Chapitre 5

« Où est Silvain ? » a demandé Mélissa, contenant difficilement sa colère.

Lucrèce a poussé un petit rire en coin : « N'es-tu pas son épouse ? Pourquoi me demandes-tu où se trouve ton propre mari ? À moins que… Silvain ne souhaite plus te parler ? »

Malgré la voix douce, ses paroles provoquantes ont attiré rapidement l'attention des employés alentour.

Les anciens du groupe, reconnaissant Mélissa, ont affiché une surprise mêlée d'incompréhension.

Silvain n'avait-il pas toujours cultivé l'image d'un mari fidèle et attentionné ? Comment en était-on arrivé à cette scène de confrontation humiliante ? Son épouse contre sa maîtresse ?

Ceux qui savaient que Lucrèce avait été jadis soutenue financièrement par Mélissa ont affiché une expression encore plus gênée.

« Puisque tu ignores tout, laisse-moi t'éclairer : il fait la sieste. Je l'accompagnais, mais une amie m'a invitée à faire du shopping. Je l'ai donc laissé se reposer seul », a poursuivi Lucrèce avec une feinte nonchalance.

Elle a porté négligemment la main à son collier, révélant par ce geste les marques rosées qui jalonnaient son cou.

« Si tu n'as rien d'important, je te conseille de partir. Silvain ne souhaite pas te voir. Si cela change, je ne manquerai pas de te prévenir », a-t-elle ajouté avec un sourire sucré.

Sous le regard pesant de l'assistance, la rage de Mélissa a atteint son paroxysme. N'y tenant plus, elle a giflé Lucrèce avec une force qui a résonné dans le hall.

Un silence stupéfait est survenu, puis des murmures affairés.

Lucrèce, stupéfaite, est restée un instant immobile, la joue rougeoyante.

Soudain, apercevant une silhouette familière, elle s'est effondrée au sol dans un sanglot dramatique : « Mélissa, je vous en prie ! C'est de ma faute ! Ne soyez plus fâchée contre Silvain ! »

Alors que Mélissa s'apprêtait à dénoncer cette comédie grossière, une haute silhouette a écarté la foule d'un geste vif.

Oui, Silvain est apparu, le visage sombre.

« Lucrèce ! » s'est-il exclamé en se précipitant vers elle.

« Silvain, je veux... »

Alors que Mélissa s'apprêtait à parler, Silvain l'a repoussée violemment : « Assez ! Cesse tes caprices ici ! Mon entreprise n'est pas le lieu de tes crises. Veux-tu que tout le monde te prenne pour une folle ? »

Déséquilibrée, Mélissa a chuté lourdement sur le sol. Un gémissement étouffé lui a échappé, son visage perdant toute couleur.

Pourtant, sans même un regard pour elle, Silvain s'est précipité vers Lucrèce et a pris son visage avec une tendresse coupable : « Tu as mal ? »

Cette jeune femme pleurait avec une grâce calculée : « Oui… Souffle sur ma joue, s'il te plaît. »

Il s'est exécuté, murmurant avec une douceur infinie : « Je t'avais pourtant dit de rester loin d'elle. »

« Ne sois pas fâché contre Mélissa, c'est de ma faute… Je l'ai irritée sans le vouloir », a-t-elle sangloté en se blottissant contre lui.

Silvain l'a soulevée dans ses bras avant de se tourner vers les employés médusés : « Vous n'avez rien à faire ? Retournez travailler ! »

La foule s'est dispersée aussitôt sous son regard noir.

Enfin, ses yeux se sont posés sur Mélissa, toujours à terre. Son expression était d'une froideur inédite, réduisant à néant des années de tendresse.

Sous ce regard glaçant, Mélissa a senti le sol se dérober sous elle.

Jamais elle n'aurait imaginé qu'il puisse un jour la regarder ainsi.

Après un long silence, Silvain s'est approché et l'a tirée brusquement par le bras, sans la moindre délicatesse : « Nous allons parler dans mon bureau. »

Elle a trébuché, manquant de se tordre la cheville, et a tenté de se dégager : « Parlons ici. »

« Dernier avertissement : ma patience a des limites ! » a-t-il grondé, « Regarde-toi ! Tu te comportes comme une harpie ! »

« Une harpie ? » Le mot a fait frissonner Mélissa. Un rire amer s'est échappé de ses lèvres, bientôt mêlé de larmes, « Vraiment, Silvain… Jamais je n'aurais cru que tu me qualifierais ainsi. »

« Tu trouves cela indigne ? Mais quand tu m'as trahie, as-tu seulement pensé aux conséquences ? » a-t-elle lancé sans trembler.

« Assez ! » a-t-il rugi, « Que veux-tu exactement ? »

Sans hésiter, Mélissa a sorti un document de son sac et le lui a tendu : « Je veux divorcer. »