Home / LGBTQ+ / ENTRE LEURS BRAS / Chapitre 3 — Flashs, peau nue

Share

Chapitre 3 — Flashs, peau nue

Author: Darkness
last update Last Updated: 2025-09-13 21:36:07

Zoé

Je ne suis pas nue.

Pas encore.

Mais j’ai ôté mes chaussures. Mon pull. Mon soutien-gorge traîne sur le dossier d’une chaise.

Et Jules, devant moi, ajuste la lumière, concentré, presque silencieux, comme s’il préparait un rituel sacré.

Le décor est volontairement nu : un mur blanc, une chaise noire, une plante verte fatiguée dans un coin. C’est froid, neutre… et pourtant, j’ai l’impression d’être la seule chose vivante ici.

Je suis au centre. Et je brûle.

Jules lève les yeux vers moi. Il m’observe comme on regarde une faille dans une armure. Pas pour la réparer, mais pour s’y engouffrer.

— Tu es sûre de toi ? demande-t-il, la voix basse, sans la moindre pression.

Je pourrais dire non. Mon ventre se tord. Mon cœur bat trop fort. Mon corps tout entier est en alerte.

Mais je hoche la tête. Parce que malgré la peur, malgré cette tension qui me serre la gorge, j’ai envie de ce moment. De ce regard. De cette exposition.

J’ai envie d’être vue. Par lui.

Il commence à prendre les premières photos. Les clics résonnent dans le silence comme des pulsations.

De profil.

De dos.

Ma robe glisse un peu sur mon épaule.

Je sens son regard s’y attarder, plus longtemps que nécessaire. Et je l’aime pour ça.

— Tu peux la laisser tomber… juste un peu, murmure-t-il. Sa voix est douce, mais elle me fait frissonner jusqu’au creux des cuisses.

Je l’écoute.

Une bretelle tombe. Puis l’autre.

La robe glisse le long de mes bras, effleure ma taille, s’arrête juste en dessous.

Je suis nue des épaules jusqu’au haut du ventre.

Mes bras se croisent par réflexe sur ma poitrine.

Le bruit de l’appareil s’interrompt. Jules abaisse l’objectif.

— Tu n’as pas besoin de te cacher, Zoé. Pas ici. Pas maintenant.

Je relève les yeux vers lui.

Et dans ce regard-là, il n’y a pas de jugement. Pas d’analyse technique.

Il me regarde comme un homme qui lutte contre ce qu’il veut faire.

Et ça m’électrise.

Il s’approche. Lentement. En silence. Il pose son appareil sur la table, sans me quitter des yeux.

Ses gestes sont mesurés. Respectueux. Mais chargés.

Il s’arrête à quelques centimètres de moi.

Je sens sa chaleur. Son odeur.

Je pourrais reculer.

Mais je ne bouge pas.

— Tu dégages quelque chose de rare, murmure-t-il.

Sa voix est grave, voilée.

— C’est brut. Sensuel. Indompté. C’est… troublant. Même pour moi.

Je tente un sourire, un peu tremblant.

— Tu dis ça à toutes les femmes à moitié nues sous tes projecteurs ?

Il secoue doucement la tête. Un rictus dans le coin des lèvres.

— Non.

Une pause.

— Et je ne parle pas à toutes les femmes avec ce genre de voix.

Je retiens mon souffle.

Il est là, devant moi. Sa main se lève, hésite… puis vient se poser sur ma joue. Très légèrement. Comme s’il me touchait pour la première fois.

Sa paume est chaude. Son pouce effleure ma pommette. Un geste anodin. Et pourtant, j’ai envie de crier.

— Si tu veux que j’arrête, je recule, souffle-t-il.

Je reste silencieuse. Mon corps hurle déjà la réponse.

Je ne veux pas qu’il s’éloigne.

Je veux plus.

Je pose mes doigts sur son poignet. Mon regard plonge dans le sien.

— Ne recule pas.

Il inspire lentement. Et cette fois, c’est lui qui vacille.

Il se penche, très doucement. Son front frôle le mien. Son souffle est là, chaud contre ma bouche. Il ne m’embrasse pas. Il attend.

Le temps s’étire.

Et je n’ai jamais eu autant envie de quelqu’un sans qu’il ne me touche vraiment.

— Tu me rends fou, murmure-t-il.

Ma peau est en feu.

Sa main descend lentement, longe ma nuque, mon épaule nue, la courbe de mon bras. Un effleurement presque chaste. Mais mon corps le vit comme un incendie.

