L'abandonnée

Dans l'église, le prêtre a annoncé avec douceur : « Les époux peuvent maintenant échanger les alliances. »

J'ai tendu mon annulaire, attendant silencieusement. Mais Gervais restait immobile, les yeux rivés sur un message. Puis, il a jeté l'alliance et s'est précipité dehors.

Sur mon téléphone, j'ai vu la dernière publication de Léonie : « De retour seule au pays pour me soigner… quelle tristesse », accompagnée d'une photo d'un lit d'hôpital.

Autour de moi, les murmures allaient bon train : « Pourquoi Gervais est-il parti ? »

Mon frère, Jasmin, s'est approché : « Clara, tu as toujours été forte. Je sais que tu peux gérer ça seule. Là… c'est Léonie qui a besoin de moi. »

Après ces mots, il est parti, lui aussi.

Ils m'avaient abandonnée, pour la même femme.

Plus tard, impossible de joindre Gervais. C'était encore une publication de Léonie qui m'a appris la vérité : une photo où Gervais et Jasmin veillaient à son chevet. Le collier fabriqué par Gervais ornait son cou, et la robe de rêve dessinée par Jasmin enveloppait son corps.

Tout cela… aurait dû m'appartenir…

Orpheline, j'avais été adoptée par la famille de Jasmin avant de rencontrer son meilleur ami Gervais. Nous avions grandi ensemble, inséparables.

Gervais me répétait depuis l'enfance : « Je te protégerai. » Il chassait ceux qui m'intimidaient et exauçait chacun de mes souhaits. Jasmin me gâtait aussi, sacrifiant ses jouets pour m'offrir de belles robes.

Alors, quand mes parents biologiques étaient revenus, un an plus tôt, pour m'emmener… j'avais refusé de les suivre. Je ne pouvais pas quitter Jasmin, ni Gervais.

Pourtant, ces deux hommes qui comptaient tant pour moi m'avaient abandonnée le jour le plus important de ma vie.

Dans mes mains, le bouquet de fleurs se fanait, tandis que dans la salle, les invités chuchotaient :

« Mon Dieu, le marié a disparu ! »

« Pourquoi Jasmin est-il parti aussi ? »

« Qu'a fait Clara pour que Gervais la plante là ? »

« Aucune idée… ça doit être quelque chose de honteux. »

Les sarcasmes m'engloutissaient. Mon frère et mon fiancé, ceux qui devaient être mon bouclier, avaient tous disparu...

Les minutes se sont écoulées lentement, le soleil a décliné, les invités sont partis... sans qu'ils ne reviennent...

Après une journée sans manger à régler ce désastre, je me suis effondrée, victime d'une hypoglycémie.

Je me suis réveillée à l'hôpital. Une journée entière avait passé, sans un seul message de Jasmin ou de Gervais. Seule Léonie avait encore posté une photo.

Elle y souriait, tenant un bol de soupe aux champignons.

La légende disait : « Merci à ces deux messieurs de prendre soin de moi, une pauvre malade. »

Le cœur brisé et les mains tremblantes, j'ai composé le numéro de Gervais.

Premier appel : silence. Deuxième tentative : même rejet. Ce n'était qu'à la troisième sonnerie qu'une voix de femme s'est faite entendre : « Clara… désolée. Gervais et Jasmin ont été impulsifs. Je ne pensais pas qu'ils te laisseraient seule le jour de ton mariage… »

C'était Léonie, évidemment.

Avant que je ne puisse parler, j'ai entendu Gervais la réconforter : « C'est pas grave, Léonie. Ne t'excuse pas. Ta santé passe avant un mariage. »

Il a saisi le téléphone, sa voix glaciale transperçant la ligne : « Le mariage est annulé. On verra plus tard. Tu savais que Léonie était malade et partait se soigner à l'étranger, et tu nous l'as caché exprès ? Juste pour ne pas gâcher ta maudite cérémonie ? Je ne t'avais jamais jugée aussi égoïste ! »

La communication s'est interrompue brutalement.

Une douleur à l'estomac m'a tordu les entrailles, m'empêchant de protester. J'ignorais sincèrement la maladie de Léonie. Mais Gervais refusait toute explication, allant jusqu'à bloquer mes numéros.

Peu après, Jasmin m'a appelée à son tour. Juste pour m'annoncer :

« Clara, la robe que j'avais dessinée pour toi... je l'offre à Léonie. Je ne t'ai pas élevée pour mentir. Elle est orpheline comme toi, malade et seule. Elle a plus besoin de nous. Elle n'a rien. Le mariage peut se tenir n'importe quand, et on pourra toujours refaire les robes. Sois plus décente, d'accord ? »

Pas un mot de réconfort. Pas une once de sollicitude. Durant cet appel, il ne s'est pas enquis de mon état.

À cet instant, tout ce que j'avais retenu depuis des heures m'a submergée d'un coup. J'ai serré mes bras contre ma poitrine, résolue à fuir cet endroit.