LucianoJe la regarde dormir, le drap à peine remonté sur ses hanches, ses cheveux en bataille éparpillés sur l’oreiller comme un chaos doux, sa bouche entrouverte, relâchée, offerte, laissant s’échapper un souffle lent, fragile, presque enfantin, et pourtant il y a dans cette image quelque chose de féroce, quelque chose d’injuste, de désarmant, parce qu’elle est belle sans le vouloir, belle comme un piège, belle comme une erreur qu’on a envie de refaire mille fois.Sa peau nue est encore marquée, par mes doigts, par mes dents, par ma bouche, chaque trace est une empreinte, un sceau, une signature invisible que je suis le seul à savoir lire, un territoire conquis sans violence mais avec une volonté brutale, parce qu’elle est à moi, pas parce qu’elle me l’a dit, ni parce qu’elle m’a supplié de rester, mais parce qu’elle ne peut plus fuir, parce que même si elle partait maintenant, elle m’emporterait sous la peau, et que moi, je ne pourrais plus l’arracher.Je me lève lentement, sentant
GRÂCEJe l’attends dans la pénombre, un verre à la main, les jambes croisées, la robe fendue jusqu’à la hanche, le dos nu, offert comme une promesse, ou une provocation. Le salon sent la lavande, le cuir ancien, et quelque chose d’amer, de plus profond : la peur peut-être, ou le désir mal contenu. Ce parfum-là, je le connais. Je l’ai porté toute ma vie. Je le sers aux hommes comme un poison lent.Il entre sans frapper. Comme toujours. Le patriarche. L’homme que même la mort semble respecter, ou éviter. Son ombre s’étire avant lui. Il ne porte pas son âge. Il l’utilise. Comme une arme. Chaque ride est une cicatrice, un avertissement. Chaque geste est une leçon apprise sur un champ de ruines.— Grâce.Sa voix claque, mate, sèche. Il n’a pas besoin de hausser le ton. Les murs s’inclinent d’eux-mêmes.Je lève les yeux vers lui, lentement, avec ce sourire à peine esquissé qui fait tomber les plus prudents.— Monsieur Valenti. Toujours aussi ponctuel.Il s’approche. Je sais ce qu’il regarde
LucianoJe ne bouge pas.Pas tout de suite.Je laisse son poids contre moi, sa peau moite ruisselante sur la mienne, ses muscles encore tendus par l’orgasme, ses seins collés à moi , sa respiration qui bat trop vite contre ma nuque.Elle croit qu’elle a gagné. Qu’elle a gardé le pouvoir jusqu’au bout.Elle a tort.Je suis calme , patient. Je laisse son corps descendre lentement de son sommet. Je laisse ses cuisses se desserrer, sa bouche s’ouvrir, ses mains glisser contre mes flancs. Puis je parle, doucement, bas, au creux de son oreille.— Détache-moi.Elle hésite une seconde puis deux.Puis elle s’exécute. Elle défait les sangles, lentement. Trop lentement.Je ne bouge toujours pas. J’attends.Quand enfin mes poignets sont libres, je les referme sur ses hanches brutalement.Elle sursaute.— L-Lucia…Je la retourne sans ménagement. Je plaque ses bras au-dessus de sa tête. Je les coince sous une de mes mains. Mon autre paume se referme sur sa gorge.— Tu pensais pouvoir jouer avec moi
Sasha La lumière pâle de l’aube filtre à peine à travers les stores métalliques, traçant des lignes nettes sur le parquet brut, sur les draps défaits, sur les ombres de nos corps emmêlés. Le silence est dense, chargé de cette moiteur tiède du matin, celle qui colle à la peau, aux draps, aux pensées.Luciano dort encore.Allongé sur le ventre, nu, sa respiration profonde soulève lentement son dos large, musclé, cette carcasse dangereuse qui a fait trembler des quartiers entiers, maintenant offerte, vulnérable, endormie dans mon lit, comme s’il m’appartenait. Et peut-être qu’il m’appartient un peu, ce matin.Je l’observe longuement, le regard enfoncé dans les courbes de ses omoplates, la nuque tendue, la mâchoire relâchée, une main repliée sous l’oreiller, l’autre ouverte à côté de son visage, paume tournée vers moi. Ouverte. Comme une invitation. Comme un oubli. Comme une faiblesse.Je me lève, nue, doucement, sans bruit. Mes pieds effleurent le parquet. Mes cheveux glissent sur ma pe
SASHAJe n’ai pas bougé.Luciano dort contre moi ou plutôt, feint encore le sommeil.Mais je le connais trop.Je reconnais la tension contenue dans ses muscles, ce souffle à peine irrégulier, ce silence qui ne repose pas, mais guette.Même son immobilité a l’air de lutter contre quelque chose.Contre lui-même.La lumière de l’aube, pâle et diaphane, s’est glissée entre les rideaux entrouverts.Elle ne déchire pas la chambre elle la frôle, comme si elle savait qu’ici, il ne fallait plus heurter, mais apaiser.Elle passe sur nos corps encore nus, emmêlés, marqués par la fièvre de la nuit, par les griffures de la veille et par les mots qu’on n’a pas encore osé prononcer.Cette aube-là ne brûle plus.Elle apaise.Elle écoute.Je tourne lentement la tête, et je croise ses yeux.Ils sont ouverts , fixes , absents.Pas tournés vers moi, mais perdus quelque part entre le plafond et ses souvenirs.Il a ce regard de ceux qui ne trouvent plus d’issue à l’intérieur d’eux-mêmes.— Depuis combien d
SASHALe jour n’a pas encore osé se lever.Il rôde derrière les rideaux tirés, comme s’il craignait de troubler ce qu’il reste de notre nuit.Tout est silencieux, sauf le souffle encore irrégulier de nos corps.Je suis étendue, nue, les draps froissés contre ma peau, mes cuisses encore sensibles, et Luciano dort à moitié.Ou fait semblant.Il est là, sur le flanc, une main posée sur mon ventre, lourde et chaude, comme pour me retenir dans son monde.Sa peau est encore moite, saturée de notre odeur.Chaque effleurement, même inconscient, semble rallumer quelque chose en moi.Je sens son parfum partout : sur ma gorge, mes lèvres, entre mes cuisses.Cette nuit a été un vertige.Un feu.Un incendie incontrôlable où les gestes étaient plus forts que les mots.On s’est retrouvés sans rien dire, comme si tout devait être dit par la peau, par les griffures, par les soupirs.Comme si chaque seconde avait été une guerre gagnée contre le temps perdu.Je bouge à peine, juste assez pour sentir ses