Chapitre 5 : Comment a-t-il pu l'humilier de la sorte ?

« Gabriel Arnault, le jeune homme le plus distingué et brillant de la Capitale, va se marier ! »

« Oui, c'est vrai, il a annoncé la nouvelle de son mariage au milieu de la nuit ; j'étais tellement excitée que je n'avais pas fermé l'œil. Je me demande bien quelle femme a su le séduire !»

…

Pendant sa pause-café, Clara a entendu ses collègues papoter avec excitation concernant le mariage de Gabriel.

Elle connaissait Gabriel Arnault, leurs chemins s'étaient même croisés à plusieurs reprises et, à chaque fois, il était venu à son aide.

Une fois, sa voiture a crevé en pleine route ; Gabriel, qui passait par là par hasard, l'aidée à changer le pneu.

Une autre fois, alors qu'elle dînait avec un client qui, après avoir bu et sous l'emprise de l'alcool, avait tenté de passer à l'acte, Gabriel l'en avait tirée sans compromettre ni l'affaire ni sa dignité.

Et d'autres occasions encore, trop floues pour qu'elle s'en souvienne.

Elle s'est dit qu'elle lui devait bien des faveurs. Puisqu'il se mariait, elle devait lui offrir un cadeau, même s'il ne se souvenait probablement plus d'elle.

« Quand aura lieu le mariage ? » a-t-elle demandé en se servant un café.

« La semaine prochaine, le même jour que Monsieur Sébastien ! »

La main qui tenait la tasse a tremblé ; du café brûlant a giclé sur sa main.

« Je vous laisse », a-t-elle dit en s'éclipsant.

Des murmures l'ont suivi :

« Pourquoi avoir parlé de Monsieur Sébastien ? Tu savais bien que ça blesserait Madame Clara. »

« La pauvre, elle l'a accompagné toutes ces années pour finalement laisser la place à une autre. »

« Les hommes sont si ingrats, mais il paraît que Monsieur Gabriel, lui, est fidèle : la femme qu'il allait épouser est celle qu'il aimait en secret pendant une décennie… »

Clara a reçu l'appel de Sébastien dans l'après-midi. « Tu m'accompagnes tout à l'heure. »

« D'accord. » Elle ne demandait même pas l'adresse.

De toute façon, elle devait y aller. Et puis, elle n'avait plus envie de lui adresser la parole.

Elle a sauvegardé la liste des tâches à transférer, a fait quelques rangements et a suivi Sébastien.

La voiture s'est arrêtée chez les Laurent. Céline est accourue telle une princesse et s'est jetée dans les bras de Sébastien, en lui déposant un doux baiser sur la joue.

Sébastien présentait un visage naturel et calme, un sourire aux lèvres. Il lui a pris la main. « Montons. »

Céline a grimpé à l'arrière de la voiture et a regardé Clara : « Madame Clara, Sébastien et moi allons essayer ma robe de mariée. Vous pourrez choisir la vôtre, celle de demoiselle d'honneur. »

Ainsi, ils voulaient qu'elle soit témoin de leur bonheur à l'avance.

Céline et Sébastien étaient assis à l'arrière de la voiture, Céline était complètement avachie contre lui, comme si elle n'avait plus de force. « Sébastien, tu as vu l'annonce de mariage de Gabriel ? Il a choisi le même jour que nous pour se marier, tu crois qu'il fait exprès pour nous voler la vedette ? »

Gabriel et Sébastien, tous deux étaient des hommes impeccables et de bonne naissance, mais Gabriel avait des racines familiales plus solides. Sa famille ne possédait pas seulement de l'argent, mais aussi du pouvoir, tandis que Sébastien n'avait que de l'argent.

« Ne t'inquiète pas, ma chérie, ce jour-là, tu seras la mariée la plus rayonnante et la plus belle du monde. » A-t-il dit en la réconfortant doucement.

Clara l'observait dans le rétroviseur ; elle avait presque oublié la dernière fois où il lui avait témoigné autant de tendresse.

« Sébastien, je suis très heureuse de t'avoir dans ma vie. Ces sept années perdues, je les regrette tellement. » Une tristesse se lisait sur son visage mais la seconde suivante, son expression a changé et un joli sourire est apparu comme un rayon de soleil. « Mais tu m'as aimée tout ce temps, merci, Sébastien. »

Au moment où elle s'approchait de Sébastien pour l'embrasser, Clara a détourné son regard.

Même si elle avait renoncé à lui et à ce sentiment, et même si elle avait coupé les liens, les souvenirs restants continuaient de piquer son cœur.

« Sébastien, je te pose une question : pendant ces sept années, tu as bien eu d'autres femmes, n'est-ce pas ? »

Cette question, aussi sensible qu'inattendue, a choqué Clara. Son cœur s'est mis à battre vivement, ses doigts ont serré son téléphone et elle a levé de nouveau les yeux pour regarder Sébastien dans le rétroviseur.

Sébastien semblait percevoir son regard lorsqu'il croisait le sien. Il plongeait dans ses yeux tout en apaisant la femme à ses côtés : « Non, ne prête pas attention aux rumeurs, elles sont insignifiantes. »

« Même si c'était le cas, je comprends, ce n'est pas grave. Les hommes ont des besoins physiques, il faut trouver des solutions, n'est-ce pas ? » Les paroles magnanimes de Céline ont ébranlé la confiance de Clara.

Elle savait que Céline avait dit ces mots pour trouver une occasion de lui nuire, car son regard ne la quittait pas.

« Passons à autre chose », dit Sébastien, voulant esquiver ce sujet.

« Pourquoi pas ? Tu serais tombé amoureux d'elle ? » Céline a insisté, elle était toujours capricieuse, comme une princesse.

« Non », il l'a nié. « Chez les hommes, le sexe et l'amour sont deux choses distinctes et séparées. »

Le cœur de Clara se tordait de douleur. Sébastien venait de reconnaître qu'il ne l'avait traitée que comme un instrument de satisfaction physique.

Il pouvait ne pas l'épouser. Il pouvait même ne pas l'aimer. Mais comment a-t-il pu l'humilier de la sorte ?