Samuel Les jours suivants, je ne cessai de tourner et retourner dans mon esprit les découvertes récentes. Les lettres étaient un indice, mais aussi une porte ouverte sur un abîme de questions sans réponses. Alice. Ce nom résonnait dans ma tête, comme un écho lointain, aussi mystérieux qu’indéchiffrable. Pourquoi mon frère avait-il gardé cette histoire secrète ? Et pourquoi les lettres semblaient-elles si importantes, si lourdes de sens ? À chaque lecture, une nouvelle facette de leur relation se dessinait, mais les bribes de vérité laissées derrière étaient encore floues.Le coffre, bien que fermé, n’avait pas totalement emporté ses secrets. Il avait suffi de quelques mots pour que tout bascule. Je savais que la suite de cette quête passait par Alice, mais où la trouver ? Comment la retrouver dans ce monde où tout semblait glisser entre mes doigts comme du sable ?Une après-midi, alors que l’idée de la poursuivre devenait une obsession, je décidai de sortir, de me plonger dans le mon
Samuel Les mots d'Alice résonnaient encore dans ma tête. "Choisir entre la vérité qui guérit et la vérité qui détruit." Il y avait quelque chose de définitif dans sa voix, quelque chose qui m’obligeait à réfléchir à chaque aspect de ce que j'avais découvert. La vérité n'était jamais une entité simple, une révélation éclairante qui dissipait tout doute. La vérité pouvait être une épée à double tranchant, capable de guérir tout autant que de détruire.Je restai un moment silencieux, les lettres posées devant moi comme une sorte de test que je n'étais pas certain de vouloir réussir. Était-il vraiment sage de tout savoir ? De déterrer ces secrets enfouis ? Je me souvenais de mon frère, de l’homme qu’il était, de ses rêves, de ses peurs. Je savais qu’il n’avait pas tout dit. Mais en même temps, il y avait des parts de lui qu’il n’avait jamais voulu que je voie. Et maintenant, tout ce que j’avais découvert m’apparaissait comme une toile d’araignée tissée de mensonges et de vérités incomplè
Samuel Les jours suivants furent une brume épaisse d’attente et de réflexion. Chaque pas semblait me rapprocher de quelque chose d’inéluctable, mais je n’arrivais pas à voir clairement ce qui m’attendait au bout du chemin. Je savais que je n’avais plus de retour possible. La vérité que je cherchais allait me détruire, mais je l’avais déjà choisie. J'avais fait mon choix, celui de savoir, celui de comprendre ce qui s'était passé.Alice m’avait fourni quelques informations supplémentaires sur ceux qui pourraient être impliqués dans l’histoire. Mais rien n'était vraiment clair. Tout semblait flou, comme une toile d’araignée dont les fils se touchaient tous sans se croiser. Elle m’avait dit que, si je voulais connaître la vérité sur les forces qui avaient manipulé mon frère, je devais chercher un certain "Corbin", un homme mystérieux qui se trouvait à la croisée des chemins entre le monde sous-terrain et les sphères de pouvoir.Ce nom résonnait en moi avec une gravité inédite. Corbin. Un
Le café semblait soudainement plus étouffant, les murs se refermant autour de moi, comme si l’atmosphère elle-même devenait plus dense. J’étais seul, mais je ne me sentais pas seul. Le silence qui avait suivi les paroles de Corbin était lourd, presque palpable. Chaque mot qu’il avait prononcé résonnait dans mon esprit, se déformant, se tordant, se mêlant à mes pensées. Il avait dit que mon frère avait découvert quelque chose de crucial, quelque chose d’énorme, mais qu’il n’aurait jamais dû voir. Et maintenant, je me tenais là, avec ces informations qui me brûlaient les mains.Je n’avais pas de réponses claires, juste une multitude de questions. Mais il y avait une chose que je savais : cette vérité allait me ronger, me détruire si je n’allais pas au fond des choses. Le réseau, les complots, les manipulations – tout ce qu’il avait dit, tout ce qu’il n’avait pas dit… je devais savoir.Je me levai finalement, mes jambes un peu tremblantes sous le poids de la décision que je venais de pre
