Librairie
Rechercher
Accueil / Romance / LA CHAIRE INTERDITE / Chapitre 86 : L'Abîme Apprivoisé

Share

Chapitre 86 : L'Abîme Apprivoisé

Auteur: L'invincible
last update Dernière mise à jour: 2025-11-19 18:23:00

Nora

La voiture était devenue le prolongement de sa folie, un projectile lancé dans la gueule de la nuit. Les phares déchiraient les virages en lacet, éclairant par flashes la paroi rocheuse d'un côté, le vide noir de l'autre. L'odeur du cuir, de son parfum et de l'électricité statique de notre silence formait un mélange enivrant. Je regardais ses mains. Ces mains qui tenaient les rênes d'un empire, qui tournaient les pages de Proust, qui s'étaient posées sur ma peau avec une autorité qui m'avait d'abord soumise, puis rendue folle de rage. Elles étaient blanches, crispées sur le cuir du volant. Des mains de meurtrier. Ou de sauveur. Je ne savais plus.

Quand les grilles de la villa sont apparues, il n'a pas ralenti. Un bip bref, un déclic, et elles se sont ouvertes dans un grincement sinistre. La voiture a avalé l'allée gravillonnée, projetant des cailloux dans son sillage. Le bruit du moteur s'est éteint, laissant place au rugissement des vagues, bien plus bas. Un grondement primal, i
Continuez à lire ce livre gratuitement
Scanner le code pour télécharger l'application
Chapitre verrouillé
Previous Chapter Next Chapter

Latest chapter

  • LA CHAIRE INTERDITE    Chapitre 104 — L'Amour, Ce Glacis 1

    ÉlodieL’amour est un glacis.C’est la pensée qui me tourne, ce matin, en regardant mes mains posées sur la nappe de lin trop blanche. Un glacis : une finition lisse et dure, appliquée patiemment couche après couche pour protéger, pour durer, pour faire briller. Pour masquer la texture du bois en dessous, ses nervures, ses failles. Maman disait toujours qu’un bon mariage est un travail de finition. Il faut savoir poncer les aspérités, recouvrir d’une couche de patience, d’une autre de silence, d’une dernière de grâce sociale. Jusqu’à ce que l’ensemble soit impeccable, étincelant sous les regards admiratifs. Un meuble de famille.Mais le glacis, s’il est trop épais, finit par craqueler. Il se fendille. Et on voit alors, dans les lézardes, la matière véritable, sombre et fragile.Je suis assise dans le salon clair de la maison de mes parents, et je sens mes propres lézardes. Elles parcourent ma peau, remontent dans ma gorge. La tasse de thé posée devant moi diffuse une chaleur que je ne

  • LA CHAIRE INTERDITE    Chapitre 103 — Les Fantômes du Bureau 2

    NoraComment faire pour qu’il me laisse tranquille ?La question tourne dans ma tête, lancinante, désespérée. Les méthodes conventionnelles sont inutiles. La fuite ? Impossible, il tient mes proches en otage. La rébellion frontale ? Il la briserait avec une cruauté bureaucratique, en ruinant Antoine, en détruisant Léa. La soumission ? C’est la mort lente, la dissolution promise.Je lève les yeux vers le bureau de verre. La silhouette d’Hugo est maintenant debout, immobile, semblant regarder dans ma direction. M’a-t-il vue parler à Lenoir ? A-t-il des micros ici aussi ?Une nausée froide me monte à la gorge.Et soudain, une pensée tordue, dangereuse, germe. Une pensée née du désespoir et de l’observation de son propre mécanisme.Il ne me laissera jamais tranquille. Pas tant que je serai un objet de désir, de défi, de possession. Sa fascination pour moi est le moteur de mon enfer.Pour éteindre ce moteur… il faudrait que je cesse d’être fascinante. Il faudrait que je devienne… autre cho

  • LA CHAIRE INTERDITE    Chapitre 102 — Les Fantômes du Bureau 1

    NoraLe bureau d’Hugo est un temple de verre et d’acier, perché au dernier étage d’une tour qui domine la ville. La lumière du matin inonde l’espace ouvert, trop propre, trop ordonné. Chaque objet y est une déclaration de pouvoir et de contrôle. Comme la maison. Mais ici, l’air sent l’encre, le café fort et l’ambition froide.Je me tiens devant le vaste plateau de verre qui me sert de poste d’assistante. Mon ancien poste. Il m’a fait revenir ici, comme si de rien n’était. Comme si les derniers jours n’avaient été qu’un mauvais rêve. « La normalité est une discipline, Nora », a-t-il dit ce matin en m’y conduisant. « Tu reprends tes fonctions. Tu souris à mes collaborateurs. Tu es l’heureuse élue qui partage ma vie. N’oublie pas le script. »Mes doigts effleurent la surface lisse de l’ordinateur portable qu’il m’a attribué. Un outil de travail. Une camisole numérique. Tous mes accès sont filtrés, monitorés. Chaque clic est potentiellement un piège.Pourtant, être ici, hors de la maison-

