lui.La rage est un voile rouge devant mes yeux. Je lance mon bras en arrière, toute la force de mon corps, de mon humiliation, concentrée dans la paume de ma main. Je veux l’effacer. Effacer ce sourire, ce baiser, cette certitude absolue.Cette fois, la trajectoire est plus courte, plus violente. Je suis trop proche, trop rapide.Mais lui l’est encore plus.Sa main n’est pas un éclair. C’est un mur. Elle se lève, intercepte mon poignet à quelques centimètres de son visage avec une précision qui en est presque obscène. L’impact de sa prise est brutal. J’entends presque le craquement de mes os se comprimant sous ses doigts. La douleur, vive, immédiate, me fait hurler de surprise plus que de mal.— Ah !Je suis prisonnière, figée dans ce geste de révolte avorté. Mon bras tremble, tenu en l’air par une force irrésistible. La souffrance au poignet est aiguë, clarifiante.Il ne dit rien. Il me regarde, son visage à présent complètement fermé. La froideur qui en émane
DianeLe thé sent le jasmin et l’épice. Une fragrance délicate et trompeuse. Je m’assois au bord du canapé, la colonne vertébrale raide comme une lame. Il occupe le fauteuil en face, immense, dominateur. Il verse le thé avec une grâce troublante. Le liquide ambré tombe dans la tasse en porcelaine fine. Un silence s’étire, épais comme la soie des rideaux.Il tend la tasse vers moi. Je ne bouge pas. Mes mains sont croisées sur mes genoux, des serres glacées.— Vous n’aimez pas le thé ? fait-il, la tasse toujours suspendue dans l’espace entre nous.— Je n’aime pas la situation, je dis.Ma voix me surprend. Elle est claire, presque calme. Une vibration froide qui ne trahit pas le tremblement intérieur.Il pose la tasse sur la table, sans un bruit. Ses yeux gris plongent dans les miens.— La situation est ce que nous en faisons, Diane.— Non. La situation est ce que vous et mon père en avez fait. Un marché. Une transaction. Je suis le produit.Il esquisse ce même sourire minuscule, ce pli
DianeJe monte dans la voiture. Mon père s’installe à mes côtés. Liam referme la portière, un bruit sourd et définitif, puis prend place devant, à côté du chauffeur.Le trajet est un tunnel de silence. Les rues de la ville, si familières, défilent derrière les vitres teintées comme un film muet et déconnecté. Aucun de nous ne parle. Le souffle de mon père est régulier, indifférent. Le parfum de cuir neuf et d’air conditionné est écœurant. Je regarde la nuque de Liam, droite, immobile. Un roc dans ce paysage d’absurdité glacée.La Bentley s’engage sous le marquise de l’Hôtel des Bergues, le palace le plus ancien et le plus prestigieux de la ville. Les portiers en livrée s’affairent, mais tout semble se dérouler dans une bulle d’isolement sonore. Mon père descend le premier, tend une main courtoise que je saisis mécaniquement. Mes jambes sont de coton.Il ne me lâche pas le bras. Sa prise est ferme, directive. Nous traversons le hall immense, aux lustres étincelants et aux tapis épais q







