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Author: Zwina
last update Last Updated: 2025-10-11 00:15:01

Le lendemain à l’aube, elle arriva chez son père, ses mains retombant de fatigue comme si elles n’étaient plus à elle. Elle entra dans sa chambre et se laissa choir sur le lit, repassant dans sa tête le regard brisé de son père et tout ce qu’elle avait entendu de l’avocat.

Soudain, elle se souvint que sa mère était encore chez Adrian — elle s’était perdue à chercher des solutions avec l’avocat et avait oublié sa mère dans la maison de ce monstre. Elle bondit pour aller la chercher.

Elle conduisait à toute vitesse, les événements se répétant dans sa tête comme un vieux film en noir et blanc.

Elle ouvrit la porte et entra. Elle trouva Sourour (la cousine d’Adrian) en train de verser un verre d’eau à sa mère.

Asma l’accueillit avec sarcasme :

— « Lors de ta nuit de noces, tu pars et tu quittes ton mari ? Tu devrais être dans ses bras à te faire dorloter. Cette villa n’est pas une ferme où tu vas et viens à ta guise. »

Mira n’avait plus la force de répondre. Elle l’ignora.

Elle aida sa mère à se soutenir, passa devant Rajab près de la porte et le regarda — il avait l’air d’un homme dur qui lui inspirait la peur malgré la douceur dans son regard. Elle le fusilla d’un regard glacé qui le troubla, mais il ne bougea pas.

Adrian se trouvait sur la terrasse et fit un signe à Rajab pour qu’il laisse passer Mira. Rajab s’écarta immédiatement.

Mira murmura avec mépris en se dirigeant vers la voiture :

— « Maudit soit ton corps massif et maudit soit ton maître sauvage. »

Elle fit monter sa mère dans la voiture et s’éloigna.

Des jours lourds succédèrent pour Mira. L’état de sa mère se détériora ; ses nerfs n’avaient pas supporté ce qui était arrivé à son mari, et elle sombrait dans le chagrin pour sa fille aussi.

Sa mère passa ses journées entre l’hôpital et la maison ; la misère de Mira s’alourdissait. L’avocat lui apprit en plus la pire nouvelle : son père était impliqué dans une affaire de détournement de fonds importante — il serait difficile de le sauver.

Mira passa une semaine chez son père, noyée dans ses papiers, cherchant la moindre entrée d’argent dans ses comptes, la moindre preuve innocente ou disculpatoire… mais tout était embrouillé, sans ordre ni issue.

À la villa d’Adrian, il entra dans le bureau de son oncle, ses yeux brûlant d’une colère intérieure. Il ôta sa cravate et la lança sur la table avec rage.

— «Pourquoi as-tu envoyé les dossiers à la police ? N’avions-nous pas convenu que ce n’était pas le moment ? Nous attendions le moment propice… Tout se passait comme prévu… Sa fille est entre mes mains, pourquoi cette précipitation ?» frappa-t-il la table de son poing.

L’oncle répliqua d’un ton ferme : — «Ne laisse pas le sang de ta mère et de ton frère se perdre en vain ; Saleh devait payer le prix.»

Adrian répondit, dur : — «C’est moi qui décide quand il paiera. Si une goutte de sang tombe, je t’en tiendrai pour responsable.» Il leva la main et montra la bague de famille à son doigt. «Je suis le maître de cette famille, Taher. Si tu agis encore sans mon savoir, ne viens pas te plaindre de ton sort après.»

Son oncle avala sa salive Adrian l’avait appelé par son nom, et c’était là un signe de la gravité de la situation.

Adrian sortit, s’assit près des palmiers pour apaiser sa rage. Les émotions se bousculaient en lui ; une vieille blessure se remit à saigner. Il pensa à ce jour qui avait bouleversé sa vie. Une larme coula de son œil, une larme de nostalgie, tandis qu’il regardait la balançoire où il jouait avec son frère avant l’accident.

À cet instant, Mira aussi était enfouie dans ses propres plaies.

Elle repensa au premier jour où elle avait vu Adrian, à la façon dont il l’avait regardée en entrant dans la maison ; elle se souvenait de la haine qu’elle avait ressentie alors sans en connaître la raison précise.

Aujourd’hui elle se tenait comme un squelette vide, pleine de déception et de douleur. Son cœur blessé pompait la souffrance au lieu du sang. Tout ce qu’elle avait désiré, c’était de vivre libre avec Nizar, l’homme qu’elle aimait.