Je ferme les yeux. Ma poitrine se soulève trop vite. Je me sens vulnérable. Exposée.

Et pourtant, je ne me suis jamais sentie aussi vivante.

Il frôle l’intérieur de mon poignet, du bout des doigts. Là où le sang pulse fort.

— Ton cœur bat vite, murmure-t-il.

— À cause de toi, je souffle.

Il recule d’un demi-pas. Me regarde avec une intensité silencieuse.

— Tu veux continuer les photos ? demandé-je, dans un souffle rauque.

Il sourit. Laisse passer un long silence. Puis :

— Pas maintenant. Pas tout de suite.

Il s’approche à nouveau, son front touchant presque le mien.

— Il y a quelque chose ici que je n’ai pas envie d’attraper avec une caméra.

Une pause.

— Je veux le ressentir. Pas l’enregistrer.

Je frémis de la tête aux pieds.

Je reste immobile. Piégée entre l’envie de fuir… et celle de l’embrasser.

Mais il ne me presse pas. Il me laisse le choix.

Et quand il murmure à mon oreille :

— Tu as le goût du chaos… et moi, j’ai très envie d’y plonger…

Je sais.

Je sais que je suis à un souffle d’imploser.

Continue to read this book for free
Scan code to download App

Latest chapter

  • ENTRE LEURS BRAS    Chapitre 10 — Fragments d’embrasement

    ZoéLa pluie tambourine contre les vitres, rythmant mon souffle. Je sens encore la chaleur de Raphaël contre moi, chaque battement de son cœur résonne dans ma poitrine comme un écho de ce que je n’ose pas nommer. Je ferme les yeux et m’abandonne à ce vertige.Ses mains effleurent mes cheveux, descendent sur mes épaules, et tout mon corps frissonne. Chaque contact est une flamme qui se propage. Je sens la retenue dans ses gestes, ce mélange de désir et de précaution qui me fait frémir encore plus.Je me colle un peu plus contre lui, cherchant à prolonger cet instant où le temps semble suspendu. Nos souffles se mêlent, chauds et irréguliers, et je sens mon cœur s’emballer. Le monde extérieur disparaît, il n’y a plus que nous et cette tension qui nous consume doucement.— Zoé… murmure-t-il. Son nom est une caresse, et j’ai l’impression qu’il a le pouvoir de tout ralentir, d’ouvrir un espace où rien ne peut nous atteindre. Je frôle ses mains, je les guide, sans mots, et il répond à chaque

  • ENTRE LEURS BRAS    Chapitre 9 — Lignes franchies

    RaphaëlLe tic-tac de l’horloge cogne dans le silence.Zoé ne détourne pas les yeux.Le café fume encore entre nous, une fine brume qui se dissipe, comme si elle attendait que l’un de nous brise l’équilibre.Je finis par parler, la voix plus basse que je ne le voudrais :— À propos d’hier soir…Elle tressaille à peine.Ses doigts se serrent autour de la tasse, puis se détendent.— Je sais, murmure-t-elle.Un battement de cœur. Deux.Je cherche mes mots.— Je n’aurais peut-être pas dû…Elle m’interrompt, douce mais ferme :— Ce n’était pas un accident.La phrase claque doucement, mais elle résonne comme une évidence.Elle lève enfin les yeux.Un mélange de peur et de détermination s’y accroche, un éclat qui me traverse.Je sens ma respiration se faire plus lente, plus profonde.— Je ne veux pas compliquer ta vie, Zoé.Je marque une pause.— Ni te prendre ce que tu n’es pas prête à donner.Un frémissement sur ses lèvres, presque un sourire, presque une plainte.— Ce que tu crois déjà pr

  • ENTRE LEURS BRAS    Chapitre 8 — Fragments d’aube

    RaphaëlLe silence de l’appartement pulse plus fort que mon propre cœur.Je n’ai presque pas dormi.Chaque craquement du bois, chaque respiration de Zoé derrière la porte du salon, a fendu la nuit comme un fil tendu.Le baiser d’hier revient sans cesse, vif comme une braise que je n’ose ni attiser ni étouffer.Je me lève avant l’aube, pieds nus sur le parquet glacé.La ville dort encore.J’ouvre la fenêtre : un air humide s’engouffre, chargé d’odeurs de pluie, d’asphalte et de terre mouillée.La nuit hésite à s’effacer ; le ciel a cette teinte gris-bleu où s’accroche la dernière étoile, fragile et insolente.Je passe par la cuisine.Sur la table, deux verres d’eau à moitié pleins brillent dans la pénombre.Témoins muets. Accusation silencieuse.Je fais glisser un doigt sur le bord d’un verre ; la condensation froide me ramène à la réalité.Je sais ce que ce baiser signifie.Et je sais tout ce qu’il menace.Zoé.Jules.Des noms qui s’entrechoquent dans ma tête comme deux pierres.Un éc

