Home / Romance / Le Cercle des Maîtresses / Chapitre 4 — Les Dés du Silence

Share

Chapitre 4 — Les Dés du Silence

Author: sonia yayock
last update Huling Na-update: 2025-10-12 23:48:44

Le matin s’est levé sur un ciel gris perle, trop calme pour être innocent.

Le lac Voss, immobile, reflétait le souvenir trouble de la nuit.

Je ne savais pas si ce que j’avais vécu relevait du jeu, du rite… ou du piège.

Le foulard rouge avait disparu.

Sur ma table, à sa place, un petit cube noir : un dé.

Une seule face marquée — le chiffre un, gravé à la main.

Un message, évidemment.

Je l’ai fait tourner entre mes doigts.

Le bois était lisse, chaud, presque vivant.

Je n’avais aucun doute : quelqu’un — elle — l’avait laissé là.

L’après-midi, un message de Laila :

« Ce soir, 19h. Le Boathouse. Apporte le dé. »

Pas de signature. Pas besoin.

La terrasse était vide à mon arrivée.

Le vent faisait danser les lanternes ; l’eau portait des ombres nouvelles.

J’ai trouvé Laila dans le salon, assise près de la cheminée, un verre à la main.

Sur la table, plusieurs dés identiques au mien, chacun gravé différemment.

— Tu as compris le principe ? demanda-t-elle sans lever les yeux.

— Pas encore.

— Les dés choisissent. Nous, nous interprétons.

Elle a fait rouler le sien.

Le chiffre six s’est arrêté face à la flamme.

— Le hasard est un menteur, mais il aime être cru, dit-elle en souriant.

Elle m’a tendu la main.

— Montre-moi le tien.

J’ai posé le dé dans sa paume.

Ses doigts se sont refermés dessus comme sur un serment.

— Le chiffre un, murmura-t-elle.

— Il signifie quoi ?

— Le commencement. L’innocence. Ou la solitude. Parfois les trois.

Elle a levé les yeux vers moi :

— Tu as perdu quelque chose hier.

— Oui.

— Et maintenant, tu fais partie de nous.

Les autres sont arrivées une à une.

Ivy, toujours éclatante ; René, nerveuse, comme si le silence l’étouffait ; Claudia, calme, impénétrable.

Elles ont pris place autour de la table.

Laila a lancé les dés.

Les chiffres se sont succédé, les regards aussi.

Des mots chuchotés, des sourires coupants.

Puis mon tour.

Le dé a roulé lentement… et s’est arrêté sur zéro.

— Il n’y a pas de zéro, ai-je dit.

— Pas sur le bois, répondit Claudia. Mais sur toi, si.

— Que veux-tu dire ?

— Le Cercle ne donne pas, il remplace. Tu as perdu ton secret, Sonia. Maintenant, quelqu’un le garde pour toi.

Laila me fixait, immobile.

— Qui ?

— Celui ou celle qui a pris le foulard.

— Et si je le retrouve ?

— Alors la vérité changera de camp.

Elle a approché son verre, effleurant le mien.

— Bois. Ce soir, le silence parlera pour toi.

Le liquide avait la couleur du miel et le goût du feu.

Autour de moi, les voix s’éteignaient une à une, comme si la pièce retenait son souffle.

Le monde s’est rétréci jusqu’à ne plus contenir que Laila — ses yeux, sa présence, sa certitude.

Elle a posé une main sur la table, près de la mienne.

— Tu veux savoir ce que nous chassons vraiment ?

J’ai hoché la tête.

— La peur. Celle qui nous gouverne. Celle qui nous empêche d’aimer.

Son ton n’était pas une explication, mais une confession.

— Et quand on n’a plus peur ? ai-je demandé.

— Alors on devient dangereux.

La soirée s’est achevée sur une promesse silencieuse.

Laila m’a raccompagnée jusqu’à la porte.

Avant que je parte, elle a murmuré :

— Garde ton dé près de toi. Il te montrera ce que tu refuses de voir.

En rentrant, je l’ai posé sur ma table de nuit.

La flamme de la bougie tremblait.

Le dé s’est retourné tout seul.

La face du six me fixait.

Patuloy na basahin ang aklat na ito nang libre
I-scan ang code upang i-download ang App

Pinakabagong kabanata

  • Le Cercle des Maîtresses   CHAPITRE 95

    Isma partit à l’aube, sans tambour ni au revoir. Elle n’avait pas pris d’or, pas de cartes : seulement un petit sac de toile, la pierre blonde serrée contre son cœur, et le mot d’Idriss replié six fois, comme une prière. La pluie de la veille avait lavé la route ; le ciel, bas et net, dessinait une ligne dure entre la terre et la mer. On eût dit que le monde la bénissait d’un silence pur.À la Maison du Vent, la porte restée ouverte laissait entrer une brise tiède qui ramenait encore l’odeur des braises. Farah la regarda s’éloigner sans un geste, ni plainte ni joie ; une reconnaissance grave passa dans ses yeux. Soraya lui avait touché la joue tout juste avant qu’elle ne franchisse le seuil, comme on marque un passage. Alma avait plié un essuie-main et l’avait glissé dans son sac, sans rien dire. Les gestes valaient désormais plus que les lois écrites.— Va, dit Farah doucement. Mais souviens-toi : on peut chercher un homme et se perdre de soi. Ne confonds jamais la route avec l’exil.

