LaurieL’hôpital pue l’antiseptique, un parfum acide qui s’accroche à mes narines, mêlé à une odeur plus insidieuse, celle de la peur, de la mort évitée de justesse. Ça me retourne l’estomac, me donne envie de vomir ou de fuir, mais je reste clouée sur cette chaise en plastique inconfortable, les yeux rivés sur Alexander. Il est là, allongé dans ce lit trop blanc, trop propre, son torse enveloppé de bandages là où la balle l’a frappé. Une blessure nette, ont dit les médecins, mais le mot « nette » n’efface pas la tache rouge qui s’est imprimée dans ma mémoire, ni le cri qu’il a poussé quand il s’est effondré. Il est vivant, stable, mais chaque bip du moniteur cardiaque, régulier et mécanique, me rappelle à quel point c’était proche, à quel point j’ai failli le perdre. Mes mains tremblent, serrant le disque dur qu’on a arraché à ce cauchemar, ce foutu « Projet Oméga » qui a failli nous tuer tous les deux. C’est un rectangle froid, métallique, à peine plus grand qu’un paquet de cartes, m
LAURIE— T’es toujours là, murmure-t-il, la voix rauque, râpeuse comme du papier de verre.— Ouais, dis-je, un sanglot coincé dans la gorge. Mais t’as intérêt à arrêter de te faire tirer dessus, parce que je vais pas passer ma vie à jouer les infirmières.Il rit, un son bref qui se transforme en grimace de douleur, et je me penche, l’embrasse doucement sur les lèvres, un geste impulsif qui dit tout ce que je ne peux pas formuler. Ses lèvres sont sèches, mais chaudes, et il répond, faiblement, comme s’il puisait dans ses dernières forces. On s’écarte, et ses yeux cherchent les miens, pleins de questions, de regrets, mais aussi d’autre chose, quelque chose qui ressemble à de l’espoir.— Le disque ? demande-t-il, sa voix plus ferme.Je tapote ma poche, le métal dur sous mes doigts.— En sécurité. Les flics ont tout – les dossiers, l’enregistrement d’Elena. Elle chante comme un canari. Stahl est dans le vent, mais ils le traquent.Il hoche la tête, ses doigts serrant les miens un peu plus
AlexanderLe bureau d’Amadeus est un tombeau, un étage poussiéreux au cœur d’un immeuble oublié du 8e arrondissement de Paris, où le temps semble s’être figé dans une couche de crasse et de regrets. Les vitres opaques laissent à peine filtrer la lumière des réverbères, et l’air est lourd, saturé d’une odeur de papier moisi, de métal rouillé et d’un relent de désespoir. Chaque pas sur le parquet craquant résonne comme un avertissement, un écho des années où j’ai foulé cet endroit sous les ordres d’un homme qui m’a façonné et brisé à la fois. Les flics sont dehors, tapis dans l’ombre, leurs radios crépitant à peine audible à travers les murs épais. Leur présence est un filet de sécurité, mais il me rassure à peine. Ce soir, ce n’est pas leur guerre – c’est la nôtre.Laurie marche à mes côtés, son couteau glissé dans la poche de son jean, sa mâchoire serrée, ses yeux bleus brillant d’une détermination qui me coupe le souffle et me terrifie à la fois. Elle est une flamme dans cette obscur
Il attrape son arme, rapide comme un serpent, et je pousse Laurie derrière moi, mon flingue levé, le canon pointé sur sa poitrine. Mon cœur cogne, mais ma main est ferme.— Pose ça, Stahl, dis-je, la voix basse, un grondement. T’es pas en position de jouer.Il hésite, ses yeux passant de moi à Laurie, puis à la porte, comme s’il calculait ses chances. On gagne du temps, c’est le plan – laisser les flics se positionner, attendre le signal de Marc. Mais je vois Laurie bouger du coin de l’œil, discrète, maligne. Elle glisse une main dans sa poche, son téléphone allumé, l’écran masqué par sa paume. Elle enregistre, encore, capturant chaque mot de Stahl, chaque aveu qu’il lâche malgré lui. Elle est brillante, toujours un coup d’avance, et une bouffée de fierté m’envahit, même au milieu de cette tension.— Parle, Stahl, dis-je, pour le pousser, pour le faire craquer. T’as perdu. Pourquoi tu t’accroches ?Il ricane, mais ses mots sortent, presque malgré lui, comme si la pression le faisait d