  • ENTRE LEURS BRAS    Chapitre 7 — Lignes de fuite

    JulesLa porte claque encore dans ma mémoire, plus sèche, plus lourde que la veille.Un bruit minuscule en réalité, mais qui résonne comme un verdict.Depuis qu’elle est sortie, chaque coup de vent dans la cage d’escalier, chaque moteur qui gronde en bas de l’immeuble, ressemble à ses pas qu’on espère et qu’on redoute.La lampe du couloir brûle toujours, un halo jaune qui tremble comme une veilleuse pour enfant. Je l’ai laissée allumée, incapable d’affronter le noir complet.Je me lève tard, après une nuit faite d’insomnies hachées, le cœur serré dans un étau invisible.Dans la cuisine, l’air sent le café froid et la poussière.Sur le comptoir, une seule tasse blanche, la sienne, encore marquée de l’empreinte de son rouge à lèvres.Un détail infime, ridicule, mais qui me fait vaciller, comme si ce cercle écarlate me rappelait qu’elle existe ailleurs, hors de ma portée.Je reste longtemps immobile, paumes à plat sur le bois glacé.Les minutes s’étirent, sans repères.Elle m’a dit qu’el

  • ENTRE LEURS BRAS    Chapitre 6 — L’ombre d’hier 

    ZoéJe suis toujours là.Assise dans ce salon qui n’a pas changé, mais qui semble s’être refermé sur moi.Chaque détail me saute au visage : la pile de livres trop ordonnée sur la table basse, les deux tasses en céramique assorties qu’on n’a jamais utilisées, et ce foutu plaid bleu qu’il m’avait tendu une nuit où j’avais froid sans jamais oser me prendre dans ses bras.Je suis là, mais je ne sais plus si c’est une bonne idée.Je suis entrée comme on revient dans un rêve. Mais j’ai oublié qu’un rêve peut tourner au cauchemar si on reste trop longtemps.Raphaël ne parle pas.Il bouge dans la cuisine, se donne une contenance, remplit deux verres d’eau, en pose un devant moi. Il ne me regarde pas. Il attend. Comme s’il savait que ce n’est pas lui qui détient la clef, mais moi.Et moi… je suis incapable de bouger.Il s’appuie contre le plan de travail, tête baissée, main sur le verre. Et puis enfin :— Tu veux qu’on fasse comme si de rien n’était ? Ou tu préfères tout foutre en l’air maint

  • ENTRE LEURS BRAS    Chapitre 5 — Et si c’était un piège ?

    ZoéLa lumière du matin est brutale.Crue.Insolente.Elle s’infiltre par les interstices du volet, sans prévenir, sans demander la permission.Et elle tombe directement sur lui.Jules dort à moitié. Une main sur ma taille. L’autre repliée sous sa tête. Il est encore beau dans le silence. Moins brûlant que la veille. Plus humain. Plus fragile, peut-être.Moi, je suis éveillée. Depuis un moment déjà.Les paupières ouvertes sur le plafond.Le corps encore douloureusement satisfait.Et l’âme en vrac.Qu’est-ce qu’on a fait ?Enfin… ce qu’on a fait, je le sais.Mais ce que ça signifie… j’en ai aucune idée.Je me lève sans bruit, ramasse ma robe abandonnée au sol. Chaque mouvement me rappelle sa bouche, ses mains, sa voix grave dans mon oreille.Mon corps se souvient.Mais mon esprit, lui, doute.Je file dans la salle de bain, laisse couler l’eau froide sur ma nuque. J’ai besoin de clarté. D’air. De distance.Mais au fond de moi, quelque chose résiste.Un goût d’inachevé.Ou peut-être de t

More Chapters
Explore and read good novels for free
Free access to a vast number of good novels on GoodNovel app. Download the books you like and read anywhere & anytime.
Read books for free on the app
SCAN CODE TO READ ON APP
DMCA.com Protection Status