Je m'éloigne de mes Alpha papas

Le jour où j'ai décidé de partir, c'était Noël. Notre famille avait pour tradition de célébrer ce jour ensemble chaque année.

Ce matin-là, j'ai reçu un appel de mon professeur.

« Zoé, je suis content de voir ton email, tu as accepté le projet de recherche en Antarctique, » a-t-il dit. « Il y a trois ans, tu disais ne pas pouvoir te résoudre à quitter ta famille. Je suis heureux de te voir reprendre ta carrière maintenant. J'ai déjà réservé ton vol pour demain soir. N'oublie pas de dire au revoir à ta famille aujourd'hui. »

Le mot famille m'a fait vouloir pleurer.

Après la mort de ma mère, il ne restait plus que mes trois pères et moi. J'étais autrefois la fille la plus chérie du monde des loups-garous, la fille de trois puissants Alphas.

Mais depuis l'arrivée d'Alice, elle était devenue leur préférée. Et je suis devenue celle qu'ils ne voyaient plus.

« Professeur, » ai-je dit, « veuillez demander pour moi le plus haut niveau de confidentialité. Supprimez toutes mes données d'identité du Bureau d'Information des Loups-Garous. »

« Pourquoi ferais-tu cela ? » a-t-il demandé, surpris. « Une fois tes données effacées, ton nom, Zoé Hugo, cessera d'exister. Tes pères ne pourront plus jamais te retrouver. Tu comprends cela ? Ils vont devenir fous quand ils réaliseront que tu es partie ! »

Il ne pouvait pas comprendre pourquoi je faisais cela.

« Ils ne le seront pas, » ai-je dit doucement.

La voix froide de mon père a résonné dans mon esprit. « Tes choses ne nous concernent pas. Tu n'as pas besoin de nous en parler. »

Si je disparaissais complètement, ce serait plus simple. Je pourrais prétendre qu'ils n'ont pas pu me joindre, et non qu'ils ne s'en souciaient pas.

Après un long silence, mon professeur a accepté ma demande.

Après avoir raccroché, j'ai essayé de contacter mes trois pères par lien mental, un par un. Comme je m'y attendais, ils m'avaient déjà bloquée.

Alors j'ai sorti mon téléphone et j'ai appelé mon premier père, Julien.

« Papa... c'est Noël, » ai-je dit doucement. « Pouvons-nous dîner ensemble ? Juste un repas en famille ? »

Il y a eu un long silence à l'autre bout du fil.

Je me suis dépêchée d'ajouter : « J'ai acheté à Alice une nouvelle robe de spectacle, la robe clair de lune du magazine de mode qu'elle adore. »

« Quel repas en famille ? » La voix de Julien était sèche et irritée. « Alice est à l'hôpital à cause d'une allergie, et tu as encore envie de faire la fête ? »

« Alors j'apporterai la robe à l'hôpital, » ai-je dit. « Nous pouvons fêter ça là-bas, ensemble. »

Peut-être était-ce le tremblement dans ma voix – quelque chose que je n'avais jamais montré auparavant – qui l'a fait se taire de nouveau.

Depuis qu'Alice était entrée dans notre maison, les disputes entre mes pères et moi étaient devenues incessantes. Peu importe la gravité de la situation, je n'avais jamais baissé la tête. Je n'avais jamais supplié.

Alice n'était même pas censée faire partie de notre famille.

À l'époque, elle n'était qu'une fille timide de l'orphelinat – harcelée, isolée, sursautant au moindre bruit.

J'avais pitié d'elle. C'est moi qui avais convaincu mes pères de la recueillir.

Et au début, tout était parfait. Nous partagions des vêtements, des secrets, des collations de minuit.

Je croyais sincèrement l'avoir sauvée.

Mais à un moment donné, quelque chose a changé.

Mes pères ont commencé à la traiter différemment, avec plus de douceur et de chaleur.

Même mes amis ont été attirés par sa douceur, son innocence, son petit sourire parfait...

Et ils se sont éloignés de plus en plus de moi.

Il m'a fallu beaucoup trop longtemps pour réaliser la vérité :

La fille dont j'avais autrefois pitié était celle qui cachait les griffes les plus acérées derrière ses larmes.

Mais maintenant, j'allais partir et je ne les reverrais plus jamais. Le moins que je puisse faire était de leur dire au revoir correctement.

Soudain, une voix douce et joyeuse a rompu le silence.

« Papa, si Zoé s'excuse auprès de moi, nous pouvons dîner ensemble, » a dit Alice.

« Je suis désolée, Alice, » ai-je dit immédiatement. « J'arrive tout de suite. »

Après avoir raccroché, je suis rentrée à la maison et ai pris les autres cadeaux que j'avais préparés.

Je voulais qu'Alice soit heureuse. Si elle était heureuse, mes pères le seraient aussi. Je voulais que le dernier repas en famille dans ma mémoire soit paisible.

Quand je suis arrivée à l'hôpital, j'ai vu tout ce qu'ils avaient fait pour elle.

Lucas, l'Alpha qui contrôlait les ressources médicales mondiales, avait donné à Alice un traitement de niveau supérieur.

Simon, qui commandait les guerriers de l'Alliance du Nord, avait déployé des gardes pour protéger tout l'étage afin que personne ne puisse la déranger.

Je suis entrée discrètement dans la chambre.

Les joues d'Alice étaient roses, son expression toujours aussi innocente.

J'ai rapidement sorti la robe du sac, l'ai aidée à l'enfiler, ai fermé la fermeture éclair dans le dos et ai ajusté les bretelles. Puis j'ai pris son téléphone et pris plusieurs photos pour qu'elle puisse en choisir une à publier en ligne.

Mes trois pères me regardaient avec surprise. Ils ne m'avaient jamais vue ainsi : si calme, si douce.

« C'est magnifique, » a dit Alice en tournoyant sur la pointe des pieds. La robe au clair de lune scintillant tandis qu'elle tournait.

Leurs regards l'ont suivie, attirés par sa lumière.

« Attention, ne tombe pas, » a dit Simon doucement, se rapprochant pour la protéger.

Les yeux de Julien et de Lucas suivaient chacun des mouvements d'Alice, remplis de la même tendre chaleur qui m'appartenait autrefois.

Quand Simon s'est assuré qu'elle était en sécurité, son regard s'est tourné vers moi. Mais au moment où nos regards se sont croisés, la chaleur dans ses yeux s'est transformée en froideur.

Ce changement m'a blessée profondément.

J'ai détourné le regard et sorti de mon sac un collier en saphir, ainsi que le badge qui symbolisait l’héritier Alpha.

« La robe allait mieux avec ce collier. »

Sous les regards stupéfaits de tous, j’ai passé le collier autour du cou d'Alice.

« Ce badge… tu le voulais tellement. Je te l’offre maintenant. »