Je posai le dossier sur la table, mes mains tremblantes alors que je m’apprêtais à découvrir ce qui avait tué mon frère, ce qui l’avait mené à cette sombre fin. Les photos étaient les premières à m’attirer. Des visages flous, des réunions secrètes, des lieux que je reconnaissais à peine. Mais c’étaient les noms inscrits à côté de chaque image qui m’intimidaient le plus. Des noms que j’avais déjà entendus dans les murmures de la ville, des personnages influents, des figures qui évoluaient dans les ombres de la politique et des affaires, mais jamais mentionnées ouvertement.Je fixai les documents avec une intensité nouvelle, essayant de relier les pièces, cherchant à comprendre ce que mon frère avait trouvé, et surtout, pourquoi il devait mourir pour cela. La pièce semblait se rétrécir autour de moi, chaque souffle devenant plus lourd. Je savais que cette découverte marquerait un tournant irrémédiable. Il n’y avait plus de retour en arrière possible.La femme qui m’avait mené jusqu’ici
Je fermai le dossier brusquement, le poids des informations qui y figuraient m'écrasant. Mon cœur battait à tout rompre, mes pensées embrouillées par ce que je venais de découvrir. Chaque nom, chaque facette de cette organisation était un coup de plus porté à la réalité que je croyais connaître. Mon frère avait été un pion dans un jeu d'échecs dont il ignorait les règles. Et maintenant, moi aussi, je me retrouvais sur l'échiquier, prêt à jouer une partie où les pièces étaient invisibles.Je me tournai vers la femme, dont la présence dans la pièce semblait se fondre dans l'ombre elle-même. Elle me fixait sans un mot, mais je pouvais sentir qu’elle attendait quelque chose de plus. Elle savait, elle connaissait la suite. Elle m’avait prévenu, mais le chemin que j’allais emprunter était bien plus dangereux qu’elle ne l’avait laissé entendre. Pourtant, je n’avais pas d’autre choix."Comment dois-je procéder ?" demandai-je, ma voix tendue par la détermination. "Je veux les noms. Je veux sav
La silhouette s'avança lentement, ses pas résonnant dans le silence oppressant du bâtiment abandonné. Je me figeai, mes sens en alerte, chaque fibre de mon corps tendue, prête à réagir. J'avais cru que j'étais seul, que cette quête me mènerait à des réponses tranquilles, mais j'étais loin de m'imaginer à quel point les choses allaient se compliquer. L'ombre de la personne se précisait, et je pouvais sentir la tension monter en moi.La silhouette, maintenant plus nette, s'arrêta à quelques mètres de moi. Un homme, sans doute dans la quarantaine, vêtu d'un long manteau sombre. Son visage était partiellement caché par la lumière faible qui filtrait à travers les fissures des fenêtres, mais ses yeux brillaient d'une lueur glaciale. Je pouvais deviner une certaine autorité dans son regard, une certitude qui trahissait son appartenance à un monde dont je n'étais qu'un intrus.Je me redressai, cherchant à masquer la nervosité qui commençait à m'envahir. « Qui êtes-vous ? » demandai-je d'une
Je le suivis dans l'obscurité, mes pas s'harmonisant avec les siens alors que nous nous enfoncions plus profondément dans le bâtiment. La lumière vacillante des néons brisés et des ampoules éteintes rendait l'atmosphère plus étrange encore, comme si le temps ici s’était arrêté. Chaque recoin semblait imprégné de secrets, chaque mur, chaque écho résonnait avec la présence d'un passé que je n'étais pas censé découvrir.L'homme ne se retournait jamais, marchant d'un pas mesuré, comme s'il connaissait ce lieu par cœur, tandis que moi, chaque mouvement me rapprochait d'une réalité que je commençais à peine à comprendre. Je savais que ce que je faisais était risqué, que je m'aventurais dans un monde qui pouvait m'engloutir à tout instant. Mais l'idée de rester dans l'ignorance était bien pire.Nous arrivâmes à une porte métallique, plus solide que les autres, et l'homme s'arrêta devant, l'ouvrant sans hésitation. Il me lança un regard en coin avant de pénétrer dans la pièce sombre qui se tr
