Chapitre 3 – L’apparition parfaite

Inaya se tenait dans l’open space silencieux, encore secouée par sa rencontre avec Louis.

Il n’avait presque pas changé. Et pourtant… tout en lui semblait plus froid, plus contrôlé. Comme si le garçon qu’elle avait aimé avait disparu pour laisser place à un homme que rien n’atteignait.

Elle tentait de se concentrer sur les fichiers qu’on venait de lui remettre quand elle entendit une voix douce, presque chantante, derrière elle.

— « Tu veux un café ? »

Inaya se retourna.

Une femme s’approchait, tenant deux gobelets dans ses mains.

Elle était d’une beauté calme et ordonnée. Une silhouette élancée dans un tailleur beige, les cheveux bruns lisses tombant en cascade sur ses épaules, une peau pâle et soyeuse, des ongles parfaitement manucurés.

Un sourire doux ornait ses lèvres.

— « Je suis Élisa. Élisa Montclair. »

Elle tendit un des cafés à Inaya.

— « Je crois qu’on ne s’est pas croisées encore. Je suis… »

Elle marqua une pause, puis ajouta avec un sourire presque timide :

— « La fiancée de Louis. »

Un coup en pleine poitrine.

Inaya sentit sa gorge se nouer, mais elle n’en montra rien. Elle prit le café, sourit doucement.

— « Enchantée. Moi, c’est Inaya. »

— « Oui, je sais. Louis m’a parlé de toi… un peu. »

Sa voix était douce. Parfaite. Mais quelque chose dans son regard…

Un éclat. Une ombre fugace.

Quelque chose de trop poli pour être vrai.

— « Il paraît que tu es très brillante. Une étoile montante, c’est ce que dit le directeur adjoint. »

Inaya ne savait pas si c’était un compliment ou une mise en garde.

— « Je fais de mon mieux. » répondit-elle simplement.

Élisa la regarda avec un air doux, presque complice. Puis elle s’approcha un peu plus et murmura :

— « Je sais que ça peut être difficile… de travailler ici. Les attentes sont élevées. Et Louis est… exigeant. »

Un sourire tendre. Une main posée brièvement sur l’épaule d’Inaya.

Mais ce geste, censé être réconfortant, lui donna des frissons.

Inaya sentait l’avertissement derrière la gentillesse.

Elle n’était pas idiote.

Cette femme savait. Ou soupçonnait.

Et elle marquait son territoire.

— « Ne t’en fais pas. Je suis là pour apprendre. Rien de plus. »

Un silence tendu s’installa, à peine voilé par leurs sourires de façade.

Élisa finit par reculer, ajusta la manche de son tailleur et dit d’un ton léger :

— « Louis est très loyal. Quand il aime, il aime jusqu’au bout. Il ne trahit pas. »

Cette phrase, lancée comme une caresse, fut une flèche empoisonnée.

Inaya retint une bouffée d’amertume.

Elle savait ce qu’il lui avait fait.

Et pourtant, elle resta digne.

— « Alors je suppose qu’il a changé. »

Élisa arqua légèrement un sourcil, surprise.

— « Pardon ? »

Inaya répondit par un sourire impassible.

— « Rien. Merci pour le café. »

Puis elle se retourna calmement vers son écran, laissant Élisa plantée là.

Mais au fond d’elle, une alarme venait de s’activer.

Cette femme n’était pas une poupée fragile.

C’était une adversaire. Une manipulatrice déguisée en douceur.

Et Inaya savait que ce n’était que le début du jeu.