Chapitre 6

Elizabeth.

Je suis arrivée au manoir à bout de souffle après avoir couru pendant une heure sur la piste d'athlétisme aménagée pour toutes les candidates. Je me suis effondrée en m'asseyant sur l'une des marches, essayant de reprendre mon souffle en inspirant lentement, quand j'ai été surprise par la visite de mon père. 

« C'est ton monde, tu es comme ta mère », m'a-t-il dit en se tenant devant moi. 

« Tu ne me connais pas du tout, papa, je fais de l'exercice pour ma santé, parce que j'aime ça, pas pour plaire aux autres. j'aime les robes, les sacs à main et le maquillage parce que j'aime ça, pas pour les autres. Sur ce point, ma mère et moi sommes très différentes. Il est évident que pendant toutes ces années, tu n'as pas su nous différencier », ai-je lâché avec un dédain marqué d'une pointe de déception. En vérité, j'ai pris comme une insulte le fait qu'il dise que je ressemblais à ma mère. 

— Je suis venu parce qu'A.J. Walker veut être ton sponsor, il veut parier sur la gagnante et il pense que ça pourrait être toi. 

— Même si je n'en avais pas, je n'accepterais pas, je trouve cet homme super répugnant, j'en ai déjà un. — J'ai vu son front se plisser, je pense que ce n'était pas une bonne nouvelle pour lui. — Le mieux, c'est qu'on va passer par une intermédiaire et pas sous le regard d'un vieux lubrique qui pense que je vais me vendre pour de l'argent, comme ton pote. 

— Je sais que tu es en colère parce que je t'y oblige, mais tout ça, c'est l'entreprise familiale, on dépend de tout ce monde, de tout notre avenir, Elizabeth. 

— Mon avenir, c'est ma carrière et ce que j'aime faire, papa, mais tu ne comprends pas ce qui m'énerve. Ne t'inquiète pas, je vais faire de mon mieux pour gagner et je te donnerai une partie du prix que je recevrai, mais après ça, je quitterai ta maison et je suivrai mon chemin toute seule. J'ai compris que je ne peux pas vous forcer à avoir une vision différente de ma façon de voir la vie. Vous faites votre vie et moi la mienne. 

— Tu ne peux pas simplement cesser d'être une Sullivan, dit-il avec un peu de surprise et une pointe de déception dans la voix. 

— Je ne peux pas te donner plus que ce que je t'ai déjà donné, je ne te donnerai rien de plus, merci d'être venu, je dois aller aux essayages, mon sponsor a déjà payé les créations de Joel et j'espère que tu ne vas pas te frotter à mon sponsor, sinon je vais abandonner le concours et tu te retrouveras seul avec une fille. 

Je me suis levée, le laissant seul dans l'entrée. J'ai été trop dure avec lui quand j'ai fermé la porte. Une larme a coulé sur ma joue. Contrairement à ma mère, j'avais encore de l'espoir pour mon père, mais il vient de disparaître. C'est définitif, je suis seule au monde et si je veux atteindre mes objectifs, c'est comme ça que je dois continuer. 

« Je dois juste tenir encore une semaine, une semaine de plus, Elizabeth. » 

Bastián. 

Je regardais mon nouvel animal de compagnie manger tout près de moi, je m'habituais déjà à sa présence, je remarquais que ses oreilles se dressaient et qu'il commençait à aboyer en remuant la queue. 

— Qu'est-ce qui t'arrive maintenant ? — Il court vers la porte. 

— Salut, petit ! Je suis contente que tu sois encore en vie. J'entends la voix de ma sœur. Quand je m'approche, je la vois à genoux, en train de caresser le ventre du chiot qu'on lui a offert. 

— Depuis quand suis-je un tueur d'animaux ? Elle a haussé les épaules et a continué ce qu'elle faisait. 

— Je suis venu parce que j'ai des nouvelles d'Elizabeth. — Ça a tout de suite attiré mon attention. — Tu ne vas pas aimer ça, j'ai entendu dans les couloirs de l'entreprise qu'A.J. s'intéressait à elle, en fait, il a essayé de devenir son parrain, la bonne nouvelle, c'est que ta copine ne l'aime pas du tout. 

Savoir que mon oncle s'intéresse à elle m'a mis en colère. Pour la première fois, j'ai ressenti le besoin de sortir de mon exil juste pour lui faire comprendre qu'il ne doit avoir aucune aspiration avec Elizabeth, ni même oser poser les yeux sur elle. 

« Qu'est-ce que tu vas faire ? » me demande-t-elle en me regardant fixement. 

« Pour l'instant, rien, je vois que c'est une fille intelligente », répond ma sœur en souriant. « Est-elle aussi altruiste que le disent les médias ou est-ce juste une façade des Sullivan ? » 

— Non, en fait, tout est vrai, je suis allée au centre et j'ai discuté avec la mère supérieure qui s'occupe des enfants. Elizabeth bosse à temps partiel à distance avec son designer pour payer les factures. Elle est gentille et je suis contente que tu aimes enfin quelqu'un pour de vrai. 

— Je serai juste son sponsor. Tu crois que je vais me montrer comme ça devant elle ? Je lui montre mon visage. — Crois-moi Bella, j'ai vu son expression quand elle m'a vu, je ne suis pas le genre d'homme qui lui plaît d'habitude. 

— Alors pourquoi tu le fais ? 

Je suis resté silencieux, me posant mentalement la même question : pourquoi je le fais ? Après avoir vu sa réaction quand je l'ai sauvée, si je me montre à elle, elle saura ce que j'ai fait à sa sœur et elle me méprisera de la même manière. D'une manière ou d'une autre, je suis foutu avec elle. 

— J'ai mes raisons. Et on avait dit que tu ne poserais pas de questions, non ? 

— Vendredi, c'est le gala des candidates. Si tu veux un smoking, dis-le-moi. 

Elle fait demi-tour et sort de chez moi, le chiot s'assoit en remuant la queue quand la porte se ferme. Au fond, j'ai envie de la revoir, de l'avoir près de moi. Elizabeth Sullivan a réveillé en moi quelque chose qui était endormi depuis longtemps et que je pensais ne plus jamais ressentir. 

Je marche jusqu'à mon bureau, j'ouvre mon ordinateur portable et je regarde toutes les infos sur le centre pour enfants. Je cherche le numéro de compte pour faire des dons, je tape le code de mon compte bancaire et je fais mon premier don de manière anonyme. 

« On peut commencer avec cinquante mille dollars, j'adorerais voir sa tête quand elle verra l'argent », je compose le numéro de Bella

— Oui, mon cher frère ?