ÉliseJe cours sans réfléchir, portée par la main de Samuel, tirée dans l’ombre d’un homme que je ne connais pas.Et pourtant, quelque chose en lui m’est familier.Son allure.Son silence.Son regard, vu à peine une seconde, qui ne laissait place à aucun doute : cet homme est né de la guerre.La pluie me claque le visage, me noie les pensées, mais je continue.Samuel grogne à chaque pas, il serre les dents pour ne pas hurler — je vois bien qu’il saigne.Mais il ne ralentit pas.Il court, malgré la douleur.Parce qu’il la connaît déjà, cette douleur.Parce qu’elle lui appartient.Nous prenons un virage sec dans une rue plus étroite encore, puis une porte métallique s’ouvre devant nous, poussée par le frère fantôme.Alexandre.Il ne prononce pas un mot.Pas une question.Pas une explication.Il entre.Nous le suivons.Et la porte se referme derrière nous avec un grondement sourd, comme un couperet.L’intérieur est sombre, humide.Une vieille cave ? Un abri ? Un lieu oublié du monde.Je
SamuelJe serre la main d'Élise sous la table.Elle tremble à peine, mais je le sens.Elle aussi a compris.Quelque chose de terrible se prépare.Pas seulement l’attaque.Pas seulement la violence.Autre chose.Quelque chose qui remue l’âme, qui fouille dans les entrailles, qui réveille des souvenirs que je croyais morts et enterrés.Un instinct ancien griffe l'intérieur de mon crâne, hurle que le pire est à venir.Je jette un œil aux clients autour de nous.Ils commencent à paniquer.Certains se lèvent précipitamment, renversant leurs verres, bousculant les chaises.Le serveur crie d’appeler la police.Trop tard.Beaucoup trop tard.Je me lève d'un bond, tirant Élise avec moi.Elle ne pose pas de questions. Elle sait lire l'urgence dans mon regard.On fonce vers l'arrière du restaurant, bousculant une serveuse en larmes, ignorant les protestations paniquées.Mon cœur tambourine dans ma poitrine, battant un rythme frénétique dans mes oreilles.La porte de service.Notre seule issue.M
AlexandreLa pluie commence à tomber au moment où je m’éloigne du café.Des gouttes lourdes, glacées, cognent contre ma capuche. Chaque impact résonne comme un rappel brutal de ce que je m'apprête à faire.Chaque pas claque sur l’asphalte fendu, chaque battement de mon cœur martèle l’évidence : cette fois, je ne peux pas rester spectateur.Pas cette fois.Je glisse dans une ruelle étroite, engloutie par l’ombre. Le téléphone volé vibre dans ma paume.Un message s’affiche."Équipe 2 en place. Fin de mission avant 23h00."Pas minuit.Vingt-trois heures.Ils accélèrent.Ils sentent que quelque chose dérape.Ils vont frapper plus tôt, plus fort, sans subtilité.Et cette fois, ils n’attendront pas poliment devant un vieux café.Je me mets à courir.Pas pour fuir.Pour traquer.Je dois trouver qui tire les ficelles. Couper la tête du serpent avant qu’il ne crache son venin.Avant qu'il ne touche Samuel.Je connais ces jeux.Je les ai joués.Je les ai gagnés.Et j’en ai perdu bien trop.Un c
AlexandreIl ne sait pas que je suis là.Depuis la rue, dissimulé sous ma capuche, je les observe à travers la vitre craquelée du vieux café.Samuel.Mon frère.Mon double.Celui qui m’a cru mort pendant tout ce temps. Celui que j'ai laissé croire au pire, par nécessité... ou par lâcheté.Je vois ses épaules, tendues sous le poids d'un monde qu'il essaie encore de porter seul.Je reconnais sa posture, ce léger tremblement qu'il cache aux autres, cette rage froide qui bout sous sa peau.Et face à lui, la fille.Élise.La faille.Le point où tout en lui se désarme, où ses défenses tombent.Elle ne s’en rend même pas compte, mais elle est en train de le sauver — doucement, silencieusement.Je serre les dents.Ce n’est pas de la jalousie qui me noue les tripes. Ce n’est pas non plus de la haine.C’est pire.C’est ce vide en moi, ce gouffre que Samuel a fui en se raccrochant à une main tendue... pendant que moi, je me laissais engloutir.Je pourrais partir.Tourner les talons.Laisser cett
SamuelJe reste sur ce banc longtemps après son départ, le papier serré dans ma main moite.Le monde continue de tourner autour de moi — les enfants crient, les feuilles bruissent sous le vent d’avril, les conversations flottent dans l’air comme des bulles prêtes à éclater — mais moi, je suis figé.Il n’y a plus que cette adresse, cette minuscule ligne d’encre, qui bat contre ma paume comme un deuxième cœur.Je sais ce que ça signifie.Ce soir, je n’aurai plus d’excuses.Ce soir, je ne serai plus seulement celui qui observe depuis l’ombre, qui prétend avoir le temps.Ce soir, il faudra choisir. Définitivement.Je ferme les yeux un instant, le souffle court.Je suis tellement habitué aux ordres, aux missions, aux manipulations, que le simple fait de devoir faire un choix libre me terrifie plus que n’importe quelle arme pointée sur moi.Mais je le ferai. Pour elle. Pour moi aussi, peut-être.Je me lève, range le papier dans ma poche, et je pars avant que le doute ne me rattrape.---La