  • LA CHAIRE INTERDITE    Chapitre 101 — Les Ombres du Passé Présent

    NoraLa chambre est un écrin de soie et d’ombre. Je m’y tiens debout, au centre, les bras enveloppant mon propre corps. Le silence ici est épais, luxueux, il étouffe. Il porte le parfum de cèdre et de contrainte.Mes pas sur le parquet ciré sont les seuls bruits. Je marche jusqu’à la fenêtre, écarte le lourd rideau de velours. Le jardin japonais s’étale, parfait, immobile. Un bassin, des pierres, du sable ratissé. Une image de sérénité forcée. Une métaphore de mon existence ici.Je tourne en rond. L’adrénaline de la confrontation dans le salon d’hiver retombe, laissant place à un froid lucide. Il a pensé à tout. Transféré mes cours. Filtré mes communications. Il possède des arsenaux, a-t-il dit. Des armes propres. Des faux si convaincants qu’ils détruiraient des vrais.Antoine et Léa.Mon cœur se serre, mais mes yeux restent secs. Les larmes sont devenues un luxe trop dangereux. Elles signifient un affect, une faille. Je ne peux pas me le permettre.Je pense à sa main effleurant mes c

  • LA CHAIRE INTERDITE    Chapitre 100 — L’Éclat du Silence Retrouvé 2

    HugoJe tourne les talons et me dirige vers le salon d’hiver, une pièce vitrée donnant sur le jardin japonais. Je sais qu’elle me suit. Ses pas sont légers, feutrés, derrière moi.Dans le salon, le thé est déjà servi. Un service en porcelaine de Limoges, délicat, translucide. Je m’assois dans un fauteuil en cuir et lui désigne le canapé en face.— Assieds-toi. Bois quelque chose de chaud. Tu dois être fatiguée.Elle obtempère, se laissant tomber plutôt que s’asseyant. Elle ne touche pas à la tasse que je lui tends.— Comment s’est passé ton adieu à Léa ? demandé-je, prenant une gorgée de thé.— Comme prévu, dit-elle, d’une voix monocorde. Elle est inquiète, mais elle a cru à l’histoire de la résidence. Pour un temps.— C’est tout ce qu’il nous faut. Un temps.Je la regarde par-dessus le bord de ma tasse. Ses yeux fixent le bassin aux carpes koï, derrière la vitre. Elle a l’air vidée. Mais il y a quelque chose, dans la ligne de sa mâchoire, dans la façon dont ses mains sont posées à pl

  • LA CHAIRE INTERDITE    Chapitre 99— L’Éclat du Silence Retrouvé 1

    HugoLe temps s’étire, élastique et menaçant. Deux heures. Cent vingt minutes qui se décomptent dans le tic-tac sourd de l’horloge murale en bois d’ébène de mon bureau. Je ne regarde pas les caméras. L’attente est un exercice de contrôle. Je dois lui faire confiance, à ma menace, à son intelligence de survie. Je l’ai vue vaciller, ployer sous le poids de l’enjeu. Elle n’a pas le choix. C’est ce que je me répète, savourant l’amer pouvoir de cette certitude.Je travaille. Des contrats, des chiffres, des lignes nettes qui n’ont pas la duplicité des êtres humains. Mais mon esprit est ailleurs, dans une voiture roulant vers son ancienne vie, avec Martin, silencieux et vigilant, au volant. Je l’imagine dans cet appartement étroit, entourée des reliques de son existence d’avant. Ses doigts sur les livres, les vêtements, les photos. Chaque objet, un adieu. Chaque geste, une capitulation.Un plaisir froid, presque clinique, me parcourt. C’est une transplantation. Je déracine une fleur sauvage

Plus de chapitres

Vous vous intéresseriez aussi à

Découvrez et lisez de bons romans gratuitement
Accédez gratuitement à un grand nombre de bons romans sur GoodNovel. Téléchargez les livres que vous aimez et lisez où et quand vous voulez.
Lisez des livres gratuitement sur l'APP
Scanner le code pour lire sur l'application
DMCA.com Protection Status