laurieLe soleil se lève sur la campagne, un éclat timide qui perce les nuages, comme une caresse après une longue nuit de tempête. Je suis debout dans la cour de l’orphelinat, l’herbe humide trempant mes baskets, mon souffle formant de petits nuages dans l’air frais d’avril. Alexander est à côté de moi, sa main dans la mienne, chaude, solide, un ancrage que je n’aurais jamais cru possible il y a encore quelques semaines. Nos valises sont posées près de la voiture, un vieux break qu’on a loué pour ce voyage, comme si on voulait laisser le luxe de Knight Enterprises derrière nous, ne serait-ce que pour un jour. On est revenus ici, à cet endroit qui nous a faits et brisés, pas pour chercher des réponses, pas pour se battre, mais pour dire adieu – aux murs gris, aux souvenirs amers, à la douleur qu’on a portée trop longtemps.L’orphelinat n’a pas changé, pas vraiment. Les fenêtres sont toujours cassées, leurs cadres mangés par la rouille, et la grille d’entrée penche comme un vieillard f
LAURIEOn marche, main dans la main, à travers la cour, puis à l’intérieur, nos pas résonnant dans les couloirs vides. Chaque pièce est un souvenir – la salle commune où on jouait aux cartes, le dortoir où je pleurais la nuit, l’escalier où Alexander m’avait promis qu’on s’en sortirait. Je m’arrête devant une porte, celle du bureau du directeur, et je frissonne, repensant à Elena, à sa silhouette dans la photo, à tout ce qu’on a découvert. Stahl est en prison, les preuves d’Oméga ont fait tomber des puissants – politiciens, hommes d’affaires, ombres qu’Amadeus manipulait. Knight Enterprises est sauvé, Hargrove a signé pour de bon, et pourtant, je sens encore une ombre, un poids qui refuse de partir.Alexander le sent aussi, je le vois dans sa posture, dans la façon dont ses yeux balaient les murs, comme s’il cherchait quelque chose. Il sort une lettre de sa poche, celle trouvée dans les dossiers de Stahl, écrite par Amadeus avant sa mort. Il me la tend, et je la prends, mes doigts tre
laurieLa pluie tambourine contre les baies vitrées du bureau d’Alexander, un rideau glacé qui brouille la skyline de La Défense, ses éclats scintillant comme des yeux dans la nuit d’avril 2025. L’air sent le café refroidi et le papier, saturé par les vibrations des écrans tactiles, leurs notifications clignotant comme des battements de cœur. Je tiens la lettre d’Amadeus, mes doigts tremblants sur l’encre noire, le croquis d’un médaillon – cercle barré, symbole d’Oméga – brûlant mes yeux. Alexander, penché sur un écran, fronce les sourcils, ses cheveux noirs en mèches rebelles, ses yeux gris pleins d’une tempête contenue. Il croise mon regard, et je sens mon pouls s’affoler, une chaleur familière malgré la peur.« Son médaillon, » murmuré-je, ma voix rauque, pointant le dessin. « Il le portait toujours. Dans son ancien bureau, ici, non ? »Avant qu’il réponde, son téléphone vibre, et la voix de Marc, paniquée, déchire le silence. « Stahl s’est évadé, » dit-il. « Un gardien corrompu. I
laurieLe rooftop de Knight Enterprises scintille sous un ciel constellé d’étoiles, les guirlandes lumineuses suspendues entre des poutres d’acier jetant des éclats dorés qui dansent sur le béton poli. L’air frais d’avril 2025 porte une odeur sucrée de croissants tout juste sortis du four, flottant depuis un café niché dans une ruelle en contrebas, mêlée au parfum métallique et vibrant de Paris. La ville s’étend sous nos pieds, un océan de lumières clignotantes, des toits en zinc luisant sous la lune, des boulevards traçant des lignes dorées dans la nuit. Je suis assise sur un coussin posé à même le sol, une tablette sur les genoux, griffonnant des idées pour un projet qui n’a pas encore de nom – des esquisses de code, des concepts pour une start-up, des bribes de rêves que je n’ai jamais osé formuler à voix haute. Mes lunettes glissent sur mon nez, et je les repousse d’un geste machinal, mon pull en laine effleurant ma peau, doux comme une caresse contre la fraîcheur du soir.Alexande