SamuelJe relis l’adresse, encore et encore, comme si les lettres pouvaient s’effacer sous mes yeux, comme si ce choix pouvait disparaître s’il me faisait trop peur.Il n’y a que trois rues à traverser pour atteindre ce lieu qu’elle m’a indiqué. Trois rues qui pèsent comme trois continents. Chaque pas est une trahison silencieuse de celui que j’étais censé être. Chaque pas me pousse un peu plus loin de l’ombre où j’ai vécu trop longtemps.Le vent est frais ce soir. Il soulève des odeurs de bitume, de bois mouillé, et de feuilles mortes. L’air a un goût de fin d’été, de promesses épuisées. Mon cœur cogne trop vite contre mes côtes. Je ne devrais pas avoir peur. Je suis censé être l’homme sans attaches, celui qui observe, qui manipule, qui disparaît avant que quiconque ne réclame quoi que ce soit.Mais Élise n’a rien réclamé.Elle a tendu la main.Et je suis celui qui doit prouver que je peux la prendre sans la souiller.Je m’arrête devant une petite maison. Vieille, sans charme particu
ÉliseIl revient.Je le vois de loin, assis sur le même banc, mais aujourd’hui, il est plus proche du bord, comme s’il s’autorisait à frôler ma réalité. Il n’a pas ouvert son livre. Il ne fait même pas semblant de lire. Le simple fait qu’il soit là, à découvert, presque vulnérable, me serre le ventre.Je ne suis pas surprise. Pas vraiment. C’est comme si mon corps, avant même mon esprit, avait su qu’il reviendrait. Comme une de ces douleurs fantômes qu’on apprend à apprivoiser, qu’on cache dans un coin de la poitrine, en espérant qu’elle se taise.Il est là.Et moi, je suis là aussi.Mon fils court devant moi, la joie simple de l’enfance éclatant dans ses pas. Il lance un cri aigu en direction du bac à sable, s’arrête, regarde Samuel et, sans hésiter, lui adresse un petit salut de la main. Samuel répond d’un geste tout aussi doux. Ils se reconnaissent déjà, d’une manière que je n’ai pas encore acceptée.Je m’avance, comme on marche vers une frontière.— T’es revenu, je murmure, presqu
ÉliseIl y a quelque chose dans ses silences qui me trouble plus que mille paroles.Samuel.Ce nom tourne dans ma tête comme un écho qu’on n’arrive pas à faire taire. Je le regarde, chaque matin, assis sur ce banc. Il ne parle pas beaucoup. Il lit. Il écoute. Il me répond parfois avec un sourire doux, presque maladroit. Comme s’il avait peur que je le devine.Et pourtant, je sens bien qu’il cache quelque chose.Personne ne choisit ce banc par hasard. Pas à cette heure, pas chaque matin. Personne ne s’attarde dans le parc d’un quartier aussi gris sans raison. Et surtout, personne ne me regarde comme lui le fait… avec cette espèce de mélancolie retenue, comme s’il s’excusait d’avance de ce qu’il allait me faire.Je suis fatiguée de fuir. Fatiguée de deviner.Alors demain, je lui poserai la vraie question.Celle qui ne se camoufle plus derrière la politesse.Celle qui dit : “Qui es-tu vraiment, Samuel ?”---SamuelElle est venue plus tôt ce matin.Son fils tenait sa main, comme toujours
Élise Mais s’il est comme moi…S’il est juste un autre cœur blessé sous une autre peau brisée…Alors peut-être qu’on pourra, ensemble,changer les règles.Ou au moinsarrêter de se mentir.Ralentir le temps.Laisser nos silences se parler.Parce qu’à force de survivre,j’ai oublié ce que c’étaitd’être simplement en vie.Et si lui aussi l’a oublié…Alors peut-êtrequ’on peut se rappeler ensemble.— SamuelIl y a quelque chose dans sa manière de se tenir.Raide mais fragile.Comme une tour qu’on aurait reconstruite trop vite après un séisme.Elle me regarde comme si j’étais un fantôme.Ou pire : comme si elle m’attendait depuis toujours sans en avoir conscience.Et moi, je reste là.Assis sur ce banc que je n’ai pas choisi par hasard.À prétendre lire un livre que je connais par cœur depuis des années.Elle pense que je suis tombé sur elle par hasard.Mais rien, avec elle, ne sera jamais dû au hasard.---Je m’appelle Samuel.Enfin, ici, c’est le nom que j’utilise.Il y en a eu d’autr