  • Le Cercle des Maîtresses   CHAPITRE 94

    Les nuits d’Isma prenaient la couleur des souvenirs.Sous la lune pâle, les anciennes pierres du monastère semblaient respirer encore la prière silencieuse des femmes disparues. Les flammes des bougies vacillaient, dessinant sur les murs des silhouettes qui dansaient, comme si Noor et Farah s’étaient glissées dans la chambre à travers le vent.Isma leva les yeux vers la fenêtre entrouverte. Le parfum du jasmin entrait, mêlé à celui plus âcre de la pluie. Tout en elle frémissait d’un pressentiment qu’elle ne parvenait pas à nommer — une caresse du passé, ou un avertissement.Depuis la rupture du Cercle, les liens entre les sœurs s’étaient recomposés, mais fragiles, tendus de secrets et de blessures à peine refermées. Soraya parlait moins, Alma priait davantage, et Isma… Isma aimait en silence.Cet amour, elle l’avait trouvé là où elle ne devait pas.Dans le regard d’un homme qui portait les cicatrices du même combat.Il s’appelait Idriss.Un voyageur, un ancien disciple de Farah avant

  • Le Cercle des Maîtresses   CHAPITRE 93

    Le jour s’ouvrit sans cérémonie, mais la lumière semblait hésiter à entrer. La Maison du Vent portait encore l’empreinte de la nuit précédente : une brûlure fine, comme un parfum qu’on n’ose plus nommer. Dans la grande salle, les objets sacrés attendaient, immobiles ; la corde brûlée pendait en un demi-cercle, souvenir visible d’une douleur recentre. Autour de la table, l’air vibrait d’indécision.Les visages étaient divisés. À une extrémité, celles qui restaient fidèles au Cercle — Farah, la jeune fille aux cheveux emmêlés, la femme au foulard rouge — parlaient bas, cherchant des mots qui n’avaleraient pas la blessure. À l’autre, des novices échangeaient des regards pleins d’un feu neuf, une lumière qui n’était plus seulement héritage mais revendication. Entre les deux, un espace se formait, large comme une mer.— Nous devons nous rassembler, dit Farah, la voix contenue mais ferme. Le Cercle n’a jamais été un refuge parfait, mais il tient parce que nous acceptons la lumière et l’ombr

  • Le Cercle des Maîtresses   CHAPITRE 92

    La mer s’étendait devant elle, vaste, argentée, indifférente. Ylena marchait sur le sable froid, le vent soulevant ses cheveux comme un voile de rébellion. Depuis qu’elle avait quitté la Maison du Vent, elle n’avait plus entendu la voix des anciennes ni senti la vibration du Cercle. Pourtant, quelque chose d’autre, plus ancien et plus sauvage, l’appelait depuis l’horizon.Elle posa la main sur la pierre qu’elle portait toujours au cou, vestige de son initiation. Elle était tiède, presque vivante. Chaque battement de son cœur faisait naître une pulsation dans la pierre — comme si le Cercle refusait de l’oublier.Dans la Maison du Vent, la jeune fille aux cheveux emmêlés s’éveilla en sursaut. Une douleur brûlante lui traversait la poitrine, comme si un fil invisible la liait encore à Ylena. Elle savait, sans comprendre comment, qu’elle n’était pas morte. Mais elle savait aussi que Ylena avait franchi une frontière que personne n’avait jamais osé traverser.— Elle n’est plus des nôtres,

  • Le Cercle des Maîtresses   CHAPITRE 91

    Le silence tomba sur la Maison du Vent comme une couverture de cendre. Depuis le dernier rituel, les novices ne se parlaient presque plus. Quelque chose d’invisible, de brûlant, s’était glissé entre elles. Les regards étaient plus lourds, les gestes plus mesurés, et les flammes du désir, qu’elles pensaient avoir apprivoisées, revenaient comme des bêtes sauvages cherchant à mordre la chair de leurs promesses.La jeune fille aux cheveux emmêlés observait tout cela du haut de la galerie. Elle sentait la fracture venir, lente et profonde. Les anciens signes revenaient — les murmures dans les couloirs, les rituels faits en secret, les alliances formées dans l’ombre.Farah l’avait prévenue :— Le feu que vous avez allumé dans leurs cœurs, si vous ne le gardez pas pur, consumera le Cercle avant qu’il ne mûrisse.Une nuit, sous la pleine lune, une réunion clandestine eut lieu. Trois novices s’étaient retrouvées dans la cour des pierres. L’une d’elles, Ylena, portait une expression d’orgueil b

  • Le Cercle des Maîtresses   CHAPITRE 90

    Le jour s’éleva sur la Maison du Vent comme un souffle chaud et lourd, chargé des murmures et des secrets de la veille. La lumière filtrait à travers les rideaux, dessinant sur le sol des ombres mouvantes qui semblaient danser avec les pensées et les désirs des novices. Chaque héritière de la première génération sentait le poids de sa responsabilité : guider la nouvelle génération tout en veillant à ce que les flammes de la passion et de la trahison ne consument pas le Cercle naissant.La jeune fille aux cheveux emmêlés posa ses mains sur la pierre noire. La vibration était différente aujourd’hui : plus intense, plus vivante, comme si les désirs et les secrets des novices s’étaient déposés en elle et sur le Cercle. Elle comprit que la leçon d’hier n’était qu’un prélude à ce que chaque héritière devrait traverser.— Aujourd’hui, dit Farah d’une voix grave, vous apprendrez que la loyauté et le désir sont des flammes qui se nourrissent l’une de l’autre. Si vous ne savez pas les tenir, el

Higit pang Kabanata
Galugarin at basahin ang magagandang nobela
Libreng basahin ang magagandang nobela sa GoodNovel app. I-download ang mga librong gusto mo at basahin kahit saan at anumang oras.
Libreng basahin ang mga aklat sa app
I-scan ang code para mabasa sa App
DMCA.com Protection Status