LAURIECarter relâche ma main et se redresse, un sourire en coin revenant sur son visage, comme s’il retrouvait son assurance.— Fais gaffe, Knight, lance-t-il, taquin, ses yeux pétillant. Elle est têtue, cette fille. Elle va te faire tourner en bourrique, mais elle vaut le coup.Alexander rit, un son bas, rauque, qui résonne dans ma poitrine.— Je sais, murmure-t-il, un éclat malicieux dans les yeux, son regard glissant vers moi.Le reste de l’équipe – Marc, quelques techniciens de Knight Enterprises, une amie de Carter – finit par partir, leurs rires et leurs voix s’évanouissant dans l’escalier. Le rooftop redevient notre refuge, un îlot suspendu au-dessus de Paris. Le vent se lève, jouant avec mes cheveux, les faisant danser autour de mon visage. Je les repousse, frissonnant légèrement, et Alexander s’approche, s’asseyant à côté de moi sur le coussin. Il est proche, si proche que je sens la chaleur de son corps, l’odeur de son eau de Cologne, boisée et subtile, mêlée à celle de la
laurieLe rooftop de Knight Enterprises scintille sous un ciel constellé d’étoiles, les guirlandes lumineuses suspendues entre des poutres d’acier jetant des éclats dorés qui dansent sur le béton poli. L’air frais d’avril 2025 porte une odeur sucrée de croissants tout juste sortis du four, flottant depuis un café niché dans une ruelle en contrebas, mêlée au parfum métallique et vibrant de Paris. La ville s’étend sous nos pieds, un océan de lumières clignotantes, des toits en zinc luisant sous la lune, des boulevards traçant des lignes dorées dans la nuit. Je suis assise sur un coussin posé à même le sol, une tablette sur les genoux, griffonnant des idées pour un projet qui n’a pas encore de nom – des esquisses de code, des concepts pour une start-up, des bribes de rêves que je n’ai jamais osé formuler à voix haute. Mes lunettes glissent sur mon nez, et je les repousse d’un geste machinal, mon pull en laine effleurant ma peau, doux comme une caresse contre la fraîcheur du soir.Alexande
laurieLa pluie tambourine contre les baies vitrées du bureau d’Alexander, un rideau glacé qui brouille la skyline de La Défense, ses éclats scintillant comme des yeux dans la nuit d’avril 2025. L’air sent le café refroidi et le papier, saturé par les vibrations des écrans tactiles, leurs notifications clignotant comme des battements de cœur. Je tiens la lettre d’Amadeus, mes doigts tremblants sur l’encre noire, le croquis d’un médaillon – cercle barré, symbole d’Oméga – brûlant mes yeux. Alexander, penché sur un écran, fronce les sourcils, ses cheveux noirs en mèches rebelles, ses yeux gris pleins d’une tempête contenue. Il croise mon regard, et je sens mon pouls s’affoler, une chaleur familière malgré la peur.« Son médaillon, » murmuré-je, ma voix rauque, pointant le dessin. « Il le portait toujours. Dans son ancien bureau, ici, non ? »Avant qu’il réponde, son téléphone vibre, et la voix de Marc, paniquée, déchire le silence. « Stahl s’est évadé, » dit-il. « Un gardien corrompu. I
LAURIEOn marche, main dans la main, à travers la cour, puis à l’intérieur, nos pas résonnant dans les couloirs vides. Chaque pièce est un souvenir – la salle commune où on jouait aux cartes, le dortoir où je pleurais la nuit, l’escalier où Alexander m’avait promis qu’on s’en sortirait. Je m’arrête devant une porte, celle du bureau du directeur, et je frissonne, repensant à Elena, à sa silhouette dans la photo, à tout ce qu’on a découvert. Stahl est en prison, les preuves d’Oméga ont fait tomber des puissants – politiciens, hommes d’affaires, ombres qu’Amadeus manipulait. Knight Enterprises est sauvé, Hargrove a signé pour de bon, et pourtant, je sens encore une ombre, un poids qui refuse de partir.Alexander le sent aussi, je le vois dans sa posture, dans la façon dont ses yeux balaient les murs, comme s’il cherchait quelque chose. Il sort une lettre de sa poche, celle trouvée dans les dossiers de Stahl, écrite par Amadeus avant sa mort. Il me la tend, et je la prends, mes doigts tre
laurieLe soleil se lève sur la campagne, un éclat timide qui perce les nuages, comme une caresse après une longue nuit de tempête. Je suis debout dans la cour de l’orphelinat, l’herbe humide trempant mes baskets, mon souffle formant de petits nuages dans l’air frais d’avril. Alexander est à côté de moi, sa main dans la mienne, chaude, solide, un ancrage que je n’aurais jamais cru possible il y a encore quelques semaines. Nos valises sont posées près de la voiture, un vieux break qu’on a loué pour ce voyage, comme si on voulait laisser le luxe de Knight Enterprises derrière nous, ne serait-ce que pour un jour. On est revenus ici, à cet endroit qui nous a faits et brisés, pas pour chercher des réponses, pas pour se battre, mais pour dire adieu – aux murs gris, aux souvenirs amers, à la douleur qu’on a portée trop longtemps.L’orphelinat n’a pas changé, pas vraiment. Les fenêtres sont toujours cassées, leurs cadres mangés par la rouille, et la grille d’entrée penche comme un vieillard f
