Chapitre 2

« Zoé, quel tour joues-tu maintenant ? » Les yeux aigus et méfiants de Julien ont balayé mon visage tandis qu'il tirait Alice derrière lui pour la protéger.

Je comprenais pourquoi il était sur ses gardes. Le collier dans ma main n'était pas un simple bijou : c'était le cadeau que mes trois pères m'avaient offert lors de ma première transformation à quinze ans.

Oui, j'ai éveillé ma louve très tôt. J'étais l'Alpha la plus prometteuse de ma génération, destinée à hériter des trois tribus de mes pères. Ce collier, ainsi que le badge, symbolisaient ce destin.

Alice avait laissé entendre plus d'une fois qu'elle les voulait. Chaque fois, nous finissions par nous disputer si violemment que toute la maison tremblait. Je n'avais jamais cédé. Je criais, jurais, insistais sur le fait que je ne les lui laisserais jamais les avoir.

Alors, quand je les lui ai soudainement offerts, il était logique qu'ils pensent que je manigançais encore.

« C'est juste un cadeau pour me faire pardonner, » ai-je dit doucement après un long silence.

Simon m'a jeté un regard approbateur. « Zoé a enfin compris qu'il faut céder à sa sœur. Ne t'inquiète pas, même si Alice a le badge, tu hériteras toujours des trois tribus. »

« Nous t'achèterons un collier encore plus cher, » a dit Julien d'un ton plus doux.

« Tu aurais dû apprendre plus tôt à prendre soin de ta sœur, » a ajouté Lucas doucement, caressant mes cheveux. « Sois une sœur attentionnée. »

Ma gorge s'est serrée. Les larmes ont monté avant que je puisse les retenir. Je ne me souvenais même plus de la dernière fois où ils m'avaient parlé avec autant de douceur.

« Merci, Zoé ! » a dit Alice. « Je vais porter ce collier à la fête de Noël ! »

Puis elle a levé les yeux vers moi, un doux sourire aux lèvres. « Tu viendras avec nous, n'est-ce pas ? Nos papas ont annulé toutes leurs réunions ce jour-là pour pouvoir m'emmener voir le feu d'artifice ! »

« Je ne peux pas y aller... »

Simon a froncé les sourcils. « Où vas-tu ? »

Un instant, je suis restée figée et j'étais surprise qu'il pose cette question.

« Je... » J'ai hésité, me demandant si je devais lui dire la vérité.

Il m'a coupée la parole, d'un ton impatient. « Laisse tomber. Quoi que ce soit, cela ne nous concerne pas. »

La pièce est tombée dans un silence pesant.

J'ai mis la main dans ma poche, ai placé une clé sur la table et ai forcé un sourire. « C'est pour ma chambre. Laisse Alice s'y installer après sa sortie. »

« Qu'est-ce que tu viens de dire ? » Julien m'a dévisagée, incrédule.

Ma chambre n'était pas la plus grande ni la plus luxueuse de la maison, mais Alice disait toujours qu'elle l'aimait le plus. Elle avait supplié plus d'une fois d'échanger de chambre avec moi, et j'avais toujours refusé. Même quand mes pères lui avaient proposé d'acheter une nouvelle villa, elle avait aussi refusé.

Juste hier, elle se plaignait de vouloir ma chambre après sa sortie de l'hôpital en prétendant que l'air y était plus pur, la vue sur le jardin idéale pour sa convalescence. Et j'avais dit non, encore une fois.

Lucas a froncé les sourcils. « Tu n'as pas besoin d'agir ainsi pour qu'on te plaigne. Alice a déjà accepté de rester dans une autre chambre. »

« C'est bon. Je ne cherche pas à être dramatique, » ai-je dit. « Je le pense vraiment. De toute façon, je suis occupée par le travail ces jours-ci. Je rentre très rare à la maison. »

« Ça suffit. » La voix de Julien a claqué dans l'air comme un coup defouet tandis qu'il posait sa tasse de café avec fracas, renversant le liquide sur la table.

Silence à nouveau.

Puis, comme si rien ne s'était passé, ils se sont retournés vers Alice, lui demandant comment elle se sentait, si elle avait besoin de quelque chose, si son bras lui faisait encore mal.

Je suis restée là, oubliée, ma poitrine se serrant jusqu'à ce que respirer fasse mal.

Je me suis penchée, faisant semblant de lacer mes chaussures pour qu'ils ne voient pas mes larmes.

« Je vais partir maintenant, » ai-je dit doucement.

Mes pas ont résonné lourdement sur le sol. Personne ne m'a arrêtée. Personne n'a dit un mot jusqu'à ce que j'atteigne la porte.

Soudain, je me suis souvenue du jour où ma mère était morte : tous les trois avaient les yeux rouges et gonflés et ils m'avaient prise dans leurs bras en murmurant : « On t'aimera toujours. Tu seras toujours notre petite princesse. »

Menteurs.

Mon nez me brûlait. Les larmes ont coulé avant que je puisse les retenir.

Le lendemain matin, j'ai commencé à faire mes valises. J'ai complètement vidé ma chambre.

Le domestique Oméga me regardait, perplexe.

« Mais, Mademoiselle, » a dit l'un d'eux prudemment, « vous êtes l'héritière. Pourquoi donner votre chambre à la fille adoptive ? Dans quelle chambre allez-vous dormir, alors ? »

J'ai forcé un sourire en secouant la tête. « Aucune. Je pars. Je n'en aurai plus besoin. »

Ils sont tous restés figés.

« Mademoiselle, partez-vous en voyage d'affaires ? Vous aurez encore besoin de votre chambre à votre retour. »

« Je ne reviendrai pas, » ai-je dit. « Plus jamais. »

Avant que je puisse reprendre mon souffle, j'ai entendu la voix de Lucas derrière moi. Son ton était glacial.

« Où exactement penses-tu aller ? »