Sa mémoire la ramena à la scène où son père la présentait à la vente — le moment où il cessa d’être un père et devint un marchand vendant sa fille comme une marchandise.

Ce jour-là, elle était entrée et avait entendu son père conclure l’accord avec Adrian ; son cœur s’était fendu. Elle s’était sentie bon marché aux yeux de son père — un être vil qui avait vendu sa fille sur un marché misérable. Elle se tint sur le seuil, les jambes tremblantes, incapable d’entrer. Elle voulut partir pour de bon, mais la main de son père l’agrippa et on la força à entrer. Elle n’oublia jamais la phrase qu’il prononça : « Mira, voici ton futur mari, Adrian. Fais-lui salut. » Elle chercha dans les yeux d’Adrian une parcelle de pitié, mais n’y trouva qu’un sourire perfide sur ce visage séduisant.

Depuis ce jour, la résistance s’était éteinte en elle. Elle choisit le silence, car ses mots n’étaient que l’écho de sa douleur, qui la blessait davantage et la tuait sans que personne ne se soucie. Maintenant elle regrettait de ne pas avoir hurlé, de ne pas l’avoir défié, d’avoir sombré dans sa faiblesse et s’être perdue entre la dureté de son père et cet homme étranger.

Le matin suivant…

Adrian se vêtit et se dirigea vers la maison de ses parents pour la ramener.

Il entra, et la maison ressemblait à une tombe — un vide glacial qui engloutissait les sons. Il se tenait au milieu de la cour et appela :

— « Mira… Mira… »

Personne ne répondit.

Il pénétra dans sa chambre et la trouva recroquevillée sur elle-même, comme si elle cherchait à devenir plus petite pour disparaître. Des écouteurs aux oreilles, des larmes coulant sur ses joues, une respiration saccadée, des feuilles de la société de son père éparpillées partout. Elle portait une chemise longue sans pantalon, laissant apparaître ses cuisses — son corps était sculptural, gracieux comme les pattes d’une gazelle, sans défaut. Adrian resta stupéfait, incrédule, comme s’il découvrait une femme pour la première fois, alors qu’il avait vu tous types de femmes.

Elle leva la tête et le trouva immobile devant elle. Sous le choc, elle tira la couverture pour cacher ses jambes, honteuse.

— «Que fais-tu ici, espèce de bête ? Sors d’ici… dégage !» cria-t-elle.

Elle s’écria également à voix haute : «Abdessami ! Abdessami !» (l’homme qui travaille chez eux).

Adrian referma la porte et se tint au bord du lit. D’un ton réservé, comme s’il se maîtrisait pour ne pas exploser, il dit :

— «Je suis venu te ramener à la maison. Change de vêtements, tu ne peux pas sortir ainsi…» Il essayait de se contenir et de ne pas se mettre en colère.

— «Quelle maison ? Et quel mariage ? C’est mon père qui a conclu cette misérable transaction et il est en prison maintenant ! Dès demain je déposerai une demande de divorce pour cause de préjudice. Je te ferai sortir de ma vie aussi vite que tu y es entré !» se redressa-t-elle, le doigt pointé vers lui.

Adrian haussa les épaules d’un air indifférent et répondit d’un calme rageant qui la rendit folle :

— «Très bien. Change-toi et nous y allons.»

Son froideur lui fit perdre tout contrôle. Elle hurla de toutes ses forces : «Assez ! L’affaire est terminée ! Ton visage devient répugnant… Dégage de ma vue ! Je ne sais pas pourquoi, depuis que tu es entré dans ma vie, les ennuis ne cessent jamais !»

Elle n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’elle sentit ses pieds quitter le sol.

Adrian l’avait portée ! Il avait pris la situation avec une implacable froideur. Il la posa sur son épaule sans pitié, comme un sac de blé, et sortit.

Sa mère poussa des cris, tenta de se lever mais n’y parvint pas.

Abdessami s’approcha pour la libérer ; Adrian le repoussa d’un coup de pied et le jeta au sol. Elle se débattait et mordait, mais ses coups n’avaient aucun effet.

Ils arrivèrent à la villa ; Adrian saisit Mira et la fit sortir de la voiture, la poussant avec dureté jusqu’à atteindre la porte. Il la saisit par les cheveux :

— «Regarde cette villa… tu n’en sortiras que sur des épaules. Si tu veux partir libre, tue-toi… prends le pistolet !» Il plaça l’arme dans sa main et pressa la gâchette entre ses doigts. «Allez, finis ta vie. N’es-tu pas courageuse ? Montre-moi ton courage !»

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