Il attrape son arme, rapide comme un serpent, et je pousse Laurie derrière moi, mon flingue levé, le canon pointé sur sa poitrine. Mon cœur cogne, mais ma main est ferme.— Pose ça, Stahl, dis-je, la voix basse, un grondement. T’es pas en position de jouer.Il hésite, ses yeux passant de moi à Laurie, puis à la porte, comme s’il calculait ses chances. On gagne du temps, c’est le plan – laisser les flics se positionner, attendre le signal de Marc. Mais je vois Laurie bouger du coin de l’œil, discrète, maligne. Elle glisse une main dans sa poche, son téléphone allumé, l’écran masqué par sa paume. Elle enregistre, encore, capturant chaque mot de Stahl, chaque aveu qu’il lâche malgré lui. Elle est brillante, toujours un coup d’avance, et une bouffée de fierté m’envahit, même au milieu de cette tension.— Parle, Stahl, dis-je, pour le pousser, pour le faire craquer. T’as perdu. Pourquoi tu t’accroches ?Il ricane, mais ses mots sortent, presque malgré lui, comme si la pression le faisait d
AlexanderLe bureau d’Amadeus est un tombeau, un étage poussiéreux au cœur d’un immeuble oublié du 8e arrondissement de Paris, où le temps semble s’être figé dans une couche de crasse et de regrets. Les vitres opaques laissent à peine filtrer la lumière des réverbères, et l’air est lourd, saturé d’une odeur de papier moisi, de métal rouillé et d’un relent de désespoir. Chaque pas sur le parquet craquant résonne comme un avertissement, un écho des années où j’ai foulé cet endroit sous les ordres d’un homme qui m’a façonné et brisé à la fois. Les flics sont dehors, tapis dans l’ombre, leurs radios crépitant à peine audible à travers les murs épais. Leur présence est un filet de sécurité, mais il me rassure à peine. Ce soir, ce n’est pas leur guerre – c’est la nôtre.Laurie marche à mes côtés, son couteau glissé dans la poche de son jean, sa mâchoire serrée, ses yeux bleus brillant d’une détermination qui me coupe le souffle et me terrifie à la fois. Elle est une flamme dans cette obscur
LAURIE— T’es toujours là, murmure-t-il, la voix rauque, râpeuse comme du papier de verre.— Ouais, dis-je, un sanglot coincé dans la gorge. Mais t’as intérêt à arrêter de te faire tirer dessus, parce que je vais pas passer ma vie à jouer les infirmières.Il rit, un son bref qui se transforme en grimace de douleur, et je me penche, l’embrasse doucement sur les lèvres, un geste impulsif qui dit tout ce que je ne peux pas formuler. Ses lèvres sont sèches, mais chaudes, et il répond, faiblement, comme s’il puisait dans ses dernières forces. On s’écarte, et ses yeux cherchent les miens, pleins de questions, de regrets, mais aussi d’autre chose, quelque chose qui ressemble à de l’espoir.— Le disque ? demande-t-il, sa voix plus ferme.Je tapote ma poche, le métal dur sous mes doigts.— En sécurité. Les flics ont tout – les dossiers, l’enregistrement d’Elena. Elle chante comme un canari. Stahl est dans le vent, mais ils le traquent.Il hoche la tête, ses doigts serrant les miens un peu plus
LaurieL’hôpital pue l’antiseptique, un parfum acide qui s’accroche à mes narines, mêlé à une odeur plus insidieuse, celle de la peur, de la mort évitée de justesse. Ça me retourne l’estomac, me donne envie de vomir ou de fuir, mais je reste clouée sur cette chaise en plastique inconfortable, les yeux rivés sur Alexander. Il est là, allongé dans ce lit trop blanc, trop propre, son torse enveloppé de bandages là où la balle l’a frappé. Une blessure nette, ont dit les médecins, mais le mot « nette » n’efface pas la tache rouge qui s’est imprimée dans ma mémoire, ni le cri qu’il a poussé quand il s’est effondré. Il est vivant, stable, mais chaque bip du moniteur cardiaque, régulier et mécanique, me rappelle à quel point c’était proche, à quel point j’ai failli le perdre. Mes mains tremblent, serrant le disque dur qu’on a arraché à ce cauchemar, ce foutu « Projet Oméga » qui a failli nous tuer tous les deux. C’est un rectangle froid, métallique, à peine plus grand qu’un paquet de cartes, m